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Deng Fei : pour une « philanthropie via micro-blog » absolument transparente
LI YUAN, membre de la rédaction
Deng Fei, consterné d’apprendre que des enfants des campagnes reculées ne pouvaient pas manger à leur faim à l’école, parvient à émouvoir le web et à le mobiliser pour ses « déjeuners gratuits » Coup d’œil sur une œuvre caritative qui doit son existence et son succès à weibo, le micro-blog chinois.
Depuis le lancement de son projet de déjeuner gratuit pour les enfants des régions démunies chinoises, Deng Fei fait la navette entre Guangzhou, Guiyang, Changsha et Beijing.
Deng Fei, né en 1978 au Hunan, était un journaliste brillant. Au cours des ses dix ans passés comme journaliste, il a écrit une centaine de rapports d’enquête concernant la protection des droits des femmes et des enfants et d’articles où il dénonçait la corruption. Jour après jour, il renforçait ainsi sa détermination à se battre aux côtés des groupes fragiles. En 2011, un peu par hasard, Deng est passé du statut de « superviseur » un peu éloigné du terrain, pour reprendre ses termes, à celui d’organisateur de projets d’intérêt social, directement actif sur le terrain, susceptible d’être interpellé et audité par le public.
Le weibo l’aide à réaliser une œuvre d’intérêt social
Une causerie anodine est à l’origine du projet de déjeuner gratuit de Dengfei, qui l’a vite rendu célèbre en Chine.
En février 2011, Deng a appris, au cours d’une causerie avec une institutrice venant d’un district pauvre du Guizhou, que les écoliers de celle-ci n’avaient rien à manger pour le déjeuner et qu’ils buvaient souvent de l’eau pour apaiser leur faim. Deux semaines plus tard, après une enquête au Guizhou, Deng a découvert que c’était un phénomène généralisé dans les écoles situées dans les régions montagneuses démunies de cette province. À cause de la longue distance entre maison et école, les enfants ont un besoin urgent d’une cantine qui puisse leur procurer un déjeuner.
Cette fois-ci, Deng n’a pas fait de reportage là dessus au moyen d’un média traditionnel, mais a recouru au weibo, le micro-blog chinois. C’est quand, en 2010, grâce au weibo, il a aidé un père à retrouver son fils perdu depuis trois ans, que Deng a réalisé la puissance de celui-ci.
« Quand j’ai transmis en direct ce que je voyais et ce que je pensais sur weibo, les soutiens et les dons financiers sont venus comme une vague. J’ai commencé ce mouvement en étant motivé par l’ardeur des microblgueurs », a déclaré Deng.
Au début, 500 personnes du milieu médiatique ont répondu à l’appel au don d’un déjeuner aux enfants des régions montagneuses démunies de Chine. Avec la diffusion sur weibo, des stars et des entreprises ont également commencé à y participer. Deux mois plus tard, l’école primaire Shaba dans le district de Qianxi du Guizhou est devenue la première école chinoise à profiter du déjeuner gratuit. Et six mois plus tard, 110 écoles dans 13 provinces jouissaient du même avantage.
Le grand succès du projet de déjeuner gratuit a vite suscité l’attention du gouvernement central. En octobre 2011, le Conseil des affaires d’État a décidé de mettre en place un programme national de nutrition pour les élèves des zones rurales. Depuis, les autorités centrales affectent chaque année plus de 16 milliards de yuans à ce programme, dont environ 26 millions d’élèves répartis dans 680 districts et villes à travers le pays sont bénéficiaires.
Wang Zhenyao, directeur de l’Institut des études sur les services d’intérêt public de l’École normale supérieure de Beijing, a hautement apprécié le projet de déjeuner gratuit : « L’activité caritative est une puissance douce. Le projet de déjeuner gratuit en est un parfait exemple. Dès le début, Deng Fei et ses partisans n’expriment pas de plaintes ou de critiques. Au contraire, ils se lancent dans ce mouvement sans arrière pensée. C’est difficile pour les jeunes, mais ils réussissent à faire cela. »
Selon Deng, avec la participation de l’État dans le projet de déjeuner gratuit, lui et ses amis vont continuer leur activité charitable. « Pour que ces 16 milliards de yuans soient mis pleinement en valeur, il faut encore des investissements dans les installations connexes qui ne sont toutefois pas dans le budget des autorités centrales. Nous ferons de notre mieux pour fournir des aides à cet égard », a ajouté Deng.
Une oeuvre caritative absolument transparente
Jusqu’ici, le projet de déjeuner gratuit a été mis en pratique depuis à peu près deux ans, rassemblant des dons financiers pour un montant de plus de 37 millions de yuans et bénéficiant à environ 40 millions d’élèves. Bien qu’il y ait depuis longtemps des activités caritatives en Chine, il est rare d’en voir d’aussi importantes et aussi étendues dans le temps. Deng attribue cela à leur mode d’opération.
« J’ai réalisé dès le début que nous ne pouvions pas gérer nous-même les dons financiers », a souligné Deng. En tant que journaliste d’enquête, il est très sensible à l’argent. Après une comparaison bien réfléchie, Deng a choisi d’ouvrir un compte à la Fondation de l’éducation et du bien-être social de Chine, qui ne demande que 5% du total comme frais de gestion.
Avant de fournir des aides financières à une école, Deng va l’inspecter avec des confrères locaux et des volontaires. Puis, il présente la situation réelle de l’école sur weibo. Toutes les sommes de dons sont rendues publiques à la fois sur weibo et sur le site Web officiel du projet de déjeuner gratuit. Afin d’éviter la corruption, toutes les écoles aidées doivent ouvrir un compte sur weibo pour expliquer chaque jour les dépenses et publier des photos du déjeuner. Si les conditions ne le permettent pas, il faut envoyer un message au volontaire qui le transmet ensuite sur weibo.
« Tous les efforts sont faits pour garantir la transparence de l’utilisation des fonds et la confiance des donateurs et des volontaires de notre équipe. C’est seulement ainsi que nous pouvons avoir constamment des dons et que les enfants peuvent se débarrasser de la faim », a indiqué Deng.
Récemment, le ministère chinois des Affaires civiles a déclaré que les grandes fondations devaient publier leurs tableaux financiers chaque trimestre, mais selon Deng, le projet de déjeuner gratuit peut publier son tableau financier chaque semaine.
Grâce à l’efficacité, la large participation et la transparence de gestion, le projet de déjeuner gratuit est hautement apprécié dans la société. Actuellement, il est important de développer ce projet de façon durable en améliorant son fonctionnement et ses processus.
Honnêteté, ouverture et transparence : indices de l’œuvre caritative moderne
Selon Deng, il ne peut désormais plus faire marche arrière sur le chemin qu’il a entamé, car trop de puissance le pousse à aller de l’avant. Durant sa carrière de journaliste, il ne s’était jamais senti si fatigué mais jamais si heureux non plus.
« Je suis plein du sentiment de succès. Auparavant, la façon dont j’influençais la société passait par les lecteurs. Aujourd’hui, je peux me servir de weibo et de nombreuses sortes de ressources pour résoudre des problèmes. La Chine ne manque pas de ceux qui écrivent, mais de ceux qui agissent, a dit Deng. Il est possible que plus nous puissions sensibiliser et indigner davantage de gens encore en poursuivant une travail de type supervision de la société, par des rapports d’enquête ou des articles contre la corruption; mais si nous faisons appel à l’amour et à la bonté, c’est peut-être une meilleure façon encore de changer celle-ci. »
Actuellement, le projet de déjeuner gratuit s’engage dans la bonne voie, et Deng Fei se lance dans son troisième projet de protection de l’enfance : l’assurance-maladie grave pour les enfants dans les régions rurales chinoises.
Avec l’émigration vers les villes, il est courant que les parents dans les régions rurales chinoises travaillent dans une grande ville et que leurs enfants soient laissés dans la bourgade natale. Deng a réalisé qu’en plus de la nourriture, un grand nombre des enfants des campagnes avaient besoin d’une assurance médicale.
A présent, l’assurance santé des enfants des campagnes vient du nouveau système rural d’assurance maladie par cotisations. Mais à cause du faible niveau des cotisations et du remboursement de l’assurance, les frais médicaux doivent encore toujours être assumés pour l’essentiel par la famille et les problèmes pour les enfants gravement malades et issus de familles pauvres ne peuvent pas être fondamentalement résolus.
Un projet d’assurance maladie grave, complémentaire du nouveau système rural d’assurance maladie par cotisations, a été lancé par Deng Fei, des personnalités caritatives et des compagnies d’assurance commerciales. Il couvre les enfants entre 0 et 14 ans à travers le pays, sans aucune restriction sur la sorte de maladie. La compensation maximum est de 200 000 yuans, et le remboursement est en moyenne supérieur à 90%. Tous les frais pour l’achat de l’assurance sont payés totalement par les dons sociaux. Hefeng, district défavorisé au niveau national de la province du Hubei, a été choisi comme le premier site pilote pour mettre en place ce projet.
Dans le milieu de la « philanthropie via micro-blog », Deng Fei est censé être le leader. Il a la conviction que la crédibilité d’une organisation reconnue d’utilité publique ne dépend pas de sa renommée ni de l’argent, mais de l’honnêteté, laquelle repose sur l’ouverture des informations. Par conséquent, il estime que l’honnêteté, l’ouverture et la transparence sont les indices de qualité de l’œuvre caritative moderne.
À la cérémonie d’ouverture du projet, Deng a bien expliqué comment garantir la transparence des comptes et exprimé sa volonté d’être audité par les cabinets de comptabilité. « Il se peut que nous ne soyons pas assez professionnels, mais il est sûr que nous ne détournons aucun sou. »
Le projet d’assurance maladie grave est géré comme suit : la fondation collectionne des dons auprès des personnalités caritatives et des entreprises; un groupe de volontaires constitué d’experts du milieu de l’assurance évalue et choisit une compagnie d’assurance; la compagnie d’assurance se charge de la compensation; et le gouvernement local soutient le développement ainsi que l’exécution du projet.
« Dans ce mode d’opération, la fondation, comme la compagnie d’assurance commerciale, chacune est spécialisée dans son secteur d’activité », a souligné Zhang Qingfeng, porte-parole du projet.
À l’époque de weibo, Deng a pu mesurer la vitesse de rassemblement des ressources humaines et matérielles. Il est prêt à faire face à des « conflits et désagréments », car il sait que cela est un prix à payer pour le développement de l’œuvre caritative populaire. Mais il tient à une oeuvre de micro philanthropie absolument transparente.