CHINAHOY

1-April-2014

Changements à Lhassa

 

Le 2 mars 2014, dans la rue restaurée de Barkhor, pèlerins et visiteurs se succèdent continuellement.

 

ZHANG HONG, membre de la rédaction

Dans ce vieux quartier de 1,33 km², toutes les rues sont propres et ordonnées.

Gedra et sa femme sont tranquillement assis les jambes croisées sur la place devant le temple Jokhang. Quant à leur fils, il bavarde avec ses amis par WeChat (une application mobile très populaire en Chine). Tenpai Nyima, 13 ans, et son père Gedra, originaires de Dêgê au Sichuan, ont achevé il y a deux mois leur pèlerinage de 2 800 km – en se prosternant tous les trois pas – entre leur région natale et Lhassa. Il leur a fallu 7 mois et 20 jours.

Non loin d'eux, Angzhehai et sa femme prient le long du chemin de pèlerinage. C'est le troisième pèlerinage à Lhassa qu'a effectué Angzhehai, 74 ans. Il y a 62 ans, alors qu'il n'avait que 12 ans, il arriva pour la première fois à Lhassa sur une charrette à bœufs, après un voyage pénible de cinq mois. Pour son deuxième pèlerinage, âgé de 58 ans, il lui fallut passer quatre jours en bus pour relier le Qinghai au Tibet. Aujourd'hui, le trajet entre Xining (chef-lieu du Qinghai) et Lhassa ne prend plus qu'une nuit, indique-t-il.

Le vieux quartier de Lhassa, propre et fonctionnel

Il n'y a pas que la durée du parcours entre Lhassa et les autres régions qui ait changé : la ville en elle-même aussi.

Le 2 mars dernier, la rue Barkhor a accueilli son premier Nouvel An tibétain depuis sa transformation. Malgré la fermeture de nombre de boutiques pour les célébrations, un flot ininterrompu de pèlerins y a circulé. Les nouveaux éclairages donnent une ambiance douce au Barkhor. Les dalles d'ardoise issues de la montagne Nanshan (qui s'élève à une altitude de 5 000 m) sont solides et résistantes, et ont remplacé celles ordinaires qui pavaient la rue. Grâce à cela, le vieux quartier reprend son caractère simple et ancien, a déclaré Cao Pengcheng, directeur adjoint du comité de gestion du quartier Barkhor.

Les plus de 3 000 étals de marché en plein air se sont déplacés dans le supermarché Barkhor qui vient d'ouvrir. Le chemin de pèlerinage entourant le temple Jokhang est ainsi plus large.

Tout cela est à mettre au crédit des travaux de protection du vieux quartier de Lhassa qui ont commencés fin 2012. Avec un investissement de 1,5 milliard de yuans, les travaux ont duré six mois, et les infrastructures du quartier Barkhor ont été considérablement améliorées. Cao Pengcheng garde un souvenir vivace du quartier avant la rénovation : « Dans le passé, les deux côtés du quartier étaient jonchés d'étals, et c'était difficile de marcher. Les marchands étaient dehors par tous les temps. Ils devaient transporter leurs marchandises en tricycles à remorque. Aujourd'hui, les rues spacieuses sont praticables, pour les croyants comme pour les marchands. Ces derniers n'ont plus besoin de faire la navette avec leur tricycle. »

Outre le transfert des étals, les lignes électriques, pêle-mêle dans le passé, ont aussi fait l'objet d'une rénovation complète. Dans ce vieux quartier qui abrite surtout des édifices en bois, les lignes électriques étaient denses et en désordre comme des toiles d'araignées. La tension électrique était instable, et si l'on utilisait un appareil électrique avec une puissance un peu trop forte, une coupure se produisait. Surtout durant le Nouvel An, les comités de résidents devaient affecter plus de personnes pour veiller à ce que des incendies ne se produisent pas dans ce quartier vieux de 1 400 ans.

Dorje, 48 ans, a été de garde pendant le Nouvel An depuis 1993. Il y a 35 zones d'habitation sous la supervision de son comité de résidents. Avec la transformation complète du réseau électrique dans le quartier Barkhor, les risques latents ont maintenant été éliminés, et Dorje peut dormir tranquille. « Non seulement, cela a apporté la sécurité, mais c'est aussi beaucoup plus pratique, parce que chaque ménage a son propre compteur et paie suivant sa consommation. »

Dans ce vieux quartier de 1,33 km², toutes les rues sont propres et ordonnées. « Selon les dispositions, les nouvelles maisons construites à la place des anciennes doivent être compatibles avec le style antique du vieux quartier », dit Cao Pengcheng.

La ville de Lhassa multipliée par 20

Lhassa prit forme en tant que cité au XVIIe siècle. En 1950, la ville de Lhassa comptait 30 000 habitants et la zone urbaine avait une superficie de moins de 3 km², sans égouts et avec des routes en terre.

Aujourd'hui, la zone urbaine atteint plus de 60 km², soit une superficie 20 fois plus grande. Cao Pengcheng se rappelle que dans son enfance, il y avait des champs à l'est du bâtiment de la Poste, édifice emblématique de Lhassa. « La zone que l'on qualifiait d'urbaine comprenait seulement le temple Jokhang, le palais du Potala et leurs environs. On pouvait rapidement en faire le tour à bicyclette. »

On trouve une centaine d'auberges et de restaurants sur l'île Xianzu (pieds des dieux) qui se trouve sur la rivière Lhassa, à 2 km environ du Potala et du temple Jokhang. Près de la rivière, trône le site le plus élevé de Chine, et c'est là où se joue la pièce Princesse Wencheng. Depuis sa première représentation en août 2013, cette pièce a accueilli 210 000 touristes en deux mois, générant 30 millions de yuans de revenus.

En 2011, le gouvernement municipal de Lhassa s'est déplacé dans la partie orientale de la ville, qui était autrefois un champ de légumes, contribuant au développement local. La partie ouest, en expansion, est liée au district Doilungdêqên, sur la rive sud-est de la rivière Lhassa. La nouvelle zone de Newu deviendra la deuxième zone administrative de Lhassa.

Après 15 minutes en voiture vers l'est depuis Lhassa, on trouve un chantier de construction qui avait été le champ agricole de Caigungtang dans l'arrondissement Chengguan. Il deviendra la plus grande base d'éducation moderne du Tibet.

Devant les bâtiments en cours de construction, le vice-maire de Lhassa, Jigme Namgyal, dit à La Chine au présent : « La Cité de l'éducation a nécessité un investissement de 3,6 milliards de yuans et occupe 267 hectares. Au fil de l'avancée des travaux, 17 écoles dont l'école secondaire technique professionnelle n°1 de Lhassa, l'école pilote de Beijing, et celle du Jiangsu s'y sont déjà installées. à la rentrée 2014, elle accueillera ses premiers étudiants. »

Par le passé, les citadins tibétains de Lhassa envoyaient souvent leurs enfants étudier à l'extérieur. La Cité de l'éducation, explique le secrétaire du comité du Parti pour Lhassa, Qi Zhala, va suivre deux voies : « faire sortir les enfants du Tibet » et « faire entrer des enseignants au Tibet».

Rejet ferme des entreprises polluantes

À Lhassa, circulait un trait d'humour noir : en hiver, la seule verdure est le feu vert au carrefour. Aujourd'hui, les rues offrent déjà un panorama vert, bien que l'hiver ne soit pas fini. Dans le cadre du « projet de corridor écologique » mettant l'accent sur le reboisement des routes urbaines, des variétés d'arbres adaptées à l'environnement du plateau, comme les peupliers, les ormes, les ginkgos ou les cèdres, ont été plantées. Le taux de couverture verte des routes s'élève à 98 %.

En 2012, un grand projet de reboisement a commencé dans la montagne Nanshan, au sud de la rivière Lhassa. Ce projet d'un investissement total de 10 milliards de yuans durera dix ans (2013-2022). Avec des techniques avancées en provenance d'Israël et des États-Unis, de l'eau de la rivière Lhassa sera déviée pour irriguer les arbres sur la montagne. Ces arbres produiront de l'oxygène, serviront de barrières brise-vent et stabiliseront les dunes de sable.

La zone humide naturelle urbaine de Lhalu, au nord-ouest de Lhassa, la plus grande et la plus haute au monde, fait aussi l'objet d'une protection prioritaire. 700 millions de yuans ont été investis pour le déplacement des ménages dans la zone humide et pour sa réhabilitation.

« Les Tibétains eux-mêmes vivent en harmonie avec la nature, explique Cao Pengcheng. Les innombrables oiseaux migrateurs, comme les canards sauvages et les grues à cou noir, y affluent en hiver. »

Cependant, Lhassa n'échappe pas non plus au réchauffement climatique. Kelzang Phuntsog, 60 ans, se rappelle que quand il était jeune, il pouvait voir les étoiles dans le ciel toutes les nuits. Aujourd'hui, le ciel étoilé semble être loin, et la vue des sommets des lointaines montagnes enneigées se brouille peu à peu. Néanmoins, la qualité de l'air à Lhassa continue d'être la meilleure de Chine.

« Nous rejetons fermement les entreprises polluantes », a clairement indiqué Qi Zhala.

Aujourd'hui, il n'y a pas de pollution dans un rayon de 1 000 km autour de Lhassa, et Qi Zhala en est très fier. Il y a peu de temps, il a inspecté le lac Namtso et l'a admiré pour son paysage comparable à l'Antarctique. « Il faut préserver cette terre sacrée », a solennellement déclaré ce secrétaire tibétain, à la veille du Nouvel An tibétain.

 

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