CHINAHOY

4-August-2015

Le Lyon français et le dragon chinois

 

Christine Cayol et Gérard Coulomb tenant l’accord de coopération signé le 22 juin.

 

Retour sur les relations Lyon-Chine et la signature du partenariat entre La Maison des Arts de Pékin - YISHU8 et le Nouvel Institut Franco-Chinois de Lyon (NIFC).

SÉBASTIEN ROUSSILLAT, membre de la rédaction

C’est l’histoire de deux établissements, très similaires et pourtant très lointains, dont peu de personnes connaissaient l’existence jusqu’à il y a peu. Si en mai 2014, pour sa première visite en France, le président chinois n’atterrit pas à Paris comme on s’y serait attendu, mais à Lyon, c’est pour inaugurer dans la foulée un mystérieux institut dont personne ne savait trop rien jusque-là : le Nouvel Institut Franco-Chinois. Celui-ci reprend vie presque 80 ans après sa création en 1921. Et la visite à Lyon d’une délégation dirigée par la vice-première ministre chinoise Liu Yandong en septembre a suivi celle du président chinois

Presqu’un an plus tard, le 22 juin dernier à Beijing, un accord de coopération est signé par le maire de Lyon Gérard Coulomb et Christine Cayol, la directrice d’YISHU8, dans le centre culturel installé dans l’ancienne université sino-française de Beijing.

Lors de sa visite en France l’année dernière, le président chinois avait fait de Lyon la première étape de son voyage en France et inauguré le Nouvel Institut Franco-Chinois. Coïncidence ? Pas vraiment : « Cela témoigne des relations anciennes entre la Chine et Lyon. L’ancien dirigeant chinois Deng Xiaoping était lui aussi venu à Lyon et avait visité les usines Berliet dans les années 80. Celles-ci étaient alors dirigées par le beau-père d’Alain Mérieux qui lui-même était dans le domaine de la santé et dans une fondation qui travaillait avec l’épouse de Xi Jinping », nous explique le maire de Lyon.

L’idée de faire revivre le NIFC de Lyon vient de la volonté de la métropole de s’inscrire dans une dimension internationale et globale intitulée « OnlyLyon » et d’avoir une plate-forme d’échanges avec la Chine à laquelle puissent participer à la fois acteurs publics et privés lyonnais et chinois.

 

Affiche de la cérémonie de signature du nouveau partenariat.

 

À la recherche d’une nouvelle dynamique culturelle

Pour l’adjoint à la culture, « Dès qu’on entre dans le jardin de l’ancienne université sino-française de Beijing, on sent qu’il y a quelque chose de marquant et qui porte la mémoire des choses qui se sont passées. »

De même lorsque l’on se rend dans les murs du NIFC de Lyon installé dans un ancien fort militaire, sous un ancien aqueduc romain. La structure possède un musée retraçant l’histoire des échanges Lyon-Chine, un centre d’affaires, un centre universitaire, ainsi qu’un espace d’exposition permettant de dynamiser et de faire vivre les échanges entre la ville au lion et la Chine.

« Nous devons travailler sur ces symboliques. Et construire des choses du présent sur cette mémoire et surtout penser l’avenir. Si on a ces racines, il faut les redynamiser et leur redonner leur vitalité. Il faut aussi trouver les bons interlocuteurs », analyse-t-il.

Car faire des échanges culturels entre Lyon et la Chine requiert des acteurs et des moyens. « Or actuellement, les budgets sont de moins en moins importants, même si la ville de Lyon met 105 millions d’euros dans la culture par an, nous envoyons l’orchestre en Chine, les théâtres. Mais cela n’est pas suffisant pour monter des projets à l’international et surtout on peut aussi avoir le danger de monter des projets artistiques qui n’attirent pas du tout le public chinois », ajoute celui-ci.

« Je pense qu’YISHU8 peut être potentiellement un opérateur. Il faut que nous changions la vision que le milieu culturel français a de la Chine et diversifions les échanges. Aujourd’hui, nous disposons d’une marge assez étroite pour choisir les artistes chinois que nous produisons en France. Soit ce sont des outsiders voire dissidents, soit des artistes officiels parfois trop officiels et qui n’intéressent pas le public français. Il faudrait également qu’on revisite la littérature chinoise qu’on connaît mal, qu’on pourrait revaloriser en organisant des évènements au Musée des Confluences par exemple. YISHU8 et le NIFC sont des lieux privilégiés pour coproduire », conclut-il.

C’est donc en tant que plate-forme ou de porte d’entrée vers les cultures que sont pensées les deux institutions. Par exemple, le partenaire en Chine du NIFC de Lyon : YISHU8, implanté en Chine, attire les artistes chinois contemporains qui y voient un moyen de s’exporter. Le lieu permet également de faire découvrir au public chinois des artistes français en résidence. Le NIFC de Lyon, quant à lui, sera en mesure de faire des actions culturelles, universitaires, économiques et éducatives à Lyon et en Chine comme nous l’explique la directrice de l’établissement présente lors de la signature : « Nous sommes une association composée d’entreprises, d’universités et de partenaires. L’Institut se compose d’un centre d’affaires pour les partenaires lyonnais et chinois ainsi qu’un centre universitaire en partenariat avec l’université de Shanghai, et l’université Sun Yat-sen. Dans le parc du musée, nous avons une sculpture de 7 tonnes offerte par la ville de Guangzhou qui représente les fondateurs français de l’Institut avec 8 étudiants chinois symboliques. » Nous aurons un roulement de 6 à 7 expositions par an. Actuellement, nous avons une exposition offerte par YISHU8 qui a été retravaillée sous la direction du conservateur du patrimoine du musée Guimet. Et bientôt, la Chinese Art Society va nous monter une exposition photographique de 40 clichés de personnes âgées chinoises et d’architecture contemporaine chinoise pour présenter un peu le clivage tradition-modernité qui existe en Chine. »

 

Une des archives de l’ancienne Université franco-chinoise.

 

Au confluent de la tradition et de l’innovation

Ce partenariat culturel n’est évidemment pas le premier dans l’histoire des échanges entre Lyon et la Chine et depuis quelques années déjà, la ville au confluent du Rhône et de la Saône est partenaire de Guangzhou. L’une des traditions lyonnaises les plus connues : la Fête des Lumières s’est d’ailleurs déjà exportée en Chine, pays des lanternes et qui fête également la lumière le dernier jour de la fête du Printemps.

Un accord de principe de transfert de savoir-faire en matière d’illumination a d’ailleurs été signé avec Shanghai et Hong Kong récemment. Guangzhou a participé à la Fête des Lumières à Lyon il y a deux ans et cette année, c’est la ville de Qiyang qui sera invitée à illuminer une rue de Lyon.

La ville possède également un autre point commun avec la Chine : la soie. En effet, Lyon en est la capitale française. C’est certainement pour cette raison que le président chinois avait choisi d’en faire la première étape de son voyage en Europe pour y promouvoir sa politique de la nouvelle Route de la Soie. « Une équipe du Quotidien du Peuple est d’ailleurs venue me rencontrer il y a quatre mois pour parler de Lyon en tant que capitale européenne de la soie. Une de nos deux entreprises de soyers encore existantes en France, Marc Rozier, a d’ailleurs été rachetée par un entrepreneur chinois de la capitale chinoise de la soie, Hangzhou », nous dévoile l’adjoint à la culture de la métropole lyonnaise. Hangzhou est d’ailleurs la deuxième étape de la délégation lyonnaise en Chine sur invitation de cet entrepreneur.

« Mais pour qu’une route soit une vraie et non pas une impasse, elle doit être à double sens. D’où le sens de notre venue ici en Chine pour prospecter et prendre le pouls chinois afin de savoir dans quels domaines élargir nos coopérations et confirmer les anciennes », résume celui-ci.

 

La Chine au présent

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