Devant la boutique « Le Camp de base de la magie », sur la rue commerciale Xidan à Beijing, un vendeur donne une représentation interactive de magie. CNSPHOTO

DES rires et des chants s’échappent du café de Dou Xiaoxi, dans un quartier de l’est de Beijing très fréquenté par les étrangers. Quelques jeunes sont assis autour d’une table. Jin Lei et Li Langbo présentent des tours de magie. Wang Wei, le gérant du bar, également magicien, distribue des boissons aux spectateurs.

Les tours s’enchaînent : le manche d’une cuillère en acier se courbe sans recours à la force; avec un seul claquement de doigts, un ballon en éponge se dédouble à l’infini; une carte choisie par un spectateur puis remise dans le jeu, que l’on mêle longuement, est systématiquement retrouvée par le magicien...

Dou Xiaoxi, le propriétaire de l’endroit, explique : « Les spectacles de magie du week-end, qui ont commencé en septembre 2008, attirent des jeunes et des cols blancs des sociétés étrangères. À partir du mois de février, le nombre de spectateurs a vraiment augmenté, on a parfois accueilli 30 personnes. »

« Au début, il n’existait que quelques magiciens amateurs comme nous », raconte Wang Wei, né en 1986 dans la campagne de Penglai (province du Shandong). Il a formé avec ses amis un groupe de magiciens, nommé Phantomasters.

Il y a quatre ans, Wang Wei travaillait comme barman dans un bar de Jinan. Comme il connaissait quelques tours de magie, il les présentait parfois. « C’est un moyen efficace pour communiquer avec les clients », indique-t-il. Sa popularité dans ce bar lui a donné confiance. Mais à cette époque-là, il ne connaissait que quelques tours simples de magie. Puis, quand il a découvert une boutique de magie professionnelle à proximité du bar, il s’y est rendu tous les jours après le travail. Il y a même suivi une formation professionnelle. « La formation payante sert à entrer dans cet univers et à découvrir les secrets de la magie. La plupart des magiciens ne veulent pas échanger leurs expériences avec les non-professionnels », explique-t-il.

Pour devenir un bon magicien, il faut beaucoup de pratique. Après un mois d’apprentissage, Wang Wei a commencé à montrer davantage ses tours, même dans des lieux publics.

Li Langbo, qui travaille pour une station de télévision, donne un spectacle d’illusion psychologique avec son ami. DONG NING

Dans le groupe Phantomasters, le jeune homme remplit le rôle d’agent, parce qu’il possède le sens du marketing. « Avant le succès du magicien Liu Qian à la soirée télévisée de la fête du Printemps de 2009, nous ne donnions presque aucun spectacle. Maintenant, nous donnons deux ou trois représentations par semaine, et parfois des spectacles à but non lucratif dans des universités. Il y a quelques mois, à notre premier spectacle à l’Université de l’économie et du commerce de la Capitale, nous étions nerveux, sans expérience et sans confiance. Auparavant, nos numéros n’avaient eu que peu de spectateurs. Mais ce jour-là, il y avait plus de cent étudiants qui nous regardaient! Maintenant, nous n’avons plus ce problème. En plus, nous avons même la possibilité d’ajuster le programme selon les conditions du plateau et les demandes des spectateurs », dit Wang Wei, à présent très confiant.

Li Langbo, 23 ans, aime pratiquer l’illusion psychologique. Il peut par exemple savoir quelle carte le spectateur voit alors qu’il lui tourne le dos, ou dire à quelle couleur il est en train de penser.

Derren Brown, mondialement connu, est son illusionniste psychologique préféré. Dans l’illusion psychologique, nommée aussi « l’art de lire les pensées », le magicien devine ou influence les décisions des autres. « J’espère qu’après ma prestation, les spectateurs penseront que je suis doté d’une force surnaturelle », dit-il en riant.

Li Langbo a 23 ans et travaille pour une station de télévision; il a commencé à s’intéresser à la magie il y a trois ans. « Quand je me suis épris de la magie, j’étudiais la psychologie. Les meilleurs magiciens du monde sont ceux qui parviennent à capter avec succès l’attention des spectateurs lors de leur représentation. Les spectateurs sont toujours curieux des trucs des magiciens. Mais les magiciens cachent souvent les secrets et les détails de leurs tours. Ils sont capables de détourner l’attention pendant qu’ils exécutent un geste important, ou de faire imaginer aux spectateurs une scène qui n’existe pas. Plus nous avons le désir de connaître la réalité, plus nous sommes faciles à tromper. Les magiciens peuvent ‘‘créer des miracles’’, parce que les spectateurs ne savent pas que leur esprit est contrôlé par le magicien. Un bon magicien connait parfaitement la façon de penser des gens et est capable de détourner leur désir de comprendre le tour pour les attirer totalement et imposer l’illusion à leur cerveau. »

Wang Wei, gérant du café Douban, a confiance en sa maîtrise des techniques de magie. DONG NING

Li Langbo a commencé à aimer faire de la magie parce que cela favorise la communication sociale. « Cela permet de faire des rencontres facilement. En faisant mes tours de magie, je peux trouver des nouveaux amis et leur faire, dès le départ, une profonde impression. » Après beaucoup d’entraînement et un grand nombre de spectacles, il trouve de plus en plus de plaisir à exercer la magie. « Au début, j’échouais souvent. Petit à petit, j’ai réfléchi à ce que je pouvais dire et faire pour capter les spectateurs et les emmener dans des pièges psychologiques. Cela rend la magie plus intéressante. » Li Langbo explique qu’il est vraiment satisfait quand il lit la perplexité sur le visage des spectateurs.

Mais le travail individuel a ses limites. C’est pourquoi les membres du groupe discutent ensemble des difficultés et des problèmes de la magie. « Quand je n’ai qu’une seule manière de faire un tour, les autres m’apprennent de nouvelles méthodes. Ils sont les meilleurs spectateurs, car ils peuvent me conseiller des modifications dans ma représentation afin de rendre mon spectacle plus intéressant. »

Pour le moment, Phantomasters compte quatre magiciens. Ils sont en train de réaliser un film de leurs numéros quotidiens. « Le film durera une heure. On pourra le visionner sur Internet ou dans notre café. Il pourra non seulement nous faire connaître du public, mais aussi inciter d’autres magiciens à nous rejoindre. Cela sera encore plus intéressant, indique Li Langbo. Dans ce film, vous pourrez trouver des forces surnaturelles en chacun de nous. C’est absolument incroyable! »