CHINAHOY

1-December-2015

Deux Français au Hanyuqiao

SÉBASTIEN ROUSSILLAT, membre de la rédaction

 

Rencontre avec les deux candidats français à la 8e édition du concours international de chinois Hanyuqiao pour les collégiens-lycéens.

C’est à Kunming, capitale du Yunnan, que nous rencontrons Nils Foix-Colonier et Corentin Stephan, les deux candidats français. Nils, 17 ans, vient de Nantes, Corentin, 19 ans, de Bordeaux. Ils représentent la France à ce grand concours annuel organisé par l’Institut Confucius où se retrouvent près de 400 candidats de 80 pays différents.

Ils sont en Chine depuis 15 jours. Ce n’est pas leur première fois puisque Nils y a passé « plus de la moitié de sa vie jusqu’à aujourd’hui » comme il dit : ses parents étaient professeurs au lycée français de Beijing de 2005 à 2014. Il a donc vécu en Chine de 7 à 16 ans. Aujourd’hui, il fait une terminale S au lycée Jules Verne de Nantes, fait chinois en section orientale, et se prépare à rentrer en prépa MPSI.

Corentin a lui aussi déjà vécu en Chine. Il a participé à un échange entre le lycée Montaigne de Bordeaux et la Wuhan Foreign Language School en 2013. « J’ai passé 10 mois dans un lycée chinois et le week-end dans une famille d’accueil. J’étais en totale immersion », nous explique-t-il. Son père travaillait également à Shenzhen. Corentin fait actuellement une prépa ECS et y continue le chinois en LV2.

L’important, c’est de participer

Malgré leur emploi du temps bien chargé d’élèves de terminale et de prépa, ils ont quand même souhaité participer au concours. C’est après une sélection individuelle en France courant mai, qu’ils ont été retenus parmi les 65 candidats pour former une équipe : « En fait, on n’a pas vraiment eu le temps de répéter ni de se voir avant la compétition parce qu’on n’habite pas dans la même ville. On ne s’est préparé que deux jours », nous explique Nils. Mais peu importe, « l’important c’est de participer » et c’est dans cet esprit que nos deux candidats sont allés au Han-yuqiao.

« À la différence de certains pays qui s’investissent beaucoup pour faire gagner leurs candidats et les font répéter plusieurs mois à l’avance, on n’a pas eu trop de pression et on a pas mal improvisé. C’est surtout parce que notre emploi du temps à l’école ne nous permet pas de trop nous investir dans le concours », nous explique Corentin, dont les livres et cahiers envahissent le bureau de la chambre où nous les rencontrons. Finalement, ils sont arrivés 9e sur les 26 équipes européennes. Plutôt pas mal pour un continent dont le nombre d’équipes est le plus important et où la Russie écrase un peu tout le monde avec le nombre d’équipes (4) qu’elle envoie au concours. « On se dit que sans préparation véritable et beaucoup d’improvisation, arriver à se classer 9e, c’est déjà bien », ajoute-t-il.

Alors, même s’ils n’ont pas réussi à se qualifier pour les épreuves finales, les visites et les rencontres avec les autres candidats compensent : « C’est rare d’avoir l’occasion de trouver 80 pays différents réunis dans un même endroit et d’avoir l’occasion de rencontrer autant de gens pendant deux semaines dans un pays si lointain que la Chine. Je crois que ce genre de concours, ça n’existe nulle part ailleurs », commente Corentin.

L’ONU en miniature

Et c’est vrai que lorsque l’on arrive à l’hôtel de l’École normale du Yunnan où sont basés les candidats, on a l’impression qu’il s’y tient une réunion internationale : on entend parler toutes les langues, on voit des costumes de tous les pays et lors de la finale télévisée, on se rend compte du nombre de pays représentés au nombre de drapeaux différents agités par le public.

La logistique déployée pour l’organisation du concours est également impressionnante. Il faut s’imaginer une armada de 400 candidats, professeurs-accompagnateurs, bénévoles chinois et caméramans qui se promènent dans Beijing et Kunming pour les visites. Il faut s’imaginer le nombre de chambres à réserver, le nombre de bus et de billets d’avion pour acheminer toute la smala jusqu’aux endroits des visites et faire le trajet Beijing-Kunming. Et il faut voir le dispositif sécurité déployé autour des jeunes : policiers avec boucliers, camions blindés et gardes à l’entrée de l’hôtel.

Le grand gala de la finale, apothéose du concours, où les cinq candidats finalistes s’affrontent pour le premier prix, est l’occasion d’un grand spectacle comme on n’en fait qu’en Chine : une centaine d’acteurs sur scène, des chants et des danses à n’en plus finir, des costumes à paillettes, un leitmotiv sur la Route de la Soie et la Route du Thé du Yunnan avec ça en plus que cette année, le spectacle était agrémenté d’une partie où les candidats de l’Azerbaïdjan, de l’Allemagne et des pays d’Afrique ont présenté leurs performances artistiques.

« Même si on n’a pas participé au grand gala parce qu’on n’avait pas trop le temps ni l’envie, ce concours nous a permis de faire des rencontres. On a pas mal échangé avec les candidats francophones du Canada, du Luxembourg ou de la Suisse mais aussi avec ceux d’autres pays comme les Italiens ou les Américains. On a aussi bien sympathisé avec les Allemands et on a fait pas mal de visites ensemble », nous raconte Nils.

« C’est super intéressant de pouvoir rencontrer des gens qui viennent de pays où on aurait peut-être jamais eu l’idée d’aller. Cette année, il y a deux candidats du Malawi, c’est la première fois que je rencontre des gens de ce pays. Ils sont super forts en arts martiaux », ajoute Corentin.

L’école buissonnière

Hormis le concours, qui ne prend finalement que 3 jours pour départager les candidats pour la finale, le reste consiste en des répétitions (auxquelles nos candidats n’ont pas participé) et des visites culturelles. « Les visites étaient intéressantes, mais le problème, c’est qu’elles étaient trop courtes et surtout, qu’on devait tourner des rushes pour l’émission du concours. Alors on prenait plus de temps à dire « Je t’aime la Chine ! » devant les caméras qu’à vraiment visiter. Je sais qu’en Chine, ils aiment ça et que c’est pour les téléspectateurs, mais personnellement, je suis plus habitué à des voyages en famille. Quand on vivait en Chine avec mes parents, on partait souvent en excursion et on visitait évidemment plus de choses », nous raconte Nils.

« Moi non plus, je ne suis pas trop fan de tout le tralala des photos et du fait que le concours soit télévisé. On est toujours sollicité pour être pris en photo ou filmé. En fait, on passait plus de temps à prendre des photos qu’à visiter vraiment. Par exemple, dans la Cité interdite, on a passé une demi-heure à prendre des photos et faire des tournages et seulement 5 minutes à visiter », ajoute Corentin.

« Évidemment, avec un groupe de 400 personnes, c’est difficile de bien visiter et tout le monde n’est pas en mode “j’aime les musées et les visites”, donc on a pris notre mal en patience », tempère Nils.

Mais le professeur-accompagnateur de l’équipe allemande, un Chinois originaire de Kunming, a pris le taureau par les cornes devant l’impatience de ses élèves et décidé d’emmener nos deux candidats français et leurs amis allemands faire des visites hors-groupe. « Par exemple, quand tout le monde partait à droite sur la Grande Muraille, nous, on partait à gauche pour quitter le groupe. Ou bien quand les organisateurs disaient “rendez-vous à telle heure si vous êtes perdus”, on faisait exprès de se perdre pour avoir plus de temps pour visiter », nous explique Corentin en rigolant.

C’est donc dans une ambiance bon enfant que s’est passé le Hanyuqiao pour nos deux candidats qui sont depuis rentrés chez eux. Corentin projette de retourner en Chine quand il sera en 4e ou 5e année d’école de commerce. « Je continue le chinois parce que ça peut m’être utile pour mon travail plus tard. Je pense revenir faire 6 mois en Chine et 6 mois dans un pays anglophone après mes études », explique-t-il. Nils quant à lui, souhaite devenir professeur de mathématiques, passer l’agrégation et enseigner à l’étranger. Il n’exclut pas de revenir travailler en Chine mais a envie de vivre dans d’autres pays avant.

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