CHINAHOY

1-April-2015

L’expression-clé de la diplomatie chinoise

 

Le 12 novembre 2014, le président chinois Xi Jinping a rencontré son homologue américain Barack Obama au Grand Palais du Peuple à Beijing. Après leur entretien, ils ont tenu une conférence de presse commune.

 

Le 8 mars, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi, en réponse aux questions de journalistes chinois et étrangers au sujet de la politique étrangère de la Chine et de ses relations avec les autres pays, a résumé la diplomatie chinoise de l'année 2015 par l'expression « un point clé et deux axes ».

« Une Ceinture et une Route » : pas un plan Marshall

D'après les explications de Wang Yi, le « point clé » est de promouvoir la stratégie « une Ceinture et une Route » dans tous les domaines. Le ministre a indiqué que la Chine allait renforcer la communication politique avec les autres pays pour mieux faire coïncider les intérêts de chacun. Afin d'aller plus loin sur la voie d'une coopération mutuellement bénéfique, la Chine va mettre l'accent sur l'interconnexion des infrastructures, la construction de corridors économiques terrestres et l'établissement de pôles de coopération maritime. La Chine espère encore promouvoir les échanges humains et culturels, ainsi qu'accélérer les négociations concernant les zones de libre-échange. Wang Yi estime que la stratégie « une Ceinture et une Route » obtiendra des résultats rapides et contribuera au redressement global du continent eurasiatique.

Wang Yi a encore précisé que les « deux axes » correspondent à la paix et au développement, deux grands thèmes aujourd'hui dans le monde. Ainsi, de concert avec la communauté internationale, la Chine compte bien commémorer comme il se doit le 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, tirer des leçons de l'histoire et se tourner vers l'avenir, avec pour ambition de devenir une force majeure pour le maintien de la paix.

Certains considèrent que le programme « une Ceinture et une Route » est l'équivalent du plan Marshall, une assertion que Wang Yi dément. Pour lui, les deux ne sont pas de la même trempe ! Dans l'esprit de la Route de la Soie antique datant de plus de 2 000 ans, la stratégie « une Ceinture et une Route » est un résultat de l'ouverture de la Chine et de sa coopération avec l'extérieur à l'ère de la mondialisation. Il ne s'agit pas d'un outil géopolitique ; il ne faut pas la considérer selon un point de vue hérité de la guerre froide. Au cours de la promotion d'« une Ceinture et une Route », la Chine va suivre le principe « négocier, construire et partager ensemble », mener des consultations sur un pied d'égalité et respecter les choix propres de chaque pays. La Chine va prendre en considération les intérêts de chaque partie et mettre l'accent sur l'ouverture et la transparence de ses politiques. Elle prêtera attention à ce que son programme « une Ceinture et une Route » soit conforme aux stratégies de développement des différents pays et aille de pair avec les mécanismes de coopération régionale actuels. Le concept « une Ceinture et une Route » porte sur le développement commun et vise la coopération gagnant-gagnant. Il ne s'agit pas d'un « solo » joué par la Chine, mais d'une « symphonie » orchestrée par les divers participants.

Zhang Yunling, directeur du département des études internationales à l'Académie des sciences sociales de Chine, pense qu'« une Ceinture et une Route » s'avère « l'initiative de la Chine, mais le projet de tous ». « Cela montre que la Chine a choisi un chemin différent de la voie expansionniste suivie par les puissances traditionnelles », a-t-il observé.

Lors de sa visite en Mongolie l'année dernière, Xi Jinping a transmis le souhait de la Chine d'inviter les autres pays à profiter du développement chinois. Au Tadjikistan, lorsqu'il rencontrait le premier ministre de ce pays, Xi Jinping a déclaré : « De plus en plus de pays voudraient prendre le "train chinois", et ils sont les bienvenus ! Notre objectif est le bénéfice mutuel. » Zhao Mei, chercheuse de l'institut d'études américaines à l'Académie des sciences sociales de Chine, a indiqué que le programme « une Ceinture et une Route » poursuit une prospérité commune.

Selon Wu Enyuan, directeur de l'institut d'études sur la Russie, l'Europe de l'Est et l'Asie centrale à l'Académie des sciences sociales, a affirmé : « À travers la stratégie "une Ceinture et une Route", la Chine va construire une sorte de "Transsibérien", qui va certainement permettre de multiplier les coopérations techniques sino-russes ». Selon lui, la Chine se doit d'endosser plus de responsabilités, car « nous sommes les concepteurs d'un plan dont de nombreux pays attendent beaucoup », a-t-il souligné. 

Le 25 février 2015, une ligne de fret ferroviaire entre Lianyungang, ville portuaire du Jiangsu, et Almaty, ancienne capitale du Kazakhstan, a été ouverte.

 

Vers de nouvelles relations avec les pays voisins

« Construire de nouvelles relations avec ses voisins est une bonne façon pour la Chine de perdre des forces, a indiqué Zhang Yunling. C'est une démarche qui mettra à l'épreuve la patience, l'intelligence et la capacité du pays. »

Développer des relations de bon voisinage est une ligne que suit depuis bien longtemps la diplomatie chinoise. Depuis 1949, la Chine avance les cinq principes de coexistence pacifique pour entretenir des rapports amicaux avec les pays voisins. Lors du XVIIe Congrès du PCC tenu en 2007, la Chine a émis l'idée selon laquelle « les grandes puissances sont cruciales ; les voisins sont primordiaux ». Lors du XVIIIe Congrès réuni en 2012, la Chine a élevé à l'ordre du jour l'objectif d'« édifier une communauté de destin incluant la Chine et les pays voisins ». Lors d'une réunion sur les affaires étrangères organisée en 2014, Xi Jinping a, pour la première fois dans un discours, parlé des relations avec les pays environnants avant de commenter celles avec les grands pays. D'ailleurs, les membres de la nouvelle équipe de direction, directement après la prise de leur fonction, ont chacun effectué des visites dans l'ensemble des pays proches, ce qui montre bien l'importance que la Chine accorde à ses voisins.

Fang Li, directeur adjoint du Centre d'études politiques du CC du PCC, considère que l'élément le plus important pour le développement chinois s'avère la diplomatie avec les pays voisins. Résoudre les divergences et les contradictions par l'établissement de connexions économiques et former ainsi des rapports d'intérêt communs contribuera au développement commun de la Chine et des pays à proximité.

« Peu de pays ont, à l'image de la Chine, noué des liens spéciaux avec une vingtaine de voisins, a analysé Zhang Yunling. Depuis les anciens temps, les relations de la Chine avec les États limitrophes sont tel un miroir reflétant la propre situation du pays. Lorsque la Chine était prospère, ses rapports de voisinage étaient sereins ; à l'inverse, en période de difficultés, les relations étaient tendues. De nos jours, aucun pays ne voudrait entrer en confrontation avec la Chine. Édifier une nouvelle communauté de destin ne consiste pas à rétablir l'ancien ordre, mais à construire des relations internationales d'un nouveau genre. »

Pour ce qui est des responsabilités internationales que la Chine doit assumer, Wu Enyuan espère que le pays va continuer à faire tout son possible. « D'un côté, la Chine doit maintenir de bonnes liaisons avec son voisinage ; de l'autre, la Chine doit se conformer aux lois de marché. Pays en développement, la Chine compte encore beaucoup de régions pauvres. Elle doit en priorité résoudre ses propres problèmes. »

Les relations sino-américaines : en progrès constant

L'année dernière, les relations sino-américaines ont subi une série d'épreuves. Néanmoins, pour Zhao Mei, chercheur expert sur les questions américaines, les liens entre les deux pays se sont resserrés. « Chacun a pris conscience de l'importance de l'autre et de la nécessité de coopérer. Notamment dans la lutte antiterroriste et la protection de l'environnement, l'un a besoin de l'autre. Les deux grands pays doivent travailler en étroite collaboration pour tenter de résoudre les problèmes auxquels l'humanité est confrontée. »

La Chine avait proposé d'établir avec les États-Unis un « nouveau type de relations entre grandes puissances » dans lesquelles « la coopération gagnant-gagnant est le terrain d'entente majeur », avait souligné à plusieurs reprises Wang Yi, ministre chinois des Affaires étrangères.

Zhang Yunling se montre optimiste envers la coopération sino-américaine. « Il existe de nombreux mécanismes de coopération entre les deux pays sur le plan économique. Jamais dans l'histoire les liens économiques entre une puissance établie et une puissance émergente n'avaient été aussi forts. Voilà pour le volet économique. Pour ce qui est des relations dans tous les domaines, il convient de renforcer la coopération en matière de sécurité pour assurer un environnement paisible aux pays voisins. »

En ce qui concerne les divergences entre la Chine et les États-Unis, Wang Yi a déclaré avec franchise : « Édifier un nouveau type de relations entre grandes puissances est une initiative, difficile, mais impérative, car elle est conforme aux intérêts communs des deux parties et en accord avec le courant de l'époque. » Il ne faut pas se focaliser sur les problèmes mais plutôt porter son regard vers l'avenir, et ainsi pousser les relations bilatérales dans la bonne direction. Wang Yi a proposé aux deux parties de faire preuve de sincérité, de respecter la ligne fondamentale « pas de conflit, pas de confrontation » et de consolider la base qu'est le respect mutuel, pour atteindre l'objectif qui est un bénéfice mutuel.

La visite de Xi Jinping aux États-Unis, qui aura lieu prochainement, sera l'événement le plus important de l'année pour les relations sino-américaines. Cette visite permettra sans doute d'étoffer ce nouveau type de relations entre grands pays, selon Chen Jian, ancien secrétaire général adjoint de l'ONU.

Grand pays, grandes responsabilités

Cette année marque le 70e anniversaire de la fin de la Secondee Guerre mondiale. La Chine va tiendra à cette occasion un défilé militaire auquel elle conviera les dirigeants des principaux pays belligérants et pays concernés. En tant que membres des Alliés à l'époque, la Chine et la Russie organiseront ensemble les célébrations. Wu Enyuan affirme que les deux pays ont résolu les différends légués par l'histoire. Cette année, les échanges commerciaux entre les deux pays devraient atteindre 100 milliards de dollars selon les prévisions, tandis que les accords de coopération devraient se lancer dans l'optique de la Ceinture économique de la Route de la Soie.

La Chine va encore saisir l'occasion du 70e anniversaire de la fondation de l'ONU pour jouer un rôle constructif : en participant activement au Sommet des objectifs du Millénaire pour le développement et à la coopération internationale contre le changement climatique, en élaborant un Agenda de développement post-2015 en adéquation avec les intérêts des pays en développement et en prenant de nouvelles dispositions pour lutter contre le changement climatique.

Chen Jining, nouveau ministre de l'Environnement, a indiqué aux journalistes chinois et étrangers qu'il espère que les pays développés assumeront davantage leur leadership, tiendront leurs engagements en matière de réduction des émissions, fourniront des soutiens financiers et techniques aux pays en développement, aideront ceux-ci à accroître leur capacité à agir et affermiront l'ambition de la communauté internationale de mener une lutte conjointe contre le changement climatique.

« Être un grand pays responsable présente deux significations : l'une est de promouvoir le développement mondial ; l'autre est de maintenir la paix mondiale. De ces deux points de vue, la Chine est un pays responsable », a indiqué Fang Li. Ce dernier a souligné qu'il important pour la Chine de résoudre en premier lieu ses problèmes intérieurs et de gagner un certain droit de parole sur la scène internationale.

 

La Chine au présent

Liens