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La poursuite de la politique de réforme et d’ouverture a un impact mondial
JOHN ROSS*
Le XIIIe Plan quinquennal chinois, qui s'étend sur la période 2016-2020 et vient d'être présenté à l'Assemblée populaire nationale, donne le ton non seulement du développement de la Chine, mais aussi celui des interactions entre la Chine et les autres pays. Par conséquent, il est important que les autres pays jugent avec précision des principaux effets que la continuation de la politique chinoise de la réforme et de l'ouverture pourra avoir sur eux. Les principales orientations le confirment, la Chine restera, parmi les puissances économiques majeures, la plus grande opportunité de coopération internationale.
Premier point clé, la croissance annuelle minimale fixée pour le PIB sur l'ensemble de la période de cinq ans à 6,5 % est plus importante pour la Chine et les autres pays que l'objectif fixé entre 6,5 et 7 % pour 2016. Certains commentateurs ont suggéré que, s'il est probable que la Chine parviendra à remplir son objectif de croissance à 6,5 % en 2016, cela pourrait être le prélude à un fort ralentissement, jusqu'à 5,0 % ou moins jusqu'en 2020. Si cela se produisait, la Chine serait en train de dériver vers le pire des scénarios, que l'on appelle ici le « piège du revenu intermédiaire ». L'arithmétique du plan quinquennal le montre, la Chine n'a aucune intention de laisser se produire ce scénario, et les indicateurs fondamentaux de son économie suggèrent qu'il n'y a aucune raison pour qu'il se produise.
L'objectif majeur du XIIIe plan est de construire la société de moyenne aisance, qui correspond à un doublement d'ici à 2020 des chiffres du PIB et du revenu par habitant de 2010. La croissance annuelle moyenne s'est établie à 7,8 % pendant la première moitié de cette décennie, c'est pourquoi la croissance sur la période 2016-2020 devra être au moins égale à 6,5 % par an. Avec un objectif compris entre 6,5 et 7 % pour 2016, cela signifie que le taux de croissance ne peut pas baisser de façon significative ces prochaines années si l'on veut que le plan remplisse ses objectifs.
Mais il y a plus important que ces engagements verbaux : les indicateurs fondamentaux de l'économie chinoise montrent que ces objectifs sont réalisables. Le taux d'investissement en actifs fixes est supérieur à 40 % du PIB, soit plus du double du niveau actuel aux États-Unis, alors que les statistiques montrent que l'efficience des investissements en termes de croissance générée est supérieure à celle que l'on mesure aux États-Unis.
Tout cela signifie que la Chine va conserver son statut de principal pôle de croissance économique mondiale pendant toute la durée du XIIIe plan. Dans le même temps, la croissance des États-Unis s'établissait à 2,4 % en 2015, ce qui correspondait en gros au taux moyen enregistré ces 20 dernières années. Même si l'on part du principe que la croissance américaine ne descendra pas en-dessous de ce taux, bien qu'elle ait montré une tendance au ralentissement depuis des décennies, cela signifie que l'économie américaine croîtra de 13 % sur les 5 prochaines années, contre 37 % en Chine.
Le second impact pour l'économie des autres pays provient de la combinaison de facteurs entre une croissance chinoise soutenue et l'ouverture de la Chine qui devient une puissance commerciale plus ouverte que les États-Unis. Selon les dernières données comparatives disponibles, le PIB chinois se composait pour 40,1 % du commerce international, contre seulement 30,1 % dans le cas du PIB américain. La plus grande ouverture de l'économie chinoise implique que sa croissance produit proportionnellement plus d'échanges internationaux qu'une croissance équivalente aux États-Unis.
Afin de prendre la juste mesure de ces tendances du commerce international, il est important de corriger un malentendu dû au fait que le volume du commerce extérieur de tous les pays, exprimé en dollars, est en déclin, en raison de la chute des cours des matières premières. Les dernières données publiées par le FMI montrent que le commerce international a reculé de 3 500 milliards de dollars, soit 11 %, par rapport à l'année précédente. Dans le même temps, la part de la Chine au commerce mondial s'est accrue, ce qui fait que ce pays a moins souffert que d'autres pays majeurs de ce recul. On voit sur le graphique les dernières données du FMI qui montrent que la part chinoise du commerce international vient d'atteindre son plus haut niveau historique. La Chine continue donc de tailler des croupières au reste du monde, que ce soit en termes de production industrielle ou de commerce international, consolidant sa position de première puissance commerciale mondiale.
Mais si la Chine renforce sa position de premier partenaire commercial mondial et en termes de croissance économique dans la continuité de tendances déjà bien établies, d'autres facteurs vont apparaître qui affecteront d'autres pays, alors que la Chine poursuivra sa transition de « pays à revenu intermédiaire » suivant les standards de la Banque mondiale à « pays à revenu élevé ». Certains de ces facteurs, comme le fait que la Chine est d'ores et déjà le leader mondial dans les énergies renouvelables, auront un effet indirect mais majeur sur les autres pays en réduisant le changement climatique. Mais deux autres processus économiques plus directs vont affecter l'économie d'autres pays.
Premièrement, la Chine ne fait pas exception au principe suivant lequel toutes les puissances économiques majeures se sont internationalisées d'abord par le commerce et dans un second temps par l'investissement direct à l'étranger (FDI). Mais la Chine possède des ressources financières inégalées pour développer son FDI. Ses réserves de change dépassant 3 200 milliards de dollars sont les plus importantes au monde. Par ailleurs, l'épargne nationale de la Chine, la matière première de son système financier, dépasse désormais, et de loin, celle des États-Unis. Des données publiées par la Banque mondiale et par les États-Unis montrent que l'épargne chinoise se situe aux alentours de 5 200 milliards de dollars, contre 3,3 trillions de dollars aux États-Unis.
Une puissance de feu financière sans équivalent dans le monde qui permet à la Chine d'accroître rapidement, année après année, ses flux de FDI, qui sont passés de moins de 20 milliards de dollars en 2006 à 118 milliards en 2015, tout en fournissant également la force qui sous-tend l'initiative des nouvelles Routes de la Soie et lui permet de prendre la tête d'initiatives multilatérales telles que la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (AIIB) et la Nouvelle banque de développement (BRICS Bank). Parallèlement, l'expansion rapide du marché intérieur chinois a attiré 119 milliards de dollars de FDI entrants en 2015, dont 61 % dans le domaine des services. La Chine est donc bien partie pour jouer un rôle accru dans les FDI bilatéraux et multilatéraux futurs.
Une seconde tendance décisive réside dans la montée en gamme technologique de la Chine et la priorité donnée au développement des capacités d'innovation. Plutôt que de se gargariser du mythe romantique qui fait de l'innovation le produit d'une culture créative concentrée dans les startups de garage, il faut comprendre à quoi sont reliés ces garages ! Comme le note Zotan Acs dans son étude de l'innovation américaine, devenue un classique : « Lorsqu'on posait la question de savoir ce qui faisait de la Silicon Valley un lieu unique, la discussion revenait normalement à une grande institution : l'université de Stanford. Cela semble une évidence partagée que la Silicon Valley et la Route 128 doivent leur statut de centres de l'innovation commerciale et de l'entrepreneuriat à leur proximité immédiate avec les universités de Stanford et du MIT (Massachusetts Institute of Technology). »
Le plan quinquennal va porter le niveau des dépenses chinoises en R&D à 2,5 % du PIB d'ici à 2020, ce qui représentera presque l'équivalent de la proportion du budget américain actuel de R&D. Une allocation de ressources colossale qui va renforcer la capacité innovante de la Chine. Grâce à cette politique, la Chine pourra progressivement démanteler les pans de son industrie qui se basent sur les très bas salaires et gagner en compétitivité dans des secteurs de moyenne technologie et dans certains secteurs de haute technologie, ce qui va encore une fois affecter profondément l'économie d'autres pays. La Chine va exporter des produits de technologie et de valeur de plus en plus élevées alors qu'elle importera plus de produits bas de gamme. Comme par ailleurs la Chine consolide son « avantage – coût d'innovation », c'est à dire sa capacité à parvenir à des prix compétitifs par l'innovation managériale et technologique, on peut s'attendre à ce que de plus en plus d'entreprises internationales devront délocaliser en Chine une partie de leurs centres de recherche.
*JOHN ROSS est chercheur à l'Institut d'études financières Chongyang relevant de l'université Renmin à Beijing. Il a été responsable de la politique économique et commerciale au sein de l'Administration du maire Ken Livingstone à Londres.
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