CHINAHOY

30-June-2017

Empereur Kangxi des Qing

 

(France) CHRISTOPHE TRONTIN

Second empereur de la dynastie des Qing (1644-1911), c'est lui qui peut se targuer d'avoir eu, dans la longue histoire chinoise où défilent les dynasties, le règne le plus long : près de 62 ans. C'est dix ans de moins que Louis XIV, dont il fut le contemporain. Mais l'empereur Kangxi a bien d'autres réalisations à son actif.

Ses débuts sont un peu chaotiques : il n'a que sept ans à la mort de son père, et le protocole veut qu'il se retrouve flanqué d'un régent, un certain Aobai. Comme souvent, ce dernier prend goût au pouvoir et renâcle au moment de céder la place au prince comme prévu une fois ses quinze ans révolus... Le prince ne l'entend pas de cette oreille, mais il lui faut toute une année d'intrigues et de persuasion avant de parvenir, en 1669, à se débarrasser de son encombrant cicérone et assumer enfin la direction sans partage de l'empire.

Dès 1673, il doit faire face à la « triple sécession » : Yunnan, Sichuan et Guangdong se rebellent et annoncent leur désir de se séparer de l'empire. Kangxi réagit de manière décidée et envoie ses armées « pacifier » les confins turbulents qui se tiendront finalement tranquilles pendant tout son règne.

Quelques années plus tard, c'est sur les confins Nord que s'installe la pagaïe. De 1680 à 1689, plusieurs batailles opposent la dynastie des Qing à l'Empire russe, qui se concluent finalement par le traité de Nertchinsk signé avec l'impératrice de Russie pour fixer enfin le tracé de la frontière sino-russe dans la région de l'Amour.

Mais déjà, d'autres nuages s'accumulent, cette fois dans l'Ouest mystérieux où la lutte fait rage entre factions mongoles et tibétaines qui secouent le joug de la dynastie. Le Dalaï Lama de l'époque, un certain Sangyé Gyatso cherche à briser la domination mongole sur le Tibet depuis le XIIe siècle et tente d'empoisonner Lhazang Khan en 1701 ; ce dernier riposte en 1705 en envahissant la capitale pour remplacer Sangyé Gyatso par un nouvel « océan de sagesse », du nom de Yeshe Gyatso. Des factions mongoles pro-Qing, Dzoungars et Khakhas, et les indépendantistes Chakhars s'affrontent, Lhazang est tué, le Tibet s'enfonce dans une spirale de violence incontrôlable... C'est sur ces entrefaites que l'empereur Kangxi intervient finalement, reprenant le contrôle de Lhassa et du Tibet en 1720, qui resteront désormais en paix sous la tutelle des Qing.

Mais l'empereur Kangxi n'a pas fait que clarifier et consolider les frontières de l'empire : il s'est également attelé à sa restauration. Sa première mesure, à peine débarrassé de la régence, fut une réforme agraire d'envergure. Persuadé que la force de la Chine résidait dans sa paysannerie, il voulut lui rendre sa dignité. Renversant la vapeur par rapport à l'exploitation très dure des paysans préconisée par Aobai, il organisa la restitution des terres confisquées et promulga un édit impérial qui interdisait jusqu'à nouvel ordre ces confiscations. Cette réforme inaugura une période de relative abondance dans le royaume, et surtout mit fin aux révoltes périodiques qui secouaient le pays.

D'autre part, il décida de faire reconstruire le Grand Canal. Celui-ci, qui datait des Sui (581-618), faisait piètre figure mille ans plus tard. Un chantier que l'empereur suivit personnellement, surtout dans le Nord de la Chine, car il avait appris quelques notions d'hydraulique et considérait ce projet comme le chef-d'œuvre de son règne.

Mais ceux qui étudient le chinois associent le nom de Kangxi à tout autre chose. Ils ont forcément entendu parler du fameux dictionnaire de Kangxi, un ouvrage monumental ordonné par l'empereur qui voulut que fussent recensés tous les caractères chinois en usage dans l'empire. Le délai de 5 ans décrété par l'impérial commanditaire ne put pas être tenu, puisqu'il fallut finalement 6 années de travail aux érudits de tout le pays pour compiler ses 47 000 entrées, créant le dictionnaire le plus détaillé de son époque en se basant sur des travaux datant de l'époque Ming (1368-1644). Pour classer ces innombrables caractères on inventa le système, toujours d'actualité, qui rassemble les caractères chinois en 214 clés ensuite rangés par nombre de traits et qui fait le bonheur de tous les étudiants mandarinophones du monde.

 

 

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