Lin
Yifu parle de l'économie chinoise
Le 5 mars, les membres de la CCPPC ont assisté
à la cérémonie d'ouverture de l'Assemblée
populaire nationale de Chine. Ayant écouté le rapport
du premier ministre sur le Programme du Xe Plan quinquennal de progrès
social et de développement économique, les membres
de la CCPPC, venus des quatre coins du pays, ont amorcé une
chaude discussion à ce sujet. Dans la salle du groupe de
l'Amicale nationale des compatriotes de Taiwan de Chine, notre journaliste
a trouvé une discussion particulièrement animée.
Lin Yifu, directeur du Centre de recherche de l'économie
chinoise, relevant de l'université de Beijing, a exprimé
son point de vue sur quelques problèmes sensibles de l'économie
chinoise, et d'autres membres ont également participé
activement à la discussion.
Optimiste quant à l'impact de
l'OMC
Lin Yifu, 46 ans, diplômé des
universités de Taiwan, de Beijing, de Chicago et de Yale
et titulaire d'un doctorat en économie, jouit d'un prestige
élevé dans les milieux scientifiques, grâce
à ses analyses pénétrantes sur l'économie
chinoise.
Il a d'abord donné son évaluation de l'économie
chinoise, à partir du bilan présenté par le
premier ministre Zhu Rongji sur l'exécution du IXe Plan quinquennal.
" Pendant la période du IXe Plan quinquennal, le taux
de croissance moyen de l'économie chinoise a atteint plus
de 9 %, a-t-il dit, c'est un miracle de la société
humaine. La Chine a ainsi contribué considérablement
au redressement rapide de l'Asie de l'Est après la crise
financière. La possibilité de maintenir un taux de
croissance élevé de l'économie chinoise dans
l'avenir sera basée sur les efforts qu'on déploiera
pendant le Xe Plan quinquennal pour résoudre les problèmes
économiques actuels.
Lin Yifu a avoué étudier les
contradictions et les problèmes de l'économie chinoise
du point de vue d'un économiste. " D'abord, l'écart
entre la ville et la campagne s'élargit encore, a-t-il dit,
le revenu des paysans augmente lentement, soit un chiffre de moins
que le pourcentage atteint par les citadins. La situation dans ce
domaine est pire que jamais. Deuxièmement, il y a encore
beaucoup de problèmes systémiques à résoudre
dans la réforme des entreprises d'État. "
Quant à l'impact sur l'économie
chinoise de l'entrée à l'OMC à propos duquel
s'inquiètent les gens, M. Lin est optimiste. Il a analysé
les points forts et les points faibles de l'économie chinoise
face à l'OMC. " On n'a qu'un mu et demi (1 mu = 1/15
d'hectare) en moyenne dans la campagne chinoise, mais la main-d'uvre
n'est pas chère. C'est une industrie à forte intensité
de main-d'uvre, le prix de revient des légumes qui
demandent beaucoup de soins est relativement faible et la proportion
exportée de ces produits est naturellement élevée.
Par exemple, aujourd'hui, les Coréens du Sud mangent des
légumes produits par la province du Shandong en Chine. Quant
à la production des céréales qui nécessite
peu d'heures de travail dans les régions vastes et peu peuplées
où le niveau de mécanisation est élevé,
son prix est moins cher aux États-Unis, par exemple. Heureusement,
après l'entrée de la Chine à l'OMC, la Chine
n'importera que l'équivalent de 4 % de ses céréales
produites et consommées. Elle n'a donc pas à s'inquiéter
de l'impact de l'OMC dans le domaine de la production des céréales.
Par contre, nos fruits et nos légumes pourront être
exportés en grande quantité. Cela sera bon pour les
paysans.
En qui concerne l'industrie, le professeur
Lin n'est pas pessimiste. " L'industrie légère
chinoise à forte intensité de main-d'uvre occupe
totalement le marché américain, a-t-il dit, il est
difficile de ne pas acheter un produit de l'industrie légère
fabriqué en Chine. Sans doute, ce sera un grand bien pour
l'exportation des produits de ce genre après l'entrée
de la Chine à l'OMC. Ce qui manque à la Chine, ce
sont des capitaux et une industrie à forte intensité
de techniques, et ces produits sont justement concentrés
dans les entreprises d'État, l'automobile et les appareils
électroniques, etc. Toutefois, la capacité de concurrencer
de ces entreprises au plan international est très faible.
Après l'entrée de la Chine à l'OMC, il y aura
une période de 3 à 5 ans pendant laquelle le protectionnisme
sera permis à l'égard de ces entreprises chinoises;
mais après cette période, que feront-elles? La pression
qui leur sera imposée sera très forte.
En Chine, les entreprises d'État
ont toutes le même point faible. Leurs secteurs d'activités
ne sont pas les points forts de l'industrie chinoise. Ces entreprises
ont toutes été construites selon un plan d'État.
Si, auparavant, elles pouvaient subsister, c'est parce que l'État
leur accordait des mesures préférentielles. Les crédits,
le coût des matières premières, par exemple.
Après le commencement de la réforme, ces avantages
préférentiels ont peu à peu disparu. Le manque
de vitalité des entreprises d'État réside aussi
dans la pénurie de fonds, elles ne peuvent pas concurrencer
avec les entreprises étrangères possédant des
capitaux énormes. Ce problème sera résolu.
Puisque les canaux d'introduction des capitaux étrangers
sont tellement nombreux, nous pouvons en tirer profit et les utiliser
pour notre propre compte. Concrètement: 1. créer des
entreprises à capitaux mixtes et utiliser les capitaux et
les techniques de l'étranger; 2. être coté à
la Bourse étrangère pour utiliser directement des
capitaux étrangers. Cette méthode a déjà
enregistré des succès pendant le IXe Plan quinquennal;
par exemple, la création d'une entreprise à capitaux
mixtes avec la société de films Kodak a introduit
des capitaux et des techniques des États-Unis. Les entreprises
à capitaux mixtes touchent aussi le secteur de l'automobile.
L'entrée de la Chine à l'OMC exercera une pression
sur ces entreprises qui devrons accélérer l'introduction
des capitaux étrangers et le transfert des techniques en
Chine. Ce sera bien pour le pays.
La réplique animée des membres
de la CCPPC
L'intervention du professeur Lin a attiré
l'attention toute particulière des membres, et les discussions
ont immédiatement suivi.
Chen Daobei, l'un d'eux, a dit au professeur Lin:
" Je suis tout à fait d'accord avec vos points de vue,
mais nous n'avons jamais été jusqu'au bout dans les
faits. Cela peut-être parce que l'esprit de nos décideurs
n'était pas assez ouvert. "
Le professeur Lin a répondu que ce genre
d'obstacles existait vraiment. Mais il a insisté: "
La situation est urgente, nous sommes entre la vie et la mort. Les
décideurs chinois se rendent compte que, après les
vicissitudes des vingt dernières années, la période
du Xe plan quinquennal sera une chance à ne pas manquer pour
la Chine. "
" L'écart des salaires entre la Chine
et l'étranger est très grand, a dit M.Yang Size au
professeur Lin, après leur entrée en Chine, les hommes
d'affaires étrangers ont attiré le personnel compétent
et acheté à bon marché des techniques avancées
inventées par la Chine. Que faire? "
" La pression oblige la Chine à réformer
son système du personnel et son système de rémunération,
a répondu le professeur Lin. Citons quelques exemples: la
Chine a nommé Shi Meilun comme responsable de la Commission
chinoise du contrôle de la Bourse, en lui donnant un traitement
de vice-ministre et un salaire annuel de 6 millions de yuans. La
rémunération annuelle d'un professeur de l'université
de Beijing et de Qinghua peut atteindre 50 000 yuans. "
M.Yang a alors demandé: " Combien
de sociétés chinoises peuvent payer un salaire si
élevé? "
" De toute façon, les sociétés
étrangères embauchent des Chinois, développent
le PNB de la Chine et paient des impôts au gouvernement chinois.
C'est une bonne chose, " lui a répondu M. Lin.
" Nous n'avons pas peur de l'élargissement
de l'écart entre les riches et les pauvres, a continué
M. Yang, mais l'État doit percevoir des impôts élevés
à l'égard des riches et effectuer une redistribution
, sinon l'égalitarisme nourrit les paresseux. "
Un autre membre du nom de Lin Mingyue est alors intervenu dans la
discussion: " Je travaille dans une entreprise d'État
et la plupart des salaires y sont à peu près égaux.
L'année dernière, 5 des 50 ingénieurs de mon
entreprise sont partis travailler pour un site Web et cela m'a causé
une grande pression. Je n'avais de cesse d'en rendre compte au département
supérieur pour attirer son attention. Cette année,
le salaire des techniciens a doublé. Pour stabiliser le contingent
des techniciens, le salaire et le type de travail entrent en jeu,
un type de travail ayant de belles perspectives peut attirer du
personnel talentueux. En outre, il faut encore faire attention:
parallèlement à l'augmentation du salaire, nous devons
réduire le personnel. "
HOU RUILI
|