CHINAHOY

1-December-2015

Wang Chi-Yuan : rien de mieux que le silence »

LU RUCAI, membre de la rédaction

Wang Chi-Yuan, peintre chinois exilé au États-Unis surprend par la fraîcheur et la simplicité de ses œuvres.

Lors de la séance de vente automnale 2015 consacrée aux œuvres du peintre Wang Chi-Yuan (1893-1975) organisée à Hong Kong par la maison China Guardian, toutes les peintures mises aux enchères ont été vendues. Parmi elles, Fruits, la dernière œuvre du peintre, a été adjugée à 240 000 dollars hongkongais, soit 30 fois plus que le prix prévu.

Réalisée en automne 1974, Fruits est la dernière œuvre de Wang Chi-Yuan d’après les experts. Sur la peinture, l’artiste a laissé ce poème : « Les plantes portent des fruits, les feuilles jaunissent. Le vent se lève et les feuillent mortes virevoltent dans le vent. Je flâne dans les champs. Je peins les fruits qu’on va vendre au marché dans les paniers. Les peindre me rend heureux. Les Chinois peuvent être fiers. Lorsqu’on lit beaucoup, on le peut comprendre. » Dans son livre Brève Introduction À L’Origine Des Beaux-Arts, Wang Chi-Yuan écrit : « Les beaux-arts sont une expression des phénomènes sociaux ou une capacité... Les beaux-arts sont divisés en deux types : le premier est statique et le deuxième est en mouvement. » Ses œuvres appartiennent au premier. Les natures mortes étaient une forme de prédilection de Wang Chi-Yuan. Ses sujets et ses techniques reflètent le goût des lettrés chinois pour la peinture traditionnelle mais aussi pour les natures mortes à l’occidentale.

La famille de Wang Chi-Yuan est originaire de l’Anhui, mais Wang Chi-Yuan est né à Wujin, (aujourd’hui Changzhou dans le Jiangsu). Il n’a pas appris la peinture de façon académique dans son enfance. En 1912, après avoir obtenu un diplôme de l’école normale locale, il enseigne les beaux-arts dans une école primaire de la campagne. En automne 1913, il est admis à l’Institut de dessin de Shanghai, ancêtre de l’École des beaux-arts de Shanghai où il étudie pendant un an. À la fin de ses études, il reste comme professeur et devient vice-directeur de l’école. L’année où il étudia dans cette école est le seul temps qu’il consacra pour apprendre la peinture dans sa vie. En automne 1919, il intégre l’Association des Chevaux célestes, créée pour les artistes chinois de peinture occidentale par le célèbre peintre Liu Haisu.

En 1926, Wang Chi-Yuan se rend à Tokyo et à Paris pour étudier les beaux-arts. À son retour à Shanghai, il se lance dans les études de la peinture occidentale. En 1928, il organise avec d’autres artistes une association baptisée Yiyuan. La même année, il organise une exposition de œuvres de Pan Yuliang, peintre chinoise formée à Paris, lorsque celle-ci revient en Chine.

Wang Chi-Yuan a fait beaucoup pour la promotion des beaux-arts en Chine. En 1931, il intégre l’association Juelan espérant réveiller l’art traditionnel chinois par l’Art Nouveau. En 1936, dans la préface qu’il écrit pour l’exposition des chefs d’ œuvre contemporains de la Chine, Cai Yuanpei fait l’éloge des efforts déployés par Wang Chi-Yuan et Liu Haisu pour redresser l’art moderne chinois.

En 1941, lors de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l’agression japonaise, Wang Chi-Yuan se rend aux États-Unis pour y établir l’Institut de la peinture Huamei, une école pour apprendre la peinture traditionnelle et la calligraphie chinoise. Il vit aux États-Unis jusqu’à sa mort en 1975, enseignant et vendant ses peintures.

Chacune de ses œuvres : natures mortes, croquis, peintures à l’huile, aquarelles, peintures à l’encre, possède un style différent. Certaines sont à la hauteur d’un chef d’œuvre de grand maître, d’autres sont du niveau d’un débutant. Wang Chi-Yuan disait : « En peinture occidentale, il faut s’exercer longtemps pour atteindre la maturité technique. Si l’on possède déjà une certaine habileté technique, il faut témoigner de ses sentiments. Lors de la création artistique, on doit mettre en valeur ses capacités techniques mais aussi ses sentiments. Copier ou imiter n’est pas un bon moyen pour réussir. » C’est pourquoi ses œuvres débordent de naturel.

Le talent artistique de Wang Chi-Yuan ne se borne pas à la peinture de fleurs et de fruits. Ses peintures d’animaux illustrent aussi son style à la fois chinois et occidental. Dans ses tableaux, les hibous juchés sur les branches, et les poissons nageant dans l’eau sont très vivants.

Déjà dans les années 1920 et 1930, Wang Chi-Yuan jouit d’une grande notoriété dans le Sud de la Chine. Il se classe parmi les plus grands artistes chinois de l’époque aux côtés de Cai Yuanpei, Liu Haisu, Huang Binhong, Lin Fengmian, Zhang Daqian, Pan Yuliang, etc. Pendant les études de Liu Haisu en Europe, Wang Chi-Yuan devient directeur par intérim de l’École des beaux-arts de Shanghai. Il y est professeur et directeur des études pendant 12 ans.

Aux États-Unis, il tient une exposition avec Zhang Daqian. En 1954, ce dernier achète une parcelle de terre au Brésil et y fait construire un jardin chinois : le Jardin des Huit Vertus. Une des œuvres de Wang Chi-Yuan : Les bambous dans le Jardin des Huit Vertus a été peinte là-bas. La peinture est le témoin de cette amitié entre les deux artistes longue d’un demi-siècle.

Lors des ventes printanières 2015 organisées par la maison China Guardian, une quarantaine de ses œuvres ont été vendues. Parmi elles, Pommes sur le carton, Lecture, etc. Le portrait à l’huile Lecture a été adjugé pour 805 000 yuans. Sur son autoportrait, une inscription : « Pour le calme, rien de mieux que le silence. »

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