CHINAHOY

5-August-2015

Nouvelle donne dans le football chinois

 

Des enfants du club Yinchao en pleine action. (WEI YAO)

 

HU YUE, membre de la rédaction

En août 2014, une entreprise de conseil brésilienne a publié son top 100 du taux de remplissage des clubs football mondiaux de l’année précédente. Le club Beijing Guo’an occupait la 38e place avec 39 269 personnes par match. C’est grâce à ses bonnes performances dans la Ligue des championnats de Chine et d’Asie, que Beijing Guo’an a obtenu ce taux de remplissage assez élevé, et surtout assez stable. D’ailleurs le club chinois qui occupe la meilleure place dans cette liste, c’est le Guangzhou Evergrande, qui se classe 35e. La meilleure place parmi les équipes asiatiques. En 2013, Evergrande a remporté le championnat de la Ligue de AFC (Asian Football Confederation) faisant de lui probablement l’équipe la plus populaire de Chine.

Ces trois dernières années, le football chinois a attiré l’attention des médias internationaux. Lorsque le président Xi s’est déclaré fan de football, même les médias politiques ont commencé à publier des rapports et des articles sur l’état de ce sport en Chine. La fièvre du football a rapidement gagné le pays.

Un sport jeune

Ni Yanshuo est éditeur d’une revue en anglais à Beijing. Chaque week-end, il accompagne son fils, âgé de 11 ans, à son club. Son fils n’avait pas encore quatre ans lorsqu’il a commencé à jouer à l’école Yichao spécialisée dans le football. Une école célèbre à Beijing pour ses cours et ses entraînements au football destinés aux enfants de quatre à dix ans. Désormais, Yinchao propose une dizaine de classes à niveaux différents aux écoliers, qui comme le fils de Ni Yanshuo ne sont pas professionnels, mais ont choisi ce sport par attrait personnel. Yinchao possède aussi des équipes professionelles de plusieurs niveaux. Par rapport aux classes amateur, l’entraînement des équipes profesionnelles est plus intense. Depuis des années, Yinchao alimente le système du football professionnel chinois avec les jeunes pousses issues de ses rangs.

M. Xi Jinping, en tant que fan de football le plus célèbre de Chine, a mentionné en plusieurs occasions sa passion pour le ballon rond, ce qui a automatiquement suscité l’intérêt et donc le développement de ce sport. Une série de réformes en cours est en train de transformer le petit monde du football chinois.

On peut dater le début de la réforme du football chinois au 27 février 2015, date à laquelle ont été publiés des objectifs officiels à court, à moyen et à long terme. Parmi ceux-ci, on note deux buts à moyen terme qui sont l’augmentation du nombre des licenciés adolescents et l’élévation du niveau de la Ligue nationale. Former une réserve de jeunes joueurs, tel est le point le plus important de cette réforme. C’est précisément à ce point que veut répondre la nouvelle loi sur le football universitaire.

Ces dernières années, la spécialité du football des jeunes a bénéficié d’une politique favorable au sein du monde éducatif, et les jeunes espoirs comme le fils de Ni Yanshuo, peuvent espérer accéder à des établissements plus prestigieux grâce à leurs bons résultats sportifs.

 

Le football dans la boue est un sport populaire auprès des jeunes chinois.(WEI YAO)

 

Engouement populaire et renaissance du foot chinois

Depuis quelques années, de plus en plus de parents se sont mis à encourager leurs enfants à s’inscrire à un entraînement au football, entraînant le développement du football écolier et universitaire.

De fait, le football a connu une vague de popularité en Chine au cours des années 1990. On venait alors d’établir le nouveau système de Ligue professionnelle. À l’époque, on avait opté pour un entraînement sur le mode soviétique. Des jeunes joueurs venus de toutes les provinces de Chine étaient réunis dans des écoles pratiquement coupées de l’extérieur, où ils habitaient, mangeaient, et s’entraînaient ensemble. Malheureusement, ces enfants étaient également coupés d’une éducation d’école primaire normale, ce qui handicapait ceux qui ne souhaitaient pas poursuivre une carrière footballistique.

En 2002, après dix ans d’efforts, l’équipe nationale de Chine s’est pour la première fois qualifiée pour la phase finale de Coupe du monde. Un premier sommet pour le football chinois, suivi d’une baisse rapide, non seulement des performances de l’équipe, mais aussi de l’enthousiasme des fans chinois. Jusqu’à ce que ces dernières années le gouvernement entreprenne des efforts de lutte contre la corruption qui, en Chine comme dans les autres pays, gangrène le monde du foot. En s’attaquant aux matchs truqués et aux clubs véreux, il a réussi à assainir le football chinois qui fait à nouveau des progrès. De nombreuses grandes entreprises se sont lancées dans le sponsoring de clubs professionnels, et des joueurs internationaux ont été recrutés dans la Ligue chinoise. Petit à petit, plusieurs équipes de la Ligue nationale de Chine sont arrivées à un niveau mettant à leur portée la Ligue des Championnats d’Asie. La fièvre du foot s’est une nouvelle fois emparée de la Chine.

Ces changements ont redonné au football ses lettres de noblesse, ravivant l’envie de nombreux parents d’inscrire leurs enfants à un club. Xu Song, journaliste de l’agence Xinhua, espère que son fils fera partie de l’équipe de son école primaire. Il explique : « J’aime beaucoup le football, et je sais ce que ce sport signifie pour un garçon : la santé, la peau bronzée, mais aussi, en tant que sport d’équipe, c’est une école de coopération, du travail d’équipe et du fair-play. »

Dans un pays de 1,3 milliard d’habitants, quand le football entre à l’école, le nombre de jeunes joueurs ne peut qu’augmenter rapidement. Cependant, à en croire les experts, l’objectif du football scolaire est uniquement de cultiver l’intérêt et de fortifier la santé des enfants. De nombreuses étapes doivent être franchies avant que le grand nombre de joueurs amateurs se traduise par une excellence du football professionnel.

Naissance d’un football asiatique

Dans les grandes villes chinoises comme Beijing, Shanghai et Guangzhou, ainsi que dans des villes secondaires possédant une tradition du football comme Dalian ou Qingdao, certains habitants n’ont jamais perdu l’habitude de jouer au football. Xitianyi est une équipe amateur située près du centre de Beijing. Les membres de cette équipe se recrutent parmi les fonctionnaires des organismes et des établissements de service public qui entourent le marché Tianyi. Chaque week-end, ils se réunissent pour jouer au foot sur un terrain proche de ce marché qui a donné son nom à l’équipe. Une équipe qui a récemment fêté ses dix ans. Aujourd’hui, le cadet de l’équipe a 20 ans tandis que le doyen en a 50. Xitianyi est une équipe typique parmi les millers d’équipes amateur que compte Beijing. Aussi enthousiaste et combattive que les autres.

La fièvre du ballon rond se propage désormais dans les villes petites et moyennes. Wei Yubin, un employé de banque de la ville de Zigong (Sichuan), a toujours été un bon joueur au collège. Il n’est pas devenu un joueur professionnel, mais il a gardé l’habitude de jouer le football pendant son temps libre. Il explique que la ville de Zigong manque de terrains de football, et que les écoles qui en possèdent un ne permettent pas l’accès du public, ce qui rend vraiment difficile la recherche d’un site adéquat pour l’entraînement. Heureusement, ces dernières années la situation a beaucoup changé. La ville de Zigong, 3 millions d’habitants, a investi dans la construction d’un grand nombre de terrains de football à 5. Depuis quelque temps, lui et ses amis se donnent rendez-vous régulièrement pour jouer au football plutôt qu’au mah-jong. De fait, les jeunes professionnels comme Wei Yubin sont ceux dont l’enthousiasme pour le football est le plus prononcé.

Sautant sur l’opportunité de ce regain d’intérêt sportif, les grandes entreprises chinoises comme Wanda, Evergrande, Greenland, Taobao et Eciticont investi dans des clubs professionnels. Mais leur intérêt se limite au sommet de la pyramide: la Ligue professionnelle, négligeant la base de cette pyramide que constitue le football à 5. Une discipline qui peut elle aussi générer des bénéfices. Les propriétaires de salles de football à 5 peuvent non seulement louer leur terrain, mais aussi fournir des services auxiliaires, comme par exemple un restaurant et une boutique de produits dédiés à l’équipe locale, des chaussures de sport, des maillots, des ballons. Tout un marché riche de perspectives grâce à la croissance de la population des fans de foot en Chine.

Ces dix dernières années, les Jeux Olympiques de Beijing constituaient de souvenir sportif le plus marquant pour les Chinois. Désormais, c’est la fièvre du football qui prend le relais pour encourager le développement de l’esprit sportif du pays. Et organiser (voire même gagner ?) une Coupe du monde est devenu le but à long terme de la réforme sportive chinoise.

 

 

La Chine au présent

Liens