CHINAHOY

9-June-2014

Construire une ceinture économique autour de la capitale

 

La ceinture économique Beijing-Tianjin-Hebei. (CFP)

 

LUO YUANJUN, membre de la rédaction

Beijing est actuellement une mégalopole qui polarise industries et problèmes environnementaux. Pour un développement mieux réparti, la nouvelle direction chinoise prévoit l'intégration économique de Beijing, Tianjin et du Hebei. Analyse.

L'idée de créer une ceinture économique autour de la capitale ne date pas d'hier. Cette notion de « ceinture de la capitale » a été mentionnée dès 1982 dans le Plan directeur de la construction urbaine de Beijing. En novembre 2004, la Commission nationale du développement et de la réforme a officiellement proposé le projet régional relatif à la ceinture économique Beijing-Tianjin-Hebei. En mars 2011, construire une « ceinture économique autour de la capitale » comptait parmi les points énoncés dans le XIIe plan quinquennal du pays. Ainsi, ce sujet a été élevé au rang de stratégie nationale.

Les nouveaux dirigeants accordent une grande importance à la mise en place de cette ceinture économique. En août 2013, alors qu'il présidait une réunion sur le développement du Hebei, le secrétaire général du Comité central du PCC, Xi Jinping, a proposé de promouvoir le développement coordonné de la zone Beijing-Tianjin-Hebei. Dès lors, il a formulé plusieurs directives à cet égard. De même, Li Keqiang, le premier ministre chinois, dans le rapport d'activité du gouvernement qu'il a présenté le 5 mars 2014, a souligné la nécessité de renforcer la coopération économique dans la zone de la mer Bohai et au niveau de Beijing-Tianjin-Hebei.

Alors, comment aménager cette ceinture économique autour de la capitale ? « Il faut d'abord parvenir à un consensus avant d'agir », a souligné le secrétaire du comité du Parti pour la province du Hebei, Zhou Benshun. Actuellement, trois positions partagées se distinguent : l'amélioration de l'environnement écologique, la restructuration économique, l'intégration des infrastructures de transport.

Une politique écologique

Les Pékinois estiment que l'un des plus grands avantages que leur ont apportés les Jeux Olympiques de 2008, c'est l'amélioration de l'environnement. Pour garantir que le ciel azur serait au rendez-vous, la municipalité de Beijing avait déplacé certaines entreprises hautement polluantes, dont l'aciérie Shougang, au Hebei. Cependant, dès le début de 2013, le smog est revenu étouffer la capitale. Au mois le plus critique, cette épaisse brume enveloppait la ville plus de 80 % des jours...

La province du Hebei a également été touchée. En 2013, parmi les dix villes chinoises où la qualité de l'air est la plus mauvaise, sept se trouvaient au Hebei. Comme cette province jouxte Beijing, ce fléau écologique représente aussi une menace directe pour la capitale. Et étant donné la forte mobilité des nuages de pollution, il est nécessaire d'agir conjointement pour des résultats probants.

Avant que Beijing et Tianjin deviennent des municipalités relevant directement du gouvernement central, Beijing, Tianjin et le Hebei formaient ensemble une seule et unique région. Les trois sont liés par leurs caractéristiques géographiques similaires en termes de géologie, topographie, climat, sol et communautés biologiques, des attaches naturelles qui ouvrent de larges perspectives de coopération. Ils sont en outre confrontés aux mêmes défis écologiques : pollution grave atmosphérique, contamination et pénurie de l'eau, fragilité de l'écosystème.

Après avoir pris connaissance du compte rendu sur le développement collaboratif de la zone Beijing-Tianjin-Hebei, le 26 février 2014, le secrétaire général Xi Jinping a déclaré : « Il convient de renforcer la coopération en matière de protection environnementale. À l'instar du mécanisme conjoint de lutte contre la pollution atmosphérique déjà lancé, il faut optimiser d'autres plates-formes de coopération pour la plantation de forêts de protection, la préservation des ressources aquatiques, la gestion de l'eau ou encore l'utilisation des énergies propres. »

Dans le domaine de l'écologie, Beijing, Tianjin et le Hebei ont déjà pris des mesures concrètes. En septembre 2013, le ministère de la Protection de l'environnement, le ministère de l'Industrie et de l'Information et le ministère du Logement et de la Construction urbaine et rurale ont conjointement publié les Règles d'application du plan de lutte contre la pollution atmosphérique dans la zone Beijing-Tianjin-Hebei et ses environs. Il faut désormais s'attendre à l'amélioration des mécanismes de coopération concernant la préservation des ressources aquatiques, la gestion de l'eau et l'utilisation des énergies propres.

Selon Wu Bin, directeur du centre de recherche sur l'éco-civilisation du Bureau national de la sylviculture, la planification de l'espace écologique doit être au cœur du développement coordonné de Beijing-Tianjin-Hebei. Au cours de l'urbanisation, priorité doit être donnée à la construction d'une civilisation écologique. C'est selon ce concept de « civilisation écologique » que doivent être ajustés les schémas de l'économie et de la société ainsi que les modes de production et de vie, a-t-il expliqué. Dans le processus d'intégration de Beijing-Tianjin-Hebei, a-t-il poursuivi, il faut encore écouter les avis et conseils des spécialistes pour prendre des décisions éclairées, de sorte à ce que le développement ne se fasse pas au prix d'une dégradation de l'environnement. Il s'agit d'envisager, de manière holistique, la restructuration des espaces verts, l'optimisation de l'utilisation du sol et la résolution des problèmes liés à l'eau.

Structures économiques complémentaires

Le marché près du zoo de Beijing, construit au milieu des années 80, est le plus grand centre de distribution en gros de vêtements dans le nord de la Chine. Il est même fréquenté par des stars de cinéma, dont Fan Bingbing, qui y fait parfois du shopping. Mais ce marché sera déplacé à Langfang dans le Hebei, selon le contrat qui a été signé le 3 avril 2014 par cette ville et l'arrondissement Xicheng de Beijing.

Selon les statistiques, Beijing compte plus de 1 300 marchés de gros dont quelque 120 dans le noyau urbain, des « temples de la consommation » qui ne sont pas tout à fait en ligne avec les fonctions essentielles d'une capitale. La masse d'individus que rameutent ces lieux est une des causes de la congestion du trafic. Il est alors nécessaire de déménager ces marchés de façon appropriée. Il s'agit non seulement d'une solution à un problème patent de Beijing, mais aussi d'un point de départ pour le développement en liaison étroite avec Tianjin et le Hebei. Quand ces industries s'installeront au Hebei, la structure économique de la province s'en verra modifiée.

Beijing, Tianjin et le Hebei cumulent une population de plus de 100 millions d'habitants et couvrent ensemble une superficie de 216 000 km². La ceinture économique de la capitale, qui unifie les trois, compte parmi les plus grandes régions économiques de la Chine, aux côtés des deltas de la rivière des Perles et du Yangtsé. Xi Jinping a appelé à accélérer le développement conjoint tous azimuts de Beijing-Tianjin-Hebei, sur la base de leurs avantages comparatifs, des exigences de la division industrielle moderne, du principe de complémentarité et du concept de coopération gagnant-gagnant. L'édification de l'agglomération Beijing-Tianjin-Hebei sert de vecteur ; l'optimisation de la division régionale du travail et de la répartition industrielle, la planification et l'utilisation globales des ressources et du territoire sont les lignes directrices du projet ; la création de mécanismes institutionnels à long terme en marque le point de départ.

Beijing, Tianjin et le Hebei ont déjà formé, au fil des années, leurs propres pôles industriels. Le Hebei s'appuie majoritairement sur le secteur secondaire, avec des firmes opérant notamment dans les domaines de la sidérurgie, du charbon, de l'électricité et de l'industrie légère. Beijing, centre politique, d'innovation technologique, du capital humain et des échanges internationaux, qui rassemble un grand nombre de talents, développe principalement les industries de services haut de gamme, de technologie de pointe et de création culturelle. Quant à Tianjin, assise sur de solides bases industrielles, commerciales et manufacturières, elle présente des avantages dans l'industrie de transformation avancée, la recherche et le développement, ainsi que l'application industrielle des acquis scientifiques.

Pour Yang Weimin, directeur adjoint du bureau de direction financière et économique du Comité central du PCC, les maladies urbaines de Beijing trouvent leurs origines dans la trop grande diversité des fonctions que concentre la ville. Il faut délocaliser celles qui ne sont pas indispensables à la capitale, afin de permettre une complémentarité et un développement harmonisé dans la zone Beijing-Tianjin-Hebei.

Visant une répartition raisonnable des fonctions, la complémentarité et l'élévation de la compétitivité globale, ces trois parties déterminent leur positionnement industriel en fonction de leurs caractéristiques propres. Beijing souhaite développer les économies du savoir et des services, telles que la finance, l'assurance, le tourisme, la culture et d'autres industries haut de gamme. Tianjin, avec ses dizaines de millions d'habitants, va augmenter la part des services dans l'économie, pour que celle-ci dépasse les 50 %. Le Hebei, de son côté, prendra activement en charge le secteur manufacturier, suite au transfert d'entreprises connexes depuis Beijing et Tianjin.

Intégration des transports

En avril 2014, une plate-forme d'enregistrement des passagers dépendant de l'aéroport de Tianjin a été ouvert à la gare du sud de Beijing. Ainsi, une fois enregistrés sur leur vol, les passagers peuvent y prendre gratuitement le train interurbain Beijing-Tianjin pour arriver à la gare de Tianjin, puis le bus jusqu'à l'aéroport. Cet itinéraire est de 30 minutes plus court qu'une course vers l'aéroport de Beijing. En effet, la ligne TGV interurbaine Beijing-Tianjin, ouverte en 2008, rapproche ces deux municipalités. Avec une durée de trajet inférieure à 29 minutes, elle est la première voie ferroviaire interurbaine à grande vitesse en Chine permettant le passage de trains à plus de 300 km/h, ainsi que la première ligne TGV conçue pour le transport de passagers.

D'autres voies ferrées à grande vitesse existent dans la zone Beijing-Tianjin-Hebei, comme celle pour passagers qui relie Beijing à Shijiazhuang, ou encore celles de Tianjin-Qinhuangdao et Beijing- Shanghai. Bientôt, depuis Beijing ou Tianjin, il sera possible d'atteindre directement les principales villes du Hebei en une heure de temps en moyenne.

De plus, Beijing, Tianjin et le Hebei sont aussi desservies par de nombreuses autoroutes. Le Hebei possède six jonctions d'autoroutes avec Beijing et neuf avec Tianjin, tandis que ces deux dernières sont reliées entre elles par quatre autoroutes. Fin 2013, a été officiellement mis en place un système de péage électronique interprovincial incluant Beijing, Tianjin, le Hebei, le Shanxi et le Shandong, afin de faciliter les conditions de circulation dans la région pour les usagers.

En février 2014, le président chinois Xi Jinping a encore rappelé l'urgence de bâtir un réseau de transport moderne, nécessaire à l'intégration de Beijing, Tianjin et du Hebei.

Selon les prévisions, la zone Beijing-Tianjin-Hebei, d'ici 2020, disposera d'un réseau autoroutier long de 9 000 km, de liaisons routières reliant les villes principales en moins de trois heures, d'un réseau ferroviaire de 9 500 km, ainsi que de lignes ferroviaires interurbaines joignant les villes majeures en environ une heure. Par ailleurs, l'aéroport international de Beijing sera capable d'accueillir 100 millions de voyageurs, et la phase initiale des travaux de construction du nouvel aéroport de Beijing sera achevée. Tianjin multipliera et modernisera les routes rejoignant Beijing et le Hebei, dont le nombre passera de 29 actuellement à 38.

 

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