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Quand le pouvoir du capital se déchaîne
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En 2011, Hugo Shong lance le programme Looking China, qui sponsorise la production conjointe de micro-films sur la culture chinoise par des étudiants chinois et étrangers en cinéma. |
HOU RUILI, membre de la rédaction
Le siège pékinois d'IDG Capital Partners comprend une dizaine de salles de conférence où sont négociés les nouveaux projets qui affluent toute l'année. La société, fondée en 1993, était l'une des premières entreprises de capital-risque à s'installer en Chine et elle est à l'origine de la création d'un certain nombre de marques devenues célèbres. Un exemple frappant de l'approche gagnant-gagnant dans les affaires, puisque IDG Capital Partners gère désormais un capital de 7,7 milliards de dollars. Près de 100 des 450 entreprises où la société a investi sont entrées en bourse ou ont été rachetées.
Hugo Shong, partenaire fondateur d'IDG Capital Partners, est le principal artisan de ce succès. Lorsqu'il passe en revue le développement foudroyant du marché boursier chinois dont il a été l'une des parties prenantes, M. Shong dévoile une franchise toute américaine combinée à un charisme bien chinois.
Répondre à l'appel de la réforme et de l'ouverture
M. Shong se félicite d'avoir été là, dans sa prime jeunesse, aux premières heures de la réforme et de l'ouverture chinoise. Depuis l'âge de 15 ans il travaillait comme électricien lorsqu'en 1977 le système de l'examen national a été remis en service à la fin de la Révolution culturelle. M. Shong a passé l'examen et a pu obtenir une place d'étudiant à la faculté des langues étrangères de l'université du Hunan. Il a ensuite enchaîné avec un master de journalisme à l'Académie des sciences sociales de Chine avant de partir pour Boston où il a étudié le journalisme et la communication.
Travaillant aux États-Unis en tant que journaliste, M. Shong écrivait des reportages sur toute une série d'investisseurs en capital-risque et légendes de la Silicon Valley. Lorsqu'il rejoignit IDG en novembre 1991, flairant déjà les opportunités d'affaires fabuleuses que recélait le marché chinois, il a proposé à son chef, Patrick J. McGovern, fondateur et P.-D.G. d'IDG, d'explorer les marchés d'Asie-Pacifique. En décembre 1991, il a été envoyé en Chine pour y lancer plus de 40 joint-ventures dans la presse et l'édition.
Au début de 1992, le dirigeant chinois Deng Xiaoping effectuait sa fameuse tournée d'inspection dans le Sud de la Chine où il a tenu son fameux discours sur l'importance de la réforme et la détermination du pays à la conduire. Pour M. Shong, cela signifiait qu'une mine d'or allait s'ouvrir pour les investissements en capital-risque, une conviction qu'allait partager M. McGovern. Les conditions du marché chinois cependant n'étaient encore assez matures, et les premiers projets d'investissement, notamment celui qui visait à développer la fabrication de batteries d'ordinateurs portables, ont échoué. Ce n'est qu'en 1996 qu'IDG Capital Partners a pu conduire sa première IPO, et en 2000 sa première « sortie » par reprise du capital. C'est grâce à sa longue expérience accumulée dans les technologies, les médias et les télécoms qu'IDG Capital Partners est parvenue à détecter, puis à soutenir toute une série de start-ups, Tencent, Baidu, Sohu ou encore Ctrip qui devaient finalement dominer le secteur de l'Internet chinois. La réputation d'IDG a explosé en conséquence, et M. Shong s'est vu acclamé en tant que capital-risqueur N°1 en Chine.
Tencent, une société fondée en 1998, s'est mise à développer un système de messagerie mobile, et l'année suivante elle obtenait d'IDG un financement de 1,1 million de dollars. Comme bien d'autres entreprises pionnières du secteur Internet chinois, elle allait connaître bien des maladies infantiles. Lors de cette période qu'on a surnommée « l'hiver de l'Internet » en 2000, IDG s'est retirée du capital de Tencent. Au moment de cette retraite précipitée, IDG avait déjà multiplié par 60 le capital investi. Cette décision, M. Shong l'admet volontiers, a été une erreur qu'il regrette encore aujourd'hui. Cette société est entretemps devenue un leader mondial des services Internet au chiffre d'affaires annuel de 102,86 milliards de yuans et Tencent modèle et influence le mode de vie et de communication de centaines de millions de Chinois. D'autre part, elle ne cesse d'ouvrir de nouveaux domaines au secteur Internet chinois.
Embrasser une ère nouvelle
Le soutien gouvernemental à l'entrepreneuriat et à l'innovation pour tous a suscité une prolifération d'entreprises innovantes, créant par là même un besoin accru de capital-risque. Dans le même temps, les capital-risqueurs étendent fiévreusement leurs capteurs pour essayer de détecter les opportunités qui leur permettront le meilleur retour sur investissement. Cette symbiose a créé une déferlante de capitaux destinés aux entreprises petites et moyennes dans le domaine des technologies nouvelles.
Afin de soutenir les technologies nouvelles et les bons projets, IDG Capital Partners a créé un fonds de 100 millions de dollars dédié aux start-ups d'entrepreneurs nés dans les années 1990. Jusqu'à ce jour, ce fonds a pris des parts dans 30 entreprises récemment créées par de jeunes entrepreneurs. L'une d'elles est Bilibili.com, inventeur et propagateur des fameux « bullet screen » qui a fait son succès auprès des jeunes. À la fin de l'année dernière, Bilibili était classé 228e au palmarès Alexa mondial et 36e en Chine.
À en croire M. Shong, une technologie particulière prend l'avantage à chaque nouvelle période du développement économique. Comme elle est généralement très attractive pour les jeunes, elle trouve dans la jeunesse un large public d'utilisateurs. Aujourd'hui, les technologies de l'Internet mobile sont largement diffusées et la génération des post-90 a grandi avec elles. IDG a financé, à hauteur de plusieurs milliards de dollars, plusieurs sociétés dont les dirigeants appartenaient à cette catégorie d'âge, dans l'espoir de les voir devenir le prochain Baidu, Alibaba ou Tencent.
En 2014, IDG Capital Partners a commencé à sponsoriser des compétitions d'entrepreneurs dans les universités en Chine et aux États-Unis, cueillant au passage de nombreuses idées innovantes et prometteuses.
IDG Capital Partners gère toutes sortes de fonds, depuis un fonds VC (venture capital), jusqu'à un fonds PE (private equity), en passant par divers fonds industriels et un fonds en yuan. Le fonds consacré aux médias et le fonds PE ont pris conjointement des parts dans la société de divertissement Legendary Pictures, et le fonds en yuan a investi dans Beijing Baofeng Inc. En expliquant le pourquoi de ce mélange des genres dans les investissements de sa société, M. Shong recourt au vocabulaire du ping-pong, un sport dont il est expert. « Nous avons le coup droit, le revers de balles, l'attaquant rapide et le défenseur. Ce n'est que lorsqu'une société possède des employés qui combinent toutes les compétences qu'elle peut assurer une croissance durable. »
Nouveaux domaines d'investissement
Cette dernière décennie a vu un marché chinois des capitaux plus mature qui s'est mis à attirer plus d'investisseurs internationaux. Ceux-ci apportent avec eux divers nouveaux fonds, de nouvelles techniques de gestion et des applications plus larges pour les outils Internet. Ceci a largement contribué à améliorer l'efficacité du financement des start-ups, mais cela a aussi entraîné une concurrence accrue pour IDG Capital Partners. Faire face aux marées montantes et descendantes des marchés a mis à rude épreuve les compétences de M. Shong et de son équipe, les obligeant à approfondir toujours plus leur compréhension de l'économie chinoise. Des compétences qui leur permettent de choisir de façon rationnelle les investissements au plus fort potentiel.
IDG Capital Partners prédit l'apparition de nouvelles super-sociétés dans diverses spécialités de la finance Internet. C'est pourquoi l'entreprise a investi dans 35 sociétés qui couvrent à peu près l'intégralité des options existantes dans ce domaine. Jusqu'à ce jour, 14 d'entre elles ont réussi à se qualifier pour une seconde tranche de financement, et la valeur estimée de la plupart d'entre elles dépasse 100 millions de dollars.
Alors que les sources conventionnelles d'énergie continuent de s'épuiser, l'humanité se trouve face au défi de trouver de nouvelles sources d'énergie renouvelables. Le capital-risque est généralement réticent à s'engager dans des projets liés aux énergies nouvelles, en raison des budgets importants en temps et en argent qui sont requis pour explorer et tester les technologies. M. Shong croit pour sa part que le temps est venu de changer la donne. IDG a investi dans la société Titangas Technology, qui produit des stations de recharge pour les voitures électriques. La pollution environnementale qui découle de la forte croissance de l'économie chinoise provoque désormais une inquiétude largement partagée. La promotion des voitures électriques est une des réponses à ce problème, mais l'engouement du public pour ces voitures est freiné par la pénurie de stations de recharge.
Afin de s'adapter à cette ère de croissance entraînée par la consommation et de tourisme de masse, IDG Capital Partners s'est également engagée dans plusieurs projets de tourisme au capital limité, notamment dans les bourgs fluviaux de Wuzhen dans le Zhejiang et de Gubei dans la banlieue de Beijing. Ces bourgs d'eau, riches de leur patrimoine architectural préservé et restauré, offrent aux citadins survoltés des métropoles voisines une échappatoire au stress urbain. L'entreprise coopère également avec six sites touristiques chinois où les infrastructures d'accueil seront améliorées pour accueillir des performances culturelles et d'autres activités.
Au travers de son partenariat avec le Beijing Tourism Group, IDG Capital Partners a fait ses premiers pas au contact d'enseignes réputées de l'hôtellerie et de la restauration, comme Home Inns ou Quanjude (canard laqué de Beijing). Par ailleurs, suivant la mode qui s'est répandue dans les familles chinoises aux revenus de plus en plus confortables, l'entreprise s'est associée à Baiyaxuan pour développer son offre de copies d'œuvres de grands peintres et de tableaux de maître à des fins de décoration intérieure.
Le shopping en ligne fait désormais fureur alors que de nombreux commerçants ont cessé de distribuer des produits frais en raison du coût élevé du stockage et des risques sanitaires. IDG représente une exception remarquable à cette tendance grâce à son partenariat avec COFCO womai.com, qui assure des tests fiables de tous les produits vendus.
« L'économie de marché chinoise a atteint un assez haut niveau et les décisions d'investissement peuvent désormais se baser principalement sur la demande du marché, en particulier lorsqu'il s'agit de biens de consommation, de services d'information et d'e-business », affirme M. Shong.
En 2014, cinq partenaires d'IDG, dont M. Shong, ont figuré au palmarès de Forbes China Ranking of Best Venture Capital Investors.
Rendre ses bienfaits à la société
C'est l'éducation qui a changé la vie de M. Shong, et on peut dire qu'il a suivi une carrière fulgurante. C'est pourquoi il a décidé en 1995 de faire un don d'un million de yuans à l'université du Hunan afin d'y établir une bourse d'études. Il a ensuite poursuivi son soutien à son alma mater en finançant un prix pour une piscine.
En 2004, il a proposé à l'université de Boston de fonder le Prix Hugo Shong Lifetime Journalism Achievement Award, qui s'accompagne d'une prime de 35 000 dollars, le premier accordé à une profession en particulier aux États-Unis par un ancien étudiant chinois, et le Prix Hugo Shong Reporting on Asia Award, assorti d'une prime de 15 000 dollars, soit 5 000 dollars de plus que le Prix Pulitzer. M. Shong a également fait don de 2 millions de dollars à McGovern Institute for Brain Research (MIBR) du MIT au travers d'échanges de chercheurs travaillant sur les pathologies du cerveau entre la Chine et les États-Unis. Sur sa recommandation, IDG a également conclu, en 2011, des accords de coopération avec l'université Tsinghua, l'université de Beijing et l'école normale de Beijing pour y créer l'IDG/McGovern Institute pour la recherche cérébrale dans ces trois universités chinoises reconnues, avec une dotation totale de 30 millions de dollars. Cet institut dédié à la recherche sur les pathologies du cerveau et le fonctionnement de la cognition et de la communication humaines va participer à l'avancée de la neurologie en Chine.
Il y a six ans, IDG et l'Université normale de Beijing ont fondé conjointement l'Academy for International Communication of Chinese Culture. Le programme Looking China lancé par l'institut à l'initiative de M. Shong sponsorise la production conjointe de micro-films par des étudiants en cinéma chinois et étrangers. Il a déjà reçu plus de 200 dossiers, dont un consacré au concept d'harmonie dans la culture chinoise, et un autre expliquant la philosophie du Tai Chi. M. Shong espère que ces courts-métrages pourront aider à promouvoir la compréhension de la culture chinoise en Occident, et ainsi contribuer à une meilleure appréciation du cinéma chinois à l'étranger.
Le président Xi a mentionné ce programme lors de son discours du 7 novembre 2015 à la National University of Singapour. « En juillet de l'année dernière, plusieurs étudiants singapouriens âgés d'à peine plus de 20 ans ont rejoint le programme Looking China pour en apprendre plus sur la Chine en prenant des photos. Ce programme les a emmenés vers le Nord-Ouest chinois et ils ont pu y entrevoir l'image d'une Chine modernisée à travers leurs objectifs, ressentir au plus près la culture chinoise en assistant avec le public local à une représentation de l'opéra Qinqiang, goûter aux nouilles pressées à la main de Lanzhou, et enfin vivre l'aventure en descendant la rivière sur des canots en peau de chèvre. Parallèlement mais dans un autre décor, deux étudiants chinois de la National University of Singapour ont passé une année entière à filmer l'histoire et les rêves de 50 citoyens de Singapour. Je suis sûr que vous avez entendu bien d'autres anecdotes sur de tels échanges interculturels. »
Ces 23 dernières années où l'économie chinoise a connu sa plus forte croissance ont été pour M. Shong l'occasion de faire fructifier son capital, réalisant à la fois son rêve chinois et son rêve américain.
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