CHINAHOY

29-September-2014

L’économie chinoise face au défi de la croissance

 

LI DAOKUI*

L'économie chinoise se trouve actuellement dans une période de transition caractérisée par un double défi : d'une part, il est nécessaire de remplacer les anciennes forces motrices de la croissance par de nouvelles ; d'autre part, il faut mener des réformes institutionnelles de fond.

Autrefois, l'exportation et l'immobilier portaient l'économie chinoise. Mais ces deux secteurs cèdent progressivement la place à de nouveaux moteurs de croissance. C'est précisément la raison pour laquelle la progression de l'économie chinoise a décéléré dernièrement. Je gage que ce ralentissement n'est que temporaire. En d'autres termes, l'économie chinoise fait face à un défi : celui de faire rebondir la croissance. Cette dernière, autrefois à 10 %, est tombée aux alentours des 7-7,5 %. Toutefois, si toutes les réformes à venir réussissent, l'accroissement du PIB s'accélèrera. Notons que le PIB par habitant en Chine ne représente que 19 % de celui enregistré aux États-Unis. Ainsi, la Chine présente encore un fort potentiel de croissance économique.

Alors quels sont les nouveaux moteurs de la croissance chinoise ? Tout d'abord, l'investissement dans les infrastructures destinées à la consommation. Cet investissement se met progressivement en place. Mais le financement de ces infrastructures nécessite d'opérer un changement radical : passer du financement bancaire à court terme vers l'émission d'obligations à long terme ou d'obligations à faible taux d'intérêt. Nous devons accomplir cette réforme pour encourager l'émergence de cette nouvelle force motrice.

Le deuxième secteur porteur, c'est la consommation privée, qui peu à peu repart à la hausse. La contribution au PIB qu'apporte la consommation privée augmente de 0,7 % chaque année. À ce rythme, d'ici trois à cinq ans, la part de la consommation privée représentera 50 % du PIB, contre 30-35 % à l'heure actuelle.

Le troisième moteur consiste en ce que j'appelle l'« écologisation » de l'économie et des capacités de production. Les secteurs sidérurgique, pétrochimique et de l'énergie électrique requièrent tous d'énormes investissements pour améliorer leurs méthodes de production.

Pour ce qui est de la réforme en Chine, je pense que celle-ci se fera en deux temps. Le pays se trouve actuellement dans la première phase, qui se traduit par une réforme « du haut vers le bas ». Elle remet en ordre les actions gouvernementales, lutte contre la corruption, réduit l'intervention de l'État dans les activités économiques, notamment en matière d'approbation et de gestion des affaires des entreprises.

Actuellement, cette réforme « du haut vers le bas » porte un réel intérêt au système de droit en Chine. Prochainement, sera élaboré un document extrêmement important, qui annoncera les grandes lignes de la réforme radicale du système juridique national. Ce texte aura un impact considérable sur l'environnement des affaires en Chine.

La deuxième phase de la réforme commencera d'après moi dans quelques années. Il s'agira cette fois-ci d'une réforme « du bas vers le haut », qui tentera notamment de remanier les entreprises d'État. De nos jours, l'accent est mis sur la réforme « du haut vers le bas » ; celle « du bas vers le haut » commence tout juste à voir le jour. Mais soyons francs, les officiels doivent adopter de nouveaux modes de gestion et de communication avec les entreprises, des modèles qui seront régis par un ensemble de règles.

D'après moi, il est crucial de dresser un calendrier pour toutes ces réformes. Par exemple, trois ans pour la réforme du marché financier, le temps de libéraliser le taux de dépôt. Le taux de prêt a d'ores et déjà franchi ce cap. En termes de libéralisation des opérations en capital, j'ai en outre entendu parler d'un délai de trois ans.

En ce qui concerne la réforme politique, je ne sais pas combien de temps elle prendra précisément, car cette réforme difficile à mettre en pratique devra s'effectuer petit à petit. Comme avait déclaré Deng Xiaoping il y a des dizaines d'années, il faut « traverser la rivière en tâtant les pierres autour de soi ».

(L'article a été rédigé sur la base du discours prononcé par l'auteur lors du Forum d'été de Davos édition 2014)

 

*LI DAOKUI est directeur du Centre d'études sur la Chine et l'économie mondiale, relevant de l'université Tsinghua.

 

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