CHINAHOY

29-July-2013

Shenzhou-X: une nouvelle avancée chinoise dans l’espace

 

 
Le 20 juin, l’astronaute Wang Yaping a donné un cours depuis l’espace aux enfants chinois, le premier de ce genre jamais effectué en Chine.
 
 
HOU RUILI, membre de la rédaction
 

Le vaisseau spatial Shenzhou-X, avec trois astronautes à son bord, a été lancé le 11 juin dans l’espace et a voyagé en orbite pendant quinze jours, créant un nouveau record pour le vol spatial chinois. Après l’amarrage entre le vaisseau spatial et le module laboratoire Tiangong-I, les astronautes sont entrés dans le module. Pendant douze jours, ils y ont effectué une trentaine d’essais qui concernaient la technologie et la médecine spatiales, et donné un cours de physique aux enfants chinois. Le vaisseau spatial a aussi effectué son premier vol d’essai autour du module spatial et effectué un rendez-vous avec celui-ci. Le président Xi Jinping s’est entretenu par visiophone avec les astronautes, en leur exprimant ses encouragements.

Il s’agit du cinquième vol spatial habité de la Chine, où les astronautes sont rentrés sains et saufs sur Terre, dix ans après le vol du premier astronaute chinois Yang Liwei dans l’espace. Le vol de Shenzhou-X signifie que la Chine commence à entrer dans l’étape des applications spatiales, et jette les bases du système de transfert espace-Terre pour la recherche en laboratoire dans la future station spatiale.

Les hautes technologies perfectionnent le vol de Shenzhou-X

Avec l’amarrage automatique effectué le 13 juin, les hommes et le matériel ont pu être transférés du vaisseau Shenzhou-X au module Tiangong-I. Le 23, un amarrage manuel a pu être effectué avec succès entre Shenzhou-X et Tiangong-I, grâce aux manœuvres précises de l’astronaute Nie Haisheng et à l’étroite collaboration de deux autres astronautes : Zhang Xiaoguang et Wang Yaping.

Le 25 au matin, après le détachement des deux unités, Shenzhou-X a volé par-dessus Tiangong-I et s’est placé à l’arrière de celui-ci pour effectuer un rendez-vous à une courte distance. Il s’agit du premier essai de vol d’un vaisseau spatial autour d’un autre engin et du premier rendez-vous de la Chine, et celle-ci a pu le réaliser avec succès. Cet essai permettra d’accumuler de l’expérience pour la construction prochaine de la station spatiale. Selon le programme spatial habité chinois, dont la troisième étape concerne la construction d’une station spatiale, celle-ci sera composée de trois modules, disposés en forme de T : un module central et deux modules laboratoire des deux côtés. Le module central comprendra à l’avant deux interfaces destinées à l’amarrage du vaisseau spatial habité, et à l’arrière une autre interface pour l’amarrage d’un vaisseau spatial cargo. Le vaisseau spatial devra changer d’orbite plusieurs fois en volant autour du module laboratoire et cela sera plus difficile que les rendez-vous et amarrages précédents, a déclaré Wu Ping, le porte-parole du programme spatial habité chinois.

Ce sont des technologies spatiales mûres et des procédures de production stables qui ont permi le merveilleux vol de Shenzhou-X.

Quand un vaisseau spatial habité vole dans l’espace et déploie ses ailes solaires, les panneaux solaires captent l’énergie du soleil pour alimenter le vol du vaisseau dans l’espace.

« Pour le substrat de panneaux solaires, l’utilisation de la colle et le processus de durcissement ont été strictement contrôlés, de sorte que pour le même poids, on a obtenu une meilleure performance », explique Wang Zhiyi, de l’institut de recherche n°805 de l’Académie des technologies spatiales de Shanghai (ATSS) qui a mis au point les ailes équipées de cellules solaires. M. Wang a obtenu une distinction pour sa contribution exceptionnelle au programme spatial habité chinois.

Il y a beaucoup d’améliorations similaires. « Par rapport à Shenzhou-IX, la disposition des caméras de Shenzhou-X a été optimisée, de sorte que lors du lancement, l’état du vaisseau a pu être mieux surveillé », explique un expert de l’institut de recherche n°805.

De nombreux dispositifs dans le vaisseau Shenzhou-X peuvent désormais être produits en série. Cela réduit les coûts et la durée de développement d’un engin spatial, et améliore sa qualité. Avec l’optimisation du processus de test, l’efficacité des tests du vaisseau spatial a aussi été améliorée.

« Ce vol est centré sur les expériences scientifiques, dit le chercheur Tao Jianzhong de l’ATSS. Avec une trentaine d’essais scientifiques, il réalise plus de deux fois plus d’essais que dans le vaisseau Shenzhou-IX. Ceux-ci portent sur la technologie des engins spatiaux, la médecine spatiale et des activités d’intérêt public. »

Ces essais sont d’autant plus précieux que l’environnement spatial n’est pas reproductible artificiellement. « Ces expériences scientifiques peuvent contribuer au succès rapide des satellites de navigation Beidou et Haiyang. C’est aussi un des résultats importants du lancement réussi de Shenzhou-X », déclare Tao Jianzhong. 

 

Les trois astronautes Nie Haisheng, Zhang Xiaoguang et Wang Yaping sont entrés dans le module Tiangong-I le 13 juin.

 

Un cours spatial très remarqué

Le 20 juin au matin, un cours de 40 minutes a été donné depuis Tiangong-I par les astronautes. Ce cours a permis de tester et de démontrer la capacité de transmission en temps réel du système de satellites-relais chinois de la première génération, établi en 2012. Depuis sa mise en service, ce système a joué un rôle important dans les rendez-vous et amarrages entre Tiangong-I d’une part et Shenzhou-VIII et IX de l’autre.

Ce cours spatial a été donné par la femme astronaute Wang Yaping, assistée par Nie Haisheng, et filmé par Zhang Xiaoguang. Avec la mesure de la masse, des pendules simples, des gyroscopes et des gouttes d’eau, Wang Yaping a montré aux enfants chinois les différents phénomènes de physique qui se produisent en état d’apesanteur. Par visiophone, elle s’est entretenue et a répondu aux questions des élèves qui s’étaient réunis dans la salle de classe installée à l’école secondaire annexe de l’université du Peuple de Chine à Beijing. Plus de 330 élèves ont participé aux activités en classe sur place et plus de 60 millions d’autres, venus de 80 000 écoles secondaires dans tout le pays, ont suivi l’événement par écran interposé.

La Chine est le deuxième pays à avoir effectué un cours spatial après les États-Unis. La transmission directe a attiré l’attention du monde. Pour Associated Press, le cours donné par les astronautes chinois depuis l’espace est une « bataille », une tâche comparable en difficulté à l’amarrage spatial qu’ils ont effectué à grands risques. Jiji Press du Japon qualifiait le cours spatial chinois « d’incroyable ».

De nombreuses mesures ont été prises pour mieux garantir le travail et la vie des astronautes dans l’espace, telles que la disposition de davantage de poubelles, des aliments variés et personnalisés ou encore l’optimisation du processus de travail et de l’horaire des astronautes. En outre, le remplacement du plancher et l’augmentation des dispositifs de retenue permettent de rendre la vie des astronautes plus pratique.

Au profit de la vie quotidienne

Certains pensent peut-être que le vol du vaisseau spatial habité n’est jamais qu’une onéreuse expérience scientifique très éloignée des besoins quotidiens. Mais l’expérience prouve que ces technologies spatiales vont progressivement changer la vie de l’homme.

Selon Tao Jianzhong, le taux de conversion de la cellule solaire sur Shenzhou-X atteint 26 %, un niveau qui la classe aux premiers rangs mondiaux. Si la demande pour cette technologie se maintient et que son coût baisse, cela va considérablement changer la vie des gens.

Pour répondre aux exigences des engins spatiaux, la Chine a développé de nombreux produits lubrifiants de pointe. Ces technologies seront largement utilisées dans les domaines civils comme les automobiles ou les appareils ménagers, qui sont exigeants pour la lubrification.

En outre, selon Wang Kunsheng, président du China Aerospace Engineering Consultation Center, les technologies spatiales sont à l’origine du développement de 80 % des 1 100 nouveaux matériaux utilisés par la Chine ces dernières années.

« Le long vol orbital permet d’effectuer sur les astronautes des recherches médicales sur la perte osseuse et l’atrophie musculaire. Certains résultats possèdent une grande valeur pour le traitement des malades », explique Chen Shanguang, directeur du Centre de recherche scientifique et d’entraînement des astronautes de Chine. Pour l’académicien Hu Wenrui de l’Académie des sciences de Chine, alors que la Chine est très en retard sur les pays développés de l’Occident dans l’industrie biopharmaceutique, les expériences scientifiques sur la vie dans l’espace permettent d’inventer et de fabriquer de nouveaux médicaments au bénéfice de l’humanité.

En outre, certaines technologies spatiales ont changé la vie des gens. Ainsi : les sachets de légumes des nouilles instantanées sont inspirés des légumes déshydratés dans les aliments destinés aux astronautes, ou encore le moulage creux par soufflage de certaines chaussures de sport est une technologie dérivée de la combinaison spatiale...

 

Le retour réussi du vaisseau spatial Shenzhou-X, le 26 juin
 

Des compétences jeunes

Les brillants exploits de la cause spatiale ont été obtenus grâce à une équipe nombreuse, répartie sur plus de 3 000 départements ou entreprises. Les jeunes y jouent un rôle important.

Mu Yu, âgé de 31 ans, est le concepteur général du réseau électrique de la fusée Longue Marche 2F utilisé au lancement du vaisseau spatial habité Shenzhou-X. Il est désormais le concepteur en chef adjoint de la China Academy of Launch Vehicle Technology (CALT), fondé par Qian Xuesen, père du programme spatial chinois. Une dizaine d’améliorations ont été faites pour élever la fiabilité de la fusée Longue Marche 2F. En l’an 2000, Mu Yu, âgé de 18 ans, a été admis au département de conception d’aéronefs de l’Université polytechnique de Beijing. Ayant obtenu un doctorat en 2007, il a intégré la CALT. Actuellement, les chercheurs nés dans les années 1980, dans cette académie, sont au nombre de 17 000, et représentent 80 % du nombre total de chercheurs.

Liu Ning, concepteur en chef de la China Academy of Space Technology (CAST), n’a que 33 ans. Il est le concepteur général du module laboratoire Tiangong-I. Ayant obtenu un doctorat en mécanique à l’université Tsinghua en 2008, il a été recommandé pour le projet Shenzhou. Depuis longtemps, le gouvernement chinois encourage les universités à recommander leurs diplômés brillants pour joindre les rangs de la recherche spatiale. Parmi les 1 000 étudiants-chercheurs et doctorants à la CAST, 90 % sont nés dans les années 80. Parmi les 150 000 chercheurs dans le domaine de l’aérospatial, 100 000 personnes sont nées dans les années 1980. L’âge moyen au sein de l’académie se situe entre 31 et 33 ans, soit 15 ans de moins que dans les centres de recherche des grandes puissances spatiales. Les jeunes deviennent la force motrice du développement de l’aérospatial chinois.

« Le secret de la Chine, qui devient une puissance spatiale, est l’introduction incessante de sang frais et le soutien de l’État », déclare Yu Menglun de l’Académie des sciences de Chine, expert en mécanique spatiale et en conception balistique de fusée.

Des plans qui se déroulent comme prévu

Selon Wang Zhaoyao, directeur du Bureau du programme spatial habité chinois, la menée à son terme de la mission Shenzhou-X a marqué le couronnement de la première étape de la deuxième phase du programme spatial habité chinois. Approuvée par le gouvernement chinois en février 2005, cette étape a porté sur deux tâches majeures : réaliser des percées dans la sortie des astronautes de la capsule et maîtriser les technologies de rendez-vous et d’amarrage entre les engins spatiaux. Dans cette étape, cinq lancements ont été effectués depuis 2005 : Tiangong-I, Shenzhou-VII, VIII, IX et X. Un système technologique pour garantir le séjour des astronautes en orbite a été mis en place.

Selon le programme spatial habité chinois, le lancement du laboratoire spatial Tiangong-II en 2015 environ constituera la prochaine étape. Simultanément, le projet de station spatiale habitée sera mené à bien conformément au plan prévu. Le module central expérimental sera lancé vers l’an 2018 et l’an 2020 verra l’achèvement de la construction de la station spatiale habitée chinoise. En attendant, selon les besoins, une série de vaisseaux cargo et habités seront lancés pour transporter des fournitures et du personnel au laboratoire spatial et à la station spatiale.

 

La Chine au présent

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