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Zunyi, une ville légendaire

Sur les traces de la lutte menée par nos martyrs
Le grand tournant historique qui s’est marqué par une des plus belles victoires chinoises ayant pris place à Zunyi n’a certainement pas manqué de lui donner sa beauté peu commune. La conférence la plus cruciale, le virage historique le plus important et les combats les plus héroïques de l’Armée rouge durant sa Longue Marche ont eu lieu sur cette terre magique. C’est à Zunyi que Mao Zedong, grande figure de son époque, s’était distingué en tant qu’éminent homme politique et avait permis à la révolution chinoise de sortir du creux de la vague pour connaître un revirement historique. Haut personnage militaire, il livra en cet endroit des combats dont il pouvait être fier, combats connus sous le nom des « quatre traversées de la rivière Chishui ». Également poète illustre, il écrivit ces vers passés à la postérité : « Ne croyez pas qu’il soit de fer ce défilé puissant. Maintenant à grands pas, nous franchissons ses crêtes ». La seule calligraphie que cet artiste de talent dédia aux hauts lieux de la révolution chinoise fut celle destinée au site de la Conférence de Zunyi. La culture de la Longue Marche de l’Armée rouge et tous ces « souvenirs rouges » ont donné une grande importance à Zunyi, devenue un incontournable lieu sacré de la révolution.
Le site de la Conférence de Zunyi se trouve rue Laochengzi Yinlu, dans le quartier de Honghuagang. Grâce à cette conférence, la ligne politique de Wang Ming, qualifiée d’« opportunisme de gauche » fut écartée, et Mao Zedong prit les rênes de l’Armée rouge et du Comité central du Parti. Cette Conférence changea le cours de l’histoire chinoise en sauvant l’Armée rouge et le Parti, ce dernier faisant par là même preuve de sa maturité.
Le Cimetière des martyrs de l’Armée rouge est situé sur le mont Xiaolong-shan, avenue Fenghuang. Il s’agit d’une colline calme et verdoyante, adossée à la montagne Fenghuangshan et faisant face à la rivière Xiangjiang. À l’entrée du cimetière, est dressée une stèle qui a été érigée à l’occasion du cinquantenaire de la Conférence de Zunyi, sur laquelle sont gravés huit caractères dorés, calligraphiés par Deng Xiaoping : « Immortels sont les martyrs de l’Armée rouge ». 77 martyrs reposent là, en cet endroit surnommé par la population locale la « montagne de l’Armée rouge ».
Dans le cimetière, une tombe toute ronde se démarque des autres, avec sa haute stèle sur laquelle sont gravés les gros caractères « tombeau de l’Armée rouge ». C’est ici que gît un infirmier de l’Armée rouge, Long Siquan, qui a donné sa vie pour la libération du peuple.
Vers mi-janvier 1935, l’Armée rouge arriva à Zunyi. Au cours de la mobilisation des masses, elle apprit qu’une épidémie de fièvre typhoïde se propageait au village de Sangmuya, à moins de 4 km au sud de la ville. Long Siquan, agent infirmier de l’Armée rouge, était tout de suite parti soigner les malades. Mais, lorsqu’il revint auprès de sa garnison une fois les patients guéris, sa troupe était déjà partie. Suivant les quelques instructions laissées sur un bout de papier, il prit la route sans tarder afin de rattraper sa troupe. Malheureusement, alors qu’il traversait une forêt, le jeune homme fut abattu par une balle et s’écroula dans les broussailles.
À l’annonce du décès de Long Siquan, les villageois arrivèrent de tous côtés et emmenèrent sa dépouille sur une colline pour l’y enterrer. Depuis, l’on vient souvent fleurir sa tombe. Après la Libération, le gouvernement populaire a transféré sa sépulture de Sangmuya au Mausolée des martyrs de l’Armée rouge, y ajoutant une statue de bronze du jeune homme.
Sur l’ancien champ de la bataille de Qingdupo, j’ai rencontré une femme septuagénaire qui m’a confié que l’Armée rouge lui avait sauvé la vie. Un jour, alors que sa mère la portait sur son dos, un avion ennemi surgit pour bombarder les villages. Au moment critique, sept soldats de l’Armée rouge se jetèrent sur sa mère pour la protéger. Sa mère et elle survécurent, mais les sept soldats périrent tous sans exception…
Cette terre fut également témoin d’une belle histoire d’amour, avec une cérémonie de mariage d’une durée de deux jours qui lia un homme et une femme jusqu’à ce que la mort les sépare.
Revenons en janvier 1935, au moment de l’arrivée de l’Armée rouge à Zunyi. Wang Quanyuan, âgée de 22 ans, et Wang Shoudao furent affectés tous les deux au Bureau de la sécurité. Ils se marièrent le 7e jour de l’entrée de l’Armée rouge dans la ville de Zunyi. Le soir même de leur mariage, Wang Shoudao offrit à sa nouvelle épouse un petit pistolet qu’il avait récupéré sur le champ de bataille. Selon les coutumes de leur pays natal, Wang Quan-yuan devait lui offrir en retour une paire de chaussures confectionnée par ses soins. Toutefois, comme l’armée marchait ou livrait combat sans cesse, elle n’avait pas le temps de remplir cette obligation. Le lendemain, les deux mariés quittèrent Zunyi avec leurs troupes. Six mois plus tard, le 26 juin 1935, ils passèrent la nuit ensemble, la deuxième depuis leur mariage, ce ne sera qu’ un demi-siècle plus tard qu’ils pouvront à nouveau se rencontrer.
En mars 1937, Wang Quanyuan qui commandait le régiment d’avant-garde composé de 1 300 femmes et appartenant à la « colonne ouest » de l’Armée rouge, devait affronter les forces armées de la famille des Ma dans le corridor du Hexi. Pour tromper l’ennemi, elle ordonna à toutes les combattantes du régiment de couper leurs longs cheveux et de se vêtir en homme, tout en prétendant être le 286e régiment du 30e Corps d’armée. Après plus de 40 jours de luttes sanglantes, ces femmes soldats de l’Armée rouge livrèrent une dernière bataille, la plus âpre qui fut dans l’histoire de leur régiment. Wang Quanyuan fut faite prisonnière et soumise aux tortures les plus abjectes. Un jour, elle réussit enfin à s’évader. Mais n’arrivant pas à rétablir le contact avec les organisations du Parti, elle fut contrainte de retourner dans son pays natal, et fut déclassée au rang en mendiante. Ce n’est qu’à l’âge de 76 ans qu’elle s’est vu attribuer par le gouvernement un traitement de faveur en tant qu’ancienne combattante de l’Armée rouge.
Un demi-siècle plus tard, à l’été 1982, Wang Quanyuan arriva du Jiangxi à Beijing pour demander à Kang Keqing (épouse du maréchal Zhu De) de témoigner en sa faveur, afin qu’elle puisse obtenir le rétablissement de son statut de membre du Parti. Alors qu’elle s’apprêtait à quitter Beijing, on lui dit que Wang Shoudao, alors vice-président de la Conférence consultative politique du Peuple chinois, allait arriver pour la voir. Une nouvelle qui bouleversa totalement cette femme septuagénaire. Et lors d’une réunion de la Fédération chinoise des femmes, Wang Shoudao s’était dirigé lentement vers Wang Quangyuan, qui avait prit enfin les mains de cet homme, autrefois son mari et compagnon d’armes. Ces deux personnes âgées avaient chacune à ce moment-là le visage empli de larmes…
Encore une décennie s’écoula. Wang Quanyuan se rendit à Beijing pour rendre visite à Wang Shoudao, hospitalisé. Elle n’apporta qu’un unique présent : une paire de chaussures confectionnée par ses soins. Les mains tremblantes, les larmes aux yeux, Wang Shoudao lui avait soufflé : « Tu as tenu ta promesse faite à Zunyi ! »…
La culture de la Longue Marche fait partie intégrante de la culture de Zunyi. Suivre le chemin parcouru autrefois par l’Armée rouge, ce n’est pas simplement marcher sur les pas des générations précédentes : il s’agit surtout de se repaître de cette nourriture spirituelle que nous a fournie la Longue Marche, dont l’optimisme est l’aliment le plus riche.