CHINAHOY

28-April-2014

Shanghai, nouvelle capitale asiatique de la mode

 

Défilé du 18 octobre 2013 lors de la Fashion week de Shanghai. (CFP)

 

LIU QIONG, correspondante spéciale

Lors de la Semaine de la mode Automne-hiver 2014/2015 qui s'est tenue à Paris et qui s'est clôturée au début du mois de mars dernier, les stars chinoises vêtues avec faste et le décor de style asiatique constituaient une vue attrayante. Un peu plus tôt, Shanghai avait été classée pour la première fois (en dépassant Tokyo) dans le top 10 des capitales mondiales de la mode publié par l'agence américaine The Global Language Monitor (Observatoire mondial de la langue), devenant pionnière de la mode en Asie.

Capacité de consommation surprenante

En déambulant dans les célèbres quartiers commerciaux de Shanghai, tels que Nanjing West Road, Middle Huaihai Road et Xujiahui, on voit que ces endroits sont devenus des lieux de compétition pour les marques de luxe mondialement connues comme Hermès, Tiffany ou Cartier, et qu'ils n'ont plus rien à envier aux Champs-Élysées à Paris ou à la Cinquième Avenue à New York.

« Les marques de luxe s'installent à Shanghai car elles ont vu le potentiel de consommation de cette métropole », dit Zhou Ting, directrice de l'Institut de recherches de Fortune Character.

Selon un rapport publié le 7 janvier 2013 par le Trends Media Group, Shanghai occupe la première place sur la liste des 20 plus grandes villes chinoises en matière de capacité de consommation. Cette enquête menée dans 20 villes (Shanghai, Beijing, Shenyang, Nanjing, Chengdu, Tianjin, Qingdao, Wuhan, Dalian, Xi'an, Harbin, Chongqing, Jinan, Guangzhou, Shenzhen, Hangzhou, Fuzhou, Changchun, Changsha, Zhengzhou) a indiqué que le montant des dépenses de consommation des nouveaux riches destiné à la mode était proche de 50 000 yuans par personne en 2012, ce qui représentait 57,3 % de leur revenu annuel. À Shanghai, on atteint 86 132 yuans. La capacité de consommation de Shanghai s'est classée en première position dans les domaines des accessoires, des bijoux, des « bracelet-montres », des cosmétiques, ou des articles électroniques.

L'entreprise italienne d'e-marketing Contact Lab a récemment effectué une enquête dont le résultat montre que les dépenses moyennes des consommateurs de produits de luxe à Shanghai ont dépassé celle des consommateurs newyorkais. Sur 1 000 consommateurs de produits de luxe interrogés dans différentes villes, le montant moyen du dernier achat des Shanghaiens était de 1 000 dollars, contre 500 dollars pour les Newyorkais. De plus, à peu près 91 % des Shanghaiens avaient l'intention de racheter un ou des produits de luxe à la mode, tandis que le chiffre était de 77 % pour les Newyorkais.

La relation entre la mode et Shanghai remonte à loin. La ville était en effet appelée dans les années 1930 « le petit Paris d'Extrême-Orient ». En tant que centre de l'industrie textile en Chine dans les années 1950 et 1960, Shanghai orientait la tendance de la mode dans beaucoup de domaines, comme les vélos, les montres, les chemises ou les appareils photo. Cependant, pour diverses raisons, l'influence de cette ville au niveau de la mode a progressivement décliné.

Bien que la mode s'affiche partout à Shanghai, certains trouvent qu'il y a encore un grand écart entre cette nouvelle capitale de la mode en Asie et les capitales traditionnelles de la mode ayant une chaîne industrielle complète, comme New York ou Paris. « Au cours des 30 dernières années, presque tous les produits populaires de la mode ont été importés, indique Ge Wenyao, directeur de la Fédération internationale de la mode de Shanghai (Shanghai International Fashion Federation). Shanghai n'est pour le moment qu'une capitale de consommation de la mode qui se trouve encore dans la première phrase de développement de l'industrie de la mode, contrairement à Paris qui est le centre de cette industrie le plus connu au monde, et qui est aussi un centre de création où se décident les standards de la mode. »

 

Yongkang street, rue des bars de Shanghai. (CFP)

 

Relancer la capacité de production de la mode

« Si Shanghai veut à nouveau guider la tendance de la mode, elle doit déployer des efforts pour développer une véritable industrie de la mode, en créant des marques moyen et haut de gamme », fait remarquer M. Ge. Que ce soit Paris ou Milan, toutes les grandes capitales de la mode possèdent un nombre significatif d'excellentes marques et d'entreprises d'articles de mode. Depuis le début des années 2000, Shanghai construit des installations étroitement liées à l'industrie de la mode, dans le domaine de la culture, du divertissement, du sport, des médias ou des expositions, ce qui constitue une bonne base de développement pour la ville.

En tant que PDG de Jahwz, entreprise de cosmétiques chinoise, Ge Wenyao est l'un des personnages les plus en vue dans le cercle de la mode à Shanghai. De par ses riches expériences en matière de cosmétiques, il a divisé l'industrie de la mode en six chaînes : R&D, design, fabrication, opération et diffusion de la marque, canal de distribution, et vente.

« Les entreprises chinoises liées à l'industrie de la mode ont beaucoup de points faibles », dit M. Ge. En 2007, il a soumis au département concerné de Shanghai un rapport sur le développement de l'industrie de la mode. D'après lui, Shanghai possède de nombreux atouts dans le domaine. D'une part, Shanghai jouit d'un environnement favorable concernant les personnes qualifiées, les informations, les échanges internationaux et l'indice de la mode. D'autre part, étant appelée « le petit Paris d'Extrême Orient » dans les années 1920 et 30, Shanghai abrite toujours plusieurs marques renommées.

« Le gouvernement de Shanghai doit attacher la même importance aux vieilles marques et aux nouvelles marques. Il faut non seulement encourager le redressement de ses marques historiques, mais également soutenir le développement de ses nouvelles marques. De plus, il faut créer de bonnes conditions pour que les marques venant de différentes régions s'installent et se développent à Shanghai, et y établissent même leur quartier général. Cela aidera ces marques à se connecter au monde via Shanghai et aidera le commerce de la ville à se développer vers plus de diversification », ajoute Ge Wenyao.

« En ce qui concerne les vielles marques, elles doivent changer d'idées pour s'adapter à l'évolution de l'époque », dit Gui Chenggang, PDG de Shanghai Warrior Shoes Co., Ltd. Tout comme beaucoup d'autres vieilles marques de Shanghai, Warrior a connu une période très difficile. Mais maintenant elle est devenue le synonyme de la mode aux yeux des jeunes consommateurs. Concernant le mode d'opérations, Warrior est passée d'une entreprise de production à une opératrice de marque. Elle dispose actuellement de plus de 1 000 magasins en Chine, et ce chiffre devrait atteindre les 2 000 dans trois ou cinq ans.

L'opportunité qui a relancé cette vieille marque est assez insolite. En 2008, on a découvert par hasard sur internet une photo où une star de Hollywood porte une paire de chaussures de la marque Warrior. Warrior n'a pas laissé passer cette opportunité. D'autant plus qu'à l'occasion des Jeux Olympiques de Beijing en 2008 et de l'Expo universelle de Shanghai en 2010, Warrior a lancé le concept de la mode sportive adaptée aux goûts de la jeunesse.

Création d'un réseau complet

Durant la Fashion Week de Londres, inaugurée le 14 février 2014, ont été dévoilés des chiffres très intéressants : l'industrie de la mode a contribué à hauteur de 26 milliards de livres sterling au développement économique britannique en 2013. La valeur de l'industrie de la mode a grimpé sans discontinuer en Grande- Bretagne au cours des cinq dernières années. En effet, le chiffre était de 21 milliards de livres sterling en 2009. Une augmentation de 22 % en cinq ans !

L'essor de l'industrie de la mode en Grande-Bretagne est étroitement lié à l'orientation et à la stimulation des grandes marques nationales. La valeur de Burberry, marque britannique emblématique, est passée de 2,1 à 7,03 milliards de livres sterling en six ans, réalisant une croissance de 461 %.

Quant à la France, un autre centre de la mode renommé au niveau mondial, elle considère la mode comme une industrie stratégique qui lui apporte 35 milliards d'euros de valeur de production et 150 000 emplois chaque année. L'industrie française de la mode s'appuie principalement sur trois secteurs : le parfum et les cosmétiques, la haute couture (les vêtements de luxe), ainsi que les bijoux de luxe qui maintiennent toujours une forte croissance de vente malgré la situation économique difficile.

D'après Ge Wenyao, la réussite remarquable de l'industrie française de la mode résulte d'un réseau commercial complet, y compris de coopérations à l'intérieur des cercles professionnels ainsi que celles entre eux et l'extérieur. « L'industrie chinoise de la mode nécessite également un environnement similaire de développement où les marques locales les plus performantes coopèrent et s'unissent », fait-il remarquer.

En fait, M. Ge a déjà conféré une ouverture plus étendue à la Fédération internationale de la mode de Shanghai. Auparavant les membres de la Fédération s'impliquaient principalement dans le secteur de l'habillement, mais ils s'occuperont désormais de trois autres secteurs : le secteur de la fabrication, celui des services tels que la restauration, l'hôtellerie et les salons haut de gamme, ainsi que celui des entreprises qui servent les deux secteurs précités, comme les cabinets de chasseurs de têtes, les agences de mannequins et les entreprises de consulting.

Selon lui, les entreprises chinoises du secteur de la mode doivent avoir une vision globale et apprendre des bonnes expériences internationales en matière d'opérations. Il a l'intention de créer un comité d'experts à l'intérieur de la Fédération pour offrir à ses membres divers services, établir différentes plates-formes, par exemple dans les domaines de la chaîne commerciale, de la diffusion, de l'exposition et du financement, et publier des rapports et des indices en rapport avec le secteur afin de créer un environnement favorable au développement de l'industrie de la mode.

 

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