CHINAHOY

1-March-2016

Les multinationales optimistes pour la Chine

 

Un scanner Siemens à l'exposition China Med 2015.

 

On entend beaucoup de mises en garde, surtout venant de l'étranger, suite au tassement de la croissance chinoise. Pourtant les multinationales continuent d'investir dans notre pays, signe qu'elles voient toujours la Chine comme l'eldorado du futur.

CHEN SHANGWEN, GUAN KEJIANG et CHEN LIDAN*

Alors que l'économie chinoise s'installe dans la nouvelle normalité, on entend certains auteurs jouer les Cassandre dans la presse étrangère. Pourtant, les multinationales implantées en Chine, qui font corps avec le développement de l'économie du pays, semblent au contraire y trouver de nouvelles opportunités. Tout en prenant des mesures pour s'adapter à cette nouvelle situation, elles s'efforcent de saisir les nouvelles occasions qui s'offrent, accroissent leurs investissements et expriment ainsi leur confiance dans les perspectives de développement de l'économie nationale.

Sociétés sud-coréennes : l'âge d'or

Selon un récent sondage auprès de managers de multinationales conduit par Accenture et le Financial Times et rendu public début janvier par le site web chinois de la société de conseil, les cadres de multinationales se montrent très confiants en l'avenir du marché chinois et veulent continuer d'y investir. 72 % des personnes interrogées se sont dites confiantes pour affronter les défis des trois prochaines années, 66 % d'entre elles se disant sûres que leurs entreprises seront à même de réaliser leurs objectifs de croissance dans la prochaine décennie. Par ailleurs, 71 % des managers ont déclaré prévoir un accroissement de leurs investissements en Chine, 24 % d'entre ces derniers envisageant un accroissement « important ». Les cadres de ces multinationales s'accordent en majorité pour considérer que le marché chinois continuera à générer pour leurs produits une très forte demande.

Selon Park Geun-tae, PDG pour la Chine de la société sud-coréenne CJ Corporation, la nouvelle normalité de l'économie chinoise représente plus ou moins une pression pour les multinationales en Chine, mais les opportunités coexistent avec les défis sur ce marché. La poursuite de l'urbanisation, l'élévation constante du niveau de consommation et l'accent mis par le gouvernement chinois sur le développement du secteur des services, tous ces facteurs favorisent le développement futur des affaires du conglomérat CJ Corporation, dont les activités vont de l'agro-alimentaire au divertissement, en passant par la logistique, les biotechnologies et la grande distribution. À l'en croire, tous les voyants sont au vert pour poursuivre une implantation réussie sur le marché chinois.

« La Chine représente notre avenir, et mon 'rêve chinois' à moi, c'est de voir notre chiffre d'affaires en Chine dépasser un jour celui que nous réalisons dans mon pays », nous a ainsi déclaré Park Geun-tae. Selon lui, le rôle de la Chine dans l'économie de l'Asie-Pacifique continue aujourd'hui de s'accroître, ainsi par conséquent que son rôle dans l'économie mondiale. La Chine est imbriquée, avec les pays voisins et les régions limitrophes, dans des chaînes industrielles et des partenariats commerciaux étroits, et elle joue un rôle majeur dans l'intégration économique de la région Asie-Pacifique. Depuis l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange Chine-République de Corée, les entreprises des deux pays bénéficient d'un accès facilité aux marchés de l'autre côté de la mer Jaune, ce qui crée de belles perspectives pour le commerce et des opportunités de coopération transfrontalière. Les sociétés coréennes vivent une sorte d'âge d'or dans leur développement en Chine. »

Selon Lee Pong-jae, chargé de recherches auprès de la KITA (association sud-coréenne du commerce international), la nouvelle normalité de l'économie chinoise qui se caractérise par un taux de croissance moins rapide crée des défis nouveaux pour les entreprises sud-coréennes installées en Chine. Des ajustements stratégiques ont été nécessaires : d'un mode traditionnel d'intégration verticale elles sont passées à la coopération horizontale, et c'est entre autres par une coopération renforcée avec des entreprises chinoises qu'elles ont pu améliorer leur compétitivité sur le marché chinois. D'autre part, pour s'adapter à la nouvelle politique chinoise, il leur faut trouver de nouvelles opportunités pour répondre à la demande intérieure chinoise et se développer dans le secteur des services.

Sociétés allemandes : prendre l'initiative de s'adapter

Récemment, le journal allemand Handelsblatt a consacré une rubrique spéciale à l'économie chinoise, dans laquelle il estimait que si celle-ci voyait évoluer son mode de développement, un « atterrissage brutal » était exclu. Carola von Schmettow, PDG de HSBC pour l'Allemagne, estimait pour sa part que le ralentissement de l'économie chinoise était la conséquence inévitable de la réforme poursuivie par le gouvernement chinois. « Les prévisions annonçant un effondrement de l'économie chinoise sont très exagérées. Au contraire, la Chine conserve une forte attractivité pour les investisseurs et les entreprises. » Siegfried Russwurm, chef du Bureau technologie de Siemens, a fait remarquer au dernier Forum économique mondial de Davos que le taux de croissance de 6,9 % de l'économie chinoise en 2015 reste l'un des plus élevés au monde et que compte tenu du volume actuel de l'économie chinoise, l'augmentation de la puissance économique qu'il représente est considérable. La Chine demeure le plus important marché du monde dans bien des secteurs, et il conserve de belles perspectives d'avenir.

Le récent rapport de DIHK (Association des chambres d'industrie et de commerce allemandes) rappelle lui aussi la période de reconversion que traverse l'économie chinoise, puisqu'elle doit passer du stade de l'exportation de produits à forte intensité de main-d'œuvre vers les services et les techniques de pointe, et viser surtout la demande intérieure. Ce processus implique une croissance économique assagie, mais qui provoquera des changements brutaux, voire douloureux, dans certains secteurs. Les entreprises allemandes implantées en Chine elles aussi doivent s'adapter à ce nouvel environnement. Elles restent pourtant optimistes dans l'ensemble. Malgré le ralentissement de la croissance, la Chine reste leur marché le plus important et leur principale base de croissance. Le rapport souligne d'autre part que la reconversion de l'économie chinoise représente un énorme potentiel pour les entreprises allemandes, différent selon les secteurs et les régions. Selon les prévisions, les secteurs où les entreprises allemandes pourront bénéficier des retombées les plus prometteuses sont la protection de l'environnement, les équipements médicaux, les industries de haute technologie et des biens de consommation. Ce sont aussi les secteurs qui contribueront le plus au développement économique de la Chine.

La reconversion de l'économie chinoise fait naître de nouvelles activités économiques. Gao Song, jeune entrepreneur, établi en Allemagne, a créé dans la région frontalière bordant la Pologne un entrepôt de marchandises de 20 000 m² destiné à servir d'appui pour les plates-formes de commerce en ligne tournés vers les consommateurs européens. Chaque année, des millions de colis contenant des produits électroniques, des vêtements, des chaussures ou des fournitures de bureau venant de Chine transitent par ici pour parvenir chez les consommateurs allemands ou d'autres pays européens. Gao Song affirme que c'est l'essor de l'e-commerce chinois de ces dernières années qui a inspiré le développement de ces entrepôts dans d'autres pays. D'un clic de souris on commande des marchandises qui dans la plupart des cas arrivent à domicile en 24 heures. Ce modèle, déjà très développé en Chine où il crée de nombreux emplois, est désormais plébiscité par les consommateurs européens.

Sociétés améri-caines : le vent en poupe

Si le ralentissement de la croissance chinoise a inquiété un moment les entreprises américaines, les résultats de l'enquête rendus publics le 20 janvier par AmCham China montrent que ces soucis appartiennent au passé. Par rapport aux autres marchés émergents, la Chine conserve les faveurs des investisseurs américains, puisque 60 % des entreprises interrogées ont classé la Chine parmi les trois premiers pays d'accueil de leurs investissements. L'accroissement de la demande intérieure chinoise et le développement des classes moyennes offrent aux entreprises américaines d'importantes opportunités futures.

Nagata Maeda, chargé des relations publiques d'United Airlines pour la région Asie-Pacifique, indiquait en réponse à nos questions que sa compagnie se sentait le vent en poupe malgré le relatif tassement de la croissance chinoise. Selon lui, le marché chinois recèle de grandes opportunités et demeure pour United Airlines le marché étranger le plus dynamique et le plus prometteur. Grâce à l'assouplissement des politiques de visas entre les États-Unis et la Chine, on peut s'attendre à un accroissement du trafic passagers entre les deux pays. D'autre part, l'entreprise suit de près l'évolution du marché chinois pour identifier de nouvelles opportunités de développement.

Plus de 10 000 personnes prennent quotidiennement l'avion entre la Chine et les États-Unis. Pour United Airlines, ce sont 80 vols trans-Pacifique par semaine depuis et vers Beijing, Chengdu, Hong Kong et Shanghai. Pour faire face à une concurrence toujours plus acharnée, la compagnie a adapté sa stratégie et tourné ses regards vers les villes de province où se trouvent aujourd'hui les principales opportunités de développement.

Alors que le Salon international de l'automobile d'Amérique du Nord (NAIAS) 2016 vient de fermer ses portes, Mary Barra, PDG de General Motors, nous a elle aussi exprimé sa confiance en la Chine qui reste, et de loin, le plus grand marché automobile au monde : « La croissance restera forte malgré le ralentissement actuel. »

Les plans de développement de General Motors China indiquent que l'entreprise prévoit d'investir 14 milliards de dollars en Chine sur la période 2014-2018. GM vient d'annoncer des bénéfices record pour 2015, et c'est en grande partie dû aux marchés chinois et d'Amérique du Nord. En 2015, GM a vendu un total 9,8 millions de véhicules, avec des ventes en Chine battant tous les records, en hausse de 5 % sur l'année précédente. Qian Huikang, PDG de General Motors China, compte que cette progression se maintiendra en 2016.

 

*CHEN SHANGWEN, GUAN KEJIANG et CHEN LIDAN sont les correspondants du Quotidien du Peuple en République de Corée, en Allemagne et aux États-Unis.

(Article publié par le Quotidien du Peuple le 31 janvier, sous le titre Nouvelle normalité et nouvelles opportunités)

 

 

La Chine au présent

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