CHINAHOY

28-September-2017

Poursuite du développement global

 

KOU LIYAN*

 

Tous les cinq ans, le Congrès du Parti communiste chinois (PCC) se déroule à Beijing à la période où les Collines parfumées (Xiangshan) se dorent de leur célèbre teinte rouge automnale. Cette année accueillera le XIXe Congrès du PCC. Cet événement est toujours largement suivi par les étrangers qui manifestent un certain intérêt pour la politique chinoise, que ceux-ci vivent en Chine ou ailleurs dans le monde.

 

Et pour les étrangers qui souhaitent connaître et comprendre les nombreuses mesures prises et propositions avancées par le PCC ces cinq dernières années, ainsi que la manière dont le Parti se prépare à aborder l'avenir et les influences sur eux, je leur recommande de lire Les sept ans de Xi Jinping comme jeune instruit et Sortir de la pauvreté. Non seulement ces deux ouvrages racontant des faits réels sont assez captivants, mais aussi révèlent la logique profonde qui sous-tend les politiques intérieure et extérieure adoptées par la Chine depuis le XVIIIe Congrès du PCC tenu en 2012.

 

L'automne doré de Pizhou au Jiangsu, connu sous le nom de « pays natal des ginkos »

 

Sortir de la pauvreté, point de départ de la logique

 

Pour toutes les politiques, le PCC part du constat réel que la Chine se trouve actuellement au stade primaire du socialisme en se plaçant dans une perspective à long terme, c'est-à-dire que les niveaux de vie et de production ne sont pas encore très élevés et que les divers systèmes sont à parfaire. En conséquence, le point de départ logique des politiques chinoises est la « pauvreté », qui ici ne doit pas se comprendre dans son sens économique. Dans le livre Sortir de la pauvreté, le secrétaire général du Comité central du PCC, Xi Jinping, explique qu'il est important avant tout de s'extirper de la « pauvreté » en termes de conscience et d'idées. Le mot « pauvreté » est employé au sens large, à la manière dont l'entendait Karl Marx dans Misère de la philosophie, son œuvre parue en 1847. Plus directement, la « pauvreté » désigne pénurie et insuffisance, une situation que beaucoup de monde a connue tant sur le plan matériel que spirituel.

 

Xi Jinping possède certainement une compréhension profonde de ce terme, plus profonde même que bien d'autres. En 1969, à l'âge de 15 ans, il partit dans un village très pauvre, enclavé dans les montagnes au nord-ouest de la Chine, et y travailla durant sept ans. D'après les descriptions formulées dans Les sept ans de Xi Jinping comme jeune instruit, la vie à Liangjiahe, le village où résidait M. Xi, était à l'époque plus que « pauvre » : elle était carrément « primitive », devrait-on dire. La population souffrait d'un grave manque de nourriture : tous les travailleurs, y compris Xi Jinping, se nourrissaient principalement d'aliments à base de son, sans viande ni légumes. Les sources d'énergie faisaient également défaut : d'une part, Liangjiahe n'était pas alimentée en électricité ; d'autre part, les combustibles pour se chauffer et faire la cuisine manquaient cruellement. Certains villageois allaient même risquer leur vie au-dehors lors des jours d'inondation, dans l'espoir de ramasser quelques branches dévalant les montagnes au gré des eaux. Les moyens de transport étaient inexistants : tout déplacement se faisait à pied. Marcher sur plusieurs kilomètres avec un fardeau de plus de 100 kg sur les épaules était chose courante.

 

Le 5e Forum de haut niveau des partis politiques
Chine-Europe, qui a eu lieu les 17 et 18 mai 2016

 

Confronté à ces difficultés d'ordre matériel, heureusement, Xi Jinping pouvait lire les livres qu'il avait apportés ou qu'il empruntait. Chaque jour, il lisait beaucoup en dehors de ses heures de travail et se préservait ainsi de la pauvreté spirituelle. Par son expérience de sept ans à Liangjiahe, Xi Jinping a pris conscience, au plus profond de son être, que trop de Chinois non seulement n'arrivaient pas à satisfaire leurs besoins élémentaires, comme manger à sa faim et s'habiller décemment, mais demeuraient aussi pauvres sur les plans social et spirituel. Plus tard, Xi Jinping fut élu chef du village. À ce poste, il amena les habitants à développer le biogaz, à créer des coopératives et des points de vente dans l'industrie du fer, en menant parallèlement une campagne d'alphabétisation. Quand, finalement, il quitta le village pour aller à Beijing étudier à l'université, les conditions de vie à Liangjiahe s'étaient déjà considérablement améliorées.

 

Il suffit de comprendre ces sept ans de vie rude pour comprendre pourquoi la Chine applique sa politique de réforme et d'ouverture. Réponse : parce que sans la réforme et l'ouverture, la question de la pauvreté généralisée ne pourrait être réglée en Chine. Quand Xi Jinping a été élu secrétaire général du Comité central du PCC en 2012, les difficultés à se nourrir et à se vêtir ne représentaient plus un problème général dans le pays, mais la « pauvreté » existait encore. D'un côté, une pauvreté purement économique, qui touche plus de 100 millions de personnes ; de l'autre, une pauvreté qui se traduit par des exigences plus élevées de la part de la population dont les besoins essentiels (nourriture et habillement) ont été satisfaits. Ces exigences couvrent bon nombre de domaines, et reflètent, pour ainsi dire, une attente envers la sortie de la « pauvreté », comprise dans une définition plus vaste. Ces cinq dernières années, le PCC s'est efforcé de répondre à cette attente et continuera de travailler dur dans cette optique ces cinq prochaines années et au-delà.

 

S'attaquer au problème à partir de quatre aspects

 

Comme la « pauvreté » au sens large affecte divers domaines dans la nouvelle conjoncture actuelle, il convient de déployer de plus grands efforts et de les coordonner. C'est ainsi que le mot-clé « intégralité » est apparu dans les grands thèmes de la politique chinoise depuis le XVIIIe Congrès du PCC. Par exemple, l'édification intégrale d'une société de moyenne aisance, l'approfondissement intégral de la réforme, la promotion intégrale d'un État de droit et l'application intégrale d'une discipline rigoureuse dans les rangs du Parti. Voilà les « Quatre intégralités » bien connues des Chinois.

 

L'édification intégrale d'une société de moyenne aisance correspond à l'objectif global. En d'autres termes, il faut faire en sorte que personne ne soit laissé en marge du développement. Il convient de renforcer les maillons faibles observés dans les sphères économique, politique, culturelle, sociale et écologique. Et tout le travail mené sera centré sur la population, afin de faire advenir une prospérité commune sur le plan matériel ainsi qu'un développement global sur les plans social et spirituel. Ces cinq dernières années, le montant du revenu disponible par habitant a connu une croissance annuelle moyenne de 7,4 %. Entre 2012 et 2016, 55,64 millions de personnes sont sorties de la pauvreté, et 99,7 % des foyers paysans sont désormais reliés à la route et à l'électricité. Les conditions de vie « primitives » telles que celles éprouvées jadis à Liangjiahe sont en train de disparaître. Le PCC s'est engagé à ce que tous les citoyens vivant au-dessous du seuil de pauvreté actuel sortent de leur état de misère d'ici 2020. Des changements fondamentaux ont également transformé la vie spirituelle et sociale des Chinois. Le pays compte de nos jours 1,093 milliard d'internautes. Les habitants vont davantage au cinéma, au regard des 1,372 milliard d'entrées enregistrées au box-office national l'année dernière. Les nouveaux modes de vie, comme la communication via les réseaux sociaux, le vélopartage et le paiement mobile, bouleversent les us et coutumes des Chinois, qui, après satisfaction de leurs besoins alimentaires et vestimentaires, commencent à expérimenter une aisance moyenne sur tous les plans.

 

L'approfondissement intégral de la réforme représente la locomotive tirant ce projet. Il est nécessaire d'avoir une force motrice durable pour atteindre l'objectif général de parachever l'édification intégrale d'une société de moyenne aisance. Le PCC mise sur la réforme pour porter le développement. Lorsque les jeunes instruits de Beijing, dont Xi Jinping, débarquèrent en pleine campagne au nord du Shaanxi, ils constatèrent non seulement que cette région était pauvre et en retard, mais aussi qu'elle manquait de dynamisme et de volonté d'entreprendre. Xi Jinping aida un jeune homme, qui avait été renvoyé au motif d'avoir défriché des terres sans autorisation, à reprendre ses fonctions de chef de brigade de production. À l'époque, aux yeux des habitants locaux, en développant dans son village des points de vente et des coopératives de textile et de fer ainsi que des moulins, Xi Jinping « jouait avec les limites de la politique ». Toutefois, les cadres du PCC de la même génération que Xi Jinping savaient bien que sans de telles réformes et initiatives novatrices, jamais la population n'aurait la chance de vivre des jours heureux. Par conséquent, la ferme résolution à l'égard de la réforme et l'ouverture s'est enracinée dans le cœur des dirigeants issus de cette génération. En droite ligne avec cette idée, ces cinq dernières années, la Chine a élaboré plus de 330 mesures de réforme couvrant quinze domaines et décentralisé 618 types d'approbation administrative. À travers les réformes, l'étendue du contrôle du gouvernement a été réduite, les diverses procédures d'approbation ont été simplifiées et les fonctions du gouvernement dans les services ont été améliorées. Au fil de ce processus, l'économie chinoise a resserré ses liens avec l'économie mondiale, tout en s'ouvrant davantage à l'étranger et en haussant son degré de marchéisation.

 

La promotion intégrale d'un État de droit fournit une garantie institutionnalisée. Si Xi Jinping, à l'âge de 15 ans, ne pouvait pas aller à l'école et était contraint de travailler à la campagne, c'est parce que les mouvements politiques d'alors s'étaient désengagés des normes juridiques, voire les avaient sapées, ce qui provoqua des perturbations socio-économiques. À Liangjiahe, les villageois traitaient les petits voyous de façon brutale et primitive, avait noté Xi Jinping. Ce dernier guida les habitants à instaurer un règlement au sein du village auquel se référer pour le traitement de tout conflit. En 2012, la construction de l'État de droit a considérablement progressé en Chine, mais elle accusait encore un retard et des failles en de nombreux points. Ces cinq dernières années, la Chine a promu l'État de droit à tous les niveaux, puisqu'elle a élaboré ou amendé 48 lois, 42 décrets et règlements administratifs, 2 926 décrets locaux et 3 162 règlements locaux. De plus, un ensemble de 57 lois et 130 règlements administratifs ont été révisés, et quelque 80 règlements centraux au sein du Parti ont été rédigés ou révisés. En outre, un certain nombre d'erreurs judiciaires majeures ont été réparées. Depuis juillet 2016, toutes les audiences publiques tenues à la Cour populaire suprême doivent être retransmises en direct sur le site d'Internet dédié. Ajoutons que les tribunaux chinois, tous échelons confondus, ont déjà diffusé plus de 600 000 audiences en direct.

 

L'application intégrale d'une discipline rigoureuse dans les rangs du Parti constitue une garantie politique. Le PCC n'oublie jamais de procéder à son auto-édification. Dans le cadre de l'exercice du pouvoir à long terme, comment le Parti en place peut-il se gérer lui-même ? C'est une question souvent posée au sujet de la voie chinoise et de la construction de la démocratie. Manifestant dès son plus jeune âge un attachement profond pour le PCC, Xi Jinping, après l'envoi de dix demandes d'adhésion au Parti à Liangjiahe, avait fini par y être admis. Il étudia et travailla dans une multitude d'endroits, où il accorda chaque fois une grande importance à l'édification du Parti. Depuis son XVIIIe Congrès, le PCC a souligné la nécessité d'accroître la capacité du Parti à assainir ses propres rangs, à se perfectionner, à innover et à progresser. Cela se rapporte non seulement au PCC lui-même, mais aussi à sa compétence à guider le peuple vers le grand renouveau de la nation chinoise. Au cours des cinq ans écoulés, le PCC a renforcé l'édification du Parti à tous les niveaux par le biais de l'éducation idéologique, la consolidation de l'organisation, l'amélioration du style de travail, la lutte anti-corruption et le développement institutionnel. Ces cinq dernières années, une cinquantaine de règlements au sein du Parti ont été élaborés et imprimés pour encadrer davantage la vie politique des membres. Un grand nombre de hauts fonctionnaires corrompus (appelés « tigres ») ont été sanctionnés ; 240 cadres inscrits au Département de l'organisation du Comité central du PCC ont été mis en examen et 223 parmi eux ont été condamnés ; 1 143 000 membres du Parti et cadres aux échelons de canton et inférieurs (appelés « mouches ») ont été punis. Un mécanisme d'inspection de haut en bas a également été établi. La réforme du système de contrôle de la discipline du PCC a aussi progressé sur tous les plans ces cinq dernières années. Autre question que se posent certains : « la Commission de contrôle de la discipline supervise tous les membres, mais qui supervise la Commission ? » Une question qui fait aussi l'objet d'une solution d'ordre institutionnel.

 

Fournir une autre option à la communauté internationale

 

Ces cinq dernières années, en plus de la promotion vigoureuse des « Quatre intégralités », on a pu constater en Chine cette caractéristique du gouvernement d'associer plus étroitement affaires intérieures et relations extérieures. L'objectif de « considérer la situation du pays et la situation internationale d'un point de vue global » a été martelé dans les exposés politiques du PCC. De plus en plus, les « Quatre intégralités » et la situation internationale s'entrecroisent et fusionnent.

 

D'une part, dans le contexte de l'ouverture, la Chine entretient de vastes échanges avec la communauté internationale dans tous les domaines, allant du développement socio-économique jusqu'à l'édification du Parti. D'autre part, les pistes de réflexion proposées par la Chine en matière de développement et de gouvernance donnent lieu à une « sagesse chinoise » propre à résoudre certains problèmes touchant l'humanité. Le reste du monde peut ainsi s'inspirer des concepts et idées présentés par la Chine et s'orienter vers de nouvelles options. Par exemple, les pistes de réflexion chinoises pourraient inspirer les régions agitées par des déséquilibres économiques et des troubles sociaux à penser l'avenir avec une vision plus globale ; inspirer les régions qui manquent de nouveaux moteurs de croissance, de dynamisme et de cohésion sociaux à rechercher une manière de promouvoir une réforme de fond ; et inspirer les pays en proie à des bouleversements politiques ou dirigés par un gouvernement et des partis incompétents à repenser le fonctionnement du système et à renforcer l'auto-édification du parti au pouvoir.

 

Bien sûr, cette sagesse que la Chine apporte au monde ne constitue pas les réponses définitives aux divers enjeux, mais offre simplement de multiplier les options possibles. D'ailleurs, même pour les problèmes propres à la Chine, le PCC ne voit pas ces pistes de réflexion comme des réponses définitives. Ces dernières années, le PCC emploie souvent l'expression « une tâche perpétuelle », que ce soit pour parler de la réforme ou de l'amélioration du style de travail du Parti. Elle fait référence à un état d'esprit selon lequel il faut se tourner vers l'avenir et ne jamais relâcher ses efforts. Le PCC continuera de promouvoir un développement tous azimuts, à combattre et à solutionner les problèmes dérivant du développement, tout en réalisant un développement accru au cours de la résolution des problèmes, et ainsi de suite.

 

*KOU LIYAN est chercheur adjoint au Centre de recherche du monde contemporain de Chine.

 

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