CHINAHOY

30-October-2015

Poursuivre son rêve jusqu’à Kachgar

 

Xu Fenglin (au centre) devant le Monument national du Pakistan.

 

HUA ZI, membre de la rédaction

Étape importante sur la Route de la Soie, Kachgar est depuis deux mille ans un lieu d'échanges où les commerçants chinois et étrangers se rencontrent dans un mélange de cultures orientales et occidentales.

C'est lors de la première Conférence sur le développement du Xinjiang organisée en 2010 à Beijing qu'a été proposée la création d'une zone de développement économique à Kachgar. Cette ville est désormais désignée par le Conseil des affaires d'État comme la fenêtre de l'ouverture de la Chine vers l'Ouest ; elle a pour vocation de devenir un nouveau centre de développement qui accélérera le développement du Xinjiang.

« L'initiative ''une Ceinture et une Route'' rallume le rêve de Kachgar et la rajeunit », affirme Xu Feng-lin, PDG du Groupe de développement de Kachgar et directeur adjoint du Comité de gestion de la zone de développement économique de Kachgar. Il palpite littéralement d'émotion en parlant de cette stratégie nationale lancée en 2013 par le président Xi Jinping.

Le rêve de Kachgar a inspiré bien des vocations d'entrepreneur, comme par exemple celle de Xu Feng-lin, Ye Liwei et Gu Xinghui, les trois protagonistes de ce reportage.

Xu Fenglin : la meilleure opportunité de ma vie

En 2011, Xu Fenglin, âgé de 32 ans, était loin de se douter que ce voyage à Kachgar constituerait le tournant de sa vie. La zone spéciale économique de Kachgar venait seulement d'être décrétée. Le groupe CITIC (China International Trust & Investment Corporation) l'envoyait à Kachgar au sein d'une délégation chargée d'y étudier un programme agricole. Un voyage qui a posé les bases d'une coopération étroite entre le groupe CITIC et la municipalité de Kachgar.

Situé au cœur des vastes territoires du Xinjiang du Sud, Kachgar bénéficie de diverses mesures économiques d'encouragement de niveau national. Xu Fenglin en est sûr, cette ville millénaire est sur le point d'entrer bientôt dans une ère nouvelle. Il s'explique : « Kachgar est une ville importante de l'ancienne Route de la Soie, mais son âge d'or s'est terminé avec l'émergence de la Route maritime de la Soie. Par la suite, la situation s'est modifiée à nouveau avec la construction d'autoroutes, de voies ferrées, d'oléoducs et de gazoducs : le transport maritime a dû faire quelques concessions au transport terrestre. Il y a fort à parier que Kachgar redeviendra un centre du commerce sur le continent eurasien. »

Kachgar a réveillé la soif d'aventure au plus profond du cœur de Xu Fenglin, et une conversation avec son père à la vieille du Nouvel An chinois 2011 l'a encouragé à se lancer. « Ce jour-là, mon père m'a demandé à combien se montaient mes primes de l'année. Apprenant qu'elles dépassaient 300 000 yuans, il s'est un peu moqué de moi : 'Quelle contribution remarquable as-tu apportée à l'État pour mériter une somme pareille ?' Une question qui m'a déstabilisé », raconte-t-il.

Perdu dans ses pensées, Xu Fenglin a passé en revue sa vie au cours des dernières années. Né après le début de la réforme et l'ouverture, il a bénéficié des résultats de cette politique sans avoir connu la guerre ni la décennie de bouleversements (1966-1976). Embauché par le groupe CITIC à 25 ans, il est passé en une courte période par plusieurs postes intermédiaires. À moins de 30 ans, il peut se targuer de posséder tous les biens matériels dont bien des gens rêvent. « Mais je n'ai pas eu le courage d'assumer mes responsabilités quand l'État en avait le plus besoin, c'est ce qui manque à mon palmarès », avoue Xu Fenglin.

En 2012, la région autonome du Xinjiang a annoncé le recrutement dans tout le pays de personnes qualifiées de haut niveau pour trois zones de développement : Urumqi, Kachgar et Horgos. Xu Fenglin a sauté sur l'occasion, choisissant Kachgar. Un an plus tard, la Chine proposait l'initiative « une Ceinture et une Route » et la stratégie du corridor économique Chine-Pakistan. « Ç'a été la meilleure opportunité de ma vie », explique M. Xu avec émotion. Il a décidé de mobiliser toute son intelligence et son expérience acquise dans son travail au sein du groupe CITIC pour participer à la construction de la zone de développement économique de Kachgar.

Le Groupe de développement de Kachgar a lancé quantité de programmes destinés à stimuler la reconstruction de la ville : les infrastructures sont déjà bien avancées, certains travaux sont achevés ; les travaux dans le secteur public avancent à un rythme accéléré, comme par exemple la construction d'1,04 million de m² de logements neufs, le centre de services pour les citoyens, la bibliothèque et l'hôpital ; le Bâtiment du développement de Kachgar, emblème de la zone de développement, est en plein chantier…

Xu Fenglin est optimiste quant à l'avenir de Kachgar : « Kachgar va renaître de ses cendres et resplendira de nouveau, c'est certain. Les progrès scientifiques et techniques, la stratégie nationale ''une Ceinture et une Route'' sont les deux ailes qui feront décoller la ville. »

Ye Liwei : témoigner des progrès de Kachgar

« Mon grand-père avait participé à la construction de Huizhou (centre-sud du Guangdong) et mon père été partie prenante de la construction de la zone économique de Shenzhen (sud du Guangdong), alors moi je rêvais de faire comme eux, raconte Ye Liwei, qui est venu à Kachgar au mois de mars 2013. Je ne voulais pas manquer l'occasion de participer au développement de Kachgar. »

Ye Liwei est diplômé de la faculté de commerce de Brock University (Canada), avec un master de gestion des investissements financiers et de gestion marketing. Avant de venir travailler à Kachgar, il était directeur d'un fonds appartenant à la filiale de Shenzhen du China Science & Merchants Investment Management Group. « Kachgar est devenue la sixième zone économique spéciale en Chine. Je suis convaincu que la ville reprendra son statut de perle sur la Route de la Soie grâce aux investissements stratégiques de l'État », explique-t-il.

Selon lui, le financement est l'un des piliers de la réalisation de l'initiative « une Ceinture et une Route ». La bonne nouvelle pour lui, c'est que la zone de développement de Kachgar lui offre une opportunité qui correspond parfaitement à ses qualifications. « Je suis spécialiste de l'innovation financière, et l'élaboration de lois et de règlements dans ce domaine, c'est dans mes cordes. Tout le monde n'a pas cette chance », explique-t-il.

Ye Liwei a enchaîné des fonctions importantes au sein du Groupe de développement de Kachgar et de différentes filiales du groupe. En moins de deux ans, il a dirigé plusieurs projets dans la région, comme la fondation de la Banque du Xinjiang du Sud et le réaménagement des ressources touristiques du Xinjiang du Sud, participant à la conception de nombreux autres plans, comme la recherche d'investisseurs étrangers en vue de créer un fonds privé pilote, dont les projets concrets ont été approuvés par les autorités au mois de décembre 2014 et qui sont depuis publiées sur le site Internet officiel de Kachgar. En outre, il a participé au projet innovant de crédit et de financement « banque-gouvernement-bourse » qui regroupe la banque commerciale d'Urumqi et Shenyin Wanguo Securities Co., Ltd. La première tranche d'investissement de 200 millions de yuans a été versée au début de l'année.

Par ailleurs, il a participé à la rédaction du projet pilote de convertibilité internationale du RMB dans le centre financier et commercial situé à l'est de la zone de développement économique de Kachgar. « Je suis fier d'avoir apporté ma modeste contribution à l'internationalisation du RMB. C'est une joie pour moi de pouvoir témoigner de la construction et du développement de Kachgar », conclut Ye Liwei.

Gu Xinghui : par amour, mais pas seulement

Chaque fois que l'on dit à Gu Xinghui qu'il est venu à Kachgar par amour, il agite la main avec un sourire, expliquant : « Par amour, mais aussi pour ma carrière professionnelle... »

C'est lors de ses études de master de l'économie régionale à l'Université des finances et de l'économie du Xinjiang que Gu Xinghui s'est retrouvé pour la première fois à Kachgar. Il y suivait son directeur de thèse. « À ce moment-là, j'ai bénéficié d'une bourse de la Banque asiatique de développement (BAD) pour des recherches sur les secteurs d'exportation de Kach-gar », raconte-t-il. Par les enquêtes qu'il a conduites sur place, il est parvenu à la conclusion que l'avantage principal de Kachgar résidait dans sa situation géographique.

« Kachgar est situé aux confins de huit pays, dont le Tadjikistan, l'Afghanistan, le Pakistan, le Kirghizstan, l'Inde. Avec ses cinq postes-frontière de première classe, comme Khunjerab et Irkeshtam, plus un poste-frontière de deuxième classe, la ville est non seulement un nœud de transport important pour la Chine vers les pays d'Asie du Centre et du Sud, mais également un maillon essentiel du Nouveau Pont continental eurasien, s'enthousiasme M. Gu.

« Il y a 730 km de Kachgar à Bichkek, capitale du Kirghizstan, 1 260 km jusqu'à Douchanbé, capitale du Tadjikistan, et 1 420 km jusqu'à Islamabad, capitale du Pakistan. Ces trois capitales étrangères sont plus proches de Kashgar qu'Urumqi, chef-lieu du Xinjiang, ajoute-t-il. Grâce à sa situation géographique et à ses infrastructures de transport, les avantages de la ville sont plus évidents avec chaque jour qui passe. C'est pourquoi j'ai proposé un plan audacieux de création d'une zone de coopération économique frontalière à Kachgar. » Les conclusions de son programme de recherches ont été très appréciés par ses commanditaires à la BAD.

Une fois diplômé, Gu Xinghui disposait de plusieurs offres d'emploi à Urumqi. « Je suis tombé amoureux d'une jeune enseignante ouïghoure qui travaille dans un lycée du district de Shule à Kachgar, explique-t-il. Lorsque nous avons commencé à parler de mariage, la question clé était : allions-nous nous installer à Urumqi ou à Kachgar ? C'est le destin qui a tranché ; un jour, je suis tombé sur l'offre d'emploi du Groupe de développement de Kachgar. L'occasion était bonne, j'ai décidé de tenter ma chance ! »

Aujourd'hui, Gu Xing-hui cumule les postes de secrétaire du président du Groupe de développement de Kachgar et de directeur général adjoint de la société Tianyi Shenghe de développement agricole moderne. Ses connaissances professionnelles y ont trouvé un champ d'application idéal.

La pénurie d'eau qui règne dans la région fait de Kach- gar une sorte d'oasis. Le Xinjiang se situe au sixième rang mondial en termes de production fruitière, et c'est la première zone de production de fruits secs et frais en Chine. Pour le moment, Gu Xinghui s'occupe de projets de plantation à grande échelle de pistachiers. Il nous explique que le terrain et le climat du Xinjiang du Sud sont idéaux pour ce genre de plantation.

« Ce projet est représentatif de la mission et de la vision stratégique du groupe. Les investisseurs et le groupe ont affecté un total de 30 millions de yuans à la création d'un modèle d'exploitation agricole moderne.

Pour que les agriculteurs ayant perdu leurs terres puissent bénéficier de la reconstruction de la ville, le Groupe a proposé de créer des coopératives villageoises, ce qui leur permet de retrouver un revenu régulier.

« La zone de développement économique de Kachgar est ma piste d'envol vers le succès. J'ai le sentiment d'avoir réussi quelque chose, de récolter les fruits de mes efforts », dit-il en nous montrant une poignée de pistaches. Pistaches se traduit littéralement par « fruit de la joie » en chinois.

 

 

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