CHINAHOY

30-October-2015

À la découverte du Sud du Guizhou

 

Les femmes shui boivent ensemble après le rituel de sacrifice. (MA GENGPING)

 

Voyage à la découverte du Sud du Guizhou, une terre où de nombreuses ethnies minoritaires cohabitent en préservant leur culture traditionnelle.

LU RUCAI, membre de la rédaction

La préfecture autonome de Qiannan de la province du Guizhou, située dans le Sud-Ouest de la Chine, héberge plusieurs ethnies minoritaires, telles que les Buyei, les Miao, les Shui, les Yao, ainsi que des Han.

La première étape de notre visite est le district autonome shui de Sandu, dans le sud-est de la préfecture. C'est là que se tient la plus importante fête des Shui, le Duan.

Des traditions bien perpétuées

Les Shui, ethnie minoritaire en Chine, ne compte que 300 000 à 400 000 représentants. La plupart d'entre eux vivent dans le district de Sandu. Ils ont leur propre langue, une écriture bien à eux, ainsi qu'un calendrier et des fêtes particuliers. Ils ont su préserver leur us et coutumes traditionnels. Le Duan est la plus importante des six fêtes annuelles célébrant la maturation des céréales et le Nouvel An. D'août à octobre, la fête se prolonge sur 49 jours : la fête la plus longue du monde ! Les célébrations comprennent des courses hippiques, des danses accompagnant des combats de taureaux, des danses avec tambours de cuivre et des danses de lusheng (orgue à bouche). On profite de la fête pour se rendre des visites entre parents et amis, on danse et on boit.

Cette année, la fête commençait le 20 septembre. Afin de promouvoir plus largement la culture shui et cette fête, le district de Sandu s'est chargé d'organiser une cérémonie d'ouverture grandiose. Les Shui des villages voisins, tous affublés de leurs vêtements de fête, doivent effectuer jusqu'à deux ou trois heures de marche pour arriver sur la place du site touristique Chandan de Gulu. Les villageois miao des environs sont eux aussi invités à donner des spectacles. Pan Zhui, une femme shui du village de Xiajie, m'a expliqué que la broderie à crin de cheval est un art traditionnel des Shui et une décoration importante des vêtements shui. Les femmes utilisent les longs crins de la queue de cheval et des fils de soie pour broder vêtements et chaussures. Les petites filles shui apprennent cet art folklorique dès leur enfance. Sa fille de 12 ans maîtrise déjà la broderie traditionnelle. Pan Zhui a mis un an à broder les vêtements et les chaussures qu'elle porte. Avec des amis à elle, elle nous a présenté la danse de toast ; sa parure brodée de fils d'argent scintille joliment au soleil. Elle m'a ensuite invitée à loger chez elle, m'offrant même de me broder une paire de chaussures. Malheureusement, je n'avais pas le temps d'aller lui rendre visite et j'ai dû décliner l'invitation, mais j'étais très émue par son hospitalité.

Les spectacles des troupes miao présentés le même jour m'ont autant éblouie. Les miao des environs se divisent en deux branches cousines dont les coutumes diffèrent un peu. Yang Tonglan, 21 ans, est enseignante dans une école maternelle de village. Alors qu'elle était encore étudiante, elle s'était chargée avec ses camarades de l'université de l'organisation de deux troupes de spectacle miao. Son rêve est de participer à la transmission de génération en génération de la culture et des mœurs miao. Des troupes de spectacle ont effectué la danse traditionnelle duoyuliang, une danse qui accompagne normalement les travaux agricoles et exprime le culte de la lune des Miao.

Le rite de sacrifice qui marque le début du Duan s'est tenu dans le parc national forestier du mont Yaoren. Les 18 patriarches des villages shui, représentants de l'ethnie, offrent des sacrifices aux ancêtres et aux dieux. Après ces rituels, les villageois et les invités s'assoient autour de tables dressées au bord de la rivière pour prendre le repas traditionnel et boire de l'alcool de riz. On entend retentir avec une belle régularité l'appel à xiuxiu (faire « cul sec » en shui). La célébration de Duan est pour les hommes l'occasion de boire à l'excès, tandis que leurs femmes à la vertueuse réputation doivent veiller leurs maris ivres jusqu'au réveil.

En 2006, cette fête de l'ethnie shui a été inscrite au patrimoine immatériel national. Grâce à ce nouveau statut, la tradition sera mieux préservée et transmise. La forêt du mont Yaoren, bien que classée parc national, abrite plusieurs villages dont les habitants mènent une vie rustique. Le gouvernement local prévoit de déplacer ces communautés pour leur permettre d'accéder au confort moderne.

 

La cascade Wolong à Xiaoqikong. (MA GENGPING)

 

L'ancien village yao

Le district de Libo est une autre partie de la préfecture autonome de Qiannan. Le bourg de Yaoshan est principalement habité par des personnes de l'ethnie yao. On les appelle les baikuyao, littéralement les « yao portant des pantalons blancs » en référence aux larges pantalons qui composent le costume traditionnel. L'UNESCO a décerné à ces Yao au pantalon blanc un satisfecit pour la préservation de leur culture traditionnelle, les qualifiant de dépositaires des traditions ancestrales. Ces Yao sont passés directement de la société primitive à la société moderne, un parcours dont ils conservent les caractéristiques de leur transition récente d'une société matriarcale vers une société patriarcale. Comme ces villages sont éparpillés dans les montagnes, le gouvernement leur accorde des aides visant à les sortir de la pauvreté. Récemment, l'état a dépensé 130 millions de yuans pour reloger les habitants de deux villages. Cette façon d'aider les habitants a commencé dès la fin des années 1980 et se poursuit jusqu'à nos jours. Plus de 800 foyers yao ont déménagé vers une zone moins montagneuse dans les appartements financés par le gouvernement.

Même lorsqu'ils bénéficient de logements modernes, les Yao préservent leurs structures claniques ancestrales, ainsi que les activités culturelles et sportives traditionnelles comme la toupie, le tir à l'arc, la danse aux tambours de singe, la broderie, les combats de coqs. Les cérémonies de mariage, d'obsèques et d'autres coutumes très particulières se perpétuent. Non loin du village, certaines granges attirent l'attention des visiteurs. Il faut dire que le canon de l'architecture locale veut que les granges soient perchées sur quatre pilotis. Chaque colonne est entourée au fond de quatre pots de terre aux parois lisses, préservant l'intérieur de la grange à la fois des rongeurs et du ruissellement. Ces granges, situées à l'écart des habitations, ne sont jamais fermées à clé car personne ne vole les denrées des autres. La stabilité et l'harmonie de la société yao démontrent aux visiteurs la force de ses traditions.

 

Des filles miao en coustume traditionnel. (MA GENGPING)

 

Paysages privilégiés

Le district de Libo abrite le site touristique de Xiaoqikong très célèbre en Chine. Bien qu'il soit proche des villages yao, il présente un aspect très différent.

En juin 2007, les districts de Libo (Guizhou), Shilin (Yunnan) et Wulong (municipalité de Chongqing) ont été officiellement portés sur la liste du patrimoine naturel mondial pour leurs reliefs karstiques. Celui de Libo est le plus typique du Sud de la Chine et ses caractéristiques particulières font justement la gloire du site touristique de Xiaoqikong.

Près de l'entrée du site on peut visiter un pont construit en 1836. C'est ce pont à sept arches qui a donné son nom au lieu : xiao signifie petit, qi signifie sept, kong, arche. Jusqu'à aujourd'hui il matérialise la frontière entre la province du Guizhou et la région autonome du Guangxi.

Dans cette vallée d'une largeur d'un kilomètre et longue de 12 km environ, on trouve grottes, forêts, lacs, cascades et étangs. Après le pont de Xiaoqikong, notre itinéraire longe l'étang Hanbi, puis deux chutes d'eau, une forêt, le lac Tianzhong Yuanyang, l'étang Wolong, etc. À chaque pas on est soufflé par la beauté et la variété des points de vue.

L'étang Wolong est un site à ne manquer sous aucun prétexte, pour sa forme caractéristique en demi-lune et le rideau de gouttes bleu-vert d'une superbe cascade qui tombe à la verticale. Une centrale hydroélectrique avait été construite sur le site, mais elle a été démantelée ainsi que d'autres installations artificielles lors du dépôt de candidature au patrimoine mondial. Le site a repris son aspect ancien.

Quelques jours avant notre visite, le célèbre aventurier cathodique Bear Grylls est venu à Libo avec son groupe pour tourner un épisode de Bear Grylls : Mission Survie. Il a escaladé et franchi la cascade de la Vallée verte en trois minutes. Il s'est ensuite essayé au mode survie dans la forêt de Xiaoqikong. Bear Grylls avait le choix entre quatre districts situés dans le Guizhou, et c'est Libo qu'il a choisi pour la beauté de ses paysages et sa diversité écologique. Avis d'un connaisseur !

 

La Chine au présent

 

 

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