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Les entreprises chinoises explorent le marché international
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Le projet de restauration du pont Alexander-Hamilton (aux États-Unis) pris en charge par la China State Construction Engineering Corporation. |
AN XINZHU, membre de la rédaction
À quel point la Chine participe-t-elle à la construction d’infrastructures dans le monde ? À quelle hauteur s’élèvent les investissements chinois en la matière ? Dans quels secteurs la Chine présente-t-elle des avantages sur ses concurrents ? Quelle tendance internationale suit l’exécution de ces travaux ? M. Fang Qiuchen, président de la China International Contractors Association, a accepté de nous fournir des réponses.
Toujours en croissance rapide
La Chine au présent : Pouvez-vous donner une vue d’ensemble des projets de construction contractés par la Chine à l’étranger ? Quelle sont les atouts concurrentiels des entreprises chinoises ?
Fang Qiuchen : Les données montrent qu’en 2014, de nouveaux contrats de travaux ont été signés pour un montant total de 191,8 milliards de dollars, et un chiffre d’affaires de 142,4 milliards de dollars a été réalisé par les entreprises chinoises. Ces accords ont été passés dans 190 pays et régions. Ainsi, la construction d’infrastructures de transport, de bâtiments, d’installations électriques ainsi que la fabrication d’équipements par des entreprises chinoises à l’étranger a maintenu une croissance de 10 % environ, un rythme assez élevé. Il faut dire que la Chine possède de nombreux avantages comparatifs, que ce soit dans les secteurs des chemins de fer, de l’électricité, des télécommunications, des matériaux de construction, des machines utilisées en BTP, etc.
Les statistiques soulignent que la part des infrastructures de transport représentait en 2014 plus de 30 % des contrats de BTP réalisés par la Chine à l’étranger, soit une augmentation fulgurante de 55 % sur l’année précédente. Cette hausse est due à la promotion chinoise de l’interconnexion régionale et de la mise en place de réseaux logistiques, pour multiplier les flux de marchandises. Plus particulièrement, le gouvernement chinois a encouragé son industrie ferroviaire à « sortir des frontières », orientation qui a porté ses fruits. Des entreprises chinoises du secteur s’activent à la préparation de nouveaux projets, notamment le développement du TGV en Thaïlande, la mise en place de la ligne Budapest-Belgrade ou encore celle de la ligne Beijing-Moscou.
Selon ces mêmes données, les travaux contractés par les entreprises chinoises à l’étranger couvrent un domaine d’expertise de plus en plus large : extraction des ressources minières, développement immobilier, industrie manufacturière, exploitation agricole, traitement des déchets et des eaux usées, fabrication textile, production d’énergie solaire et éolienne...
Les accords passés dans le secteur des énergies propres se multiplient ces dernières années. En 2014, les entreprises chinoises ont signé avec 20 pays une série de 35 contrats dont le montant excédait 5 millions de dollars. La valeur cumulée atteignait quant à elle environ 1,8 milliard de dollars. Parmi les travaux prévus : la fourniture de modules photovoltaïques d’une capacité de 100 MW pour un parc solaire à grande échelle au Pakistan (215 millions de dollars), la réalisation de la deuxième tranche du projet solaire EA en Thaïlande (170 millions de dollars) et la concrétisation du projet éolien Jasper en Grèce (150 millions de dollars).
Au cours du premier trimestre 2015, les entreprises chinoises ont exécuté un nombre relativement élevé de travaux à l’étranger, l’équivalent de 31,76 milliards de dollars, un montant en progression de 17,6 % en glissement annuel. Par ailleurs, sur la même période, elles ont signé pour 45,59 milliards de nouveaux contrats. Deux facteurs viennent expliquer ces chiffres à la hausse. D’une part, l’effet d’entraînement des gros projets conclus auparavant. En 2014, 5 contrats de plus de 2 milliards de dollars et 25 autres de plus d’un milliard de dollars ont été signés. Notamment dans la construction ferroviaire, la quantité et la valeur des contrats passés ont crû rapidement. D’autre part, la Chine a décidé de soutenir vivement la construction d’infrastructures dans les pays asiatiques et africains. Dans un contexte où les fonds manquent sur le marché international, les capitaux chinois jouent un rôle de plus en plus stimulant, contribuant par là même au développement des activités des entreprises chinoises à l’étranger.
Progrès sur les nouveaux marchés
La Chine au présent : Comment se répartissent ces travaux chinois à l’étranger ? Quelles opportunités s’ouvrent aux entreprises chinoises ?
Fang Qiuchen : L’Asie et l’Afrique demeurent nos marché principaux. 85 % des nouveaux contrats de travaux d’infrastructures à l’étranger sont signés sur ces deux continents. Malgré la concurrence féroce des firmes japonaises et sud-coréennes, les entreprises chinoises, fortes de leurs compétences reconnues, décrochent de gros projets. Prenons comme exemple la cinquième phase des travaux d’un camp militaire en Arabie Saoudite (1,98 milliard de dollars) ou encore la centrale à « charbon propre » d’une capacité de 2 400 MW à Jizan (1,83 milliard de dollars).
Les activités des entreprises chinoises ont d’ailleurs enregistré une croissance rapide en Afrique, surtout en Afrique de l’Ouest. Ce phénomène découle principalement des efforts et de l’important soutien financier déployés par le gouvernement chinois pour promouvoir l’interconnexion sur ce continent. China Railway Construction Corporation Limited a notamment signé un contrat d’un montant de 11,97 milliards de dollars avec le Nigeria, pour y construire un chemin de fer le long de la côte.
Les entreprises chinoises ont également connu une progression stable dans la construction de bâtiments. La demande des pays africains en logements à bas coût est très forte. Ainsi, certaines entreprises chinoises envisagent de mettre en œuvre des projets immobiliers sur le marché africain en reprenant le modèle utilisé en Chine, ce qui tend à orienter les travaux vers le haut de gamme.
Pour ce qui est des opportunités, notons qu’à l’heure actuelle, le gouvernement chinois encourage vigoureusement la construction de la ceinture économique de la Route de la Soie et celle de la Route de la Soie maritime du XXIe siècle. Ces initiatives apportent aux entreprises chinoises une nouvelle occasion historique de s’investir dans des projets d’infrastructures à l’étranger.
Par ailleurs, les appels à l’intégration économique résonnent vivement en Europe de l’Est et en Amérique latine, d’où un besoin urgent d’y améliorer les infrastructures et l’interconnexion. Le gouvernement chinois encourage activement la coopération bilatérale sur les infrastructures en Europe centrale et orientale ainsi qu’en Amérique latine, où ce marché présente un vaste potentiel. Des résultats ont déjà été obtenus sur le continent européen : la valeur des nouveaux contrats signés par les entreprises chinoises en Europe centrale et orientale a augmenté de 65,1 % sur un an.
Actuellement, dans les pays développés, les infrastructures sont vieillissantes. Ces pays intensifient leurs investissements pour les rénover ou en construire de nouvelles. Les entreprises chinoises y voient une occasion de réaliser des percées sur le marché moyen ou haut de gamme à travers le rachat ou l’entrée au capital d’entreprises locales. En 2014, la somme totale des nouveaux contrats décrochés par les entreprises chinoises a doublé par rapport à 2013.
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Le stade de l’Amitié sino-gabonaise, d’une capacité de 40 000 spectateurs, construit au Gabon par le Shanghai Construction Group. |
Nouvelle tendance et nouveaux défis
La Chine au présent : Quelle tendance suivent les travaux menés à l’étranger par les entreprises chinoises ? Quels sont des défis ?
Fang Qiuchen : Les entreprises chinoises ont conscience que dans la nouvelle phase de la concurrence internationale, prendre part aux investissements est non seulement un moyen nécessaire pour exploiter des marchés, mais aussi un passage obligé pour se moderniser. Certaines firmes se développent en intégrant sans cesse de nouveaux champs d’activités, se livrant par exemple à la promotion de projets immobiliers, au rachat de mines, à l’exploitation agricole, à la mise en place d’installations commerciales, etc. La société China Harbour Engineering, à titre d’illustration, a investi dans son premier projet de construction d’autoroute à l’étranger, en Jamaïque. Une première section s’ouvrira à la circulation prochainement. Toute l’autoroute devrait être mise en service fin 2015.
D’autres entreprises chinoises envisagent de remporter les contrats en s’associant au financement d’un projet. La participation du Beijing Construction Engineering Group au contrat sur l’aéroport de Manchester en est un exemple. Le coût total du projet est estimé à 800 millions de livres sterling. Mais en en versant 12 millions, le groupe chinois s’est octroyé le droit de prendre en charge une partie des travaux.
Les entreprises chinoises de BTP rachètent plus de firmes et investissent plus qu’auparavant. La China State Construction Engineering Corporation Limited a achevé sa première fusion-acquisition outre-mer, absorbant la compagnie américaine de construction PLAZA. Par cette opération, elle a doublé son chiffre d’affaires aux États-Unis, y signant des contrats pour un montant total de plus de 3 milliards de dollars. Cette société chinoise commence déjà à se tailler une place sur les marchés de l’Ouest et du Sud du pays, qui sont en plein essor.
Néanmoins, les entreprises chinoises sont confrontées à des défis et difficultés. D’abord, la compétition internationale devient plus rude, que ce soit face aux firmes dans les pays en développement où les coûts sont bas ou face à celles dans les pays développés qui tirent eux aussi sur les prix. En outre, des entreprises étrangères reçoivent le soutien de leur gouvernement, soucieux d’investir plus dans les pays asiatiques, africains et latino-américains. Elles peuvent alors bénéficier de prêts à faible intérêt ou à taux zéro, de subventions ou encore d’un remboursement des taxes à l’export.
Ajoutons que les activités des entreprises chinoises se concentrent dans certains pays, de sorte que leur marge de progression se réduit. Par exemple, en Tanzanie, sur le marché des infrastructures, la part des entreprises chinoises atteignait plus de 70 % ; au Kenya, près de 60 %, en Zambie, plus de 50 %. Les entreprises chinoises se concentrent également dans certains secteurs spécifiques, notamment la construction de résidences en Algérie ou encore l’ouvrage d’autoroutes en Éthiopie et en Ouganda. Il est difficile alors pour les entreprises chinoises d’étendre encore leurs activités. Il y a aussi le problème du protectionnisme commercial de certains pays, qui n’hésitent pas à limiter l’entrée des matériaux et du personnel chinois sur leur marché.
Les entreprises chinoises peuvent aussi être confrontées à l’insécurité sur les marchés internationaux. Il suffit de regarder les actes terroristes qui ont été perpétrés dernièrement au Nigeria, au Kenya, au Pakistan et en Irak. Mais elles font face à d’autres risques encore. Il arrive que dans les pays développés, des éléments politiques fassent obstacle aux investissements chinois. Par exemple, le nouveau gouvernement grec a annoncé vouloir suspendre la vente du port du Pirée au groupe chinois COSCO. En Asie du Sud-Est, en Asie du Sud et en Amérique latine, certains projets devant être réalisés par des firmes chinoises ont aussi été annulés sans motif valable. C’est le cas du contrat portant sur la ligne de TGV au Mexique et celui relatif aux infrastructures portuaires de Colombo au Sri Lanka.
Enfin, les fluctuations du cours des matières premières internationales, entre autres, la chute du prix du pétrole, constituent aussi une menace pour la rentabilité des projets accordés aux entreprises chinoises dans les pays pétroliers.
La Chine au présent