CHINAHOY

10-June-2014

Empreintes centenaires à Xujiahui

 

Cathédrale de Xujiahui. (BEN DAOCHUN)

 

YAO LANLAN

Qui peut imaginer que Xujiahui était, il y a 300 ans, un champ au confluent de deux cours d'eau dans la banlieue de

Shanghai ? En réalité, ce nom, littéralement « le lieu où se retrouve la famille de Xu », trouve son origine dans Xu Guangqi (1562-1633), scientifique et haut fonctionnaire de la dynastie des Ming (1368-1644). Il y vécut, en travaillant lui-même aux champs, en faisant des expériences et en écrivant.

Résidence des Ming convertie en mémorial de Xu Guangqi

Malgré une carrière politique pleine de vicissitudes, Xu Guangqi occupa l'important poste de premier ministre. Catholique et disciple de Matteo Ricci, il traduisit en chinois Les Éléments d'Euclide, conjointement avec ce missionnaire italien, jetant les bases des mathématiques chinoises modernes ; ayant assimilé les connaissances astronomiques européennes, il présida à la révision du calendrier et rédigea L'Almanach de Chongzhen, faisant comprendre aux Chinois que « la Terre est ronde ». Se consacrant à la pratique, il travailla lui-même aux champs, fit des expériences, et écrivit l'encyclopédie agricole la plus complète de l'histoire chinoise, Traité complet d'agriculture et d'administration agricole. Durant des centaines d'années, cette terre, où vivaient les descendants de Xu Guangqi, s'est imprégnée de ses idées scientifiques innovantes et pragmatiques. Ces dernières se sont profondément ancrées dans la culture shanghaienne.

Par rapport au quartier commercial animé de Xujiahui, le parc Guangqi qui le jouxte s'avère calme et à l'écart du monde. Le portique chinois gravé de grues et de dragons, et la croix au bout de la « voie sacrée » peuvent se voir simultanément, ce qui donne un mélange particulier entre Chine et Occident.

Nanchun Huatang, une demeure ancienne de la dynastie des Ming, qui se trouvait dans la rue Meilong de l'arrondissement Xuhui, a été déplacée en 2003 dans l'ouest du parc Guangqi pour être convertie en mémorial de Xu Guangqi. Cette idée de déplacement trouve aujourd'hui sa justification. Dans cette cour vieille de 500 ans, on trouve le buste de Xu Guangqi portant la tenue des fonctionnaires de premier grade de l'époque des Ming, ornée de grues. Dans une pièce latérale, deux objets présentent un intérêt très particulier, l'un est la première carte du monde qui ait été introduite en Chine, l'autre, quatre portraits à l'aquarelle de Xu Guangqi, Matteo Ricci, Ferdinand Verbiest et Johann Adam Schall von Bell, qui furent exposés à l'Exposition universelle de 1915 à Panama.

Ce mémorial moins grand présente aussi des documents concernant la vie et les réalisations de Xu Guangqi qui sont très admirables.

Première cathédrale d'Extrême-Orient

À côté du mémorial se dresse la cathédrale de Xujiahui, connue sous le nom de « première cathédrale d'Extrême-Orient ».

La construction de la cathédrale de Xujiahui commença en 1904 et les travaux durèrent six ans. Tout à fait différente des églises à architecture chinoise construites plus tôt en Chine, elle est la première cathédrale de style occidental, avec un mur en briques rouges, des colonnes en pierres blanches, des toits en tuiles grises, ainsi qu'un clocher gothique qui surplombe les bâtiments alentours.

Elle est aujourd'hui l'édifice emblématique le plus célèbre de Xujiahui.

Du petit peuple aux maîtres

Un orphelinat fut créé par les Jésuites en 1864 à T'ou-Sè-Wè, près du cours d'eau Puhuitang. Chaque jour, les enfants y étudiaient, sous la direction des missionnaires, diverses compétences : la peinture, la sculpture, l'impression, la gravure sur bois, la forge du métal. Leurs œuvres furent vendues dans le pays et même à l'étranger.

L'école d'art et d'artisanat de T'ou-Sè-Wè, fondée dans le but de faire des peintures religieuses, apprit aux orphelins des techniques pouvant leur permettre de gagner leur vie, sans imaginer qu'allaient y naître des générations d'artistes renommés. Elle devint ainsi le berceau de la peinture occidentale en Chine. Les artistes Ren Bonian, Liu Haisu et Xu Beihong y enseignèrent. Xu Baoqing, un grand maître d'art artisanal qui avait été imprégné de l'art de T'ou-Sè-Wè, est considéré comme l'un des éminents représentants des « apprentis » de T'ou-Sè-Wè. La sculpture shanghaienne sur bois de buis qu'il a créée, a été inscrite en 2008 sur la liste du patrimoine culturel immatériel national.

Le Musée de T'ou-Sè-Wè, construit sur l'ancien site de l'orphelinat ouvert en 2010, conserve de nombreux objets précieux dont le portique en bois haut de 5,80 m et large de 5,20 m, qui fut réalisé en 1912, durant une année, par des dizaines d'orphelins sous la direction du jésuite Fr. AiBeck. Ce portique, sur lequel sont sculptés des nuages, un dragon en vol, les figures vivantes des Huit Immortels de la légende chinoise, a participé à trois éditions de l'Exposition universelle et est présenté, après avoir été soigneusement restauré, comme joyau du musée.

Une bibliothèque contenant des livres tricentenaires

Fondée en 1847, la bibliothèque de Xujiahui est un bâtiment, de couleur café au mobilier et au plancher de bois brut. La salle de lecture, au premier étage, s'étend jusqu'au balcon décoré de balustrades en fer et de volets.

Les archives de livres en langues occidentales, construites sur le modèle de la Bibliothèque du Vatican, sont très impressionnantes, avec une collection de 2 000 livres anciens européens publiés avant 1800 et plus de 500 000 livres en une dizaine de langues occidentales publiés avant la fin du mois de décembre 1949.

On y peut lire Les Entretiens, xylographie en latin publié en 1662, L'Histoire chinoise en français publiée en 1692, Dictionnaire chinois-latin publié en 1723, ainsi que des livres anciens en langues étrangères illustrés concernant les traditions populaires chinoises.

Toutes ces « empreintes » centenaires, représentant les échanges culturels entre l'Orient et l'Occident, contribuent à la formation d'un site AAAA à Xujiahui.

 

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