CHINAHOY

29-December-2014

Conférence de Lima sur le climat : des concessions pour des résultats limités

 

La réunion de haut niveau de la conférence de Lima sur le climat s'est ouverte le 9 décembre 2013, en présence du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon.

 

La conférence de Lima sur le climat a mis en évidence le fossé qui sépare les pays en développement des pays développés pour la réduction des émissions, mais aussi le rôle croissant que joue la Chine dans la lutte contre le changement climatique.

LI WUZHOU, membre de la rédaction

La conférence des Nations unies sur le changement climatique aurait dû prendre fin le 12 décembre, mais vu les différences de position qui séparaient les parties, elle a été prolongée de 32 heures pour s'achever finalement dans les premières heures du jour le 14 décembre à Lima, capitale du Pérou.

La résolution qui a finalement été adoptée présente des différences avec ce que les participants avaient anticipé, mais ils sont parvenus à s'entendre unanimement sur les principaux éléments du projet d'accord pour la conférence de Paris en 2015. Le texte de la résolution a été modifié à plusieurs reprises pour en diminuer la portée, ce qui montre l'attitude décevante des pays développés et les concessions plus nombreuses acceptées par les pays en développement. « En termes de droit de parole, bien que le groupe des pays en développement prend une part croissante au processus de gouvernance mondiale, il reste néanmoins en position de faiblesse », indique Zou Ji, directeur adjoint du Centre de recherche stratégique de lutte contre le changement climatique et de coopération internationale de Chine.

Des résultats imparfaits, mais qui satisfont tout le monde

La conférence de Lima est un moment important dans le processus de négociation multilatéral sur le climat, dont la tâche est de procéder à des échanges de vues essentiels concernant les avancées attendues à la conférence de Paris dans le nouveau protocole visant à faire face au changement climatique après 2020. Il s'agit aussi de faire progresser la compréhension, d'aplanir les différends et, tâche capitale, de préparer la voie pour la conférence de Paris. Dans le même temps, il s'agit d'appliquer les accords passés entre les parties pour renforcer les actions et lancer le plus rapidement possible le Fonds vert pour le climat (FVC).

Après de multiples négociations, un consensus a été atteint au cours de cette conférence sur les points suivants. D'abord on a réitéré le fait que chaque pays doit, au début de l'année 2015, formuler et soumettre sa contribution nationale après 2020. Des exigences ont été posées concernant les informations essentielles à fournir. Ensuite, dans le cadre des contributions nationales déterminées de manière autonome par chacun, l'adaptation redevient possible et un pays peut de son propre gré décider d'adapter sa décision en fonction de ses propres conditions. Troisièmement, la conférence s'est conclue par un projet d'accord qui servira de texte de base pour la conférence de Paris en 2015. La conférence de Lima a permis de réduire un peu plus l'écart de perception sur certaines questions, avec un texte à la fois simple et clair, ce qui est une bonne nouvelle pour la conférence de Paris.

Dans le même temps, le texte final ne peut satisfaire les pays en voie de développement pour ce qui est de l'engagement de réduction des émissions et de l'ampleur du soutien financier fourni par les pays développés. Les pays en développement ont aussi fait des concessions pour parvenir à un accord. Citons par exemple les modalités de l'allocation de 100 milliards de dollars au FVC, dont la feuille de route n'a toujours pas été fixée.

Le texte du projet ne fait pas l'unanimité auprès des participants. L'Union européenne a salué les avancées effectuées avant l'accord final qui serait réalisé à la conférence de Paris en 2015. Les organisations environnementales estiment au contraire que les concessions ont produit « un accord au rabais qui n'apporte rien ».

Selon Xie Zhenhua, chef de la délégation chinoise et directeur adjoint de la Commission nationale pour le développement et la réforme de Chine (CNDR), la conférence est finalement parvenue à un document relativement équilibré et correspondant aux anticipations de la délégation chinoise grâce aux efforts du président de la conférence et de chaque partie. Même si le résultat n'est pas pleinement satisfaisant, il répond fondamentalement à certaines exigences des pays en développement.

Des questions persistantes n'ont toujours pas été traitées

La raison pour laquelle les résultats attendus n'ont pas été obtenus lors de la conférence de Lima tient au fait que les différends entre pays développés et pays en développement sur des questions persistantes n'ont pas pu être résolus. Les pays développés maintiennent que l'accord doit porter principalement sur la limitation des émissions de dioxyde de carbone et d'autres gaz à effet de serre et que la Chine, l'Inde ainsi que les autres pays émergents devront être inclus dans le système de réduction des émissions. Dans le même temps, ils refusent d'honorer leur engagement de fournir une aide budgétaire aux pays pauvres pour faire face aux problèmes climatiques. Les pays en voie de développement s'opposent de leur côté à l'adoption de systèmes de réduction des émissions et soulignent que dans le nouvel accord, les pays développés doivent s'engager à fournir une aide considérable aux pays pauvres.

Le problème central est de déterminer la part que chacun doit assumer. Bien que la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) exprime clairement le principe de responsabilité commune mais différenciée, les pays en développement estiment que le changement climatique est le résultat de 270 années d'émissions et que les pays développés doivent assumer une plus grande responsabilité, d'abord en réduisant eux-mêmes leurs émissions, ensuite en fournissant une assistance financière et technologique aux pays en développement pour les aider à faire face au changement climatique et à réduire les émissions. Les pays développés estiment pour leur part que tous les pays doivent assumer une responsabilité similaire, voire même identique. C'est un rejet de la responsabilité et le point de désaccord le plus sérieux. Par ailleurs, avec la mondialisation, les pays développés ont transféré de nombreux secteurs industriels dans les pays en développement et déplacé les émissions dans ces pays. Ainsi, les pays développés ont-ils une responsabilité plus grande qu'il n'y paraît en ce qui concerne les émissions actuelles.

Même si la CCNUCC propose une responsabilité commune mais différenciée et exprime clairement que chacun est responsable de la protection de l'environnement de la planète, il souligne les différences en termes de responsabilité. D'abord, le niveau de développement de chaque pays est différent. Les émissions des pays développés proviennent essentiellement de la consommation, de la construction, des transports alors que dans les pays en développement, au stade industriel, les émissions proviennent de la production. Le contenu et les caractéristiques sont différents.

De plus, des différences existent dans la capacité de chaque pays à faire face au changement climatique. Les pays en développement ont une capacité moindre, il faut donc leur laisser la chance et le temps de développer leur capacité avant de leur faire assumer leur responsabilité.

Pour Xie Zhenhua, le préalable pour continuer de maintenir la confiance politique dans les négociations sur le climat à l'avenir repose sur l'engagement des pays développés à réduire fortement leurs émissions avant 2020 et à fournir une assistance financière et technologique aux pays en développement.

La Chine montre qu'elle est une puissance responsable

Contraitement à certains pays développés qui traînent les pieds pour réduire leurs émissions et accorder des aides, la Chine en tant que pays en développement assume ses responsabilités de grande puissance.

Même si la Chine, un pays en développement, n'a pas l'obligation de limiter ses émissions, elle a effectué un travail concret pour faire face au changement climatique :

– En 2013, l'intensité d'émission de dioxyde de carbone a diminué de 28,5 % par rapport à 2005, ce qui correspond à une émission de 2,5 milliards de tonnes de moins.

– De 1991 à 2010, le montant des économies d'énergie représente 58 % du total mondial. Un chiffre qui traduit l'importance de la contribution de la Chine dans ce domaine.

– La capacité installée en énergies renouvelables en Chine représente 24 % du total mondial.

– Le nombre de centrales nucléaires en construction en Chine est le plus important au monde.

– La Chine possède la superficie la plus importante au monde de forêts reconstituées.

20 jours avant la conférence de Lima, les dirigeants chinois et américain ont publié un communiqué conjoint sur le changement climatique. La Chine a fait savoir que vers 2030, il est prévu que les émissions de dioxyde de carbone atteindront leur pic, voire même un peu plus tôt avec beaucoup d'efforts et que d'ici à 2030, les énergies non fossiles ne représenteront plus qu'environ 20 % de la consommation d'énergies primaires. Sur ce point, le Brookings Institute américain estime que si la Chine peut parvenir d'ici à 2030 à l'objectif de faire passer le niveau des énergies non fossiles à environ 20 % du mix énergétique, en 16 ans, elle pourra se mettre au niveau des États-Unis en termes de génération d'énergie verte et que ce sera un exploit hors du commun.

Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon salue le communiqué, qui tient lieu de motivation cruciale pour parvenir à un accord sur le climat en 2015, disant qu'il s'agit de « progrès encourageants ».

Ces résultats reflètent l'importance qu'accorde le gouvernement chinois aux problèmes du climat, mais aussi qu'il existe un consensus général. D'après le Financial Times britannique du 3 décembre, un sondage Ipsos/MORI dans plusieurs pays montre que la population chinoise est la plus au fait des éléments qui influent sur le changement climatique. « Nous ferons encore davantage », déclare Gao Feng, l'envoyé spécial pour les négociations sur le changement climatique du ministère des Affaires étrangères.

La Chine recherche une solution bénéfique pour tous

Dans les négociations sur le climat, la Chine a continuellement adopté une attitude flexible sans perdre pas de vue ses positions de principe. Dans la coopération et les négociations, la Chine recherche les bénéfices mutuels ; en réunissant les pays en développement, la Chine cherche à trouver une position commune dans le dialogue et la communication avec les pays développés pour faire avancer le processus dans sa globalité.

Gao Feng explique que d'un côté, dans le cadre des « quatre pays BASIC », des « pays en développement adoptant une position similaire » ainsi que du « Groupe des 77 », la Chine renforce sa coopération avec les pays en développement comme l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud et s'efforce de défendre leurs intérêts. De l'autre, la Chine établit des mécanismes de consultation avec notamment les États-Unis, l'Union européenne, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Australie, communique régulièrement sa position et ses politiques intérieures sur le changement climatique, tout en renforçant la coopération pratique dans les domaines des énergies propres, des économies d'énergie, des véhicules électriques, des transports verts, etc.

Si les pays en développement ne bénéficient pas de la compréhension, du soutien et de l'impulsion des pays développés, leur appel ne sera pas entendu de façon satisfaisante, voire même ne sera pas suffisamment pris en considération, et les négociations ne pourront pas avancer.

Le 12 novembre dernier, la Chine et les États-Unis ont publié un communiqué conjoint qui représente un bon exemple de recherche de position mutuellement bénéfique entre pays développés et pays en développement. Il établit clairement pour la première fois les objectifs et le calendrier de réduction des émissions aux États-Unis et en Chine après 2020. Cela jouera de plus un rôle moteur important dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Dans le même temps, cela a servi d'exemple pour les autres pays et donné une impulsion positive pour la conférence.

Durant la conférence de Lima, Ban Ki-moon a salué les efforts déployés par la Chine pour lutter contre le changement climatique. Il souhaite que la Chine continue d'assumer le leadership dans les négociations sur le climat et joue un rôle moteur dans la signature d'un accord en 2015 en affirmant que « les Nations-unies ont placé de gros espoirs dans ce sens ».

Par ailleurs, par rapport à certains pays développés qui ne tiennent pas parole sur la question du changement climatique, la Chine, en tant que pays en développement, d'un côté les représente en demandant activement aux pays développés l'assistance financière et le soutien technologique pour s'efforcer de répondre au changement climatique ; de l'autre, fait savoir qu'elle ne sera pas en concurrence avec les autres pays en développement pour ces fonds. Dans le même temps, la Chine octroie activement des financements, transfère des technologies et fait bénéficier les autres pays en développement de son expérience.

Depuis 2011, la Chine a alloué au total 270 millions de yuans à l'aide aux pays en développement à faire face au changement climatique et a formé près de 2 000 fonctionnaires et techniciens en provenance de ces pays.

En septembre dernier, lors du sommet des Nations unies sur le climat, la Chine a annoncé qu'elle allait doubler les financements existants et créer un fonds de coopération sud-sud sur le changement climatique. Elle a aussi fait un don de 6 millions de yuans pour soutenir la coopération sud-sud sur le changement climatique initié par Ban Ki-moon.

Dans les grandes réunions comme l'APEC et le G20, les dirigeants chinois et étrangers abordent obligatoirement les questions du climat. Le Fonds de la Route de la Soie doté de 40 milliards de dollars établi par la Chine, la Banque des BRICS et le Fonds Chine-Afrique incluent aussi des initiatives sur le changement climatique.

M. Gutierrez, ministre de l'Environnement et de l'Énergie du Costa Rica à la conférence, a fait savoir le 9 décembre que la Chine fournissait un exemple au monde par ses efforts inlassables pour faire face au changement climatique. « La Chine, en tant que pays en développement, a proposé un pic pour les émissions de dioxyde de carbone et déploie tous les efforts possibles pour aider les autres pays en développement, ce qui est exemplaire. »

La Chine reste sans l'ombre d'un doute un pays en développement

Durant la conférence de Lima, certains médias internationaux ont fait part de leurs doutes quant à savoir si la Chine était un pays en développement et demandé en outre à la Chine, dont la contribution est déjà très importante, de prendre encore plus d'initiatives qui dépassent son niveau de développement et ses capacités. La délégation a répondu à ce genre de discours.

On ne peut pas nier que qu'en 20 ans de participation aux négociations sur le climat, des transformations très importantes ont eu lieu en Chine. Lors de la Conférence des Nations unies sur le développement et l'environnement qui s'est tenue à Rio de Janeiro en 1992 et qui a adopté la CCNUCC, le PIB de la Chine atteignait 2 690 milliards de yuans, contre 56 000 milliards de yuans en 2013, soit 20 fois plus en 22 ans, passant de la 10e à la 2e place mondiale.

Cette rapidité de croissance et ce classement peuvent laisser rêveur, notamment quand on voit les voitures de luxe en Chine, les Chinois qui achètent des produits de luxe, sans même parler de la Chine, première puissance commerciale mondiale, premier pays détenteur de réserves de change, etc. Il est facile de se tromper sur la situation d'ensemble de la Chine.

On ne peut tout simplement pas changer le fait que la Chine reste encore un pays en développement. Si on rapporte le chiffre de 56 000 milliards de yuans à une population de 1,3 milliard, le PIB par habitant n'atteint alors que 7 000 dollars environ. C'est très loin encore de la ligne médiane par habitant dans le monde, à savoir 13 460 dollars. Il se situe à la centième place environ et un nombre relativement important de pays en développement se placent devant, comme le Botswana, le Turkménistan, la République Dominicaine et le Monténégro par exemple.

Par rapport aux cinq pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU, le PIB par habitant de la Chine équivaut à un septième de celui des États-Unis et celui de la Russie est deux fois plus important, alors que ce pays occupe la quatrième place. Par rapport aux pays du BRICS, la Chine se situe devant l'Inde et derrière la Russie, le Brésil et l'Afrique du Sud.

Si on compare la Chine, deuxième économie mondiale, et les États-Unis, première puissance mondiale, la différence est monumentale. Non seulement le PIB par habitant est 7 fois plus important aux États-Unis, mais sur le plan de la puissance technologique, de l'éducation, de l'administration publique ou de la production agricole, l'écart reste important. Prenons par exemple l'agriculture. En 2012, le Centre de recherche sur la modernisation de la Chine relevant de l'Académie des sciences de Chine a publié un Rapport sur la modernisation en Chine en 2012 : recherche sur la modernisation de l'agriculture qui montre qu'en termes de valeur ajoutée, de main d'œuvre et de productivité, en 2008, le niveau de modernisation de l'agriculture chinoise avait 108 années de retard par rapport aux États-Unis, et 36 années de retard par rapport à la Corée du Sud.

Les statistiques de la Banque mondiale montrent qu'il reste encore 100 millions de Chinois vivant avec moins d'un dollar par jour, ce qui relève de la condition d'extrême pauvreté.

Comme l'explique Xie Zhenhua, « en tant que pays en développement, la Chine fait face de manière active au changement climatique en édifiant une belle Chine, en répondant aux exigences intérieures de développement durable et en assumant sa responsabilité vis-à-vis du reste du monde. Ce ne sont pas les autres qui veulent que nous le fassions, c'est nous qui voulons le faire ».

 

La Chine au présent

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