CHINAHOY

1-July-2014

Toutes voiles vers le Shandong !

 

Danse bretonne avec des gens du Xinjiang à Qingdao lors de l'exposition horticole internationale. (Photo fournie par BCR)

 

SÉBASTIEN ROUSSILLAT, membre de la redaction

La visite de la délégation du Conseil régional de Bretagne, au mois de mai à Qingdao, a permis à la coopération Shandong-Bretagne de prendre un nouvel élan.

Lors de mon passage à Qingdao, j'ai eu l'honneur de rencontrer la vice-présidente de la région Bretagne chargée des relations internationales, Forough Salami, et Christelle Rouault, brestoise installée à Qingdao depuis le milieu des années 90 et aujourd'hui directrice du Bureau de représentation de la Bretagne au Shandong.

La visite de la délégation du Conseil régional, composée de cinq membres et conduite par Mme Forough Salami, a eu lieu du 15 au 19 mai dernier à Qingdao, ville portuaire du Shandong. Elle s'est ouverte par l'inauguration d'une exposition sur les relations sino-françaises au Lycée n°9 de la ville, et a été suivie d'une journée colloque autour du thème « Bretagne, terre de sécurité alimentaire », d'une visite du Salon chinois de l'élevage, de la Fête de la Bretagne et enfin d'une visite de l'Exposition horticole internationale de Qingdao.

Hissez les voiles !

« La coopération décentralisée Shandong-Bretagne s'est créée à l'initiative de la partie chinoise en 1985, m'explique Forough Salami. La Chine venait de s'ouvrir et je pense que les deux régions avaient remarqué leurs similitudes. Car, que ce soit territoire, histoire, culture ou système économique, le Shandong et la Bretagne possèdent beaucoup de caractéristiques communes. Tout d'abord, le Shandong et la Bretagne sont deux péninsules : une à l'Est, une à l'Ouest. Ensuite, ce sont deux économies à la fois agricoles et maritimes. Enfin, la culture bretonne est particulière et très liée à une histoire ; celle du Shandong est, elle aussi, reconnue comme unique en Chine. »

Christelle Rouault m'apprend que « la coopération a démarré très lentement dans les années 80, et surtout autour de la problématique de l'agroalimentaire, qui présentait un intérêt pour chacune des parties. La fin des années 80 en Chine a empêché beaucoup de coopérations possibles. Ce n'est qu'en 2005 que l'on a vraiment tendu la main et mis en place un protocole de renforcement de la coopération. »

Des ports d'attache

Au départ, la coopération a donc surtout consisté en des échanges avec pour contenu l'éducation, la jeunesse et les sports. C'est ainsi qu'au début des années 2000, a été créé le jumelage du lycée rennais Émile Zola avec l'école des langues étrangères de Jinan. Plusieurs lycées bretons ont par la suite été mis en relation avec des lycées du Shandong. On compte aujourd'hui plus d'une dizaine de lycées bretons ayant une école jumelle en Chine. Des délégations sportives, notamment de ping-pong, discipline dans laquelle excelle le Shandong, ont également été invitées à venir montrer leur niveau à Rennes, et une délégation de pongistes d'Hennebont viendra également pour des stages d'entraînement à Qingdao. Le centre d'entraînement de l'équipe de France de voile olympique a accueilli l'équipe chinoise pour des entraînements avant les JO de 2008, et le centre de voile de Qingdao accueille des élèves de Brest l'été pour des stages et la compétition annuelle de voile organisée à Qingdao, la « Mayors' Cup ».

« Il fut normal de mettre l'accent sur l'éducation, puisque l'économie chinoise était très compliquée à l'époque et qu'il était difficile d'investir et de s'implanter. Mais les Chinois et les Français étaient très demandeurs pour tout ce qui était échanges pédagogiques et culturels. D'ailleurs, il faut remarquer que la Bretagne est aujourd'hui l'une des seules régions de France à promouvoir l'enseignement du chinois dans tous les niveaux scolaires, de l'école primaire à l'université ! » fait très justement remarquer Forough Salami.

« Le partenariat entre l'université du Shandong et Rennes II, puis désormais avec l'université de Bretagne qui regroupe les 4 universités bretonnes, est également un très bon exemple de la qualité des échanges mis en place, car nous avons, avec l'aide de l'université du Shandong, créé l'Institut Confucius de Bretagne, dont la directrice chinoise vient de cette université. Nous avons également engagé plusieurs coopérations au niveau doctoral entre les laboratoires de recherche, et accueillons chaque année quelques milliers d'étudiants venant de toute la Chine dans les différentes universités bretonnes. On compte tous les ans une trentaine d'étudiants bretons dans le Shandong, pour des études d'un an ou plus et une centaine de collégiens et lycéens qui y vont pour des séjours courte durée, sachant qu'une autre partie se retrouve également dans d'autres régions et villes chinoises. »

Christelle Rouault ajoute : « C'est vrai qu'au départ, on mettait surtout l'accent sur les échanges scolaires et universitaires. Le jumelage de Rennes avec Jinan et celui de Brest avec Qingdao en 2006 sont aussi deux exemples de partenariats institutionnels qu'on a pu mettre en place à l'initiative de la région Bretagne. La ville de Qingdao accueille par exemple le jardin de Brest dans l'exposition horticole, où nous avons organisé un concert de musique bretonne cette année. La Fête de la Bretagne a également lieu tous les ans dans le Shandong, et en particulier à Qingdao. Brest accueille une délégation de Qingdao régulièrement à l'occasion des Tonnerres de Brest et pour des conférences internationales sur les sciences maritimes. Brest est en effet pour la France ce qu'est Qingdao pour la Chine dans le domaine des sciences maritimes.

Les échanges entre Rennes et Jinan sont également très vivants. Il faut rappeler aussi que plusieurs villes de Bretagne sont jumelées ou en contact avec des villes du Shandong. On peut citer Quimper où est basée l'EMBA disposant d'un cursus commerce international Asie, et Yantai, dont l'Hôpital de l'Amitié franco-chinoise collabore depuis 1860 avec les CHU de Saint-Malo et de Nantes. Il est intéressant de remarquer que nous sommes la région française qui compte le plus de villes jumelées avec la Chine ! » conclut-elle fièrement.

Un nouveau cap franchi

« L'année dernière, avec la visite du vice-président de la région Bretagne en charge de l'économie, la coopération a pris un nouvel essor : nous avons décidé de renforcer la dimension économique du partenariat. Le gouvernement du Shandong a notamment émis la demande de coopérer dans le domaine de la sécurité alimentaire. Et je pense qu'un de nos atouts dans nos coopérations à l'international, c'est d'amener ce que nous savons faire de mieux. En l'occurrence, l'agro-alimentaire pour la coopération avec la Chine. Ainsi, en six mois, grâce à l'aide de Christelle Rouault ici à Qingdao et à Bretagne Commerce International, nous avons monté ce forum avec pour thème « Bretagne, terre de sécurité alimentaire ». Nous avons souhaité faire de ce colloque une sorte de plate-forme pour nos entreprises. Nous sommes présents pour créer une atmosphère de confiance réciproque, créer un pont entre les institutions chinoises et françaises et offrir un soutien officiel à cette coopération », explique Forough Salami.

« Notre bureau met à disposition des entreprises bretonnes et du Shandong le réseau institutionnel tissé au fil de notre travail de longue date sur place en faveur des deux régions, pour ainsi ouvrir des portes et aider notamment les entreprises bretonnes à travailler en symbiose avec les autorités et leurs partenaires chinois. Aujourd'hui, dans le Shandong, ce sont une dizaine d'entreprises bretonnes qui sont implantées, dont certaines figurent parmi les plus grosses entreprises européennes dans les secteurs de l'élevage et de l'agroalimentaire et rayonnent depuis la Chine vers les autres pays d'Asie. Les coopérations entre entreprises chinoises et bretonnes sont de plus en plus nombreuses et s'élargissent à de nouveaux domaines. Le vent est bon. »

Tiens bon la barre et tiens bon le vent...

Forough Salami tient à me faire remarquer que « ce n'est pas parce qu'on se lance dans l'économie qu'on laisse de côté ce qui a été fait et qu'on largue par-dessus bord les coopérations universitaires et culturelles ! Au contraire, c'est le point d'ancrage de la coopération. D'ailleurs, si on y réfléchit bien, le fait qu'il y ait des Chinois en Bretagne pour leurs études contribue à notre renommée en matière académique. Rappelons au passage que la Bretagne a été la première région française à accueillir des étudiants chinois en 1964. De plus, les étudiants bretons en Chine cherchent souvent un travail en relation avec la Chine après, que ce soit au Shandong ou ailleurs. Les coopérations scientifiques, bien que leur développement soit plus difficile à estimer, sont là pour aider dans des domaines pratiques et en rapport avec l'économie. Des entreprises chinoises prennent des parts dans nos entreprises, comme c'est le cas pour le groupe Synutra qui vient d'investir 100 millions d'euros en Bretagne en coopération avec Sodiaal. Cela permet de créer des emplois. Donc le développement des échanges entre la Bretagne et le Shandong ne va pas se changer en ''quai de marchandises'', mais en quelque chose de plus global, et va notamment se spécialiser dans des domaines où nous excellons et pouvons entrer en compétition avec les autres pays. L'année prochaine sera celle du trentenaire de la coopération entre la Bretagne et le Shandong, un évènement que nous allons bien sûr célébrer comme il se doit ! » conclut Forough Salami.

 

La Chine au présent

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