CHINAHOY

28-April-2015

Les 7 villages antiques du Hebei

 

Le village pittoresque de Daliangjiang.

 

Les 7 villages antiques du Hebei recèlent de trésors d'architecture et d'histoire à ne pas manquer.

SHEN YUWEN*

Les « 7 villages antiques » dans le district de Jingxing, à Shijiazhuang (capitale du Hebei), ont été nommés « villages traditionnels chinois ». Leurs disposition, architecture et coutumes ont été préservées malgré le développement fulgurant de la Chine, de sorte qu'ils sont aujourd'hui devenus des paradis pour les citadins en quête de ruralité.

Liangjiacun, le paradis de la pluie

Le village de Liangjiacun, bâti sur le flanc d'une montagne, s'est peu à peu dépeuplé avec l'exode des jeunes ruraux pour la ville, mais l'architecture y vaut le détour. Les maisons y sont organisées comme un camp romain, séparées par de petites venelles. Les toits et les pavés du village ont vu passer plusieurs siècles d'histoire.

Le village a gardé son cachet. Pendant ma visite, plusieurs vieillards ont insisté pour m'inviter chez eux et m'offrir le thé traditionnel. Cela m'a fait chaud au cœur de voir que les personnes âgées des campagnes ont conservé cette coutume ancestrale.

Au plus profond d'une ruelle du village, j'ai découvert une cour avec une grande porte antique décorée. Un vieillard m'a expliqué que c'était un ancien temple des ancêtres. Bien que les murs soient couverts par les mauvaises herbes et les toiles d'araignées, on pouvait quand même apercevoir les anciens murs paravents et les portes en bois sculptées. La structure de la cour et les sculptures de chauve-souris, ainsi que le motif tigré des tuiles, sont aussi toujours visibles.

De l'autre côté de la ruelle, se trouve une petite cour jadis certainement très jolie, mais aujourd'hui délabrée, dans laquelle son proprétaire n'habite plus. À notre demande pour visiter, il nous a ouvert la porte de sa vieille cour chaleureusement. À l'intérieur de celle-ci, se cachait une maison en bois à deux niveaux couverte de plantes grimpantes. On trouve peu de maisons à étage dans le Nord de la Chine, c'est donc un exemple architectural vraiment particulier. La petite cour, la maison à étage, les fenêtres sculptées m'ont rappelé ce vieux poème chinois : « J'écoute la pluie pendant une nuit tranquille dans une maison à étage ».

J'avais entendu dire que dans le village de Liangjiacun, tout le monde connaissait les arts martiaux. J'ai donc demandé à un petit garçon de me faire une démonstration. Sous les encouragements de son grand-père, ce petit timide m'a finalement montré ses prouesses et est parti se cacher dans les jupes de son aïeul alors que j'applaudissais.

 

La porte des remparts anciens de Tianchang.

 

Le village de Tianchang

Avant de me rendre au village de Liangjiacun, j'avais visité un autre vieux village, celui de Tianchang. Il se trouve à côté de la route nationale 307. Par rapport au tranquille Liangjiacun, ce bourg est plus prospère : on y trouve des foires, des boutiques et des petits restaurants. Le bourg est entouré de remparts antiques. Le mur d'enceinte du village est percé de portes en trois endroits. La première a été reconstruite à l'identique, la deuxième tombe en ruine et la troisième, qui date de la fin des Qing, a été bien préservée dans son état d'origine. En haut se trouve un petit temple, dont le toit chinois simple est très joli. La bourgade possède également un temple dédié au dieu des remparts de la ville. En général, il n'y avait que les municipalités importantes qui pouvaient construire ce type de bâtiment.

En marchant vers le centre du bourg, les bruits de foire se font de plus en plus lointains. De vieilles maisons de notables s'alignent de chaque côté de la rue. Parmi celles-ci, une vieille maison d'un ministre d'État sous les Ming (1368-1644) ; l'ancienne mairie du bourg composée de plusieurs cours dont les murs sont ornés de sculptures. On peut également trouver un ancien collège, des temples et les ruines d'un ancien four à céramiques.

Depuis la grande porte restaurée, on peut se faire une idée de l'organisation des maisons accolées les unes aux autres, de la profondeur des cours et observer les chats jouer aux acrobates sur les toits. Dans les ruelles, les habitants interpellent les visiteurs qui flânent et prennent des photos pour discuter avec eux.

Ce bourg n'est séparé de la route nationale que par une rivière qu'enjambe un pont antique, sur lequel passent encore les voitures. Les rambardes avec leurs lions sculptés ont été abîmées par les intempéries. Certains lions sculptés ont été restaurés, mais de façon très grossière. On voit bien qui des artisans modernes et antiques sont les meilleurs.

Le village à flanc de montagne : Xiaolongwo

Le village de Xiaolongwo a été séparé en deux parties par la nationale 307. Le vieux bourg se situe dans la partie sud et regroupe un tiers de tous les bâtiments du village. Celui-ci a été bâti le long de la montagne. Les habitations, construites en pierre des monts Taihang sont communes au style traditionnel du Nord de la Chine. Certaines cours ont été construites suivant le relief ; sous celles-ci, les gens ont creusé des caves.

Le village n'est pas grand, mais sa disposition le fait ressembler à un labyrinthe d'Escher. S'y perdre est très facile. Lors de ma promenade, j'ai lâché le groupe avec lequel je visitais et me suis perdu. Mon petit détour m'a fait découvrir un ancien théâtre. L'arrière-scène était fermée à clef, mais j'ai pu entrapercevoir des valises de costumes et d'accessoires dans la cour.

Un autre endroit d'intérêt dans le village est un groupement de niches boud-dhistes dans la montagne. L'ensemble est encore assez sauvage et n'a pas été aménagé. La plupart ont été abîmées, mais il en reste encore quelques-unes en bon état, notamment celle d'un magnifique Boddhisattva qui a vu passer les siècles et a survécu miraculeusement à plusieurs épisodes violents de l'histoire.

 

Les statuts de bouddhas du village de Xiaolongwo. (PHOTOS : SHEN YUWEN)

 

Un château de pierre

Le village de Daliangjiang est considéré comme le plus beau parmi les 7 villages antiques du Hebei. Son charme est unique. On y retrouve tout ce qui fait un village du Nord de la Chine : le caquètement des poules et les aboiements des chiens, les cheminées des maisons, les vieux qui se dorent la pilule et les enfants qui font semblant de se battre sur la scène du vieux théâtre.

À l'entrée, on peut admirer une porte ronde et une stèle qui date du règne de l'empereur Yongzheng des Qing. Daliang-jiang a lui aussi été bâti sur le coteau de la montagne. Les maisons en pierre sont plus hautes que la porte des remparts et donnent l'impression d'avoir été construites sur le mur d'enceinte.

Ce village possède une longue histoire, dont les pavés des rues tortueuses, polis par des siècles de piétinement, sont les témoins. La scène du théâtre est elle aussi en pierre. Sur le fond de scène, une petite porte voûtée permet d'accéder à l'arrière-scène.

On peut également visiter l'ancienne maison d'un ancien lauréat de l'examen militaire impérial. Ce bâtiment possède plusieurs cours superposées. Malheureusement pour moi, la maison était fermée lorsque j'y suis allé.

Toutes ces maisons, les unes sur les autres le long du flanc de la montagne, ressemblent à un château fort. Lorsque l'on se tient dans la cour d'une demeure, on voit le toit de la maison du voisin en dessous. Et si l'on est dans la cour de quelqu'un qui habite le haut du village, alors on voit les montagnes alentours, ce qui rend la disposition particulière du village plus évidente encore.

Le poste de commandement

Le village de Lüjiacun se situe au fond d'une vallée. Bien caché au cœur de la montagne, il est encore plus tranquille que les autres. La plupart des maisons sont centenaires. Celle des frères Lü, qui ont donné leur nom au village, est situé à l'entrée du village. C'est la plus vieille demeure du coin. Elle date des Ming (1368-1644). La maison possédait une caverne qui servait de moulin à huile. Elle est aujourd'hui abandonnée.

La bourgade est calme comme les montagnes de Taihang. Les roches, les arbres, les maisons, tout y est comme dans une peinture traditionnelle chinoise. Les vieux, assis sur les marches en pierre du pas de la porte, bavardent, pendant que les gamins courent et s'amusent à côté.

Pourtant, ce village n'a pas toujours été aussi tranquille. Pendant la Guerre de résistance contre l'agression japonaise, le bataillon de Deng Xiaoping et Liu Bocheng a séjourné au village en février 1938. Dans la cour de la maison Fushou, ils ont orchestré la bataille de Changshengkou, où 180 soldats japonais ont été anéantis. Pendant cette époque-là, beaucoup de jeunes du coin ont participé aux combats, et certains y ont laissé leur vie.

Là où l'empereur passa la rivière

Le village de Diducun est limitrophe de la passe Niangzi (passe stratégique de la Grande Muraille à Beijing). C'est le plus éloigné des 7 villages antiques du Hebei. Le mur d'enceinte du village est percé de trois portes et s'organise selon un carré. Les routes du village sont rectilignes. J'ai eu la chance d'être invité par un habitant à visiter sa maison. Celle-ci est déjà très ancienne, mais tellement solide que je ne doute pas qu'elle puisse tenir debout un bon siècle encore.

Dans la cour, un vieil homme élégant qui se démarquait des habitants du cru m'a raconté les histoires de Diducun. Par rapport aux autres villageois, il parlait un très bon mandarin avec l'accent pékinois. L'hôte de la maison m'a expliqué que c'était son oncle. Le vieil homme avait travaillé à Beijing pendant sa jeunesse et était revenu au village pour y passer sa retraite.

Le nom du village signifie en réalité « le village où l'empereur passa la rivière ». On dit que l'empereur Liu Xiu des Han de l'Est (25-220) y aurait traversé la rivière Weishui. Beaucoup de maisons du village sont aujourd'hui laissées à l'abandon. Certaines seulement sont encore habitées. Une dame m'a demandé d'entrer dans sa maison pour l'aider à lire les trois caractères calligraphiés inscrits sur la porte intérieure de sa cour. L'inscription que plusieurs personnes n'avaient pas réussi à déchiffrer semble être les caractères « Longévité et Santé » en écriture zhuan (écriture de forme ronde).

L'épopée de Yu Qian, le fidèle officier des Ming

La plupart des maisons des villages antiques des monts Taihang possèdent un point commun : la pierre. En effet, la région en regorge. Ce style architectural est particulièrement prédominant dans le village de Yujiacun.

Celui-ci est le seul où il est nécessaire d'acheter un billet pour entrer. Il a été construit par les descendants de Yu Qian, officier fidèle des Ming. Ce dernier, poète à ses heures, avait écrit : « Je n'ai peur de rien, ni même d'être brûlé, car je veux être un honnête homme. » Et il a fait honneur à ce poème, puisqu'il fut l'un des héros qui protégèrent la Cité interdite lors de son siège par les Oïrats au XVe siècle.

Le petit-fils de Yu Qian quitta la capitale sous le règne de l'empereur Chenghua des Ming, et avec sa famille, s'installa là où est actuellement le village de Yujiacun. C'est donc la 24e génération de Yu qui habite ici aujourd'hui. Les descendants de Yu Qian ont creusé des carrières et utilisé les pierres de la région pour leurs maisons, les champs en terrasses et des outils en pierre. À l'entrée du village, le pavillon de la Fraîcheur est une imitation de pavillon en bois, mais en pierre. Il est classé parmi les sites historiques et culturels du patrimoine national.

Le village de Yujiacun est comme un musée d'art lithique. Cette petite bourgade de 0,25 km² possède 3 500 m de chemins de pierre, plus de 4 000 maisons, dont un millier ont été construites sous les Ming et les Qing. 90 % des habitants sont les descendants de la famille Yu. Leur style de vie, traditionnel et loin du bruit des grandes villes, a été amplement préservé.

 

*SHEN YUWEN est rédacteur du site likefar.com.

 

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