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Culture

L’héritage d’un grand maître

 

WU BING

Portrait d’un peintre illustre qui a su ouvrir l’inspiration artistique chinoise aux techniques classiques de la peinture occidentale.

WU Guanzhong a réussi à appliquer les techniques occidentales de la peinture à l’huile aux motifs traditionnels de la peinture chinoise, apportant ainsi une grande contribution à la modernisation du lavis classique à l’encre de Chine. Ses œuvres continuent de battre des records aux enchères, et actuellement le volume des enchères pour son travail a atteint une valeur de 1,78 milliard de yuans.

Le Village natal de Lu Xun évoque l’immensité et l’isolement. 

L’humeur des paysages

Wu Guanzhong s’est consacré à la peinture de paysages et a essayé d’adapter les techniques occidentales pour ce sujet traditionnel chinois. Il a tenté d’apporter plus de vraisemblance aux paysages et de combiner la subtilité et la richesse de la palette impressionniste française avec les concepts esthétiques de la peinture traditionnelle chinoise. Un tel objectif complexe était plus facile à dire qu’à faire; en fait, il a fallu l’inspiration et les efforts de plusieurs générations d’artistes chinois pour créer des huiles de style vraiment chinois, depuis que le support et le genre ont fait sentir leur présence dans le pays, il y a deux cents ans.

Dans les années 1960 et 70, Wu a parcouru le pays pour faire des huiles de paysages chinois. L’atmosphère d’un paysage est un élément central de la peinture traditionnelle chinoise, et une grande attention est accordée à transmettre des nuances émotionnelles et psychologiques particulières. Le succès d’une œuvre dépend totalement de la façon dont l’artiste se sent et se comporte par rapport à une humeur particulière et avec quelle efficacité il ou elle transmet celle-ci dans la composition et la réalisation. Wu connaissait très bien cette règle et estimait que la peinture à l’huile chinoise devait se déployer dans la gracieuse délicatesse des villes d’eau du Sud, avec leurs ponts en arches et leurs ruisseaux, et aussi dans les puissants torrents des hautes montagnes.

Wu a apporté sa profonde compréhension à Shaoxing (Zhejiang), la ville natale de Lu Xun (1881-1936). Il avait une grande admiration pour cet écrivain à la langue acérée, visionnaire et devin, et il a voulu rendre l’idée qu’une région bénie produit des gens d’exception. À la recherche d’inspiration, il a laissé son empreinte dans chaque coin de Shaoxing et un héritage de tranquillité et d’élégance dans ses représentations de cette ville.

Un jour, ses yeux se sont décillés alors qu’il montait sur une petite colline. L’approche panoramique qu’il a utilisée pour ses travaux ultérieurs, dont pour Village natal de Lu Xun, a été un grand succès. Une concentration de murs blanchis à la chaux et de toits de tuiles grises domine le centre du tableau, mis en relief par les vastes eaux grisâtres qui l’entourent et qui semblent se mêler avec le ciel. Un bosquet verdâtre au premier plan bloque quelque peu la vue sur les multiples rangées de toits gris, laissant de l’espace pour l’imagination du spectateur. Cependant, un mur gris et une maison blanche dans le coin inférieur droit mettent en avant la colonie d’habitations villageoises, établissant un lien entre les voies navigables gris cendré et les maisons du centre de la peinture, puis redirigeant l’attention des spectateurs vers le ciel, dans le coin supérieur gauche. L’effet final donne l’impression de l’immensité et de l’isolement. La plupart des paysages de Wu Guanzhong se concentrent sur une scène en particulier, et ces représentations panoramiques telles que celle-ci sont rares. Village natal de Lu Xun est célébré comme son chef-d’œuvre réaliste des années 1970.

La couleur est également importante pour capter et présenter l’état d’esprit d’un paysage. Wu Guanzhong était un maître de la palette impressionniste, mais il s’est abstenu de souligner les contrastes entre lumière et ombre qui dominent ce genre, croyant que cette caractéristique était trop intense pour refléter l’humeur des paysages de Chine. Wu a déployé à la place des techniques et des nuances de pastels pour créer un effet qu’il décrit comme « ciel mi-couvert ». Ce trait le distingue de l’école impressionniste. Son éblouissante utilisation de l’espace est aussi devenue une marque de son style. Ses gros blocs de blanc et de noir appartiennent clairement au langage du lavis.

Le monastère Tashilhunpo de Wu Guangzhong reflète son intérêt particulier pour les arbres.

Esquisse de style chinois

Wu Guanzhong a préconisé que les paysages doivent être fondés sur des croquis préliminaires. Mais, contrairement à des artistes occidentaux, il ne sélectionnait pas une perspective particulière pour son travail. Wu avait foi dans les techniques chinoises traditionnelles de composition des paysages, exigeant de l’artiste de faire un premier tour du site afin de créer une image dans son esprit ou dans un carnet. Le lieu pouvait changer à plusieurs reprises avant que l’artiste commence à peindre. La variation des points de vue est l’une des principales distinctions du paysage traditionnel chinois. Wu décrit cette méthode comme « sélectionner le minerai de fer dans les montagnes puis le fondre et le tremper le long du chemin. »

Tandis qu’il faisait une esquisse d’Un village de montagne de Guilin, les montagnes au loin et les arbres au premier plan lui semblaient former une composition exceptionnelle, mais la gamme de vert plus ou moins foncé semblait un brin monotone. Il a alors placé les maisons aux murs blancs et aux toits gris entre les montagnes et les bosquets, cassant ainsi avantageusement l’homogénéité des couleurs et ajoutant une sensation de mouvement à l’image. Lors de la création de Jeunes bambous le long de la rivière Lijiang, il a également alterné à plusieurs reprises les perspectives et recombiné différents angles dans une composition équilibrée.

Wu aimait particulièrement dessiner des arbres et a travaillé dur pour perfectionner son trait. « J’aime les arbres parce qu’ils ressemblent à des humains, en particulier les arbres d’hiver, sans feuilles, qui sont comme nus et transpirant de tristesse ou de joie », a-t-il expliqué. Les peintres occidentaux utilisent souvent des taches de couleur pour rendre les arbres feuillus, comme des choux-fleurs, tandis que les artistes chinois ont recours à des lignes pour exprimer directement leur beauté squelettique. Wu admirait les peintres classiques, Guo Xi (1023-1085), Li Tang (1066-1150) et Ni Zan (1301-1374), en particulier pour leur représentation des arbres qu’il louait comme « précise et humaniste, à un niveau qui est rarement atteint par les artistes de l’Occident ».

Le monastère Tashilhunpo est un chef-d’œuvre datant de 1961. L’arrière-plan est composé de montagnes et de temples, et l’avant-plan, d’arbres; ceux de la première rangée sont nus, mais Wu a utilisé un style linéal afin de leur donner des postures vivantes. Il était méticuleux dans l’organisation des lignes, pour que les spectateurs sentent la densité et le naturel de la nature représentée.

Selon son expérience « le croquis au crayon et au lavis est une technique presque parfaite pour dépeindre les arbres, mais avec la peinture à l’huile, collante, il est difficile de rendre la subtilité des branches et des brindilles. » Puis, il a trouvé l’inspiration dans la poterie grecque antique, ces lignes folles raclées dans une épaisse couche de couleur de base, comme on en voit dans les huiles de Matisse. Wu utilisait une spatule pour gratter des lignes ou des bandes sur un fond de peinture épaisse, puis il appliquait de la couleur dans les rainures pour les mettre en avant. Le résultat a été des motifs arachnéens qu’il appréciait. Pour la cime des arbres, il utilisait la pointe d’une spatule pour gratter de fines lignes courbes, sans ajout de couleur. Il avouait: « J’ai souvent utilisé ces techniques pour représenter les bois et les brindilles courbes; encore une fois, un effet difficilement réalisable avec un pinceau pour peinture à l’huile. »

Toutefois, certains artistes chinois formés en Russie ont refusé de reconnaître « l’authenticité » ou les propriétés particulières de ces œuvres qui marquent son style innovant. De l’avis des artistes russes, les paysages du Sud de la Chine ne sont pas adaptés à ce médium, mais à ce moment, Wu avait déjà rempli ce vide.

L’âme du pin reflète le style quasi abstrait adopté par Wu Guanzhong durant ses dernières années. 

Modernisation du lavis

Dans les années 1970, Wu a commencé à s’essayer au lavis, souvent en commençant le motif avec de la peinture à l’huile, puis en le refaisant à l’encre. Évaluant les deux techniques, il a efficacement appliqué son expérience de l’huile à ce nouveau médium. Il a également excellé dans la minutieuse technique pointilliste, ainsi que dans celle des lignes et blocs de couleur; sa boîte à outils intellectuelle et technique était bien garnie, afin de mieux refléter la beauté poétique de la nature et l’empathie de l’artiste. Ses lavis plaisent tout autant aux esthètes traditionnels qu’aux sensibilités artistiques plus modernes.

La peinture Deux hirondelles est une œuvre dont il était très fier. Des artistes occidentaux, comme le Néerlandais Piet Mondrian (1872-1944) et le Suisse Paul Klee (1879-1940), ont étudié le « nombre d’or » afin de créer la composition la plus parfaite en divisant géométriquement la toile. Wu a connu les délices de ces répartitions lorsqu’il a peint Deux hirondelles. En attendant le train à Ningbo en 1981, il a vu plusieurs résidences uniques et s’est empressé de faire des croquis. Plus tard, à la maison, il a pris de l’encre et trempé son pinceau dans un de ses tons gris argent favoris et a prestement tracé quelques lignes sur le papier blanc, le divisant en blocs géométriques de différentes tailles. Il a trouvé à sa grande satisfaction que les lignes horizontales, les espaces blancs rectangulaires et les polygones noirs formaient des contrastes équilibrés qui satisfaisaient à la fois la précision formelle de l’Occident et l’esthétisme de l’Orient. Il a remarqué : « Les formes géométriques de Mondrian poursuivent la simplicité et la pureté de la beauté, mais elles sont vagues ou muettes sur le plan émotionnel. L’œuvre Deux hirondelles exprime clairement un sentiment oriental – les deux hirondelles s’envolent, mais l’amour pour leur foyer reste. »

Wu Guanzhong est né et a grandi dans une ville d’eau du Sud. Dans sa jeunesse, il est allé étudier à l’étranger et s’est installé en Chine du Nord à son retour. Ses œuvres, exécutées dans des techniques empruntées à l’Occident, expriment l’amour d’une âme de voyageur pour sa ville natale. Cela donne de l’ampleur à son procédé formel et mêle l’ambiance du lavis chinois à l’expressionnisme moderne de l’Occident. Son approche unique insuffle à ses œuvres la simplicité et la souplesse de la modernité, tout en transmettant la tranquillité et le sentiment de la tradition. Les quelques traits simples dans Deux hirondelles sont chargés de sens, dans un style que l’auteur affectionne si bien que, les années suivantes, il est à la base de plusieurs œuvres, dont L’ancienne résidence de Qiu Jin et Une réminiscence de la Chine du Sud. À partir de ces travaux, il a ensuite développé son langage symbolique pour les motifs ville d’eau : une ligne horizontale représente un toit, et une ligne verticale, une porte ou une fenêtre. Ce sont des symboles clés du langage artistique chinois.

Dans ses dernières années, il a créé beaucoup de peintures quasi abstraites, telles que Jardin de la Forêt du lion et L’âme du pin. La « quasi-abstraction » est une forme d’art énigmatique rendue plus compréhensible pour le public ordinaire, ce qui devrait être selon lui la responsabilité des artistes. Le jardin de la Forêt du lion est un célèbre jardin de Suzhou dont les multiples rochers, vus de loin, ressemblent à un groupe de lions. Wu a trouvé que le jardin était plein d’une abstraite beauté linéale, mais il avait peur que les gens ne l’apprécient pas s’il n’utilisait qu’une combinaison de points et de lignes. Alors, il a stratégiquement placé quelques formes reconnaissables, comme un pont et un pavillon. Ces petits ajouts n’interfèrent pas avec la qualité du travail, de sorte que le milieu artistique a également acclamé l’œuvre. Recevoir « aussi bien l’approbation des experts que l’admiration du public » était le critère de Wu pour ses procédés et ses créations.

Une œuvre de Wu Guanzhong valait des dizaines de millions de yuans, même de son vivant, mais ce maître a mené une vie incroyablement humble. Il portait les vêtements que ses enfants n’utilisaient plus et se faisait couper les cheveux par un coiffeur de rue dans son quartier. Dans les années 1990, l’artiste taïwanais Liu Guosong lui a rendu visite à son domicile. Il était dans une chambre où il n’y avait que deux lits espacés et accolés aux murs. Quand il a demandé à voir le studio de Wu, celui-ci a sorti une planche, l’a placée entre les deux lits et a répondu à son visiteur abasourdi : « Voilà! » Même dans les dernières années de sa vie, durant lesquelles il avait un studio indépendant, ce dernier faisait à peine 15 m².

C’est dans ces conditions spartiates que le grand maître a obtenu une reconnaissance internationale, établissant de nouveaux précédents pour les établissements français et anglais. En 1992, le British Museum a dérogé à sa règle d’exposer seulement des pièces anciennes et a organisé l’exposition personnelle d’un artiste vivant : « Wu Guanzhong: un peintre chinois du XXe siècle ». Le musée a également obtenu son ultime travail à l’encre couleur, un immense Oiseau de Paradis, pour sa collection permanente. En 1991, Wu recevait le titre d’Officier des Arts et des Lettres de la part du ministre de la Culture et devenait, en 2002, le premier Asiatique à recevoir la Médaille des Arts et Lettres de l’Académie des Beaux-Arts de l’Institut de France, créé il y a deux cents ans.

 

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