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Un front uni de résistance
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Un visiteur photographie le mur criblé d'impacts de balles de l'entrepôt Sihang, symbole de la résistance à Shanghai. |
JIAO FENG et ZHOU LIN, membres de la rédaction
Après l'incident du pont Marco Polo survenu le 7 juillet 1937, l'armée japonaise intensifia son invasion de la Chine. Pour sauver la nation, les deux principaux partis politiques chinois, le Parti communiste et le Kuomintang, s'allièrent en un front uni de résistance à l'agression japonaise et mobilisèrent la population pour qu'elle tienne tête à l'ennemi durablement. À Shanghai, l'ambition de l'armée japonaise de « mettre la Chine à genoux en trois mois » ne put se concrétiser face aux vives contre-attaques des troupes chinoises. Dans la province du Shanxi, l'armée japonaise tomba dans une embuscade dressée à la passe de Pingxingguan par la VIIIe Armée de route. Le mythe de l'invincibilité de l'armée japonaise fut alors brisé. Cette victoire gonfla le moral des militaires et civils chinois, plus déterminés que jamais à repousser l'envahisseur japonais. Après huit années de batailles, la Chine remporta la victoire finale dans cette Guerre de résistance à l'agression japonaise. Voici deux épisodes clés qui en ont marqué le début.
La bataille de Songhu
L'arrondissement Baoshan, au nord de la ville de Shanghai ainsi qu'au confluent de la rivière Huangpu et du Yangtsé, constitue une voie fluviale permettant d'entrer à Shanghai. De nos jours, dans le parc bordant le Yangtsé, se trouve le Mémorial de la bataille de Songhu. Le secrétaire adjoint de ce mémorial, Xu Rong, nous explique que là s'étendait le chef-lieu de district de Baoshan, qui fut le principal théâtre des deux batailles de Songhu.
Dans le mémorial sont exposés documents, photos, objets et reconstitutions miniatures décryptant l'histoire de ces batailles sanglantes pour résister aux envahisseurs japonais.
Dans la nuit du 28 janvier 1932, les forces navales japonaises, lancèrent, en cinq points différents, une offensive contre les troupes chinoises stationnées dans la zone de Zhabei. Le commandant en chef de la marine japonaise déclara avec arrogance pouvoir prendre Shanghai en quatre heures seulement. La 19e Armée de route combattit avec fougue les militaires japonais pendant 36 jours. Bilan : 10 000 soldats japonais furent tués ou blessés ; la marine japonaise fut contrainte de remplacer trois fois son commandant en chef.
Après l'incident du pont Marco Polo, l'armée japonaise déclencha une guerre d'invasion totale en Chine. Le 13 août 1937, les forces armées japonaises lancèrent une attaque à Shanghai, réduisant les quartiers de Zhabei et de Nanshi à l'état de ruines. Dès lors, les troupes chinoises et japonaises se livrèrent bataille trois mois durant. Comme après six jours et six nuits de combat, l'armée japonaise n'avait toujours pas réussi à pénétrer dans la ville. Elle lâcha quantités de bombes au napalm, rasant complètement le chef-lieu de district de Baoshan. Près de 600 militaires chinois sacrifièrent leur vie pour défendre Shanghai. Aujourd'hui, dans le coin sud-ouest du parc, une grande pierre commémore leur sacrifice.
Dans le mémorial, sont présentés des manuscrits et des lettres des officiers et soldats qui participèrent aux affrontements, des livres et des journaux relatant cet épisode historique, ainsi que des dessins de peintres de l'armée. Ces peintures représentent des scènes réelles qui ponctuèrent le siège japonais. Sur l'une d'entre elles, intitulée Sac de la maison de la famille K à Zhabei, on peut voir quelques soldats japonais s'engouffrer dans une habitation délabrée, arme à la main.
Dans le mémorial, un insigne commémoratif de l'Association des camarades de Shanghai qui gardaient l'entrepôt Sihang nous rappelle cet événement historique. Cet entrepôt Sihang, sur la rive nord du fleuve Suzhou, était un bâtiment sur cinq étages en béton armé. Il hébergeait quatre banques. Fin octobre 1937, l'armée chinoise étant partie défendre d'autres lieux, Xie Jinyuan, chef du régiment n° 524 et ses soldats reçurent l'ordre de rester en garnison dans le magasin Sihang. En quatre jours et quatre nuits, ces soldats chinois contrèrent une dizaine d'offensives ennemies. Ils montrèrent aux résidents et soldats étrangers dans les concessions à quel point les militaires chinois étaient déterminés à s'opposer à l'invasion japonaise et transmirent ainsi cet esprit de résistance au monde entier.
Sur le mur ouest de l'entrepôt, demeurent encore les impacts des balles tirées par l'armée japonaise. La municipalité de Shanghai a décidé de reconstituer l'aspect original du lieu après les combats et d'en faire un mur commémoratif de la résistance contre l'agression japonaise. Dans le mémorial, une salle d'exposition des « 800 héros » a été agrandie pour commémorer cet épisode.
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Zeng Shirong raconte l'histoire de son père, guide de la VIIIe Armée de route. |
La victoire de Pingxingguan
Le 25 septembre 1937, Zeng Huai, alors âgé de 35 ans, tombe sur une troupe de soldats de la VIIIe Armée de route à l'entrée du village. « Il y avait un commandant en tenue militaire, assis sur un grand cheval, avec quatre gardes autour de lui. Il demande à mon père de leur indiquer le chemin », se rappelle le fils de Zeng Huai, Zeng Shirong, qui n'avait que 3 ans à l'époque. « Alors que je n'avais que 5 ans, mon père me contait souvent cette bataille pleine de rebondissements », commente Zeng Shirong, qui a aujourd'hui 81 ans. Il fait référence à la bataille appelée, plus tard dans les manuels d'histoire chinois, la « victoire de la passe de Pingxingguan ».
Zeng Shirong nous a montré les photos en noir et blanc de son père affichées chez lui. Zeng Huai avait, guidé la VIIIe Armée de route, et monté une équipe chargée de transporter les soldats blessés vers un autre village à 2,5 km pour que ces derniers puissent recevoir des soins à temps. Ce n'est que lorsque les combats prirent fin qu'il apprit que ce commandant en chef qu'il avait vu n'était autre que le général Nie Rongzhen.
Sur les falaises surplombant le village de Baiya, situé dans le district de Lingqiu au Shanxi, on peut voir la tranchée de Shiliqiao, où eurent lieu les affrontements les plus virulents. Celle-ci est en forme de sac, avec une embouchure très étroite. Elle était située à un passage obligé pour atteindre Taiyuan, la capitale du Shanxi, si l'on venait de Laiyuan (Hebei) ou de Lingqiu (Shanxi). Cette tranchée n'est large que de 10 m et de ses côtés se dressent des falaises hautes de 20 mètres environ. Outre un chemin de terre étroit, les hommes n'avaient nulle part où se cacher. C'est en cet endroit que la division n°115 tendit des pièges au camp adverse, et anéantit plus de 1 000 soldats, détruisit une soixantaine de véhicules et s'empara d'un certain nombre d'armes et de munitions ennemies. C'est la première victoire que remporta la division n°115 de la VIIIe Armée de route, armée qui devint par la suite le pilier de la résistance face à l'occupation.
De nos jours, deux édifices emblématiques demeurent intacts dans le village de Baiya. L'un est le poste de commandement de la division n°115 à l'entrée du village, d'où Lin Biao et Nie Rongzhen dirigeaient les opérations militaires ; l'autre est le temple du village où des combats à l'arme blanche avaient lieu entre des soldats chinois et japonais.
« Maman, je voudrais rentrer »
En septembre 1938, Mao Zedong souligna l'importance de la victoire à la passe de Pingxingguan, affirmant que cette histoire permettrait de mobiliser la population chinoise pour une grande résistance nationale.
Au mémorial, une photo de deux sœurs, Aiying et Meiying, est mise en évidence. Ce sont les filles d'un Shanghaïen, M. Pu Jiting. Lorsque ces deux-là entendirent l'annonce de la victoire, Aiying et Meiying prirent 400 yuans sur leur argent de poche pour acheter chacune des jumelles militaires. Puis, elles les offrirent aux généraux Zhu De et Peng Dehuai, afin de les soutenir.
Alors que la détermination à résister de l'armée et de la population chinoise devenait de plus en plus résolue, le moral des troupes japonaises, à l'inverse, était désormais entamé. Lorsque les soldats de la VIIIe Armée de route et les villageois nettoyèrent le champ de bataille, ils trouvèrent une lettre qu'un soldat japonais avait écrite à sa fiancée : « Ici, la mort est devenue quelque chose de banal. Plusieurs personnes avec lesquelles je suis venu ont déjà perdu la vie. Il suffit d'une fusillade pour que les hommes qui marchent devant tombent, inertes. La mort nous accompagne tout le temps. » Un autre jeune soldat japonais avait écrit dans un courrier : « Maman, je viens tout juste d'avoir 18 ans. Pourquoi ai-je dû partir si loin et tuer des Chinois ? Maman, je voudrais rentrer à la maison. Il y a quelques jours, nous sommes passés dans un village. Le supérieur nous a donné l'ordre d'incendier les maisons et d'assassiner les habitants. C'étaient des paysans, très pauvres. Du sang giclait sur mes vêtements, j'avais très peur. Je ne voulais pas les tuer, surtout que je n'avais rien contre eux. Je croyais à l'origine que j'allais venir me battre pour un idéal, pour la gloire du Japon. Mais maintenant, Maman, je voudrais rentrer et reprendre mes études. »
La Chine au présent