CHINAHOY

4-February-2015

Du bruit dans la cuisine...

 

L'auteur en train de faire de la cuisine chinoise chez lui pour ses amis. (PHOTO FOURNIE PAR SÉBASTIEN ROUSSILLAT)

 

La cuisine chinoise m'a toujours attiré. De mes premières expériences dans mon enfance à mes découvertes et essais après mon arrivée en Chine, la cuisine chinoise et moi, c'est une grande aventure !

SÉBASTIEN ROUSSILLAT, membre de la rédaction

Ma première expérience de la cuisine chinoise a eu lieu à mes huit ans : ma mère m'avait promis de m'inviter au restaurant chinois pour mon anniversaire. C'était dans la petite cantine chinoise du centre commercial du Colombier, à Rennes. C'est là que j'ai appris à me servir des baguettes. Ma connaissance de la cuisine chinoise se résumait alors au riz cantonais, au porc salé aux pousses de bambous et au porc au caramel.

La cuisine chinoise me donnait vraiment l'impression d'être exotique, car cuisiner du bambou et faire de la viande au caramel sont des habitudes culinaires très éloignées de celles françaises.

Mais la cuisine chinoise en France est rarement typique. En réalité, elle est plutôt vietnamienne, rapportée dans leurs bagages par les émigrés du Vietnam d'origine chinoise. C'est notamment pour cela qu'on ne trouve pas de nems ni de rouleaux de printemps dans tous les restaurants en Chine, à la différence des restaurants chinois en France. La vraie cuisine chinoise est bien différente de ce que l'on peut trouver dans l'Hexagone. On trouve beaucoup de livres sur la cuisine chinoise. Ils expliquent surtout comment cuisiner le chou chinois, les champignons noirs ou les vermicelles, mais la vraie cuisine chinoise de tous les jours ne se résume absolument pas à ces quelques ingrédients, et elle réserve parfois des surprises étonnantes !

 

Bouillie à la farine de maïs. (YU JIE)

 

La surprise du palais

Puis j'ai fait l'expérience de la vraie cuisine chinoise en 2007, dans le Shandong, avec des plats dits « familiaux », alors que j'habitais en colocation avec deux étudiants chinois. J'ai découvert à la grande surprise de mon palais qu'elle était très salée et acide. Je découvrais aussi le pain à la vapeur, qui me donnait l'impression d'être de la mie de pain pas cuite, les pommes de terre « en fil » et les nouilles chinoises sans œuf qui m'ont paru très insipides. On m'a aussi servi l'eau de cuisson, que l'on jette d'ordinaire en France, et ce fut la fin des nouilles pour moi. Je m'étonnais aussi de trouver peu de riz et encore moins de vermicelles dans le Shandong...

Je regrettais mon petit-déjeuner français, car le petit-déjeuner chinois est salé. Je faisais également une expérience vraiment dépaysante avec les plats du Sichuan, où le poivre et le piment sont rois...

En résumé, mes premières expériences de cuisine chinoise typique ne furent pas à proprement parler concluantes. Mais j'ai réussi à m'habituer et à trouver des plats que j'aime manger. Je suis tombé amoureux du Gongbaojiding et du Yuxiangrousi, mais aussi des bouillies chinoises au petit-déjeuner accompagnées d'un hamburger chinois à la viande. Et bizarrement, j'ai adoré les œufs de cent ans...

J'ai aussi eu l'occasion, pendant la fête du Printemps que je passais à la campagne, de goûter à la viande de pigeon, aux moineaux frits, et aux scorpions, sauterelles et vers à soie, eux aussi frits. Soit dit en passant, manger des huîtres crues et des escargots est aussi rebutant pour les Chinois... C'est ce que je me suis dit en essayant ces mets particuliers, et finalement, les scorpions et les sauterelles qui ont un peu le goût des chips, ainsi que la viande de pigeon, m'ont bien plu.

La main à la pâte

Dans l'idée d'économiser au lieu d'aller tout le temps manger au restaurant, j'ai ensuite décidé de me mettre aux fourneaux. Ce fut l'occasion pour moi d'apprendre avec mes colocataires et amis chinois toute une panoplie de vocabulaire en rapport avec la cuisine : les noms des plats, les différents styles de cuisson, les ustensiles etc... Je sais donc aujourd'hui dire « un chinois » en chinois... J'ai par ailleurs découvert le couteau à légumes... Très technique, mais quand on sait le manier, on a l'impression de jouer à « légume ninja ».

Évidemment, j'ai appris à cuisiner les plats de base : les raviolis et l'omelette aux tomates pour commencer. Puis j'ai réalisé que la préparation, notamment la coupe des légumes et de la viande, prend plus de temps que la cuisson.

Il y a des ingrédients basiques tels que le poireau, le gingembre, l'ail et la sauce soja que l'on retrouve à peu près partout, liste à laquelle il faut ajouter le vinaigre dans le Shandong, ou le sucre dans le Sud de la Chine. Le reste se résume à faire chauffer l'huile, faire revenir les poireaux avec le gingembre et l'ail, suivis de la viande avec la sauce soja, puis mettre les légumes dans l'ordre de leur rapidité de cuisson. Exemple : pommes de terre en premier, puis champignons après. Sinon, vous vous retrouverez avec de la bouillie de champignon et des pommes de terre pas cuites...

Il convient également de faire attention à l'embrasement du wok dû à une trop haute température de chauffe de l'huile et au contact avec l'eau des légumes ! Assez effrayant...

Il est intéressant de remarquer que la cuisine chinoise est surtout à base de légumes. On peut donc manger frais tous les jours en faisant le marché (on trouve des vendeurs de légumes très facilement et ceux-ci sont souvent peu chers).

Tout un art !

La cuisine chinoise n'est pas uniquement affaire de goût, c'est aussi affaire d'esthétique et de doigté. La cuisine chinoise demande que la forme des ingrédients d'un plat ait une certaine harmonie. Ainsi, les couleurs et les formes doivent être agencées d'une certaine façon pour que le plat soit beau à voir, avant même d'être bon à manger.

Chaque plat est un tout et non pas une addition d'ingrédients indépendants les uns des autres, à la différence des plats français par exemple dont la viande est présentée entière avec un accompagnement, alors que la viande des plats chinois n'est là que pour ajouter un goût et une texture particulière au plat. D'ailleurs, celle-ci est coupée en fonction de la forme de découpe des légumes : dés, lamelles ou tranches.

De plus, sur une table chinoise, les plats froids et chauds, sucrés et salés, épicés et fades peuvent être servis en même temps pour se compléter. Un peu comme si on mangeait un mille-feuille en même temps qu'un chili con carne. Dans la cuisine chinoise, les goûts s'harmonisent. Cette façon d'accorder les plats entre eux peut être vue comme une sorte d'incarnation de la philosophie des cinq éléments qui se complètent.

Certains plats, comme le porc au caramel ou la patate douce aux « fils de caramel », demandent un doigté particulier pour la préparation de la sauce et la cuisson, tout comme certains plats à base de poissons cuits à la vapeur qui sont plus complexes que les plats à base de viande, car il faut accommoder la sauce et faire attention à la cuisson.

Et comme tout art demande de l'expérience, la cuisine chinoise n'utilise jamais de balance, ni de minuteur. À chacun donc d'avoir le compas dans l'œil pour savoir doser le sel, la sauce soja ou encore la cuisson. Et bien sûr, les grands maîtres ont toujours leurs secrets de fabrication. Pour ma part, je vous livre mon secret pour la fabrication de la bouillie à la farine de maïs : ne le préparez pas comme du café instantané... Cela faire rire les Chinois et c'est imbuvable. Parole d'expert !

 

La Chine au présent

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