CHINAHOY

2-August-2017

Kubilaï Khan des Yuan

 

(France) CHRISTOPHE TRONTIN

 

Presque tous les empires dans l’histoire se sont formés par la conquête de leurs voisins. Seul l’empire chinois s’est agrandi par assimilation de ses envahisseurs successifs. L’un des meilleurs exemples en est l’histoire de Kubilaï Khan, fondateur de la dynastie des Yuan (1271-1368).

 

Petit-fils du fameux conquérant Gengis Khan, le petit Kubilaï naît en 1215 dans un empire mongol à l’apogée de sa puissance. Ce dernier occupait alors une partie de la Chine du Nord, dont la Mandchourie et le Hebei actuels, et c’est Tolui, fils de Gengis Khan, qui était chargé de gérer ces territoires occupés. Kubilaï, quatrième fils de Tolui, fut éduqué dans une culture mongole sous forte influence de l’ethnie han. Il eut par exemple une nourrice de religion bouddhiste qu’il révéra jusqu’à l’âge adulte. À la mort de Tolui en 1232, le jeune Kubilaï se vit confier la direction d’un domaine dans le Hebei où il se lança dans une politique de réforme et de mise en valeur de l’agriculture.

 

Mongol ethnique mais chinois de cœur, il s’entoura d’un aréopage de Chinois, comme Haiyun, précepteur du bouddhisme de la Chine du Nord, Liu Bingzhong, un taoïste mystique converti au bouddhisme, ou encore le scientifique Zhao Bi. La promotion du bouddhisme dans l’empire sera d’ailleurs l’un des fils conducteurs de son règne. D’ailleurs, l’embonpoint légendaire de ce bon vivant le fait ressembler à Bouddha. En fonction des projets lancés, il fera également appel à des spécialistes d’autres nationalités, Coréens, Mongols ou Turcs.

 

En 1251, alors que son frère aîné devenait le Khan (chef) de l’empire mongol, Kubilaï se vit confier toute la région de la Chine du Nord, depuis la Mongolie intérieure où il établit sa capitale, jusque dans le Henan. Un territoire dans lequel il poursuivit sa politique de réforme méritocratique. En 1253, il reçut pour mission d’aller conquérir le Yunnan qu’on appelait alors le Royaume de Dali. Il réussit dès 1256 grâce à l’aide du roi de Dali, Duan Xingzhi, qui préféra abdiquer pour offrir ses services au conquérant.

 

En 1258, pour mettre fin à la querelle qui opposait depuis longtemps les taoïstes aux bouddhistes, il convoqua une conférence prétendûment destinée à des négociations pacifiques entre les dirigeants des deux mouvements. Mais la préférence de Kubilaï était évidente et le résultat fut la conversion forcée de 237 temples taoïstes et la confiscation de leurs biens.

 

C’est alors qu’il était en train de guerroyer dans le Sichuan que Kubilaï apprit qu’un kurultai (conseil des khans) s’était tenu dans la capitale mongole d’alors, Karakorum, et qu’il avait été nommé grand Khan de l’empire mongol. Il se dépêcha donc de rejoindre la capitale pour y recevoir sa couronne en avril 1260.

 

Rien n’est facile en ce bas monde : bien qu’il fut nommé chef de l’empire mongol par la majorité des khans, un certain Ariq Böke ne l’entendait pas de cette oreille... Furieux de voir le trône lui échapper, celui-ci se lança dans une campagne militaire contre le nouvel empereur, provoquant une guerre civile qui se propagera à la Chine du Nord et au Shanxi et ne s’achèvera qu’en 1264 après le siège et la destruction de Karakorum et la reddition d’Ariq Böke.

 

Tout en assurant l’équilibre entre ses différents vassaux en Occident, Kubilaï s’occupait maintenant de consolider ses positions dans la péninsule coréenne en vue d’une invasion du Japon (qui échoua).

 

Empereur de la Chine du Nord, il formalise son titre en 1271 en décrétant le début de la dynastie des Yuan. Il change de capitale pour s’installer à Dadu, qui deviendra Beijing, où de grands travaux sont lancés. La « ville tatare » (mongole) est réservée aux dignitaires mongols, tandis que les artisans et fonctionnaires proches de l’ancienne dynastie s’installent dans la « ville chinoise ». Soucieux de ne pas irriter les Han, il adopta la plupart des codes et des traditions établis par les Song, ce qui lui valut la désapprobation des khans mongols qui craignaient, et l’avenir leur donna raison, une dissolution de l’identité mongole dans la culture chinoise.

 

En 1276, Kubilaï, empereur de Chine sous le nom de Hubilie (puis sous le titre posthume de Shengde) obtient la reddition des Song dans le Sud : l’empire chinois entier est désormais administré par Kubilaï, le premier empereur non Han, même s’il est culturellement très proche des Han. C’est ainsi que, voici bientôt huit cents ans, la dynastie des Yuan apporta sur un plateau la Mongolie et le Tibet à la dynastie Yuan.

 

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