CHINAHOY

29-September-2014

L’histoire ne doit pas être oubliée

 

L'exposition sur la victoire de la Guerre contre l'agression japonaise au Musée national de Chine à Beijing. (CFP)

 

On oublie trop souvent que la Chine a lutté contre le fascisme durant la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, il faudrait se souvenir de l'histoire pour mesurer l'importance de la paix aujourd'hui.

JIAO FENG, membre de la rédaction

Près de 70 ans se sont écoulés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ceux qui ont vécu cette tragédie ont aujourd'hui vieilli ou ne sont déjà plus de ce monde. Pourtant, cette guerre qui causa des malheurs indicibles aux peuples à travers le globe ne doit pas être, et ne sera pas, oubliée.

Le 2 septembre 1945, sur le cuirassé USS Missouri (BB-63), le Japon signa officiellement les actes de capitulation, un évènement ayant marqué la victoire sur le fascisme.

Une soixantaine de pays et régions furent impliquées dans cette lutte à mort qui allait déterminer le sort du monde ; deux milliards de personnes furent touchées. Le nombre de militaires et civils qui moururent dans cette guerre est compris entre 55 et 70 millions. Quant à la Chine, qui fut un important théâtre des opérations de lutte contre les forces d'invasion japonaises, elle enregistra plus de 35 millions de victimes.

Unir les musées sur la Seconde Guerre mondiale

L'histoire est un manuel. Toute nation qui oublie son passé trahit l'histoire et se trahit elle-même. « Les musées et mémoriaux constituent une deuxième école grâce à laquelle la population peut comprendre son histoire », déclare Li Zongyuan, conservateur adjoint du Musée de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l'agression japonaise (MGRPCAJ) et vice- président de la Société chinoise sur l'histoire de la Guerre de résistance contre l'agression japonaise.

Le MGRPCAJ appelle à créer une union internationale des musées sur la Seconde Guerre, pour défendre la vérité historique et promouvoir la paix dans le monde. « Au fil des échanges entrepris ces nombreuses années entre notre musée et d'autres commémorant également la Seconde Guerre, nous avons compris de plus en plus clairement que sauvegarder la réalité historique ne doit pas dépendre de la responsabilité d'un seul musée. Il faut que tous ceux qui font preuve d'une vue objective sur cette guerre mondiale de lutte antifasciste partagent leurs visions. En conséquence, nous proposons que les musées et mémoriaux sur la Seconde Guerre établis dans les divers pays du monde se rassemblent en un groupe pour mener plus d'échanges et de coopérations, en vue de préserver ensemble les faits historiques et de propager la notion de paix », explique M. Li.

En 2013, le MGRPCAJ a tenu une exposition au monument d'Auschwitz-Birkenau en Pologne, à laquelle ont assisté des responsables d'autres musées concernant la Seconde Guerre. Y a été proposée la création d'une union internationale des musées sur la Seconde Guerre, une idée qui a fait l'unanimité. Suite à cette rencontre, le MGRPCAJ a donc envoyé des lettres d'invitation aux musées sur la Seconde Guerre de Russie, Pologne, Singapour, Corée du Sud, Japon et des États-Unis, avec l'espoir que l'union soit officialisée l'année suivante, pour le 70e anniversaire de la victoire des Alliés.

La contribution de la Chine dans le combat contre le fascisme

La Guerre de résistance contre l'agression japonaise ne doit pas être considérée comme un événement isolé : elle fait partie intégrante de la Seconde Guerre mondiale. La Chine y fut le principal théâtre de batailles en Orient. « Cette Guerre de résistance a grandement usé et affaibli la puissance des militaristes japonais, frappant et contenant la majorité des forces terrestres et navales japonaises pendant de longues années, confirme Li Zongyuan. En particulier, après l'éclatement de la guerre du Pacifique, la plupart des troupes japonaises ont été stoppées sur le front chinois, sans moyen d'attaquer ni l'Union soviétique au nord ni les régions au sud, ce qui a permis de réduire les dommages de l'URSS, des États-Unis et de la Grande-Bretagne. Ainsi, la Chine a mené une coopération et assistance stratégique effective envers les peuples du monde engagés dans cette lutte contre le fascisme. »

Le 18 octobre 2013, le New York Times a publié un article rédigé par le professeur Rana Mitter de l'université d'Oxford intitulé The World's Wartime Debt to China, dans lequel on peut lire : « La résistance de la Chine contre le Japon est l'un des grands épisodes malheureusement méconnus de la Seconde Guerre mondiale. La Chine fut la première puissance alliée à s'insurger contre les pays de l'Axe. Pourtant, elle a recueilli beaucoup moins de crédit pour son concours à la guerre du Pacifique que les États-Unis, la Grande-Bretagne ou encore l'Union soviétique, qui s'est jointe aux Alliés sur le front asiatique en août 1945. La contribution chinoise est tombée dans l'oubli peu après le conflit, comme si cette révélation s'avérait inconvenante. » Dans son livre Forgotten Ally, il affirme : la Seconde Guerre mondiale ne s'est pas déclenchée en Europe, mais en Chine, avec l'incident du pont Marco Polo, une histoire bien connue des Chinois.

Néanmoins, lors d'une interview accordée à la presse chinoise, Rana Mitter a convenu que « de plus en plus de spécialistes reconnaissent le rôle positif que joua la Chine dans la Seconde Guerre mondiale ».

Selon des données historiques, pendant la Seconde Guerre, un million de troupes terrestres japonaises furent contenues sur le front chinois. Le 9 septembre 1945, 1,28 million de soldats japonais se rendirent. Mais la Chine paya un lourd tribut à cette guerre. En plus des 35 millions de militaires et civils chinois qui périrent, la Chine subit des pertes économiques directes supérieures à 100 milliards de dollars, ainsi que des pertes économiques indirectes évaluées à 500 milliards de dollars.

Le passé comme guide pour l'avenir

Selon un vieux dicton chinois, « la mémoire du passé peut guider l'avenir ». En d'autres termes, il ne faut pas oublier les évènements survenus antérieurement pour pouvoir en tirer des leçons. Dans son discours prononcé le 7 juillet dernier lors de la cérémonie pour commémorer le 77e anniversaire de l'éclatement de la Guerre de résistance contre l'agression japonaise, le président Xi Jinping a déclaré : « Nous sommes réunis ici pour tenir une cérémonie de commémoration solennelle, dans le but de rappeler l'histoire, de rendre hommage aux martyrs, de chérir la paix et de rester vigilant à l'avenir. Nous poursuivrons résolument la voie du développement pacifique dans laquelle notre pays s'est engagé et protègerons indéfectiblement la paix dans le monde. »

Petit rappel historique : après l'incident de Mukden qui eut lieu le 18 septembre 1931, les militaristes japonais entrèrent de force dans le Nord-Est de la Chine. Le 7 juillet 1937 dans la nuit, les militaires japonais stationnés à Fengtai, qui manœuvraient près du pont Marco Polo au sud-ouest de Beiping (nom de Beijing à l'époque), demandèrent, sous prétexte de la « disparition » d'un soldat, l'autorisation de pénétrer dans le chef-lieu du district de Wanping pour y effectuer des recherches. Mais la garnison chinoise refusa fermement cette requête. Le 8 au matin, les militaires japonais lancèrent des attaques contre la 29e division de l'armée chinoise, qui riposta pour se défendre. Voici comment s'est déroulé l'incident bouleversant du pont Marco Polo, qui a marqué le début de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l'agression japonaise. Tout au long de cette longue guerre, les militaristes japonais perpétrèrent d'horribles crimes : massacres effroyables de civils et militaires chinois faits prisonniers, parfois même lors des entraînements au combat à la baïonnette ; esclavage sexuel des femmes chinoises ; emprisonnement de civils chinois dans des camps de travail forcé au Japon ; usage d'armes bactériologiques et chimiques sur le front chinois. Ces atrocités plongèrent les peuples d'Asie dans la détresse et laissèrent la population japonaise dans un profond traumatisme.

Après la guerre, le Japon, en tant que pays criminel et vaincu, aurait dû se repentir de ses fautes et mener un examen de conscience pour sauvegarder la paix durement gagnée. Malheureusement, la droite japonaise dément les faits historiques et ignore les innombrables vies innocentes qui ont été arrachées, en niant, en déformant, voire en embellissant la guerre d'invasion. Elle revendique le droit du Japon à l'autodéfense collective et porte peu d'intérêt à sa Constitution pacifiste. Des actes que condamnent fermement les peuples d'Asie autrefois victimes de la guerre, dont les Chinois et les Coréens du Sud comme du Nord.

« La paix représente l'idéal commun des peuples du monde. Les atrocités commises par les militaristes japonais durant la Seconde Guerre menacèrent gravement la paix de l'humanité. Tous les gens épris de paix se soulevèrent contre ces infamies et contre l'agression, afin de maintenir la stabilité dans le monde et de préserver la dignité humaine. En niant, en déformant, voire en embellissant son passé d'envahisseur, le Japon souille l'âme des martyrs et profane la dignité des vivants, un comportement qui doit être critiqué et sanctionné », soutient Li Zongyuan.

Bien sûr, garder l'histoire à l'esprit ne signifie pas cultiver l'idée de vengeance, ou un soi-disant nationalisme. « Le nationalisme, dans son sens patriotique étriqué, prône la xénophobie. Ne pas oublier l'histoire, c'est défendre la vérité historique, sauvegarder la paix et la dignité humaine, ainsi que contribuer à un environnement favorable au développement pacifique du monde », conclut Li Zongyuan.

En février dernier, lors de la 7e session du 12e Comité national de l'Assemblée populaire nationale, deux nouvelles dates de commémoration ont été fixées : le 3 septembre, comme Journée de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l'agression japonaise ; le 13 décembre, comme Journée nationale d'hommage aux victimes du massacre de Nanjing.

Le président Xi Jinping a déclaré : « L'histoire est le meilleur des manuels, révélant ce qui est le mieux pour l'humanité. Le peuple chinois conserve un souvenir impérissable des malheurs causés par la guerre, et de fait, poursuit sans relâche sa quête de paix. »

Rappeler l'histoire n'a pas pour objectif de perpétuer la haine, mais de permettre aux nations d'en tirer des leçons. Ainsi, il convient de chérir la paix et la stabilité chèrement acquises pour construire un avenir meilleur.

 

La Chine au présent

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