CHINAHOY

29-April-2014

Lyon, première escale de la visite de Xi Jinping en France

 

Le 26 mars dernier, le président Xi Jinping et le ministre français des Affaires étrangères inaugurent le Musée de l'histoire de l'Institut franco-chinois de Lyon. (Xinhua)

DAI YING*

Pourquoi le président Xi Jinping a-t-il choisi Lyon comme première escale lors de sa visite en France au mois de mars dernier ? Quel charme particulier présente cette ville ?

En étudiant minutieusement cette métropole de 1,27 million d'habitants, troisième ville en France, vous trouverez que son histoire est liée à un certain moment à celle de la Chine.

Un institut centenaire

En 1900, éclata en Chine la révolte des Boxeurs (Yihetuan, qui signifie littéralement en français : le mouvement de l'union de la justice et de la concorde), opposé aux missionnaires étrangers. Le mouvement s'acheva par la répression militaire des huit nations alliées, y compris la France. La Chine fut contrainte de signer un traité humiliant selon lequel elle devait payer une grosse indemnité. Comme 1900 est l'année Gengzi dans le calendrier lunaire chinois, les indemnités sont appelées les « indemnités Gengzi ».

L'Institut franco-chinois de Lyon fut créé en 1921 avec des indemnités Gengzi et il se trouve sur la colline de Fourvière. Sur le linteau de sa porte sont gravés quatre caractères chinois : 中法大学 (Institut franco-chinois). Aujourd'hui, le site de l'Institut franco-chinois, qui était jadis le fort Saint-Irénée désaffecté, est devenu un monument historique ouvert au public toute l'année.

En juin 1921, le gouvernement chinois de Beiyang hypothéqua les droits d'enregistrement, les frais de dossier et le droit de construction du chemin de fer Yunnan-Chongqing pour acheter des munitions à l'étranger. En apprenant cette nouvelle, les étudiants chinois de l'Institut franco-chinois, sous la direction de Zhou Enlai, furent les premiers à réagir contre cette décision. En dépit de la victoire des étudiants protestataires, les autorités françaises et le gouvernement chinois de Beiyang ordonnèrent le gel des « fonds de subsistance » accordés aux étudiants chinois du mouvement Études-Travail. Le responsable de l'Institut franco-chinois manqua également à sa parole et expulsa ces étudiants de l'Institut.

Pour défendre leurs droits à étudier et à subsister, Zhou Enlai et d'autres conduisirent les étudiants chinois à se révolter pour dénoncer les actions de l'Institut, en menant des négociations, en organisant des manifestations, et même en occupant les bâtiments de l'Institut.

Après la répression menée par les autorités françaises, 104 étudiants chinois du mouvement Études-Travail qui occupaient l'Institut franco-chinois furent rapatriés de force. Chen Yi, qui deviendra ensuite le premier ministre des Affaires étrangères de la RPC, était parmi eux. De retour en Chine, ils livrèrent les luttes révolutionnaires chinoises. Ceux qui étaient restés en France, dont Zhou Enlai, créèrent la branche européenne du PCC pour continuer à mener les luttes des étudiants chinois.

Entre 1921 et 1946, 473 étudiants furent diplômés de l'Institut franco-chinois. Parmi eux, il y eut des artistes comme le maître Chang Shuhong, la femme peintre Pan Yuliang et le poète Dai Wangshu ; des scientifiques comme Zheng Dazhang, étudiant de Marie Curie et fondateur des études radiologiques chinoises.

Après une trentaine d'années de fermeture, l'Institut franco-chinois a été rouvert dans les années 80 avec le soutien des anciens étudiants.

Sur les traces de Deng Xiaoping

En mai 1975, Deng Xiaoping, qui était alors vice premier ministre du Conseil des affaires d'État (gouvernement chinois), retourna en France. C'est ici que commença sa carrière révolutionnaire.

Il fut le premier dirigeant chinois à visiter un grand pays occidental après que la France fut le premier grand pays à établir des relations diplomatiques avec la Chine. En plus de sa mission diplomatique, il s'agissait aussi pour Deng Xiaoping d'un voyage nostalgique. Un voyage pour aider son vieil ami et camarade, Zhou Enlai, qui se débattait encore contre la mort sur son lit de douleur, à exaucer un désir caressé depuis longtemps : revenir dans le lieu où ils avaient passé une partie de leur jeunesse.

Cette année-là, Deng Xiaoping avait 71 ans. Il n'avait que 16 ans quand il posa le pied en France pour la première fois.

Le président Valéry Giscard d'Estaing accueillit chaleureusement Deng Xiaoping à Paris. Il lui dit qu'il espérait que cette visite réveillerait ses souvenirs de France, se rappelle Du Xiuxian, journaliste de l'agence de presse Xinhua (Chine nouvelle).

Durant la première moitié de 1925, Deng Xiaoping fut le commissaire de Lyon de la branche européenne du PCC, chargé des affaires du PCC et de la Ligue de la Jeunesse ainsi que du mouvement des ouvriers chinois.

À l'été de cette même année, Deng et les autres membres de la branche européenne du PCC conduisirent les étudiants chinois du mouvement Études-Travail, les ouvriers et les ressortissants chinois à mener une lutte de soutien au mouvement du 30 mai 1925 en Chine. Cette lutte ébranla la France, et même l'Europe. Les autorités françaises, inquiètes, déclenchèrent très vite une vague d'arrestations et de rapatriements.

La renaissance d'une ville

En fait, les relations entre Lyon et la Chine remontent à fort longtemps. Lyon a longtemps été qualifiée de capitale de la soie, ce qui a un double sens.

D'un côté, Lyon est le lieu où se terminait la Route de la soie en Occident, et la ville fut témoin de la prospérité de la Chine d'antan. En 1902, le premier département de chinois fut créé dans une université lyonnaise. D'un autre côté, Lyon fut un pôle de l'industrie de la soie en Europe. De la Renaissance jusqu'au XIXe siècle, cette industrie a toujours été son pilier.

Au milieu du XIXe siècle, Lyon a connu le premier changement de son histoire moderne. La montée en gamme de l'industrie de la soie, l'essor de la construction automobile, de l'industrie chimique et de l'industrie métallurgique, ainsi que le développement du secteur bancaire ont insufflé une nouvelle énergie au développement de Lyon.

Le premier chemin de fer français fut construit à Lyon, et c'est d'ailleurs l'une des premières voies ferrées au monde. Quand Zhou Enlai et Deng Xiaoping étaient en France, les navires marchands, le train et les usines représentaient la modernité de Lyon.

Mais finalement, sa plus ancienne industrie, le textile représenté par la soierie, tomba en décadence ; elle fait désormais partie du passé. En 1998, Lyon a été inscrite sur la liste du patrimoine mondial par l'UNESCO. De la Place des Terreaux, cœur de la ville, au nord, vers la Croix-Rousse, qui est l'ancien centre de la soierie.

Mais, loin d'être oubliée, comme d'autres vieux centres industriels, Lyon a commencé sa nouvelle vie. Cela est peut-être dû à sa force en matière de sciences et d'éducation. La ville est le deuxième centre d'éducation supérieure en France, abritant quatre universités générales ainsi que d'autres écoles réputées. S'y est formé un réseau associant des entreprises et des établissements d'enseignement.

Selon le site Internet de la ville de Lyon, son succès est dû aux industries émergentes très compétitives au niveau international : la biotechnologie, les produits numériques de loisirs, la mode, l'environnement, et l'industrie chimique. L'arrivée de géants de la chimie a fait aujourd'hui de l'ancienne capitale de la soie un corridor chimique.

Lors de sa visite à Lyon, le président Xi Jinping a visité le centre de recherche BioMérieux, connu pour ses diagnostics et la détection de micro-organismes industriels. Son siège se trouve tout près de la ville. BioMérieux est présent en Chine depuis presque 30 ans. Il y a trois ans, l'entreprise a installé à Shanghai son troisième centre de production, après ceux de France et des États-Unis.

Le président Xi Jinping a laissé une trace à Lyon. La Chine ne pourrait-elle pas s'inspirer de l'expérience de la ville, par rapport aux changements qu'ont connus ses industries ?

 

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