Sommaire du Avpil 2001
 
Les chaussures chinoises

 LA culture vestimentaire chinoise est riche et variée et les chaussures ont un style qui leur est propre. La recherche sur l'origine de la culture des chaussures chinoises est un sujet passionnant.

Des pieds bandés à la botte en cuir

Durant l'Antiquité, on classait les vêtements en trois catégories: le vêtement couvrant la partie supérieure du corps, le vêtement couvrant la partie inférieure et tout ce qui habillait les pieds, telles les chaussures et les chaussettes. Dans les anciens caractères chinois, tant pour la chaussette que pour la chaussure, la clé est la même: le cuir, qui était illustré sur carapace et sur os  par la forme d'un animal éventré. Ces connaissances nous permettent de comprendre les relations de la chaussure et de la chaussette avec le cuir, à l'époque où les caractères ont été créés. En effet,  à l'origine, les chaussures étaient des chaussettes faites de peau d'animaux, mais elles n'avaient pas la forme des chaussettes d'aujourd'hui qui suivent la forme du pied. Plus précisément, ce genre de chaussures ou de chaussettes n'était qu'un cuir servant à bander les pieds pour les protéger contre le froid. Les ancêtres retiraient la peau de l'animal avec un couteau de pierre, et ils s'enveloppaient ensuite les pieds d'une lanière. D'après les déductions des spécialistes, ce genre de " chaussures " rudimentaires a été porté pendant l'âge de pierre.

Suite à l'invention de l'aiguille d'os,  du fil de tendon séché et du cuir d'animal, amolli avec de la sève de plantes et du gras animal, les hommes primitifs purent coudre des "  chaussures de cuir ".

Jusqu'à présent, les chaussures en cuir les plus raffinées qui ont été découverts sont celles qui habillaient les pieds de la Belle de la Cité antique de Loulan, au Xinjiang, dont le cadavre a été enterré dans le sable pendant plus de 4 000 ans. C'est une paire de bottes en cuir de mouton dont la semelle et la guêtre sont cousues à grands points avec une cordelette en cuir. Bien que la couture soit rudimentaire, la chaussure n'était plus une simple enveloppe de pieds, ce qui lui confère une grande importance dans l'histoire de la cordonnerie en Chine.

Dans l'Antiquité chinoise, les peuplades nomades du Nord portaient des bottes fabriqueés de matériaux différents.  Les Tibétains se chaussaient de bottes en cuir de yack, les Oroqen confectionnaient des chaussures en peau de chevreuil, les Hezhe, en peau de poisson et  les Xiongnu, qui vivaient au Nord, excellaient dans la fabrication de chaussures en feutre. Pour lutter contre le froid, ces derniers enveloppaient d'abord les pieds dans du tissu, puis enfilaient des chaussettes de feutre pour terminer par des chaussures de feutre.

C'est le roi Wuling de l'État de Zhao qui a introduit la botte dans le bassin des cours moyen et inférieur du fleuve Jaune. En 325 av. J.-C., comme les États vassaux se disputaient l'hégémonie,  le roi de l'État de Zhao prit la décision d'effectuer une réforme des affaires militaires en vue de bien établir la puissance de son pays. Pour le combat, il mobilisa la cavalerie à la place des chars, ce qui exigea l'introduction, de la veste, du pantalon et des bottes des ethnies du Nord et de l'Ouest qui seyaient mieux au cavalier au combat. Les larges robes et les chaussures à semelle en bois des soldats furent remplacés, et l'État de Zhao devint peu de temps après l'un des sept pays puissants de l'époque.

Une fois ces bottes introduites dans le centre de la Plaine, leur technique et leur modèle se diversifièrent. À l'époque des Ming (1368-1644), apparurent les Tinghua, une sorte de bottes cloutées avec souliers imperméables portées par les fonctionnaires. L'histoire des Ming fait mention de ces souliers imperméables: " Au jour de pluie, les fonctionnaires faisaient leur entrée dans la cour et le palais retentissait du son des Tinghua. Celles-ci se portait à l'extérieur des chaussures et devaient être enlevées devant l'entrée de la salle du palais impérial."  

L'espadrille et la socque

Au moment où les gens de l'Ouest cousaient les bottes avec une aiguille en os et du fil fait de peau d'animal, les ancêtres de l'Est utilisaient l'aiguille en bambou et des herbes pour tresser des sandales. Selon les découvertes archéologiques, le tressage à l'aide des fibres de plantes pour la confection d'objets courants peut remonter jusqu'à 7 000 ans chez les ancêtres chinois. Par conséquent, l'aiguille en bambou et la corde de lin seraient appararues plus tôt que l'aiguille en os et la corde en peau d'animaux. C'est un bond prodigieux qui a fait passer la fabrication des chaussures, de l'enveloppe pour les pieds à l'espadrille.

Pour expliquer la naissance de l'espadrille, on a recours à une légende populaire: Dans l'Antiquité, un pauvre bougre tirait sa subsistance de l'abattage. Dans les montagnes, les ronces et les pierres acérées blessaient souvent ses pieds nus. Il enveloppait alors ses pieds avec des herbes, mais comme celles-ci se brisaient facilement, il les cordaient pour les enrouler ensuite sur ses pieds. Mais enrouler les herbes et les détacher lui donnaient beaucoup de peine, de sorte qu'il chercha par tous les moyens à tresser la semelle et l'empeigne, ce qui donna naissance à la sandale.

Il y a beaucoup de sortes d'herbes convenables au tressage de l'espadrille et c'est pourquoi, en Chine, au cours de l'Antiquité, à part les nomades, les gens de partout en portaient. Cependant, au Nord, on portait en principe des bottes d'herbes épaisses pour lutter contre le froid et, au Sud, on mettait les pantoufles qui convenaient mieux au climat pluvieux et chaud. Dès sa naissance, l'espadrille a comblé les rois et les nobles. Les lettrés aimaient aussi la porter en voyage et les paysans, pour travailler aux champs. Les paysans du littoral du Shandong mettaient une sorte de bottes qui s'appelaient Caowozi. C'était une sorte de bottes tressées de tiges de massette et doté d'une doublure d'épi de maïs qui assurait une bonne conservation de la chaleur. À l'heure actuelle, il y a encore des paysans qui tressent ce genre de bottes pour l'exportation.

Pour rendre ces bottes plus résistantes et isothermes, on leur posait une semelle en bois, ce qui leur donnait les propriétés à la fois de la sandale d'herbes et de la socque. L'origine de la socque remonterait à l'époque des Royaumes combattants (475-221 av. J.-C.). Il y en avait deux sortes: avec semelle plate et semelle dentée. Xie Lingyun (385-433), poète de la dynasties du Nord et du Sud, aimait escalader des montagnes et fabriquait une sorte de socque dentée dont il pouvait détacher les dents de devant au moment de la montée et les dents de derrière lors de la descente. Cette socque antidérapante qui assurait une bonne stabilité s'appelait la socque de M. Xie.

Dans la dynastie des Xia (XXIIe s.-XVIIe s. av. J.-C.), avant l'apparition de la socque, il y a eu encore une sorte de bottes en bois destinées à interner les serfs. Ces bottes étaient formées d'un tronçon en bois d'un mètre de long et de 30 cm de diamètre, avec deux trous percés au centre  et une serrure en bois, ce qui permettait d'enfermer les pieds du serf à l'intérieur. On appelle ces chaussures des bottes en bois plutôt qu'un instrument de torture cruel.

La chaussure militaire, le soulier de toile et la chaussure à empeigne de satin

Dans les ruines deYinshang ( dernière période de la dynastie des Shang, XIVe s.-XIIe s. av. J.-C.), on a découvert une armure et une paire de guêtres, et dans une tombe de cette période, une statue en jade d'un personnage agenouillé dont la tête manque. À la cheville, on voit les traces d'un ruban enroulé, ce qui évoque le port de la jambière. Durant les combats, les jambettes sont faciles à être blessées. Pour les protéger et que la marche soit facile, avant la naissance de la botte militaire, on utilisait la jambière faite de peau d'animal ou de rotin. Les spécialistes ont considéré ce genre de jambière comme l'origine de la bottine militaire. C'était une combinaison de jambière et de chaussure.

Sur la semelle de la chaussure portée par une statue de soldat agenouillé de la dynastie des Zhou, il y 2 000 ans, et qui a été déterrée à Houma, province du Shanxi, des lignes régulières de pointes visibles montrent bien cette semelle qui ressemble à celle du soulier de toile d'aujourd'hui, ce qui nous permet de connaître le soulier de toile utilisé comme chaussure militaire pendant la dynastie des Zhou, il y a plus de 2 000 ans. La toile utilisée pour le soulier était tissée de lin et de fibres de puéraire. À l'époque, la Chine ne produisait pas de coton,  puisque ce dernier a été introduit en Chine par la route de la Soie. La semelle du soulier de toile, piquée avec des fils de lin, rend le soulier résistant à l'usure; cette théorie de frottement fut la première à être utilisée dans la fabrication de la chaussure chinoise. Les 8 000 guerriers et chevaux en terre cuite, déterrés dans le tombeau de Shihuangdi, premier empereur des Qin (211-206 av. J.-C.), présentent les résultats de la fabrication des chaussures chinoises: le général et le cavalier portent des bottes en cuir, les archers sont chaussés de souliers à lacet avec semelles piquées, ce qui facilite la course. Par conséquent, à l'époque des Qin, la chaussure militaire différait selon le grade et le type d'armée et elle était standardisée, et  l'intendance s'occupait de la fabrication.

Dans la dynastie des Qing (1644-1911), parmi les chaussures militaires, est apparue une sorte de patins ressemblant au patin à glace de maintenant. C'était une chaussure en cuir avec une ou deux tiges de fer enchâssées dans la semelle. Les soldats qui portaient ce genre de chaussures pouvaient courir sur la glace. La famille impériale des Qing, d'origine mandchoue, habitait au Nord-Est, une région très froide. La course sur la glace constituait l'entraînement militaire en hiver. Cette tradition a été toujours conservée, même après que la dynastie des Qing eut fixé sa capitale à Beijing. Peu à peu, cet entraînement militaire, qu'on faisait à l'intérieur comme à l'extérieur de la cour impériale, s'est transformé graduellement en théâtre sur glace.

L'élevage des vers à soie remonte à 4 000-5 000 ans en Chine. Durant la dynastie des Shang , on savait tisser la soie et le brocard à rayures et colorer le tissu à l'aide de plantes et de matières minérales, ce qui influença fortement le style de chaussures chinoises et lui donna à la fois simplicité et somptuosité. Dès lors, les nobles portèrent des chaussures à empeigne de satin au lieu de l'espadrille.

D'après les données de la dynastie des Zhou, autrefois, c'était les femmes qui s'occupaient de fabriquer les chaussures. À cette époque, est apparue la cordonnerie, toutefois considérée comme un métier honteux, dont le rôle était de fabriquer spécialement les chaussures des impératrices et des favorites impériales. À l'époque des Royaumes combattants, dans l'État des Qi, le travail à l'aiguille des femmes était bien considéré. Toutes les femmes devaient savoir manier l'aiguille et les ciseaux, ce qui favorisa le développement de la soierie et de la cordonnerie. Pour embellir la chaussure de soie, les femmes des Qi brodaient directement des motifs sur l'empeigne ou ornaient cette dernière de pierres précieuses, de perles, d'or et d'argent. La chaussure avec perles était à la mode pour les dignitaires de l'époque. Par la suite, sur le marché des serfs, les jeunes filles pauvres commencèrent à porter la chaussures de soie brodée pour laisser les riches les choisir comme concubines et comme servantes.

Tout ce que les ancêtres portaient aux pieds a évolué: des bandelettes pour les pieds aux bottes en cuir, de l'espadrille à la socque et aux chaussures de toile ... ; cette évolution a eu un rapport avec la localisation, le climat et les conditions naturelles et a entretenu des liens étroits avec les phénomènes sociaux et culturels. Le protocole d'un État, les habitudes de ses gouvernants et les goûts de sa population influencent toujours la mode, les modèles et le développement de l'artisanat. Ce contexte fait naître divers us et coutumes dans le domaine des chaussures et des cordonneries aux enseignes célèbres, grâce à des conceptions et à des procédés particuliers.

Les pieds bandés

À l'époque ancienne, en Chine, les petites filles de 4 à 8 ans devaient bander leurs pieds. Ces derniers se déformaient en voûte, ce qui permettaient à ces fillettes de porter une paire de chaussures minuscules de 10 cm environ. Il semble, qu'il y a plus de 2 000 ans, les pieds bandés étaient considérés comme un critère de beauté pour les femmes. L'empereur Shihuangdi des Qin évaluait la beauté selon la petitesse des pieds. Bander les pieds dans un objectif de beauté remonterait au Xe siècle. Comme le dernier empereur se passionnait pour la musique et la beauté, il demanda de bander les pieds de toutes les femmes de la cour durant leur croissance, afin qu'elles puissent danser sur une tribune de lotus en or. Leur gestuelle gracieuse lui faisait penser à des fées qui  seraient descendues du ciel.

Bander les pieds, c'était en fait infliger un supplice à ces petites filles. Les femmes aux pieds bandés marchaient d'un pas chancelant, ne pouvaient plus marcher vite ou courir. Leur rôle était de choyer l'empereur, et cette coutume se répandit de la cour jusqu'aux couches populaires. Les dynasties des Song et des Ming connurent l'apogée de cette coutume. À cette époque, même les immigrées juives du Hunan avaient les pieds bandés.

En bas âge, une fois leur pieds bandés, les petites filles pleuraient et gémissaient toute la nuit. Pour les consoler, leur mère leur disait qu'une jeune fille avec de grands pieds ne trouverait pas mari . À l'époque, c'était la vérité. Lorsqu'il allait rencontrer une jeune fille, l'homme scrutait d'abord ses pieds. Une jeune fille à petits pieds pouvait trouver une belle-famille de bon niveau et recevoir de riches cadeaux de fiançailles.

Personne ne pouvait regarder les pieds nus des femmes à pieds bandés,  et ces derniers étaient toujours enveloppés de chaussettes, même aux jours les plus chauds.  En général, ces femmes-là s'assoyaient sur le kang ( lit en brique), les jambes croisées pour attier les regards sur les motifs de leurs chaussettes. La première fois qu'elles permettaient à un homme de voir leurs pieds nus était lors de la nuit de noce. Au jour du mariage, au moment de monter sur la chaise à porteurs, la jeune mariée devait porter des chaussures à empeigne violette et à semelle blanche, symbolisant une progéniture nombreuse; au moment d'en descendre, elle changeait ses chaussures pour des jaunes, les chaussures Caitang (mettre les pieds sur le sol de la maison de la belle-famille); pour entrer dans la chambre nuptiale, elle portait les chaussures Shuijinlian, brodées d'images d'initiation à la vie sexuelle. C'était le mari qui déchaussait sa femme au moment de se coucher pour commencer la vie nuptiale.

En 1644, la famille impériale mandchoue des Qing déménagea à Beijing, capitale de cette dynastie. Les femmes mandchoues, qui ne bandaient pas leurs pieds, portaient des chaussures à semelle épaise. La semelle, faite de bois et recouverte de tissu blanc, avait 7-13 cm de haut. Elle s'appellait ou bien semelle " pot à fleurs ", vu qu'elle était plus large en haut qu'en bas, ou bien semelle " sabot de cheval " si, au contraire, elle était plus large en bas qu'en haut. Avant de vivre à l'intérieur de la passe Shanhaiguan, les Mandchous vivaient dans les régions montagneuses du Nord-Est, et les femmes cueillaient des champignons dans les montagnes. Pour se protéger des serpents, elles attachaient souvent un morceau de bois sous la semelle de leurs chaussures, ce qui, avec le temps, devint une coutume. Par exemple, Cixi, impératrice douairière, portait des chaussures " pot à fleurs " dont la semelle avait 10 cm de haut. Bien que les chaussures " pot à fleurs " fussent répandues à la cour impériale, les femmes han portaient toujours les chaussures minuscules. Le gouvernement des Qing défendit de bander les pieds, mais dans les familles des Han, à l'extérieur de la cour, les femmes avaient toujours les pieds bandés. Au milieu du XXe siècle, après la fondation de la Chine nouvelle, les femmes chinoises purent sortir de la maison pour travailler et étudier comme les hommes, et la coutume de bander les pieds tomba complètement en désuétude.

Rites à propos des chaussures

Pour s'habiller, manger, se loger, marcher et même se chausser, les anciens Chinois se conformaient toujours aux rites. Par exemple, d'après les rites de la dynasties des Zhou  (1066-256 av. J.-C.), il fallait se déchausser avant d'entrer dans une pièce, enlever les chaussures et les chaussettes avant d'assister à un banquet et pour rendre visite à l'empereur. Toutefois, pour prendre part à une cérémonie mortuaire, les pieds nus étaient considérés comme une impolitesse.

À l'époque ancienne, les chaussures différaient selon l'usage: mariage, funérailles et deuil. Les chaussures nuptiales étaient rouges ou roses, couleurs représentant la célébration, et elles étaient brodées de fleurs, d'oiseaux et de porte-bonheur. Dans la dynastie des Han (206 av. J.-C. -220 apr. J.-C.), au moment du mariage, les jeunes filles portaient des socles peints de motifs et attachées de bandes de soie multicolores. Quant aux jeunes filles mandchoues de la noblesse, elles portaient des chaussures nuptiales à empeigne bleue et brodées d'un caractère rouge " double bonheur ".

Les morts portaient des chaussures funéraires. De la dynastie des Han à celles des Wei et des Jin (206 av. J.-C. -420 apr. J.-C.), les empereurs décédés furent chaussés de souliers de jade assortis au vêtement funéraire qui était confectionné de pièces de jade et cousu de fils d'or. À l'époque des Qing, quand l'empereur décédait, les rites demandaient de brûler ses chaussures et ses bottes. Par exemple, à la mort de l'empereur Guangxu (1875-1909), on fit brûler 104 paires de chaussures et de bottes, le plus grand nombre à l'époque. Les chaussures funéraires de la population étaient bleues, noires et brunes pour les hommes, brodées de motifs multicolores pour les femmes. La semelle des chaussures funéraires était brodée de fleurs de lotus et de dessins d'échelle pour donner l'idée de poser les pieds sur des fleurs de lotus et de monter pas à pas jusqu'au paradis.

Dans la famille, s'il y avait une personne décédée, les membres portaient des vêtements et des chaussures de deuil, de couleur blanche. Dans les temps anciens,  comme on portait des chaussures de lin et de paille, on cousait alors une petite pièce de tissu blanc sur l'empeigne des chaussures de toile ou parfois, on les décorait d'une lanière rouge à l'arrière pour exprimer le deuil. Les chaussures portant le caractère " bonheur "  étaient portées au moment de féliciter quelqu'un pour sa longévité. Ce caractère, brodé sur l'empeigne, signifiait que la longévité des vieillards faisait le bonheur des jeunes générations.

Les sentiments s'exprimaient aussi dans la fabrication des chaussures pour enfants. Autrefois, les enfants portaient, dès leur naissance, des chaussures à motifs d'animaux confectionnées par leurs mères. Mentionnons les chaussures à tête de tigre, les chaussures à figurine de diable,  les chaussures à poissons, etc. Les motifs d'animaux, collés ou brodés sur l'empeigne, servaient à la fois à renforcer l'empeigne et à chasser les mauvais esprits. En hiver, on portait des chaussures ouatées en forme de moule dont les deux pièces de l'empeigne symbolisaient les mains d'une mère tenant son enfant.

La société féodale était hiérachisée. À l'époque de la dynastie du Sud (420-589), les lettrés et les pauvres ne pouvaient porter que l'espadrille et la chaussure de toile ou marcher les pieds nus. Les nobles portaient des chaussures en cuir ou des sandales en soie. Quant à la couleur des chaussures, celle-ci différait selon le métier. Les soldats et les ouvriers portaient seulement du noir, du vert et du blanc. Les serviteurs n'utilisaient que le rouge et le noir. Si quelqu'un enfreignait la loi, il était puni. À l'époque des Jin de l'Ouest (265-317), les gouvernants méprisaient les commerçants. Ils promulguèrent et mirent en vigueur le règlement suivant: les commerçants devaient porter une chaussure blanche et une chaussure noire. Durant la dynastie des Qing, le jaune était considéré comme la couleur réservée à l'empereur, le jaune or était réservé aux nobles et l'abricot, aux gens du peuple.

Une cordonnerie centenaire

Les bottes en cuir des gens du Nord servaient souvent à l'armée et avaient la faveur de la population. Dès la dynastie des Sui (581-618), les bottes, dont la mode changeait sans cesse, devinrent les bottes chaoxue ( bottes portées par les officiers civils et militaires pour l'audience impériale). Ce genre de bottes furent fabriquées en soie dans la dynastie des Qing. Pendant les jours ordinaires, on portait les bottes à bout pointu, et pour l'audience impériale, les bottes à bout carré. Au début, les bottes chaoxue étaient fabriquées à la cour impériale. Par la suite, des cordonneries spéciales furent chargées de fabriquer ce genre de bottes.

Zhao Ting, ancien apprenti cordonnier, connaissait bien son métier. En visant le marché des chaussures des nobles et des parents de la famille impériale, il ouvrit un magasin spécialisé dans les bottes chaoxue à Beijing, capitale de la dynastie des Qing, afin de gagner de l'argent auprès des nobles. Il donna à son magasin le nom de " Neiliangshen " signifiant promotion successive à la cour, ce qui pouvait satisfaire le désir des dignitaires d'être promus.

La sévérité des rites et des règlements de la dynastie des Qing demanda à la cordonnerie Neiliangshen de perfectionner sa technique et d'améliorer continuellement la qualité. La semelle de ses chaussures se composait de 32 couches de toile, appelé semelle " à mille couches ", ce qui en faisait une semelle épaisse, mais légère. L'empeigne était faite de satin noir luisant, facile à brosser, confortable pour la marche. Ce genre de chaussures donnait fière allure. Chez Neiliangshen, les chaussures étaient faites sur mesure. Les pointures, les mesures et les formes des pieds des nobles, des officiers et des princes qui faisaient faire des chaussures dans cette cordonnerie étaient bien enregistrées dans les archives, ce qui offrait une grande facilité pour la fabrication des chaussures. Pour offrir des chaussures en cadeau aux dignitaires, il suffisait de trouver leur pointure dans les archives de Neiliangshen, bien connu dans la capitale. La renommée de ce magasin spécialisé s'est répandue, et il est devenu bien connu à l'intérieur et à l'extérieur du pays.

Après la dynastie des Qing, cette cordonnerie s'est occupée surtout des chaussures de toile pour les gens ordinaires. La semelle " à mille couches " est aérée, élastique, absorbe la sueur et est à l'épreuve de l'humidité. Elle est composée de tissu blanc de coton et  tissée de lin (cent points sur trois cm2). Pour rendre la semelle plus solide, on appose l'empeigne sur la semelle préparée dans l'eau chaude (80 °C-100 °C) on la presse et la séche, puis on la coud avec l'empeigne.

La semelle " à mille couches " a gagné le marché. Aujourd'hui, cette cordonnerie est très fréquentée. Les gens cultivés espèrent un retour à la nature, les Chinois d'outre-mer et les étrangers aiment bien ce genre de chaussures, fabriquées à la main, avec des matériaux naturels. N'importe qui peut faire faire des chaussures sur mesure dans cette cordonnerie qui gardera la pointure en archives.

PANG BLAN

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