CHINAHOY

2-September-2016

Beijing lutte contre le tabagisme

 

Le 31 mai 2015 est la Journée mondiale sans tabac. D'énormes panneaux d'interdiction de fumer ont été suspendus au Nid d'oiseau.

 

GONG HAN, membre de la rédaction

 

Le 1er juin 2015, d'énormes panneaux de signalisation d'interdiction de fumer ont été suspendus au Nid d'oiseau (le Stade olympique de Beijing). Depuis ce jour, Beijing a instauré la réglementation de contrôle du tabagisme « la plus stricte » de son histoire : il est désormais interdit de fumer à l'intérieur de tous les lieux publics et des espaces de travail, dans les transports en commun et dans les files d'attente en plein air. Une amende maximale de 200 yuans sera infligée aux violateurs individuels et de 10 000 yuans aux entreprises.

 

En 2006 déjà, la Chine a adhéré à la Convention-cadre pour la lutte antitabac. Mais la loi nationale pour contrôler le tabagisme faisait toujours défaut. C'est pourquoi Beijing a attiré beaucoup d'attention après le lancement de sa politique de lutte antitabac il y a un an.

 

La naissance de la réglementation antitabac

 

« Avec plus de 400 ans de tabagisme, la Chine, avec ses 300 millions de fumeurs, ne menait pas suffisament de campagnes de sensibilisation sur les dangers de la consommation de tabac. Dans ce contexte, l'interdiction de fumer à l'intérieur des lieux publics ne se réalisera pas du jour au lendemain », a ainsi dit Wu Yiqun, fondatrice de l'ONG ThinkTank Research Center for Health Development et ancienne vice-présidente du Centre chinois pour le contrôle et la prévention des maladies.

 

Pour l'instant, 18 villes chinoises ont établi une réglementation locale pour le contrôle du tabagisme, parmi lesquels le Règlement pour le contrôle du tabagisme à Beijing est le plus strict et répond le mieux aux exigences de la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'OMS. « Maintenant, si vous voyez quelqu'un fumer dans un restaurant, vous pouvez lui dire directement que ça vous gêne. Les serveurs et les fumeurs acceptent beaucoup mieux qu'auparavant. Vous avez désormais plus d'aplomb, parce que vous êtes soutenus par une loi. Là est le changement. Sans cette réglementation sur le contrôle du tabagisme, comment aurait-ce pu changer ? » a dit Wu Yiqun.

 

D'après les statistiques officielles publiées par le gouvernement de Beijing en 2015, 23,4 % des adultes fument, ce qui représente 4,19 millions de fumeurs dans la ville. Autrement dit, un citadin pékinois sur cinq fume. Plus de 10 millions de non-fumeurs sont ainsi exposés à la fumée du tabac ambiante.

 

Pour la plupart des Pékinois, leur prise de connaissance du Règlement pour le contrôle du tabac de Beijing a commencé par une affiche. La femme sur l'affiche dissuade les fumeurs en faisant trois gestes antitabac : « ça me dérange, c'est interdit, arrêtez ». Les trois gestes ont été soigneusement choisis et votés par les citadins.

 

Après le lancement de la réglementation, le sujet a fait du bruit dans les médias. Le signe « interdiction de fumer » est affiché dans les hôpitaux, les écoles, les restaurants et les cybercafés. D'après l'enquête réalisée par le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies, un nombre grandissant de restaurants affichent désormais le signe d'interdiction de fumer, le taux est passé de 52,6 % à 82,4 %, ainsi il y a moins de restaurants fumeurs, seulement 14,8 % contre un pourcentage de 40,3 % auparavant.

 

Le règlement a maximisé le rôle de la population en soulignant que la responsabilité de soutenir le contrôle du tabac appartient à toute la société. Dans les lieux où il est interdit de fumer, tout le monde bénéficie des droits suivants pour interpeller un fumeur : premièrement, dissuader le fumeur de fumer ; deuxièmement, demander à l'exploitant ou au gestionnaire du lieu public de faire renoncer le fumeur ; troisièmement, dénoncer le fumeur en appelant le 12320, ligne téléphonique de la Commission nationale de la santé et de la planification familiale de Chine. En outre, plus de 13 000 volontaires sont engagés dans la campagne antitabac.

 

Il faut aussi mentionner qu'à partir de la fin 2013, le gouvernement chinois a appelé les fonctionnaires de tous les échelons à prendre l'initiative d'arrêter de fumer et à accepter la surveillance du peuple et des médias, ainsi ceux qui violeront le règlement seront sévèrement critiqués et traités avec fermeté.

 

Le choix individuel et la santé publique

 

Selon l'évaluation d'une tierce organisation mandatée par le gouvernement de Beijing, depuis le lancement de la réglementation il y a un an, le taux de fumeurs dans les lieux publics a baissé de 11,3 % à 3,8 %. Les écoles, les hôtels étoilés et les hôpitaux ont le meilleur environnement sans tabac. Le changement le plus considérable a eu lieu dans les stations de transports en commun.

 

Le taux de satisfaction du public sur le contrôle antitabac s'est élevé de 42,26 % à 81,3 %, et 33,5 % d'entre eux sont prêts à dissuader les fumeurs de fumer dans les lieux publics.

 

Le contrôle antitabac de Beijing marque un grand pas dans le contrôle du tabagisme en Chine. « Au cours de l'année écoulée, j'ai été ravi de voir la stricte application du Règlement pour le contrôle du tabac à Beijing : les agents appliquent vigoureusement la réglementation et le peuple respecte bien le Règlement. Grâce au grand soutien du public, les pékinois respirent aujourd'hui de l'air plus frais. Il faut dire bravo à Beijing pour son rôle de leader dans ce domaine », a dit Dr. Bernhard Schwartländer, représentant de l'OMS en Chine, le 31 mai 2016 lors de la célébration du premier anniversaire du lancement de la réglementation à Beijing.

 

Il y a néanmoins toujours des angles morts, notamment dans les petits restaurants. En mai 2016, l'acteur chinois Wen Zhang a fumé dans un restaurant de fondue chinoise. Son acte a été révélé sur Internet par la publication d'une vidéo. Il a payé une amende et présenté ses excuses publiques. Le restaurant concerné a aussi payé une amende de 5 000 yuans.

 

Les opposants au règlement antitabac considèrent que fumer est un choix individuel et n'a rien à voir avec l'hygiène publique. En fait, cette opinion ne correspond pas à la réalité.

 

D'après le Rapport sur la consommation du tabac des adultes chinois en 2015, le nombre de fumeurs en Chine avait augmenté de 15 millions en 5 ans, atteignant ainsi 316 millions. Ce sont donc 740 millions de non-fumeurs qui subissent le tabagisme passif. Chaque année, 1,4 million de Chinois meurent d'une maladie liée au tabac.

 

Hu Dayi, expert des maladies cérébro-vasculaires, soutient fermement le règlement antitabac. « Aujourd'hui, les maladies vasculaires cérébrales sont beaucoup plus courantes et de plus en plus de personnes optent pour la pose d'un tuteur vasculaire. Nous disposons déjà de davantage de médecins maîtrisant cette technique, mais c'est toujours loin d'être suffisant. Une des préventions les plus importantes des maladies chroniques est de réduire l'exposition à la fumée du tabac, et pour ce faire, l'interdiction de fumer dans les lieux publics est le moyen le plus efficace. »

 

Le tabagisme est un coupable majeur du cancer du poumon. Zhi Xiuyi, directeur du Centre du diagnostic et du traitement du cancer du poumon de l'Université médicale de la capitale, a confié une série de statistiques aux médias. En 2015, 733 000 nouveaux cas de cancers du poumon se sont déclarés en Chine et 61 000 patients sont décédés de cette maladie. Une fois le cancer du poumon diagnostiqué, plus de 70 % des malades sont déjà en phase terminale. Ils ont dépassé le délai propice à la guérison à la racine. La dépense moyenne pour le traitement du cancer du poumon en phase terminale dépasse les 110 000 yuans, ce qui cause de plus en plus de pauvreté au sein des familles concernées. Zhi Xiuyi appelle donc à prêter attention à ce lourd fardeau médical causé par les maladies respiratoires et les maladies vasculaires cérébrales en lien avec le tabagisme.

 

Pourvu que la Chine éradique son tabagisme au plus tôt

 

Selon l'évaluation d'une autre organisation mandatée par le gouvernement de Beijing, depuis le lancement du règlement il y a un an, 46,4 % des fumeurs ont envie d'arrêter de fumer. Pour les aider, 29 organisations médicales de Beijing proposant un service d'assistance aux patients désireux d'arrêter de fumer offrent plus de 2,92 millions de consultations et interventions antitabac.

 

La bonne pratique antitabac de Beijing a une valeur de référence pour le lancement de la loi nationale sur le contrôle du tabac. Néanmoins, il est regrettable que la suggestion d'établir une zone fumeur soit intégrée dans le Règlement national pour le contrôle du tabac dans les lieux publics.

 

Zhang Jianshu, président de l'Association pour le contrôle du tabac à Beijing, n'a pas mâché ses mots lors d'une interview : « Dans cette nouvelle version de la future loi nationale, nous faisons face à un recul par rapport à la version précédente. Il ne faut pas garder de zone fumeur. Il est difficile de contrôler la dispersion de la fumée du tabac : une dépression équivalente à un typhon de force 12 serait nécessaire pour un contrôle efficace. Est-il possible de construire une telle salle fumeur ? Le Règlement pour le contrôle du tabac à Beijing est la réglementation locale de Beijing la plus soutenue par le peuple au cours de ces dernières années. C'est aussi la mieux exécutée. Si un règlement du même genre que cette version révisée était publié au niveau national, il affecterait certainement l'enthousiasme de Beijing. »

 

Il semble que la conservation de la zone fumeur s'inquiète du besoin des fumeurs, or selon la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'OMS, « Il n'existe pas de système de contrôle de la fumée de tabac qui corresponde à la norme de sûreté. Ni les dispositifs de ventilation et d'aération, ni la mise en place de la zone fumeur n'évitent le contact avec la fumée du tabac. »

 

Les entreprises de tabac dressent toujours des obstacles à l'encontre du contrôle du tabac, c'est un phénomène global. En Chine, le système du tabac est particulier : China Tobacco se charge d'une part d'élaborer les lois sur le contrôle du tabac et de superviser le travail de la lutte contre le tabagisme, et en parallèle s'occupe du développement de l'industrie du tabac en Chine.

 

Malgré ces difficultés, le contrôle du tabac avance progressivement. La version révisée de la loi sur la publicité interdit tout type de promotion du tabac, notamment auprès des mineurs. Le gouvernement a augmenté la taxation et le prix du tabac : le tarif ad valorem du commerce en gros du tabac a augmenté de 5 % à 11 %.

 

En commençant par le changement de l'emballage des paquets de cigarettes et l'augmentation du prix du tabac, la consommation du tabac sera vouée à diminuer progressivement, ainsi que la nuisance causée par ce dernier. La Chine sans tabac est en vue.

 

 

La Chine au présent

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