Chaozhou,
capitale de la porcelaine de Chine (II)
ZHANG
HONG
  
Une anecdote qu’on dit authentique circule à propos
de la porcelaine. Un jeune Chinois d’outre-mer cherchait à savoir
pourquoi, en Occident, la porcelaine portait le mot « chine »
tout comme le nom du pays. La réponse : à l’époque, le prix
de la porcelaine de Chine exportée était aussi élevé que celui de
l’or. Pour cette raison, les Occidentaux ont appelé la Chine le
pays de la porcelaine.
Chaozhou, une ville à la longue histoire, a hérité
de ce métier et de cet art traditionnel et est aujourd’hui la plus
grande base d’exportation et de production de porcelaines artisanales
et d’usage courant. Sa capacité de production et de vente lui a
acquis le titre de « capitale de la porcelaine de Chine ».
En juin dernier, des produits bien choisis ont été présentés à la
foire des articles de porcelaine à Beijing. La porcelaine de Chaozhou
présentait alors son art au monde.
La longue histoire de l’industrie porcelainière
M. Hu Peng, originaire de Kunming, capitale du Yunnan,
assume des fonctions au bureau municipal de la planification de
Chaozhou. Sur son bureau de travail, est posée une petite assiette
de porcelaine céladon. Sa couleur n’est pas très resplendissante
et le dessin à grands traits représente simplement un motif de fleur.
Toutefois, ce produit est sorti du four populaire local de la dynastie
des Ming (1368-1644), il y a plus de 600 ans, et il ajoute une touche
artistique au conservatisme d’un bureau d’administration.
La porcelaine céladon est bien appréciée à Beijing,
mais surtout dans les marchés d’antiquités et de brocante, et à
Chaozhou, on en trouve partout : elle n’est pas considérée
comme un objet rare.
Par la fenêtre du bureau de Hu Peng, on peut voir
la belle route de Chaozhou, large de 50 m. En regardant vers
l’est, c’est le pont Guanji, un des quatre ponts chinois les plus
célèbres. En traversant ce pont, on arrive au pied du mont Bijia
(porte-plume), berceau de la porcelaine de Chaozhou.
En 1922, par hasard, on y a découvert quatre statues
de bouddha et un socle en porcelaine blanche des Song. Ce sont des
objets précieux sans pareils en Chine. Depuis lors, des archéologues
portent l’attention voulue au mont Bijia, y font des investigations
sur place et y procèdent à l’excavation.
Bijia est le surnom que porte le mont Hanshan en
raison de sa forme à trois pics dressés parallèlement comme un porte-plume.
Depuis la dynastie des Song du Nord (960-907), il est une base importante
de production porcelainière en Chine du Sud. En 960, après deux
mois de navigation en mer, le commerçant indochinois Li Pu Hai allait
y acheter des porcelaines en apportant quantité d’aromates, de cornes
de rhinocéros et de défenses d’éléphant.
L’histoire de la porcelaine de Chaozhou est aussi
longue que celle de Jingdezhen du Jiangxi, ville porcelainière très
connue en Chine. Chaozhou est riche en kaolin. Aux époques des Tang
(618-907) et des Song, sur une étendue de 15 km2,
les fours parsemaient un peu partout, et le groupe de fours du mont
Bijia s’étirait sur deux kilomètres. On l’appelait le « village
aux cent fours ».
Dès 1953, 11 fours ont été découverts au mont Bijia,
dont un qui mesure 79,5m. C’est le plus long four des Song découvert
en Chine. Ce four s’adosse au mont. Il ressemble à un long tuyau
de poêle qui traînerait sur le versant, ce qui permet à la température
à l’intérieur du four de monter ou de descendre rapidement. Il produit
deux fois par mois et à chaque fois, de 50 000 à 100 000
articles sortent..
Durant les Tang et les Song, la situation politique
était stable, l’économie prospérait, les gouvernements encourageaient
le commerce avec l’extérieur. D’après les documents historiques,
plus de 50 pays entretenaient des relations commerciales avec les
Song du Sud, et la porcelaine comptait alors parmi les meilleures
marchandises exportées de Chine. D’après des recherches, à cette
période, plus de la moitié de la porcelaine exportée provenait des
fours du Fujian et du Guangdong. La porcelaine de Chaozhou en représentait
une proportion importante, et sa qualité était la meilleure. Les
fours du mont Bijia produisaient plusieurs dizaines de millions
d’objets par an.
Au Moyen Âge, en Europe, en Afrique et en Asie, beaucoup
de gens aimaient la porcelaine de Chine. Non seulement les nobles
de différents pays la collectionnaient à la cour, mais aussi le
peuple l’utilisait dans la vie courante. La plupart des vestiges
des fours des Song qui ont été découverts sont situés près du fleuve
Hanjiang, considéré comme le fleuve mère de Chaozhou. Le cours inférieur
du fleuve Hanjiang donne accès à la mer de Chine méridionale, ce
qui facilitait le transport de la porcelaine vers l’extérieur.
La fabrication de la porcelaine à Chaozhou
M. Cor De Waal, un Hollandais, vient à Chaozhou au
moins deux fois par année. Chaque fois, il prend un pousse-pousse
pour se faire promener dans la zone Fengxi, qui se trouve en banlieue
de Chaozhou. C’est là où se produit principalement la porcelaine
d’usage courant. On appelle l’endroit la « capitale de la porcelaine
du Sud ». Dans cette zone, il y a une profusion d’étals où
l’on peut trouver services à thé, vaisselle de toutes sortes, tant
de styles chinois, que japonais et occidental, et objets d’art en
porcelaine. Ce Hollandais fait son choix et passe des commandes
pour sa société qui œuvre dans le domaine de la porcelaine et des
objets d’art. Chaque année, la quantité de porcelaine qu’il importe
de Chaozhou représente 70 % de son chiffre d’affaires. Par
l’intermédiaire de cette société, des porcelaines de Chaozhou entrent
en Europe et dans des pays d’autres continents.
En 1995, l’industrie porcelainière de Chaozhou avait
atteint à peu près la même envergure que celle de Jingdezhen. En
2000, ses 10 000 fabriques avaient atteint une forte capacité de
production grâce à la standardisation des matières premières, à
la propreté du combustible, à l’automatisation de la production,
à sa spécialisation et à la qualité supérieure de ses produits.
Sa production de porcelaines sanitaires avait atteint 34 millions
de pièces (en série), soit 57 % de la quantité totale produite
au pays, dont la moitié est exportée. La porcelaine liée au secteur
de l’électricité comptait pour 120 milliards de pièces, soit 70
% de la production du pays et 50 % de celle du monde. Une fois
les capitaux rassemblés, la chaîne de production se forme rapidement.
Maintenant, Chaozhou a une production diversifiée : porcelaines
d’art, d’usage courant, sanitaires, à l’imitation d’objets
antiques, pour isolant électrique, etc.
Célèbre pays des Chinois d’outre-mer, Chaozhou possède
également une tradition de commerce bien rodée et un groupe d’entrepreneurs.
Les bons salaires offerts permettent à Chaozhou d’attirer de grands
maîtres porcelainiers; il y en a même du Japon qui y ouvrent un
atelier de travail.
M. Cai Beiqiang travaille au bureau municipal pour
l’économie et le commerce de Chaozhou et a participé à la foire
de la porcelaine de Chaozhou qui s’est tenue à Beijing. Aujourd’hui,
quand il parle de cette participation, il affirme, tout joyeux:
« Des étudiants qui font des études à l’étranger m’ont confirmé
que jamais il n’aurait cru que le « Fabriqué en Chine »
apposé sur la porcelaine provenait de Chaozhou. »
Rejoindre le monde
En 1996, Fengxi de Chaozhou a, pour la première fois,
rassemblé des entreprises pour organiser un salon de la porcelaine
de Fengxi à la Foire des articles chinois d’exportation de Guangzhou,
laquelle est reconnue comme un tremplin pour s’ouvrir au monde.
Dès lors, cette Foire a rapidement édifié un réseau de marchés internationaux
pour les entreprises porcelainières de Chaozhou. Leur chiffre d’affaires
pour l’exportation augmente chaque année.
Pour vérifier la qualité de la porcelaine de Chaozhou,
les Allemands possèdent le critère le plus strict du monde. « C’est
la norme la plus élevée », nous a confirmé le directeur général
de la SARL de porcelaine Songfa de Chaozhou, M. Li Daofan.
La SARL Songfa est l’une des entreprises d’envergure
en matière de porcelaines d’usage courant. Le jour où nous nous
y sommes rendus, on avait chargé un conteneur marqué « Objets
fragiles », et le directeur a accompagné ses clients pour choisir
les marchandises. Des Allemands vérifiaient les marchandises commandées.
Le contrôle se faisait en éclairant, en calibrant, en pesant et
par d’autres méthodes. La sévérité du contrôle garantit la qualité
supérieure de la porcelaine de Chaozhou.
S’ouvrir au monde et créer la meilleure qualité constituent
un objectif de l’industrie porcelainière de Chaozhou.. Un homme
d’affaires australien en a fait la preuve. Il a envoyé un échantillon,
et trois jours plus tard, il avait reçu un exemplaire de la porcelaine
commandée.
Grâce à la Foire des articles chinois d’exportation
de Guangzhou, les entreprises porcelainières de Chaozhou prennent
de l’expansion et ne laissent jamais passer une occasion de présenter
leurs produits. Chaque année, la SARL Sitong du Guangdong, une entreprise
porcelainière clé de Chaozhou, ne rate pas la Foire internationale
de la porcelaine d’art. En parlant de l’exploitation de ses nouveaux
produits, le directeur général Cai Zhengcheng a exprimé, avec satisfaction :
« Sitong sort de nouveaux produits quasiment tous les
jours, prend part à la Foire de Guangzhou chaque année, et 70 %
des articles présentés sont nouveaux. »
L’industrie de la porcelaine de Chaozhou sait réagir
rapidement aux nouvelles tendances sur le marché international de
la porcelaine et présente de nouveaux produits qui s’y conforment.
Ce qui surprend, ce n’est pas seulement la rapidité, mais aussi
la grande variété des produits. Un producteur de porcelaine de Fengxi
de Chaozhou a exprimé avec fierté : « Tout ce qui concerne
la porcelaine, on peut le trouver facilement à Chaozhou. »
Aujourd’hui, les porcelaines de Chaozhou sont très
demandées dans plus de 160 pays. Les hommes d’affaires y viennent
pour acheter, des agents ou des représentants de la porcelaine de
cette ville sont présents dans les grandes villes du monde, et il
y a plus de 20 000 hommes d’affaires étrangers qui entretiennent
des relations commerciales avec Chaozhou
La foire de la porcelaine fait remarquer celle
de Chaozhou
En avril 2004, Chaozhou a remporté le titre de capitale
de la porcelaine de Chine. Huang Xinghong, juge de l’Association
de l’industrie porcelainière de Chine, a déclaré : « Je
m’occupe de porcelaine depuis 20 ans, je ne croyais pas qu’on pouvait
faire une percée avec la porcelaine de Chine ; pourtant,
après quelques jours d’inspection à Chaozhou, je suis enthousiaste. »
Je peux dire que j’ai vu l’espoir de la porcelaine chinoise à Chaozhou.
Cet espoir naît des éléments suivants : en 2003,
l’industrie de la porcelaine de Chaozhou est devenu un groupe intégré
en porcelaine de Chine, avec une valeur annuelle de 11,68 milliards
de yuans et une valeur d’exportation de 643 millions de dollars
US. Aujourd’hui, Chaozhou est connue comme une des plus grandes
zones de production porcelainière et celle ayant la quantité la
plus élevée de produits exportés; on la considère également comme
la plus grande base de production de porcelaines sanitaires, la
plus grande base de production d’isolant électrique en porcelaine,
comme la ville ayant les plus nombreux titres honorifiques liés
à la porcelaine et la gamme la plus complète en Chine.
Pour présenter la puissance d’ensemble de cette industrie,
en juin dernier, à la foire de la porcelaine de Chaozhou du Guangdong,
tenue à Beijing, on a présenté des objets précieux, ce qui a attiré
150 000 visiteurs; en outre, en quelques jours, 173 accords de coopération
économique et commerciale ont été signés, pour une somme atteignant
5,7 milliards de yuans.
À la foire, les objets étaient tous en étalage,
et les visiteurs demandaient tout de suite les prix. Un responsable
de Chaozhou a avoué que, à part les choses qui ne pouvaient être
vendues, tous les objets exposés l’avaient été.
Des diplomates de plus de 80 pays, se sont arrêtés
longuement devant ces objets de Chaozhou, et ils ne cessaient de
les admirer.
L’industrie de la porcelaine de Chaozhou accuse une
croissance annuelle de 30 %. En 2003, il y avait près de 6
000 entreprises porcelainières à Chaozhou, et son personnel avait
atteint 150 000 personnes. Dans la zone Fengxi, la valeur de l’industrie
porcelainière représente plus de 6 milliards de yuans, et les devises
reçues comptent pour 260 millions de dollars US.
Dans ce contexte favorable, M. Jiang Hong, secrétaire du comité
municipal du Parti de Chaozhou garde toujours un esprit lucide.
Maintes fois, il répète que le titre de capitale de la porcelaine
de Chine n’est pas éternel. Au sein de la concurrence acharnée,
il sait qu’il faut faire valoir ses points forts et remédier à ses
points faibles. Il connaît bien l’influence de cette économie particulière
sur l’avenir de Chaozhou, et prend des décisions éclairées. Dès
son entrée en fonction, il a décidé de renforcer l’image de cette
capitale de la porcelaine de Chine, et de faire de Chaozhou un centre
de fabrication des objets en porcelaine au pays, un centre de recherche
et d’exploitation et un centre de distribution des produits de porcelaine.
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