CHINAHOY

6-November-2012

Le juge de quartier, pour diminuer les procès ----Interview accordée par Chen Jie

 

JIAO FENG, membre de la rédaction

 
 

Je suis juge assistante à la chambre Shuangqiao du tribunal de l’arrondissement Chaoyang de Beijing. En 2008, j’ai obtenu mon diplôme de maîtrise de l’université des Sciences politiques et de Droit et j’ai commencé à travailler à la chambre Jiuxianqiao du même tribunal. En juillet 2011, j’ai été mutée à la chambre Shuangqiao. Deux postes de juges de quartier allaient y être établis. L’un serait installé dans le canton Guanzhuang, l’autre au canton Changying.

À l’instar de la chambre Jiuxianqiao, la chambre Shuangqiao prend en charge les procès du quartier Shuangqiao. Auparavant, j’avais appris que la chambre Shuangqiao pratiquait un système de responsabilité des juges. Le tribunal a divisé la zone sous la compétence administrative du quartier Shuangqiao en cinq parties confiées à différents juges. Je prends en charge les affaires juridiques du canton Changying.

Chaque jour, je dois traiter beaucoup de litiges civils. Ce sont des litiges entre les membres d’une famille ou entre voisins. Les relations entre les parties impliquées sont extrêmement complexes. Mais les jugements prononcés ne peuvent que définir les responsabilités et ne peuvent pas résoudre entièrement les contradictions. En fait, un grand nombre de différends peuvent se résoudre grâce à la médiation sans avoir à passer par le tribunal. En vertu des nouvelles interprétations judiciaires encadrant la médiation judiciaire publiées par la Cour populaire suprême, la médiation des affaires civiles reconnue juridiquement a la même valeur légale que les verdicts juridiques.

Mon poste de juge est situé dans un quartier où se trouvent beaucoup de logements sociaux. Il y a notamment un bâtiment dans lequel deux foyers doivent partager un même emplacement de mur extérieur pour installer leurs appareils de climatisation. Les premiers foyers qui s’y sont installés n’étaient pas au courant de cette situation. Ils ont occupé tout l’emplacement pour y installer leur climatiseur. Le foyer voisin n’a donc plus de place pour installer sa machine, et la réinstallation nécessite des frais. Des litiges se sont produits ainsi. J’ai traité quatre ou cinq cas similaires. Pour éviter de nouveaux litiges, nous avons organisé un jugement qui ferait jurisprudence. Les locataires et le personnel de la société de gestion de l’immeuble ont pu y assister. Après la médiation, les parties en litige ont signé un accord de conciliation reconnue par la justice. Deux foyers ont partagé les frais de réinstallation de la machine. Entre les deux machines, une barre a été fixée.

Un juge de quartier a un rôle modèle, parce qu’il a de nombreux auditeurs. Ce sont les habitants locaux. Le juge effectue beaucoup d’analyses, explique les relations juridiques dans un procès et répond aux questions posées par les habitants. Il arrive souvent qu’un procès fasse jurisprudence pour des cas similaires.

Chen Jie, juge assistante, travaille au poste de juge du quartier Changying.
 

Après un an de travail, je pense que mon poste me permet d’interagir avec les habitants, de connaître leur situation. Cela établit des conditions favorables pour assurer une bonne médiation et fournir aux habitants le service complet attendu par la médiation judiciaire.

Le travail de juge de quartier m’a permis de mieux comprendre la société, ce que je ne pourrais pas savoir en étant assise derrière un bureau. Je vis en ville depuis mon enfance et je ne connaissais pas bien la vie rurale, ni les conflits familiaux. Le quartier Shuangqiao se trouve à la zone rurbaine de Beijing. Une grande partie sous sa compétence administrative est rurale. Si je ne connaissais pas bien la vie de ses habitants, comment pourrais-je juger leurs affaires ? Par mon travail et mes connaissances sur ces gens, je sais utiliser leur langage pour expliquer les lois, sans énoncer seulement les clauses d’un air solennel. Ainsi, nous établissons une communication et ils sont plus susceptibles d’accepter mes points de vue.

La création de postes de juge facilite la vie des habitants locaux. Pour ceux qui veulent demander des conseils en matière légale, les frais d’avocat sont prohibitifs et les tribunaux ont une atmosphère intimidante. Mais l’accès aux juges de quartier est facile. Ici, la communication est menée sur un pied d’égalité, ils ne sont pas embarrassés. Mon poste est situé dans un quartier résidentiel. Toute personne peut prendre rendez-vous pour demander des conseils. Le juge est chargé de répondre à ses questions.

Ces dernières années, avec l’amélioration du système légal, le concept de légalité est bien ancré dans l’esprit de la population. Les Chinois s’habituent à utiliser l’arme légale pour défendre leurs droits. Cela est une preuve de progrès social. Pourtant, les procès coûtent quelquefois très cher et prennent du temps. Les postes de juges de quartier offrent des moyens pratiques et modérés pour résoudre les litiges. Par exemple, lorsqu’un conflit se produit, les parties très fâchées viennent nous demander de résoudre le problème. Mais une fois que chacun reconnaît ses torts et qu’il n’est pas nécessaire de résoudre le litige par une procédure judiciaire, ils estiment aussi que l’arbitrage de quartier est un moyen pratique et peu cher qui peut éviter beaucoup d’ennuis.

Pour les gens ordinaires, la médiation est une option peu coûteuse et pratique qui peut résoudre efficacement les différends. Cela correspond à leurs besoins. C’est pourquoi la médiation avant le procès est une méthode efficace adoptée par les tribunaux des bas échelons. Par exemple, j’avais dû traiter en un an plus de 300 procès. Depuis que j’ai commencé à travailler à ce poste de juge, j’ai traité moins de 300 procès en un an. Malgré le contexte d’augmentation des affaires juridiques dans l’ensemble de la société, les jugements diminuent dans mon quartier.

Le système des postes de juges a maintenant été généralisé dans l’arrondissement Chaoyang, de bons résultats ont été enregistrés. Bien que cette pratique se trouve encore en phase d’essai et ne comprenne que la médiation civile et des conseils juridiques, le développement de ce système dépend de nos tentatives.

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