CHINAHOY

29-September-2014

Zhang Xun : « entremetteuse » des coproductions sino-étrangères

 

Zhang Xun.

 

Tirer le meilleur des compétences des autres pays : telle est l'idée de base des coproductions cinématographiques. Aujourd'hui, ce type de film remporte un franc succès partout dans le monde. Zhang Xun, qui s'est toujours portée en faveur des coproductions sino-étrangères, nous en dit un peu plus...

LIU CHENGZI, membre de la rédaction

«Je souhaite que tous les projets de coproduction cinématographique volent plus loin et plus haut, tels des oiseaux, s'exclame Zhang Xun, PDG de Yunnan Film Group et directrice générale de China Film Co-Production Corporation (CFCC), tout en montrant du doigt un nid d'oiseau dans une bibliothèque. Il s'agit d'un cadeau qu'un ami et son épouse ont tressé de leurs mains spécialement pour moi. Cet ami, c'est le responsable des coproductions à 20th Century Fox Film Corporation. Et il sait à quel point j'affectionne les nids d'oiseau. »

Début de la carrière

Zhang Xun n'a jamais cessé de se démener pour mener à bien son rêve d'inonder le grand écran de nouveaux films. Son époux et sa fille lui ont suggéré à plusieurs reprises de prendre sa retraite, mais elle n'aime pas les jours désœuvrés. Elle garde chaque jour un emploi du temps bien chargé. Elle avoue en souriant : « Je suis un peu pointilleuse, recherchant toujours la perfection. »

Elle a commencé à travailler à Beijing Film Studio en 1979, où elle était en charge de la distribution des films. Dès lors, elle a été témoin de l'évolution de l'industrie cinématographique chinoise : de ses débuts hésitants jusqu'à son apogée, en passant par les aléas rencontrés dans sa marche vers la deuxième place mondiale.

Sur 1979, un total de 29,3 milliards de places avaient été vendues dans les salles obscures en Chine, soit 70 millions chaque jour. Cependant, peu après ce score remarquable, le box-office des films chinois a connu une baisse continuelle. Dans les années 1980, les cinéastes chinois ne prêtaient aucune attention au concept de marché, au grand dam du personnel chargé de la distribution comme Zhang Xun. Lorsqu'un ouvrage était finalisé, China Film Distribution and Exhibition Corporation l'achetait à un prix minimum, puis les distributeurs du studio s'efforçaient de le vendre aux quatre coins du pays, emportant avec eux deux rouleaux de pellicule pesant environ 25 kg.

« Une fois, je suis restée debout pendant 30 heures dans un train allant du Henan au Guangdong. J'en garde un sacré souvenir ! Chaque année, je sillonnais presqu'une trentaine de provinces, régions autonomes et municipalités chinoises plusieurs fois de suite, mais au fond de moi, j'étais très heureuse. Jamais je me plaignais de mon travail », raconte Zhang Xun.

Après des années passées à Beijing Film Studio, Zhang Xun est entrée à China Film Co-Production Corporation, où elle occupe désormais le poste de responsable du département de distribution et diffusion.

Focus sur les coproductions

Après que la Chine a rejoint l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2001, une profonde réforme du système cinématographique a vu le jour dans le pays, poussant l'industrie du film à s'orienter vers le marché. À l'époque, les productions hollywoodiennes comptaient pour trois quarts des recettes du grand écran chinois, les films chinois faisant pâle figure à côté...

« Il fallait absolument élever le niveau global des œuvres chinoises, pour qu'elles puissent rivaliser avec les films importés et se tailler une place sur le marché », a préconisé Zhang Xun. À cette époque-là, le peuple n'était pas assez ouvert d'esprit et les techniques de production avaient du retard sur le niveau international. Il était urgent que les cinéastes élargissent leurs horizons, en étudiant auprès de l'étranger. C'est alors que Zhang Xun s'est engagée dans la promotion des coproductions, proposant d'abord de faire venir dans la partie continentale de la Chine des réalisateurs de Hongkong et de Taiwan possédant déjà une expérience en coopération internationale, et puis de saisir toutes les occasions possibles de se développer à la lumière du marché mondial.

En 2007, peu après son affectation à la tête de China Film Co-Production Corporation, Zhang Xun s'est affairée à organiser le Forum sur les coproductions sino-étrangères, à l'occasion du Festival international du film de Shanghai. Avec son équipe, elle est partie aux États-Unis et en Europe à la rencontre de cinéastes réputés, pour les inviter à mener des échanges avec la Chine. En 2011, lors de la première édition du Festival international du film de Beijing, ce Forum sur les coproductions sino-étrangères a fait sensation. Depuis, une foule de grands noms du cinéma y ont participé, entre autres, James Cameron, Luc Besson et Jean-Jacques Annaud. Jusqu'à la 4e édition du Festival international du film de Beijing, qui a eu lieu cette année, une multitude de projets de coproduction sino-étrangère ont été conclus par le biais de ce Forum, pour un montant total d'investissement dépassant les 10 milliards de yuans.

Zhang Xun saisit toute occasion d'échanger avec les cinéastes étrangers. Lors du Festival international du film de Beijing de cette année, le réalisateur américain Oliver Stone a évoqué son intention de longue date de composer un film sur Mao Zedong, en coproduction avec la Chine. Il s'est plaint que les autorités chinoises, depuis dix ans, s'entêtent à refuser sa demande. À ses mots, Zhang Xun, animatrice du Forum, lui a fait cette réponse constructive : « Pour ce qui est de l'approbation des projets de coproduction, chaque pays dispose de ses propres particularités et définit ses propres exigences. Tout d'abord, le scénario doit être admis par les deux parties. Vous ne pouvez pas agir à votre guise. Et puis, il faut bien connaître les différences entre les divers peuples en termes de langue, culture et coutumes. Le respect réciproque s'avère une condition préalable aux coproductions. »

Lors de chacune des éditions de ce Forum, Zhang Xun souligne qu'en matière de coproduction, la collaboration doit s'opérer dès le premier pas. « Il est préférable que le script soit établi conjointement par les deux parties : d'une part, pour éviter tout décalage entre le scénario et le résultat final, décalage qui peut survenir lorsque les créateurs étrangers connaissent mal la Chine ; d'autre part, pour corriger les défauts de l'intrigue, les créateurs chinois éprouvant souvent des difficultés à harmoniser tendance internationale et facteurs culturels chinois. »

Zhang Xun considère le Forum sur les coproductions sino-étrangères « comme son propre bébé ». « Renforcer les échanges et la compréhension mutuelle jusqu'à ce que de nouvelles coopérations soient conclues : tel était le fil de notre pensée en mettant en place ce Forum, explique-t-elle. Au travers d'expériences et de leçons réelles, je voudrais expliquer au monde comment développer des productions en collaboration avec la Chine. »

Elle attache une haute importance à tous les détails du Forum, surveillant que cinéastes chinois ou étrangers ne cherchent pas à « prendre des détours ». « Chaque coproduction équivaut à un mariage transnational, qui inévitablement sera source de maladresses et frictions. Je m'attache à écouter attentivement la voix des deux parties, pour les aider à se réconcilier. J'espère que tous les nouveaux couples pourront évoluer ensemble et s'engager sur la voie du bonheur », exprime Zhang Xun. Grâce à ses inlassables efforts, elle s'est forgé une fameuse réputation, tout en faisant la connaissance de quantité d'amis sincères.

De belles perspectives en vue

Au cours des six premiers mois de 2014, de nombreux projets de coproduction sino-étrangère ont été ratifiés, tels que Warrior's Gate en collaboration avec la France, Outcast avec le Canada et la France, et Flying Tigers Heroes avec les États-Unis.

Entre 2001 et 2011, 40 projets de coproduction ont été présentés chaque année en moyenne, alors qu'entre 2011 et 2013, ce chiffre dépassait 60. Toutefois, malgré cette croissance régulière, les coproductions ne représentent qu'un dixième du nombre total de films projetés dans les salles chinoises.

« Bien que les coproductions n'occupent encore qu'une faible part dans l'industrie cinématographique chinoise, ils ravissent les yeux des spectateurs. Parmi les films classés dans le top 10 du box-office chinois, nombreux sont des coproductions, indique Zhang Xun. Mais plus important encore, un quart des séances dans les cinémas sont dédiées aux coproductions sino-étrangères. En d'autres termes, la grande majorité de ces coproductions font une entrée fracassante dans les salles obscures. »

Les recettes du marché du cinéma chinois sont passées de 800 millions de yuans avant l'adhésion de la Chine à l'OMC, à 21,77 milliards de yuans en 2013 ; tandis que la proportion des œuvres chinoises diffusées est passée de 46 % à 56 %. De nos jours, les films chinois sont amplement capables de rivaliser avec les films importés.

Les coproductions ont joué (et jouent encore) un rôle non négligeable dans cet essor du marché cinématographique chinois. En fait, à partir du moment où le projet est signé par les pays concernés, les coproductions sino-étrangères sont considérées comme des films chinois à part entière, passant ainsi outre les quotas d'importation. Leurs recettes sont comptabilisées dans le total des revenus rapportés par les films chinois. Ainsi, depuis 2006, les coproductions sino-étrangères ont contribué au box-office des films chinois à hauteur de dix milliards de yuans. Précisons que plus de 90 % des films chinois exportés à l'étranger sont des coproductions.

« Ces dix dernières années, les politiques régissant l'industrie cinématographique se libéralisent en Chine. Les départements de contrôle concernés continuent à innover sur le plan institutionnel, à stimuler la production cinématographique, à assouplir les conditions d'accès au marché pour produire, distribuer ou projeter des films, tout en attachant toujours plus d'importance au rôle des coproductions sino-étrangères. Je suis convaincue que les politiques concernant le secteur cinématographique seront plus propices au développement prospère des coproductions à l'avenir, et que celles-ci se tailleront une place de choix sur le grand écran chinois », conclut Zhang Xun. Avant d'ajouter : « Avec le nouveau cycle de négociations de l'OMC qui va se tenir en 2017, il se pourrait fort bien que la Chine devienne le plus grand pays du cinéma au monde sur le plan industriel.

 

La Chine au présent

Liens