- Accueil
- Questionnaire
- Médecine chinoise
- Toit du monde
- Cuisine
- Livre
- Proverbe
- Francosphère
- A la chinoise
- Tendance
- Mots clés
- Aux quatre coins du pays
- Objets d'art
- Sci-Edu
- Environnement
- Personnalité
- Sport
- Tourisme
- Culture
- Economie
- Société
- Focus
- Convergence
- Propos d’expert
- Reportage spécial
- Dossier
- Galerie photo
- Actualité
Coopération internationale pour sensibiliser au développement durable
![]() |
Des élèves de différents pays mènent ensemble un projet. (PHOTO : LIU YI) |
LIU YI, membre de la rédaction
Le développement durable figure au rang des thèmes les plus abordés actuellement dans le monde. Lors du Sommet de l'ONU de septembre 2015, les pays présents ont adopté à l'unanimité les Objectifs de développement durable (ODD), qui constituent un nouveau cadre pour le développement mondial. Par rapport aux Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) approuvés en 2000, les ODD soulignent à quel point les pays ont désormais conscience des enjeux environnementaux pour l'existence et le développement de l'humanité.
La Chine a explicitement inscrit la proposition d'édifier une « civilisation écologique » dans son XIIIe Plan quinquennal entré en vigueur en 2016. Par ailleurs, en septembre de la même année, elle est le premier pays à avoir ratifié l'Accord de Paris, ce qui a considérablement encouragé à une coopération mondiale en réponse au changement climatique. Toutefois, dans ce pays encore en développement qu'est la Chine, le concept de développement durable se heurte à certains défis dus à la persistance d'opinions et habitudes surannées.
« Le développement durable est crucial pour les générations futures, mais tout effort sera vain si la population, notamment les jeunes, n'ont pas idée de son importance, affirme Wu Jiang, vice-président exécutif de l'université Tongji. « Par conséquent, il est impératif de sensibiliser les gens au développement durable. »
Bien que le professeur Wu Jiang soit spécialisé dans la protection et l'exploitation du patrimoine architectural, voilà trente ans qu'il s'intéresse à la problématique du développement durable, participe à des campagnes de sensibilisation et favorise l'éducation sur cette question. Il peut témoigner de la généralisation et du développement de la notion de développement durable dans les milieux éducatifs, notamment dans les établissements supérieurs. En 2012, le Partenariat mondial des Universités sur l'environnement pour la durabilité (GUPES) a été fondé sur son initiative. Ce partenariat vise à diffuser à l'échelle mondiale l'expérience chinoise en matière de sensibilisation au développement durable.
Transformations au sein du système éducatif
L'université Tongji est depuis longtemps réputée pour ses cours en construction et en planification urbaine. Mais dès lors que les problèmes de la pollution et de l'insuffisance des ressources se sont posés dans les villes, elle a commencé tout naturellement à prêter attention aux questions environnementales. En 1988, l'université Tongji a créé l'Institut du génie et des sciences environnementaux. C'était la première fois en Chine qu'une université bâtissait ce type d'établissement. Actuellement, les sciences environnementales enseignées dans cet institut occupent la 30e place parmi les meilleures disciplines selon le Classement mondial des universités QS.
Très tôt, l'université Tongji a généralisé sur son campus les bâtiments écologiques, le recyclage des eaux usées et le tri sélectif. Elle a également mis en place un système de gestion des ressources énergétiques, qu'elle a ensuite transmis à plus de 120 établissements d'enseignement supérieur, dont l'université de Beijing et l'université Fudan. Plus important encore, elle ne ménage aucun effort quand il s'agit de sensibiliser les étudiants au principe du développement durable. L'université Tongji impose que cette notion soit un sujet de réflexion au cœur de chacun des cours : d'abord, elle s'assure que le contenu du programme reflète le développement durable ; ensuite, elle vérifie qu'aucun savoir dispensé ne va à l'encontre de ce concept, puis elle procède aux améliorations nécessaires.
« Par le passé, les étudiants en ingénierie savaient que la rentabilité était au cœur des priorités, avec l'efficacité et l'utilité comme normes suprêmes, se souvient Wu Jiang. Aujourd'hui, il nous faut, en plus, penser à l'environnement pour éviter la pollution et la raréfaction des ressources. Nous devons donc revoir nos cours, qu'il s'agisse du projet de formation, du programme d'étude ou du contenu. »
En 2002, sur l'initiative de Wan Gang, vice-président de l'époque, Tongji est la première université à avoir fondé un centre d'ingénierie destiné à la recherche sur les véhicules propres. Cette nouveauté s'inscrivait dans le cadre de la réforme des disciplines entreprise par l'université Tongji. « Aujourd'hui, cette filière automobile de l'université Tongji se classe au premier rang du pays, précise Wu Jiang, mais nous devons encore persévérer dans notre réflexion et nos pratiques en faveur du développement durable. »
D'après Wu Jiang, certes les nouvelles énergies permettent de réduire la pollution, mais la multiplication des voitures privées paralyse le réseau routier et consume l'espace disponible sur le territoire. L'université Tongji a alors orienté ses recherches vers l'utilisation des nouvelles énergies dans les transports en commun et ferroviaire. En 2010, elle s'est dédiée à la fabrication de bus écologiques utilisés lors de l'Exposition universelle de Shanghai. Mais à l'heure où les transports publics ne suffisent pas pour répondre aux besoins de chacun, Wu Jiang réfléchit à l'établissement d'un système intelligent de location de voitures et au développement d'un parc de véhicules propres en autopartage.
Motivés par cette dynamique, les étudiants de l'université Tongji s'engagent avec force dans la recherche et l'innovation sur le développement durable. En 2012, par exemple, une dizaine d'étudiants ont lancé le « Programme des semences bio ». L'équipe a mobilisé ses camarades et même des étudiants d'autres universités, invitant chacun à mener des études sur l'environnement en fonction de leur propre sphère de compétence. Ces dernières années, les projets de recherches de ce type couvrent une multitude de domaines, notamment le recyclage des téléphones portables usagés, le commerce en ligne des animaux sauvages, l'utilisation des ressources en eau pour l'agriculture à Dunhuang, le développement des organisations non gouvernementales en faveur de la protection de l'environnement. Les étudiants proposent même des solutions concrètes à tous ces enjeux.
Échanges et coopération internationale
En 2002, l'université Tongji a fondé, conjointement avec le Programme des Nations unies pour l'environnement (UNEP), l'Institut pour l'environnement et le développement durable (IESD), qui est l'une des rares entités dans le monde à être née d'une coopération avec l'UNEP. Pour l'université Tongji, cet événement marque un jalon majeur dans le perfectionnement de son système d'éducation au développement durable. Plus important encore, ce nouvel institut est devenu pour l'université une plate-forme d'échanges internationale sur la sensibilisation au développement durable, en particulier avec les pays en développement. Sur une décennie environ, il a accueilli plus de 350 étudiants d'une cinquantaine de pays (70 % d'entre eux provenant des pays en développement), lesquels ont obtenu leur master ou doctorat en management environnemental ou en ingénierie de l'environnement.
Par ailleurs, l'IESD met en place des formations ciblées de courte durée. Par exemple, le Programme des futurs dirigeants pour l'environnement et le développement durable en Asie-Pacifique (APLP) s'adresse aux membres des organes ministériels impliqués dans l'environnement, l'agriculture, la sylviculture et les relations étrangères dans les pays de la région Asie-Pacifique. L'objectif est de développer leurs connaissances quant aux problèmes dont souffre notre planète, afin de renforcer l'application des politiques environnementales.
D'après Wu Jiang, les étudiants des pays en développement considèrent que l'expérience chinoise leur est plus utile que celle des pays développés. Elle s'impose comme référence à leurs yeux, car il s'agit de mesures récentes aux résultats naissants.
Actuellement, l'IESD mène des activités de transfert technologique et conduit un projet pilote sur le traitement des eaux en Éthiopie et au Kenya, illustration de la mise à profit de l'expérience chinoise dans les pays en développement. Sous la direction de Li Fengting, expert en assainissement des eaux et directeur adjoint de l'institut, l'équipe de l'université Tongji a effectué des analyses de l'eau potable et des procédés de traitement des eaux usées dans trois villes africaines, en vue d'améliorer leur qualité. Le ministère chinois des Sciences et des Technologies a accordé un solide appui à ce programme, cas typique de la coopération sino-africaine dans le domaine environnemental.
Orientation de la sensibilisation
Au début des années 1980, alors que Wu Jiang faisait ses études à l'université Tongji, les premières idées propres au développement durable émergeaient sur le campus. Mais la société, en revanche, se souciait davantage d'accélérer l'essor économique. Sur la scène internationale, le sens profond du terme « durabilité » n'était pas bien compris. Ces dix à vingt dernières années, les problèmes liées aux énergies, aux ressources et à la pollution sont devenus indéniables, ce qui a fait ressortir les failles d'un modèle de développement énergivore et polluant. L'humanité a alors commencé à ajuster ses modes de production et de vie.
D'après Wu Jiang, le développement durable ne relève pas d'une question d'ordre technologique (« comment faire ? »), mais d'une question de valeurs (« pourquoi le faire ? »). Wu Jiang s'est alors interrogé : « Les campagnes de protection environnementale, de construction de bâtiments écologiques, de promotion du tri des déchets que nous menons ont-elles pour simple objectif d'assainir l'environnement ? »
Sur fond de dégradation de l'environnement, se dessine un grave conflit intergénérationnel : pour notre propre développement, nous utilisons à outrance les ressources, spoliant les générations futures qui, sans ressources, n'auront plus la possibilité d'avancer. « Nous devons prêcher la vérité suivante : s'accaparer les ressources au détriment des générations futures, c'est tout bonnement immoral, résume Wu Jiang. C'est l'idée qui sous-tend le développement durable. »
Selon lui, dans le cadre de la sensibilisation au développement durable, il est urgent de transmettre ce genre de valeurs aux étudiants. À l'université, ils apprennent un ensemble de connaissances et de techniques qui sont des outils, pouvant aussi bien servir à dégrader l'environnement qu'à garantir le bien-être des générations futures. Tout dépend des valeurs qui guident l'utilisation de ces outils. Mais il admet qu'« il faudra plus d'une ou deux personnes, et même plus d'une ou deux générations, pour parvenir à ce développement durable ».
C'est pourquoi il a proposé en 2011 la fondation du GUPES. Au fil de ses échanges internationaux, il a constaté que nombre d'universités comprennent bien l'importance que revêt la sensibilisation au développement durable. Mais face à l'éventail de possibilités offertes dans ce domaine, il est nécessaire de mener des recherches conjointes et d'apprendre les uns des autres.
En juin 2012, le GUPES, programme phare de l'UNEP, a officiellement été créé à Nairobi (capitale du Kenya) et Wu Jiang en est devenu le premier président. À l'heure actuelle, le GUPES compte parmi ses membres plus de 600 universités réparties sur les cinq continents, et plus de 200 universités ont déposé une demande d'adhésion encore en cours d'examen. En septembre, le GUPES a convoqué son assemblée générale annuelle aux États-Unis, au Massachusetts Institute of Technology. Wu Jiang y a présenté les réalisations de l'université Tongji et a discuté avec les participants de son projet d'établir un réseau intergénérationnel de sensibilisation au développement durable.
Ces contacts internationaux plus fréquents sont l'occasion pour Wu Jiang de considérer la culture traditionnelle chinoise sous un nouvel angle. « L'architecture traditionnelle chinoise accordait une grande importance au fengshui. En chinois, feng signifie ''vent'' et shui signifie ''eau'', autrement dit, des ressources naturelles. Ainsi, nos ancêtres prêtaient déjà de l'attention au développement durable et au cycle écologique ! »
Par conséquent, Wu Jiang appelle vivement à remettre au goût du jour les valeurs du développement durable pétries dans la culture traditionnelle chinoise, par exemple, le rassemblement de plusieurs générations sous un même toit, l'harmonie entre l'homme et la nature, et plus récemment, la théorie sur la civilisation écologique. Wu Jiang conclut : « Voici la contribution chinoise au concept de développement durable, auquel nous participons activement aujourd'hui. »
La Chine au présent
Dossier
- La confiance et la conscience de la Chine dans la gouvernance mondiale
- Le yuan dans le panier DTS... et bientôt utilisé par tous ?
- Coopération internationale pour sensibiliser au développement durable
- Quand les entreprises privées se lancent à l’international
- 1 600 villages chinois expérimentent l’Internet mobile
- Lutter contre la pauvreté à la source
- Dans le désert, des oasis fleurissent