CHINAHOY

4-May-2016

L’écologie pluridimensionnelle de Chen Guanghui

 

Chen Guanghui.

 

LI YUAN, membre de la rédaction

« Les papayes en haut, les plantes médicinales au centre du terrain, des osmanthes et hibiscus plantés autour. Un environnement écologique de symbiose qu'une seule espèce ne peut réaliser », explique Chen Guanghui, PDG du Groupe biologique pluridimensionnel de Huangshan (Anhui) et président du conseil d'une coopérative tout près de là.

Chen Guanghui s'est lancé dans les affaires par le commerce du thé. En 2004 il s'est mis à faire des recherches sur l'agriculture biologique suite aux « barrières vertes » adoptées par l'Union européenne. En une dizaine d'années d'efforts, il a mis au point un modèle agricole réaliste et praticable. De ses notes qui retracent ses réflexions et ses expériences, il a fait une brochure intitulée Solutions aux questions sur l'agriculture, les régions rurales et les agriculteurs.

Rêver en vert

Le district de Xiuning dans lequel sont centrées ses activités est connu de longue date pour sa production de thé, qui constitue la principale source de revenus des gens d'ici. Cependant, les changements dans les équilibres écologiques, l'érosion du sol, la baisse de fertilité des terrains, les résidus de pesticides, ajoutés à l'accroissement du coût de la cueillette, ont entraîné une dégradation de la qualité du thé. Dans le même temps, un grand nombre de paysans sont partis pour la ville, laissant en jachère une grande partie des jardins et plantations d'autrefois.

En 2004, Chen Guanghui a cassé sa tirelire et consacré l'épargne accumulée par la vente du thé, plus un crédit bancaire, à la création de sa ferme écologique Xiaxi. Faisant appel aux experts de l'Institut de botanique de l'Académie des sciences de Chine, il a planté plus de 200 essences différentes d'arbres et de plantes. Par ses essais, observations et recherches, il est parvenu à mettre au point un mode d'agriculture circulaire qui combine les arbres de haute futaie, les arbustes et les herbacées en un écosystème adapté à cette région montagneuse.

Dans son jardin de thé à niveaux, quantité de plantes sont cultivées pour s'adapter aux caractéristiques de croissance du théier ; fleurs, feuilles et fruits des différents plants participent aux revenus des agriculteurs ; cette structure de plantations combinées réduit l'impact des catastrophes naturelles en protégeant l'écosystème et en prévenant l'érosion des sols ; le problème des résidus de pesticides est solutionné par les défenses antiparasitaires des végétaux et celui de la désinsectisation par la concurrence entre les insectes ; les déchets qui proviennent de la taille des plantes servent à nourrir les cochons, les excréments des cochons servent d'engrais organiques.

« Ce mode de culture écologique peut s'appliquer aux vergers, aux champs de riz, aux lacs, à la basse-cour et à la culture forestière pour prévenir les incendies, créer différents micro-systèmes et réaliser des cercles vertueux. Au final, ces systèmes forment différents villages harmonieux et composent de belles régions agricoles assorties d'un centre de traitement des produits agricoles et d'un système de services circulaire. C'est mon rêve chinois bio », explique Chen Guang-hui. Il considère son optimisation de la structure de plantation des plantes comme une piste potentielle pour résoudre les problèmes de l'agriculture en Chine. Si l'on appliquait cette façon de cultiver des plantes qui se renouvellent d'une année sur l'autre aux 7,6 milliards de mu (1 mu = 1/15 ha) de régions montagneuses et de prairies, on pourrait remplacer un nombre incalculable de tonnes de cultures transgéniques importées.

 

Le jardin de thé pluridimensionnel de Chen Guanghui.

 

Résultat innovant

Le rêve bio de Chen Guanghui lui vaut une certaine attention de la part des autorités, puisque son modèle d'agriculture multifonctionnelle à large cycle a été incorporé par la Commission nationale du développement et de la réforme dans la liste des 60 cas typiques de l'économie circulaire. Au mois de juin 2012, il fut invité à participé à la Conférence des Nations Unies sur le développement durable, et à y présenter son modèle innovant de plantation agricole. En 2013, sa ferme écologique a reçu la visite d'une délégation dirigée par le représentant du premier ministre français.

Qui plus est, ce modèle fait des adeptes depuis ses débuts parmi les villageois locaux. L'entreprise de Chen Guanghui, qui gère des milliers de mu de terre, encourage la coopération entre les agriculteurs et la mise en commun des terres, se chargeant de l'achat des semis, des engrais et du contrôle des technologies. Qu'ils travaillent dans sa ferme ou signent des accords d'achat groupé avec la ferme, les habitants des villages alentour ont vu leurs revenus augmenter significativement.

En tant que député à l'APN de la province de l'Anhui, il a présenté son modèle agricole dans un discours qu'il a tenu lors des sessions de l'APN et de la CCPPC de 2014. Après avoir écouté le rapport de la délégation de l'Anhui, le secrétaire général Xi Jinping a remarqué qu'il faudrait faire le bilan de ce modèle d'agriculture multifonctionnelle circulaire. « Cela m'a apporté courage et confiance », affirme Chen Guanghui. Suite à ces sessions, il a présenté avec 38 autres députés une proposition commune sur la stimulation de l'agriculture à grand cycle dans l'ensemble du pays et des solutions pour les questions concernant l'agriculture, les régions rurales et les agriculteurs. Des dirigeants à divers degrés, dont le vice-premier ministre Wang Yang, ont écrit des commentaires sur ces propositions, tandis que des professionnels de l'Académie des sciences agricoles de Chine ont mené des enquêtes dans ce domaine.

À ce jour, Chen Guanghui a déjà créé sept entreprises d'économie circulaire, et il se dit prêt à poursuivre son travail de diffusion à la ronde de son mode d'agriculture.

Le long chemin de la réforme

La mise en application de ce mode d'agriculture constitue non seulement une amélioration des technologies et une transformation du mode de production, mais également une réforme du système. Il s'agit de décisions d'importance stratégique qui concerne la vie d'une population immense puisqu'elle touche 1,8 milliard de mu de terres arables et 7,6 milliards de mu de régions montagneuses et de prairies. De ce fait, un seul département ne peut la réaliser à lui seul. « Il y a encore un long chemin à parcourir en matière de diffusion de ce mode à l'échelle du pays. Malgré de nombreuses propositions lors de l'APN et de la CCPPC et malgré la bonne volonté affichée par divers ministères et départements », explique Chen Guanghui.

Il poursuit : « Par mes recherches et mes essais pratiques des dernières années et suite aux enquêtes spéciales de 2015, je m'aperçois que le modèle agricole reste en retard dans la plupart des régions chinoises. Si la situation ne change pas au cours du XIIIe Plan quinquennal, la volonté de construire une agriculture moderne restera des paroles creuses. Cette nouvelle ère qui met l'accent sur l'entrepreneuriat et l'innovation pour tous doit réaliser aussi, et de manière fondamentale, la transformation et la mise à niveau du modèle agricole chinois par l'innovation scientifique et technologique. »

Cette année, Chen Guanghui caresse un nouveau rêve. Il espère que la Chine innovera davantage dans sa réforme du système des services financiers pour accueillir les entités commerciales innovantes avec des politiques plus ouvertes. « De fait, les produits agricoles et forestiers qui ne bénéficient pas de financement constituent un potentiel qui doit être valorisé pour l'existence et le développement de notre nation », indique-t-il.

Malgré des épreuves et obstacles, Chen Guanghui conserve sa confiance dans l'avenir de l'agriculture écologique pour laquelle il s'engage corps et âme. « L'agriculture est l'un des secteurs les plus prometteurs du XXIe siècle », conclut-il.

 

 

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