CHINAHOY

1-February-2016

L’île blanche comme un dessert à la crème

 

Des marcheurs se promènent sur l'île de Wusong.

 

WEI YAO*

Chao Guixian, 48 ans, est une paysanne de la province du Jilin située dans le Nord-Est de Chine. Il y a deux ans, sa principale activité était la culture du maïs. Comme son village se trouve dans une région de haute latitude, chaque année, après octobre, rien ne poussait jusqu'au printemps à cause de l'hiver rude. Chao Guixian passait donc la saison morte désœuvrée en attendant le mois de mai et le retour des beaux jours.

Ainsi est la vie rurale dans la région du Nord-Est de la Chine. Cependant, Chao Guixian a plus de chance que les autres, car le village de Zengtong où elle habite, sur l'île de Wusong possède un trésor magnifique : ses paysages.

L'île de Wusong (l'île des frimas) se trouve le long de la rivière Songhuajiang, dans le nord de la ville de Jilin. Son paysage de frimas en hiver est célèbre dans toute la Chine. Le frimas est un phénomène atmosphérique, s'appelle aussi Shugua (glace sur l'arbre). Dans le Nord de la Chine, l'hiver arrive vers le milieu de novembre. Quand la vapeur de la rivière Songhuajiang rencontre l'air glacial, elle se transforme en glace et couvre les branches des arbres. Une fois la neige tombée, le paysage devient alors tout blanc.

À Jilin, les gens aiment aller voir les paysages de l'île. Chaque hiver, la chaîne télévisée locale annonce tous les jours les prévisions de frimas, comme les prévisions météorologiques. Lorsqu'il y a de bons frimas, les gens se rendent alors au bord de la rivière Songhuajiang pour y apprécier les paysages de glace.

L'île est un lieu où se forme facilement le frimas grâce à son environnement géographique spécial. Au milieu de la rivière, en aval d'un réservoir où l'eau garde une température relativement élevée, le brouillard se crée facilement et enveloppe tous les objets sur cette petite île de 6 km². Le vent n'y est pas assez fort pour faire tomber la glace des branches des arbres. En une nuit les petits branches prennent l'épaisseur du bras d'un homme.

 

Ballades en traîneaux attelés.

 

Hormis ces paysages enchanteurs, le village est également intéressant car il est habité par l'ethnie mandchoue. La fondue de viande du bourg de Wuliajie fait partie du patrimoine culturel immatériel de cette ethnie. Ce pot au feu est un peu pareil que la fondue à la viande mouton de Beijing, mais le premier est beaucoup plus varié. Hormis la viande, la choucroute, les vermicelles, on trouve aussi de la viande de cerf, de chevreuil, de rares gibiers de montagne et des fruits de mer. Ces dernières années, les touristes, et particulièrement les photographes amateurs, y sont de plus en plus nombreux pour admirer le paysage et goûter les spécialités locales.

Chao Guixian profite du marché touristique de plus en plus important de l'île. En 2013, elle a construit un appartement de 300 m² avec la famille de son beau-frère et ouvert une auberge traditionnelle dans l'île. Celle-ci possède le style architectural traditionnel local, comme le kang (lit de briques chauffé à la romaine), mais aussi des équipements modernes, comme une salle de bain. Elle a aussi acheté un minibus pour transporter ses clients.

Depuis qu'elle a ouvert cette auberge, Chao Guixian est occupée toute l'année. De mai à octobre, elle cultive, et lors de la saison morte, d'octobre à mars de l'année suivante, elle s'occupe de l'auberge.

 

Une auberge du village de Hantun.

 

L'auberge de Chao Guixian est enregistrée sur les sites de voyage qunar.com, ctrip.com, elong.com et baidu.com pour rendre les réservations plus pratiques. En pleine saison, ses affaires sont plutôt prospères. En 2014, elle a gagné environ 100 000 yuans, ce qui représente une grande somme pour une famille rurale chinoise.

Partout autour de l'île des frimas, il y a des auberges comme celle de Chao Guixian à Zhengtong, Hantun et dans le bourg de Wulajie. Zhao Yanfei, né dans les années 1980, est un agriculteur local. Pendant l'hiver, il est à la maison pour gérer son auberge, et au printemps, il travaille à la ville comme ouvrier. « Il y a une vintaine d'années, l'île des frimas n'était pas connue. J'avais l'impression de vivre dans un paradis blanc, un monde qui ressemble à un gâteau à la crème couvert de sucre glace. »

Les gens du cru comme Chao Guixian bénéficient du développement touristique, et ont conscience que protéger l'environnement naturel, c'est protéger leur affaire. Ces dernières années, ils font d'autant plus attention à l'équilibre entre exploitation et protection. Chao Guixian est très confiante en l'avenir : « C'est un beau village, si on le développe de façon durable, on attirera certainement encore plus de visiteurs. »

 

*WEI YAO est journaliste à Beijing Review.

 

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