CHINAHOY

26-December-2013

La bataille de la Chine contre le smog sera difficile à gagner

 

La propagation d'un smog étouffant vers un nombre croissant de villes chinoises cet hiver est tombée comme un avertissement pour le pays : la Chine doit intensifier sa campagne contre les dommages causés à l'environnement par trois décennies de croissance rapide.

Dans sa dernière attaque, le smog a frappé mardi, veille de Noël, 16 des 74 villes surveillées. Les chiffres du smog dans ces villes, qui mesurent le niveau de particules fines qui est considéré comme dangereux, a dépassé 300, soit environ six fois le niveau jugé acceptable. Une douzaine de villes ont enregistré des chiffres « au-delà de l'indice » sur l'échelle de la pollution.

Un message sur Sina Weibo, la version chinoise de Twitter, a répondu à ces chiffres avec humour, en disant que « Noël a dû être annulé parce que le Père Noël est tombé dans la neige et n'a pas réussi à obtenir de l'aide lors de sa tournée de distribution de cadeaux en Chine à cause du smog ». Le message a été transféré des dizaines de milliers de fois, comme une plaisanterie destinée à se moquer de cette brume dangereuse.

Les données officielles ont montré que l'année 2013 a enregistré le plus grand nombre de jours de smog en un an depuis les 52 dernières années. Depuis le début de décembre, au moins 25 régions et provinces ont déclaré des niveaux de pollution élevés, en particulier de PM2.5, qui sont des particules flottantes minuscules mesurant 2,5 microns ou moins de diamètre. Les particules PM2.5 sont particulièrement dangereuses, car elles peuvent pénétrer dans les poumons et causer des maladies comme des problèmes respiratoires.

Nulle part où aller

Chen Jie, qui vit à Beijing, est à un an de l'âge de la retraite. Après un voyage dans sa ville natale recouverte de smog dans l'est de la Chine, qui s'est avérée aussi décevante que la capitale, Mme Chen est devenue déterminée à trouver un endroit propre pour s'installer pendant sa retraite.

Comme la nappe de smog a commencé à s'étendre des villes du nord du pays vers le sud, les recherches de Mme Chen sont allées aussi loin que de Hainan, la province insulaire la plus méridionale du pays, connue pour ses paysages tropicaux.

« J'ai été totalement surprise de voir que Haikou, la capitale, a aussi un problème de smog », a-t-elle déclaré.

Haikou, un lieu de villégiature considéré par beaucoup comme un endroit idéal pour se « nettoyer les poumons », a enregistré une semaine brumeuse au début de ce mois, avec des chiffres de smog atteignant plus de 100.

La pollution a été causée par des polluants dérivants des régions du nord, couplés avec les émissions des automobiles locales et des conditions météorologiques hivernales défavorables, ont expliqué les autorités locales après avoir mené une enquête d'urgence.

La fréquence des jours étouffés par le smog récemment constatée dans des villes du sud comme Haikou et Fuzhou, ainsi que dans des villes de l'Ouest comme Lhassa, où l'air est une attraction touristique majeure, a étonné les résidents locaux.

« Je séjourne à Haikou depuis près de 20 ans. Je n'ai vu que du brouillard, jamais du smog. Une brume comme ça pendant tant de jours de suite, c'est rare », a déclaré une femme du nom de Liu.

Ceux qui ne peuvent pas migrer vers d'autres lieux augmentent le temps passé chez eux, avec des filtres à air coûteux installés dans leurs appartements, et portent des masques autant que possible quand ils sortent les jours de smog.

A Shanghai, le centre économique de l'Est du pays, le smog a affecté les enfants et les personnes âgées qui sont vulnérables à l'air sale. Les hôpitaux locaux ont ainsi traité 5 070 cas de problèmes respiratoires entre le 2 décembre et le 5 décembre, en hausse de 25,9% par rapport à l'an dernier.

« Pour beaucoup de citadins, le bonheur apporté par la hausse de leurs revenus est loin d'être suffisant pour compenser la disparition de leur bonheur emporté par la pollution de l'environnement », a déclaré Zhang Xiaode, professeur à l'Académie chinoise de gouvernance.

« Si nous ne nous occupons pas sérieusement de la pollution, il n'y aura plus nulle part où aller », a dit Mme Chen.

Des obstacles au changement

Le fléau du smog reflète le double effet de l'expansion économique incontrôlée de la Chine, ce qui soulève une question cruciale : un nouvel équilibre doit être atteint entre la croissance de l'économie et protection de l'environnement.

Le pays a annoncé des mesures depuis des années pour lutter contre la pollution, mais les progrès qui ont été faits sont apparemment limités.

Les responsables locaux considèrent généralement qu'un environnement de qualité passe après les avantages économiques à court terme, ce qui contribue à leur carrière politique. Dans le même temps, les responsabilités environnementales dispersées dans tous les ministères du Gouvernement ont conduit à une mauvaise mise en œuvre des politiques.

La fermeture des usines et des centrales électriques au charbon polluantes ainsi que l'imposition de normes environnementales plus strictes ont également rencontré une forte opposition de la part des milieux de l'industrie.

Le nouveau Gouvernement chinois, entré en fonction en mars dernier, s'est montré décidé à sortir l'économie d'un modèle de croissance à tout prix, et à déployer des mesures visant à renforcer la lutte contre le problème de la pollution.

Selon un projet de réforme globale dégagé par la nouvelle direction, la Chine va corriger la façon d'évaluer les responsables, orientée sur des critères de croissance économique, et accroître le poids d'indicateurs tels que les dommages à l'environnement et les avantages écologiques.

Elle s'est également engagée à mettre en place une autorité du Gouvernement central plus unifiée afin de s'assurer que les règles environnementales seront appliquées efficacement.

Le gouvernement s'est engagé, dans un plan de lutte contre la pollution de l'air publié en septembre, à investir 1 700 milliards de Yuans (280 milliards de Dollars US) au cours des cinq prochaines années et à limiter la concentration moyenne annuelle de particules fines à un maximum de 60 microgrammes par mètre cube à Beijing en 2017, entre autres objectifs.

Les experts estiment que pour atteindre la norme de 35 microgrammes par mètre cube fixée par l'Organisation mondiale de la Santé, il faudra au moins dix ans ou plus.

« Le smog est une mauvaise chose, mais je crois qu'il va accélérer le rythme de rééquilibrage, la restructuration industrielle et l'ajustement de la structure de l'énergie de la Chine», a déclaré Zhang Guobao, Directeur du Comité consultatif d'experts de l'Administration nationale de l'énergie.

 

Source: le Quotidien du Peuple en ligne

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