CHINAHOY

1-July-2014

Le 4e Sommet de la CICA, nouveau jalon dans le processus de sécurité et de coopération en Asie

 

Séance d'ouverture du 4e Sommet de la CICA. (XINHUA)

 

ZHANG XUDONG*

« Notre tâche est avant tout d'atteindre une compréhension réciproque. De cette compréhension viendra un plus grand respect des uns envers les autres, et de ce respect découlera une action collective. » C'est ainsi que s'exprima d'une voix déterminée le président indonésien Soekarno, en avril 1955, lors du discours d'ouverture de la Conférence afro-asiatique de Bandung, devant les délégués de 29 pays représentant 1,6 milliard d'individus. Cet événement, le premier dans l'histoire à rassembler les « populations de couleur », a fait naître l'esprit de Bandung – égalité entre les peuples, négociations et coexistence pacifique – dans le cœur de tous les peuples participants d'Asie et d'Afrique.

Shanghai a repris le flambeau de Bandung après 59 ans, en accueillant le 4e sommet de la Conférence pour l'interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA). Des dirigeants, des observateurs et des invités de 47 pays et organisations internationales se sont réunis à Shanghai autour des thèmes suivants : renforcer le dialogue, la confiance et la coordination, et œuvrer ensemble pour la paix, la stabilité et la coopération. Le « consensus de Shanghai » dégagé lors de ce sommet a porté la coopération en matière de sécurité en Asie à un nouveau niveau historique.

Une nouvelle vision de la sécurité

En tant que continent le plus dynamique de la planète, l'Asie concentre également les problèmes de sécurité les plus complexes. Presque chacune de ses parties est menacée de problèmes d'insécurité de types et de niveaux divers. La pression du défi sécuritaire, conventionnel ou non conventionnel, s'accentue de jour en jour ; des sujets brûlants et des contentieux historiques coexistent et fermentent, en particulier les différents territoriaux qui continuent à s'intensifier ; les alliances militaires de toutes sortes et la mentalité de la guerre froide exacerbent le dilemme sécuritaire entre les États. La paix, la stabilité et la prospérité en Asie ont des implications extrêmement importantes pour le monde. Il est donc essentiel pour l'Asie de défendre son état de développement qui est en plein essor. Il est urgent pour le continent de créer un environnement favorable et durable pour tous, et il est nécessaire de résoudre toutes les questions de sécurité patentes en suspens. Cependant, afin de parvenir à un consensus dans l'action, il faut au préalable parvenir à une convergence sur la vision. Avant d'aborder le bilan des questions sécuritaires et leurs solutions, les parties concernées doivent parvenir à des consensus idéologiques dans tous les aspects, en particulier changer les idées reçues largement répandues dans un certain nombre de pays et d'autres facteurs négatifs entravant la coopération sécuritaire. Nous devons reconnaître que le dilemme sécuritaire auquel fait face les pays asiatiques révèle de nombreux aspects négatifs d'ordre idéologique.

Tout d'abord, une partie des pays mettent un accent excessif sur leur propre « sécurité relative », accentuant les conflits d'intérêts en matière de sécurité entre les pays, tout en réduisant la marge de tolérance. La perception de la sécurité de certains pays se base sur une menace sécuritaire présumée bien au-delà de ce qui est raisonnable. Au sujet de la coopération régionale en matière de sécurité, certains pays s'attribuent un rôle important, se donnent une mission avec une responsabilité particulière, consistant à endoctriner et favoriser un certain nombre d'objectifs politiques. Fleurissent ainsi des alliances politico-militaires sous le signe de valeurs et de systèmes politiques qui, tout en se vantant de jouer un rôle de pierre angulaire pour le maintien de la paix et de la stabilité en Asie, constituent dans une certaine mesure un défi pour l'ordre asiatique. La sécurité doit comporter les principes d'universalité, d'égalité et de clémence. Ce concept de la sécurité devrait être une conviction partagée par tous les pays asiatiques. C'est seulement sur cette base que les États peuvent édifier une « paix collective » respectant et défendant les intérêts de chaque pays, et forger une communauté de destin solide.

Ensuite, des pays mettent trop en exergue leurs propres préoccupations sécuritaires, se focalisant sur les conflits de souveraineté territoriale maritimes et terrestres, tout en empêchant la résolution des autres conflits sécuritaires. Certains chercheurs ont démontré qu'à notre époque, les sources de conflits internationaux se concentrent sur « le pouvoir, l'idéologie et l'identité », mais seule l'Asie va à l'encontre de ce phénomène, en s'enlisant dans les différends traditionnels de territoire. Les différends portant sur les intérêts maritimes sont ceux qui dominent en permanence les forums sur la sécurité. Extrêmement difficiles à résoudre, ces sujets font constamment l'objet de spéculations. La stratégie de « mettre de côté les différends et maintenir le statu quo » est aujourd'hui très difficilement applicable, ce qui retarde les discussions sur d'autres sujets, tels que les conflits ethniques et religieux, le terrorisme, la criminalité transnationale, la sécurité environnementale, la sécurité informatique, la sécurité des ressources énergétiques et les grandes catastrophes naturelles. À l'heure actuelle, la menace sécuritaire marquée par le terrorisme, le séparatisme et l'extrémisme tend à s'accentuer, et il faut y répondre de manière ferme. L'environnement et la situation sécuritaire en Asie sont tellement complexes qu'il est obligatoire d'insister sur le concept de sécurité globale, afin de faire avancer la gouvernance sécuritaire de manière coordonnée et intégrale.

En outre, une partie des pays n'a jamais abandonné la pensée de « jeu à somme nulle », continue à appliquer des doubles standards dans la défense de leurs intérêts sécuritaires et construisent leurs visions de l'avenir de la coopération sécuritaire en Asie dans un esprit exclusif. Aujourd'hui, les dialogues bilatéraux et multilatéraux sur la sécurité ne sont pas rares, mais la méfiance entre les parties en conflit ne fait que se creuser davantage, et le risque de suspicion mutuelle et de mésinterprétation des intentions est particulièrement inquiétant. Toute coopération sécuritaire et toute interaction militaire ont souvent un impact direct ou indirect sur les pays tiers. Plus important encore, certains pays émettent des réclamations contre le recours à la force ou les menaces, mais font le contraire dans les faits en intensifiant la course à l'armement et en « montrant leurs muscles ». Ils provoquent ainsi le risque d'une course à l'armement généralisée en Asie. Dans l'histoire, les grandes puissances et alliances militaires en dehors de la zone ont contribué de façon positive à la paix et la stabilité en Asie, mais elles ont laissé des effets secondaires indésirables sur la situation actuelle du continent, et leurs ingérences inappropriées ont accentué les défis sécuritaires d'aujourd'hui. Fondamentalement parlant, la sécurité en Asie doit s'appuyer sur les pays asiatiques, ce qui est à la fois une réalité de la politique internationale et le découlement naturel de « l'autonomie asiatique », leçon historique apprise au fil de la pratique de la politique internationale depuis la Première et la Seconde Guerre mondiale. Certains pays soupçonnent l'émergence d'une nouvelle alliance militaire rivale et s'inquiètent d'être exclus de l'architecture sécuritaire en Asie. Tout cela fait beaucoup de bruit pour rien. L'Asie a un besoin urgent d'augmenter le niveau de coopération sécuritaire, et les Asiatiques font à la fois preuve de capacité et de sagesse pour parvenir à la paix et à la stabilité de l'Asie. En même temps, les pays asiatiques ouvrent les bras aux pays et organisations internationales des autres régions, de sorte qu'ils jouent un rôle positif et constructif dans ce processus.

Enfin, certains pays ont coupé les liens intrinsèques entre la sécurité et le développement, et ne s'occupent plus que des menaces sécuritaires superficielles et à court terme, sans se soucier des problèmes inhérents au développement économique. Cette situation conduit à une profusion de menaces sécuritaires. La sécurité en Asie n'est pas un besoin à court terme, et le processus de coopération est un long chemin dont l'orientation et la sinuosité sont déterminées par l'interaction politico-économique. L'Asie a été de nombreuses fois témoin de cas où une nation utilise la force pour ses propres intérêts du moment, afin de déclencher la subversion de l'État rival, sans se soucier de la reconstruction du pays, le laissant sombrer dans d'interminables guerres civiles. Continent le plus touché par les trois courants de forces extrémistes, l'Asie est devenue le foyer de nouveaux problèmes non conventionnels de sécurité tels que le terrorisme. Les questions de sécurité trouvent rarement une réponse nette et simple, et beaucoup de pays distinguent très bien une solution fondamentale d'une solution superficielle : sans promouvoir le développement de tous les pays et de toutes les régions de l'Asie, on perd cette « clé générale » aux problèmes de sécurité sur le continent. Le développement durable est une orientation combinant la sécurité au développement. Le développement durable et la sécurité durable, solidaires et interdépendants, sont les conditions nécessaires à la sécurité en Asie.

En somme, la sécurité en Asie passe par la voie d'une action commune, globale, coopérative et durable. C'est l'interprétation de la vision asiatique sur la sécurité que les dirigeants chinois ont donnée à l'Asie et au monde. Cette nouvelle vision de la sécurité s'inscrit dans la lignée de l'histoire du développement de la sécurité sur le continent. Sous cette puissante impulsion, une toute nouvelle perspective de coopération sécuritaire s'ouvre pour l'Asie.

Les mécanismes de la CICA : clé de voûte de la sécurité asiatique

Afin de répondre aux défis sécuritaires et de renforcer la coopération relative à la sécurité en Asie, il faut avoir comme base des mécanismes de coopération. Aujourd'hui, la coopération sécuritaire en Asie souffre précisément de l'absence de mécanismes perfectionnés avec une grande représentativité, une vision globale et une haute performance. À cet égard, les mécanismes de la CICA peuvent devenir la clé de voûte de la sécurité asiatique.

À la fin de la guerre froide, le président du Kazakhstan, M. Noursoultan Nazarbaïev a initié en 1992, lors de la 47e Assemblée de l'ONU, la mise en place des mécanismes de la CICA. Un an plus tard, la CICA a démarré ses activités en tant que forum. Aujourd'hui, la CICA compte 26 États membres et 11 observateurs, y compris l'ONU. Des documents de référence jalonnent les 20 années de développement de ce forum de dialogues et de consultations visant à renforcer la coopération, grâce à la création de mesures de confiance multilatérales pour le renforcement de la paix, la sécurité et la stabilité en Asie : la Déclaration sur les principes directeurs des relations mutuelles des États membres de la CICA (1999), le Document Almaty (2002) et le Répertoire des mesures de confiance de la CICA (2004).

Aujourd'hui, des mécanismes réguliers sont établis : sommet des chefs d'État et de gouvernement, conférence des ministres des affaires étrangères, conférence de hauts fonctionnaires et réunions de groupes de travail spécifiques. Le sommet des chefs d'État et de gouvernement ainsi que la conférence des ministres des affaires étrangères ont lieu tous les quatre ans, à tour de rôle à intervalle de deux ans. Les pays accueillant les réunions président la CICA pendant les deux années suivantes. La Chine assurera la présidence tournante de 2014 à 2016. Une caractéristique importante des mécanismes de la CICA exposée dans le document Règles de procédure de la CICA est le principe d'unanimité : « Toutes les décisions et directives à tous les niveaux doivent être adoptées à l'unanimité ».

Comme l'a dit le président Xi Jinping au sommet des chefs d'État dans son discours inaugural intitulé « Établir activement une vision asiatique de la sécurité, créer collectivement de nouvelles perspectives de coopération en matière de sécurité » : « La CICA est le forum régional de sécurité couvrant le plus vaste territoire de la planète, réunissant le plus grand nombre d'États membres et jouissant de la plus large représentativité. Depuis 20 ans, la CICA a assumé son rôle : favoriser la coordination et la confiance, et faire avancer la sécurité et la stabilité en Asie selon le principe de la délibération et de l'unanimité. Elle a aussi apporté d'importantes contributions en ce qui concerne l'approfondissement de la compréhension mutuelle et de la coopération, ainsi que l'élaboration d'un consensus. »

Afin de jouer un rôle plus significatif dans la coopération sécuritaire en Asie, la CICA doit renforcer sa propre construction dans les domaines suivants.

Premièrement, il faut élargir la couverture géographique, afin d'inclure dans les mécanismes de la CICA le plus grand nombre de pays asiatiques et de pays extérieurs en soutien. Selon les besoins réels, la CICA doit également augmenter la fréquence des conférences des ministres des affaires étrangères et des sommets de chefs d'État, et ce afin de mieux faire face aux défis sécuritaires imprévus, d'approfondir les dialogues de manière plus fréquente sur les processus de coopération en matière de sécurité et d'assurer le bon développement de la CICA par une forte orientation politique.

Deuxièmement, il faut en même temps perfectionner la structure et l'organisation verticale : renforcer le rôle du Secrétariat, compléter les mécanismes de consultation en matière de défense et ceux des groupes de travail sur les mesures de confiance. Il faut également élargir les domaines de coopération de la sécurité vers l'économie, le commerce et la culture, afin de développer une vision de la coopération globale en Asie.

Troisièmement, il convient d'établir dans le cadre de la CICA un dispositif d'interaction entre les dirigeants et les citoyens, et entre les gouvernements et les ONG, afin de diversifier les champs d'intervention et de diffuser les visions de la CICA via les groupes de réflexion et les forums non gouvernementaux. Cela permettra d'élever sa notoriété ainsi que son influence, dans le but de consolider la base sociale des mécanismes de gouvernance asiatique de sécurité.

La présidence tournante de la Chine a déjà injecté une nouvelle vitalité dans les mécanismes de la CICA, et elle jouera un rôle central dans la promotion de la coopération asiatique en matière de sécurité. La Déclaration de Shanghai lors du 4e Sommet de la CICA l'a largement confirmé. La Chine continue d'insister sur ses principes de bienveillance et de bon voisinage, et de pratiquer son concept d'« amitié, sincérité, réciprocité et tolérance » avec ses voisins. Elle s'engage dans la promotion de la zone économique de la route de la Soie et dans la création de la route maritime de la Soie du XXIe siècle, contribue activement à la construction de réseaux de communication et de transport, et apportera son concours historique au développement et à la sécurité de l'Asie. Elle portera la coopération et le développement dans le cadre de la CICA à un nouveau palier.

 

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