CHINAHOY

30-September-2015

Chine et Banque mondiale : suivre le cours de l’économie mondiale

 

Jim Yong Kim et Lou Jiwei ont signé un accord sur la création d'un fonds de 50 millions de dollars pour réduire la pauvreté, en juillet dernier.

 

ZHOU LIN, membre de la rédaction

Cette année, nous célébrons le 35e anniversaire de la coopération entre la Chine et la Banque mondiale. Du 15 au 17 juillet, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim a visité la Chine. Pendant ses trois jours sur place, il a rencontré le premier ministre Li Keqiang et d'autres dirigeants de premier plan, dont le ministre des Finances Lou Jiwei et le gouverneur de la Banque populaire de Chine Zhou Xiaochuan. M. Kim a eu un entretien approfondi avec le premier ministre Li Keqiang au sujet de l'économie mondiale, des questions de financement du développement ainsi que de la réforme du système de santé chinois. Avec le ministre des Finances M. Lou, il a signé un accord portant sur la création d'un fonds de 50 millions de dollars destiné à contribuer à la réduction de la pauvreté. Le président de la Banque mondiale a également rencontré les dirigeants du Secrétariat multilatéral provisoire de la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (AIIB) pour discuter d'une collaboration plus étroite. Ces initiatives consolident encore le partenariat qui lie la Banque mondiale à la Chine, cette dernière étant d'ores et déjà son troisième plus gros actionnaire et un contributeur important à l'Association internationale de développement (IDA), qui est le fonds de l'institution destiné aux plus pauvres, ainsi qu'à la Global Infrastructure Facility.

Pour en savoir plus sur l'histoire récente et le potentiel de coopération future entre la Chine et la Banque mondiale, La Chine au présent a interviewé Bert Hofman, le nouveau directeur chargé de la Chine, de la Mongolie et de la Corée du Sud, basé à Beijing. M. Hofman a plus de 22 ans d'expérience au sein de la Banque mondiale, dont 16 années passées dans d'autres villes de la région de l'Asie de l'Est. Entre autres postes, M. Hofman a été économiste en chef pour la Chine mais aussi pour l'Indonésie, et économiste pays pour la Mongolie et la Namibie.

 

La Chine au présent : Il y a quelque 35 ans, le gouvernement chinois a lancé son initiative historique de la réforme et de l'ouverture, qui coïncidait avec le moment où la Chine et la Banque mondiale ont tourné ensemble une page de l'histoire en mettant en place un partenariat équitable et coopératif. En tant que chef du bureau de Beijing, pourriez-vous nous faire un bref résumé de ces 35 ans de coopération ?

Bert Hofman : Je crois que le partenariat Chine-Banque mondiale a été l'un des plus efficaces parmi ceux que mon organisme a pu établir avec un État membre. Ce partenariat nous a permis de prendre part au fantastique succès de développement qu'a été la transformation économique de la Chine depuis la fin des années 70. Je crois que la clé de ce succès a été notre soutien à l'approche pragmatique d'apprentissage par la pratique, qui a été celle de la Chine pour sa réforme économique, même si nous avons apporté notre assistance technique dans de nombreux domaines, souvent par le truchement de projets financés par la Banque. Seconde raison à ce succès : notre évolution continuelle, accompagnant pas à pas les progrès de la Chine. Au fur et à mesure que la Chine gagnait en savoir-faire, en confiance en soi et en accès aux marchés internationaux de capitaux, nous avons vu se réduire notre rôle financier. Aujourd'hui, la Chine fait appel à la Banque mondiale principalement pour soutenir l'innovation et pour faire face à des problèmes émergents.

 

La Chine au présent : La Chine est le plus grand pays en développement, et la Banque mondiale, le plus important organisme multilatéral d'assistance et de développement au monde. Le slogan de la Banque mondiale est célèbre : « Œuvrer pour un monde sans pauvreté ». Quelle est la signification de ces 35 ans de coopération réussie à cet égard ?

Bert Hofman : C'est probablement la contribution de la Chine à la lutte mondiale contre la pauvreté. Premièrement, la Chine elle-même a poursuivi une croissance économique et un développement remarquables pendant 35 ans par la réforme et l'ouverture, ce qui a sauvé 600 millions de personnes de la pauvreté. Je suis fier que notre partenariat ait été partie prenante de ce succès. Deuxièmement, avec l'accroissement de l'importance de la Chine dans le monde, et aussi avec l'ouverture de son économie qui est de plus en plus en prise directe avec le marché, l'influence de la Chine sur les autres pays s'est également accrue, par le commerce, par les liens financiers et par la circulation des idées. Cela a constitué une force positive pour d'autres pays en développement et pour l'économie mondiale : la Chine a représenté environ un tiers de la croissance économique mondiale ces dernières années, et son appétit en ressources a eu un effet d'entraînement sur l'économie de bien des pays dans le monde. Troisièmement, nous-mêmes, employés de la Banque mondiale, nous apprenons en observant la façon dont la Chine gère les défis de son développement, et ce sont des savoirs qui nous permettent de mieux aider au développement d'autres pays.

 

La Chine au présent : Y a-t-il eu des obstacles ou des malentendus entre la Chine et la Banque mondiale pendant ces longues années ? Comment ces barrières ont-elles finalement été franchies pour poursuivre la coopération ?

Bert Hofman : Comme dans tout bon partenariat, nous sommes passés par quelques turbulences. Mais à chaque fois, les deux parties sont restées convaincues de la valeur de ce partenariat, ce qui a permis finalement de trouver des solutions.

 

La Banque mondiale travaille avec Beijing sur le projet « Sunshine school ». 100 MW de panneaux solaires vont être installés sur les toits de 800 écoles primaires et secondaires de la ville.

 

La Chine au présent : En septembre 2010, lors du symposium de commémoration du trentenaire de la coopération entre la Chine et la Banque mondiale, Li Keqiang qui était alors vice-premier ministre avait déclaré que, en trois décennies, les deux parties avaient conduit une coopération constructive sur un mode innovant, récoltant des bénéfices mutuels. Cinq années ont passé depuis. Quels sont les résultats ? Quelles sont les idées créatives sur lesquelles les deux parties pensent désormais créer un nouveau mode de développement ?

Bert Hofman : La coopération n'a fait que s'intensifier. Premièrement, notre coopération sur le plan des savoirs s'est renforcée grâce à une nouvelle approche, plus précisément par les rapports rédigés en commun entre la Banque mondiale et les organismes chinois, comme ceux du Centre de recherche sur le développement du Conseil des affaires d'État. Je crois d'autre part que « China 2030 » et « Urban China » sont deux programmes clés pour la Banque mondiale et la Chine. Ils ont d'ores et déjà fourni quelques idées utiles pour les orientations politiques de la Chine dans le XIIe plan quinquennal ainsi que pour le XIIIe plan en préparation.

Nous avons en outre commencé à préparer des opérations en Chine qui utiliseront de nouveaux modes de financement, comme le Programme pour les résultats, entre autres, qui devra traiter des problèmes tels que la pollution de l'air et l'amélioration de la couverture santé. Par ailleurs, la Chine a récemment alimenté un fonds d'investissement auprès de la Banque mondiale destiné à améliorer la coopération sur les savoirs et la préparation de projets dans d'autres pays. Concernant ce dernier point, la Chine est aussi un membre fondateur de la Global Infrastructure Facility de la Banque mondiale, un fonds qui vise à accroître le volume des projets d'infrastructures pouvant être soutenus par la banque dans le monde en développement. Des exemples qui montrent à quel point notre partenariat s'est approfondi et élargi ces cinq dernières années.

 

La Chine au présent : Quelle est la vision de la Banque mondiale sur la proposition chinoise de fonder l'AIIB ? Existe-t-il des opportunités de coopération entre les deux institutions ?

Bert Hofman : Nous accueillons avec une grande satisfaction l'initiative chinoise de créer l'AIIB et la Nouvelle banque de développement des BRICS (NDB), dans la mesure où celles-ci peuvent contribuer à remplir le vide qui existe dans le financement du développement, particulièrement dans le financement des infrastructures. Ces besoins sont immenses, et ils dépassent de très loin les sources de financement existantes, notamment celles de la Banque mondiale. C'est pourquoi nous avons soutenu cette initiative dès le début, en aidant de nouveaux organismes à se mettre en place et à fonctionner. Nous espérons en outre pouvoir coopérer avec l'AIIB et la NBD dans des projets de financement futurs qui pourront remédier à des goulots d'étranglement critiques dans les infrastructures.

 

La Chine au présent : En tant qu'économiste en chef, quelle opinion avez-vous de cette coopération ? Quelles sont vos attentes pour le futur ?

Bert Hofman : C'est ma troisième période de travail en Chine, et par conséquent, j'ai été partie prenante à la croissance du partenariat Chine-Banque mondiale. Ce n'est pas une surprise si je trouve ce partenariat unique et infiniment précieux pour la Banque mondiale. De même, j'espère pouvoir contribuer aux futures mutations de ce partenariat, de façon à ce qu'il reste en prise avec les réalités et utile dans un monde qui ne cesse d'évoluer.

 

 

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