CHINAHOY

1-February-2016

Le château mystérieux de l’Orient

 

Architecture typique des Qiang à Taoping.

 

ZHOU LIN, membre de la rédaction

Le village Taoping de l'ethnie Qiang, situé à 180 km de Cheng-du, au bord de la rivière Zagunao, est fier de ses 2 000 ans d'histoire. Les Qiang sont l'une des plus anciennes ethnies présentes dans l'Ouest de la Chine, puisque son histoire est documentée sur 3 000 ans. On voit partout des décorations à la forme d'une tête de bouc. Selon les légendes qui sont remontées jusqu'à nous, les Qiang de l'antiquité élevaient des ovins qui constituaient leur principale ressource économique, d'où le culte du mouton propre à ce peuple.

Avec son réseau de canalisations, ses voies multiples, ses tours en labyrinthe, ce village est surnommé le « château mystérieux de l'Orient ».

La famille de Tang Ying habite dans ce village. Elle-même, diplômée de l'éducation supérieure a quitté son village pour travailler en ville. Mais comme elle est guide pour l'agence de tourisme CYTS, elle fait la navette entre Jiuzhaigou et Chengdu, accompagnant les touristes qui visitent le village de son enfance.

Vu de loin, le village Taoping, ce sont des maisons de pierre ocre qui parsèment la pente de la montagne, parmi lesquelles on voit des tours qui s'élèvent. Le village, entouré d'une muraille, compte 8 portes et 13 voies principales. Au pied des tours, des ruelles étroites s'entremêlent en un labyrinthe dans lequel il est difficile de s'orienter sans l'aide d'un guide chevronné.

Dans le village, on entend murmurer des ruisseaux invisibles. C'est ce qui fait le mystère de ce village : sous les rues principales et les maisons, l'eau circule partout dans des canaux. Un modèle ancestral qui a fait ses preuves, puisqu'il procure aux habitants l'eau dont ils ont besoin pour leur vie quotidienne et les garantit contre les incendies. Et puis le flot souterrain continu joue le rôle de climatiseur naturel en régulant la température ambiante.

Mais ce n'est pas la seule originalité du village, puisqu'il est surplombé de grandes tours. Grandioses, très originales, un miracle dans l'histoire de l'architecture, puisque le séisme du Sichuan qui a détruit en 2008 la plupart des bâtiments typiques de l'architecture Qiang a pourtant épargné le village Taoping.

 

Cérémonie de mariage au village.

 

Ce village est à la fois forteresse et habitation. Les passages entre les murs d'enceinte sont longs et étroits et les maisons ont été construites par-dessus. Des passages, ainsi devenus souterrains, qui forment un vrai labyrinthe.

Dans le village, un autre endroit surprenant se trouve dans la maison de la famille Yang. La source venant de la montagne émerge d'abord dans cette maison, d'où elle coule ensuite à travers tout le village. Cette vaste construction qui occupe 368 m² était la résidence du premier chef du village, son histoire remonte à 1 000 ans. C'est le bâtiment le plus ancien et le mieux préservé du village.

Yang Dengfu, le propriétaire de la maison Yang, est l'héritier de la 54e génération de l'ancien chef du village, et il se fait un plaisir d'inviter régulièrement des touristes à visiter l'intérieur de sa maison. À la droite de la maison, un passage conduit vers le réseau aquatique souterrain. C'est aussi l'entrée de son domicile, qui ne comprend aucune fenêtre, mais seulement quatre ou cinq portes, dont deux sont de vrais passages, tandis que les autres sont des pièges destinés à dérouter d'éventuels bandits.

Après quelques volées d'escalier en bois, on accède à la tour. Ses murs sont noircis, il y a des meurtrières qui témoignent de l'histoire mouvementée du village Qiang.

Tang Ying nous raconte la vie dure qui était la sienne pendant son enfance dans le village. Elle portait souvent les vêtements hérités de ses frères aînés et donc était habillée à la garçonne. La vie est plus facile aujourd'hui, comme on le voit par l'aménagement de chaque maison.

 

Enfant qiang en costume traditionnel.

 

Une maison typique, dans ce village, consiste en un bâtiment à trois étages. Des viandes salées sont souvent suspendues à côté de la porte d'entrée. L'escalier qui mène au deuxième étage est parfois couvert de grosses citrouilles. Dans le grenier, des épis de maïs et des piments sont suspendus pour sécher, entourés de quelques pots de fleurs.

Le village s'est vidé d'une grande partie de ses habitants qui sont partis tenter leur chance en ville. Peu de jeunes sont restés, et on y voit surtout des personnes âgées prenant le soleil ou se livrant à un petit commerce. Une ambiance traditionnelle règne, avec les hommes portant des robes longues et des gilets de mouton, les femmes habillées de robes longues bleues ou vertes aux ourlets brodés.

Chaque printemps, Tang Ying emmène des touristes participer aux célébrations ethniques traditionnelles : la fête du culte des montagnes, Nouvel An du calendrier Qiang. Des activités religieuses qui constituent une sorte de prière pour de bonnes récoltes.

Lors des fêtes traditionnelles et des cérémonies de sacrifice, Tang Ying fredonne des chansons et exécute des danses traditionnelles avec ses concitoyens, les hommes et femmes qiang portant leurs costumes traditionnels brodés avec raffinement. Elle aime aussi participer aux concours de chant dans les montagnes, où jeunes hommes et femmes entonnent des chansons d'amour.

« Dans leur histoire, les Qiang ont subi de longues guerres et ont connu la vie en exil. C'est de ces épreuves que leur viennent leurs manières très franches de s'exprimer », raconte Tang Ying avec fierté. Elle a grandi dans le village, et c'est vrai que ses cheveux courts et sa voix assurée lui donnent l'air d'un garçon manqué.

 

 

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