CHINAHOY

5-August-2015

Transition verte en Chine

 

Un timbre commémoratif pour la Journée mondiale de l’environnement, le 5 juin 2015.

 

Après trente années de développement industriel spectaculaire,la Chine amorce un tournant vers une économie plus sage, plus durable et surtout plus écologique. Analyse.

GONG HAN, membre de la rédaction

«Ces dernières années, la Chine s’est attelée à construire une civilisation écologique. Cela consiste à mettre en harmonie les relations entre homme et nature. » Le 27 juin, au Forum international sur l’éco-civilisation de Guiyang, capitale de la province du Guizhou, le coordinateur de l’ONU en Chine, Noudehou Alain, déclarait que, tandis que la Chine déployait ces efforts pour promouvoir le développement vert, peu de gens à l’extérieur du pays en ont entendu parler.

Le développement vert, signe de richesse

Le Forum sur l’éco-civilisation de Guiyang est le seul forum international sur l’éco-civilisation qui se tient Chine. En 2015, le thème du Forum porte principalement sur les changements survenus dans trois domaines : finance et croissance verte ; transition globale vers l’économie à bas carbone et le développement durable ; enfin, la Route de la Soie verte. Une trentaine de tables rondes ont porté sur la finance mobile, la biodiversité, la construction de nouvelles zones vertes, les villes écologiques, l’écologie des régions montagneuses et le tourisme rural.

« Le développement vert est signe de richesse. » Telle est la phrase le plus citée au cours de cette rencontre. Xie Zhenhua, représentant en chef de la Chine aux négociations de l’ONU sur le changement climatique, a affirmé que cette phrase montrait que nous comprenons de mieux en mieux qu’un environnement sain est non seulement une ressource, mais aussi un patrimoine. Le président de la Commission nationale du développement et de la réforme, Xu Shaoshi, a de son côté déclaré : « Les ressources et l’environnement constituent déjà les problèmes parmi les plus pressants à résoudre en Chine, ne serait-ce que parce qu’il nous entravent dans nos efforts vers la ‘‘petite prospérité’’ ouverte à tous. Un obstacle impossible à contourner. »

Ces dernières années, le gouvernement chinois a publié son plan d’action contre la pollution de l’air et de l’eau et amendé la Loi sur la protection de l’environnement. Des mesures plus ponctuelles ont également été prises, comme des dispositions en faveur de la protection écologique des sources du Yangtsé, du fleuve Jaune et du fleuve Lancang dans le Qinghai ; l’édification de barrières écologiques au Gansu ; l’aménagement de foyers de confinement des tempêtes de sable qui balayent Beijing et Tianjin ; et enfin, l’assainissement des cinq plus grands lacs du pays.

La nouvelle Loi sur la protection de l’environnement comporte entre autres des clauses sur la détention administrative, la démission des responsables de cas graves de pollution environnementale et des pénalités journalières imposées aux entreprises polluantes. La nouvelle loi sur l’écologie est « la plus sévère prise en Chine à ce jour », a déclaré Chang Jiwen, directeur adjoint de l’Institut de recherche des politiques sur les ressources et l’environnement, qui dépend du Centre d’études du développement du Conseil des affaires d’État, professeur de l’institut du droit de l’Académie des sciences sociales de Chine.

 

L’exposition sur le changement climatique et le développement durable lors du Forum sur l’éco-civilisation de Guiyang.

 

L’écologie, un critère important

« La Chine a inclus la protection de l’environnement et l’écologie dans la liste des critères d’examen et contrôle mesurant les résultats des travaux des administrations locales et des fonctionnaires. Cette innovation est très importante. Nous ne pouvons plus considérer le PIB comme l’unique critère de jugement du développement. » C’est en ces termes que Philippe Zahner, conseiller et directeur du Service de l’environnement, du Développement et de l’Aide humanitaire de l’ambassade de Suisse en Chine, a évalué l’initiative du gouvernement chinois tendant à la construction d’une éco-civilisation.

Lors du Forum de Guiyang, la discussion au sujet d’une réglementation plus écologique des achats gouvernementaux a suscité une vive attention. Selon les statistiques, en 2013, les dépenses publiques du gouvernement chinois ont atteint 13 800 milliards de yuans, dont 1 640 milliards pour les achats gouvernementaux, ou 2,88 % du PIB.

« Depuis 2006, le gouvernement chinois a publié plusieurs listes de produits recommandés visant à aider les administrations locales à choisir des biens certifiés conformes aux normes environnementales et à faible consommation d’énergie. Cette mesure a permis de favoriser les produits verts », a déclaré Mark Hidson, le directeur global du Centre d’achats durables du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI), lors de son intervention sur le forum. Selon lui, les achats publics verts sont de nature à stimuler la croissance, mais aussi à créer des emplois et à favoriser le développement de technologies nécessaires à une énergie moins polluante. En résumé, cette initiative est une solution appropriée pour protéger aussi bien les intérêts de la société que ceux des entreprises et des administrations.

Dai Bingguo, ancien conseiller d’Etat, a déclaré que le gouvernement chinois avait accordé une grande importance au projet d’éco-civilisation lors de l’élaboration des programmes la Ceinture économique de la Route de la Soie et la Route de la Soie maritime du XXIe siècle. Deux initiatives à même de faire progresser la coopération des États dans le domaine de l’écologie. À l’heure actuelle, la Chine bâtit en coopération avec Singapour une ville-pilote écologique, et un centre d’énergies propres en coopération avec l’Europe. Un organisme suisse et la province chinoise du Guizhou planifient ensemble un village écologique.

Selon les experts, la nouvelle normalité économique, focalisée sur un développement vert, devra mettre fin à la croissance traditionnelle propulsée par l’investissement et motivée par le gigantisme et la vitesse. Certains experts ont même recommandé que le PIB soit remplacé par un indicateur combinant PIB et GEP (Gross Ecosystem Product of Urban Area) pour mesurer le développement du pays. Des essais ont été conduits dans certaines localités. Par exemple, dans la province du Fujian, 34 districts ont cessé de mesurer l’évolution du PIB local. À Shenzhen, l’arrondissement de Yantian a lancé le concept de « ville GEP », qui accorde une valeur importante au ciel bleu, à la présence de verdure et d’eau propre. Lorsqu’ils quittent leur poste, les cadres de ces districts sont évalués selon le contrôle de performance du GEP.

Une transformation totale

Certains espèrent que la transformation verte embrassera non seulement les valeurs sociales et le mode de développement économique, mais pénétrera aussi la société en tant que mode de vie.

Le 5 juin, décrétée Journée de la protection de l’environnement, a eu cette année pour thème « Pratiquer une vie éco-responsable ». À cette occasion, Chen Jining, ministre de la Protection de l’environnement, écrivait : « La transformation du mode de vie peut produire un effet écologique inestimable sur notre société en faisant des économies et en protégeant l’environnement… La transformation écologique de notre mode de vie exige de chacun qu’il refuse les emballages inutiles, qu’il utilise moins d’articles jetables, qu’il achète les produits à faible émissions de carbone, qu’il emprunte les transports en commun, mais sans négliger les ‘‘petites choses’’ comme planter un arbre, fumer moins, économiser l’électricité, l’eau, un morceau de pain ou un bout de papier .»

Au cours du Forum, les tables rondes sur la finance verte et la croissance éco-responsable ont vu l’intervention de MM. Liu Liange et Zhang Yundu, respectivement gouverneur de la Banque d’import-export de Chine et gouverneur de la Banque agricole de Chine. Ils ont exprimé leur espoir de voir les milieux financiers investir davantage dans le secteur de l’écologie. M. Xie Zhenhua a écrit en mai que la transformation de l’économie en économie verte devrait comprendre des édifications économiques, politiques, culturelles et sociales, et ne pourra se borner à la construction d’une éco-civilisation.

2015 sera une année clé pour le développement mondial. On peut s’attendre à la conclusion d’accords globaux sur le financement, le développement durable et le changement climatique. En décembre 2015, Paris accueillera la 21e réunion des pays contractants de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique. « En ce moment crucial, le fait d’établir un trait d’union entre la construction d’une civilisation écologique en Chine et le nouveau programme mondial de développement durable permettra à la Chine de contribuer considérablement au programme du développement durable d’après 2015 », a déclaré M. Noudehou Alain, qui a apprécié la détermination de la Chine à développer l’éco-civilisation, ainsi que les progrès déjà réalisés.

 

 

La Chine au présent

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