CHINAHOY

1-June-2017

Ralf Jauch : le scientifique de souche allemande qui a pris racine en Chine

 

Ralf Jauch

 

HUANG YI et LI YUAN, membres de la rédaction

 

Bel homme bien bâti à l'apparence soignée, Ralf Jauch est un scientifique originaire d'Iéna, dans le Land allemand de Thuringe. Mais Ralf a découvert la Chine dès sa plus tendre enfance, car son père, assumant le poste de maire adjoint d'Iéna, s'était investi dans la promotion des échanges économiques et commerciaux ainsi que de la coopération amicale entre cette ville allemande et la ville chinoise de Guangzhou. Aujourd'hui, Ralf travaille à temps plein en tant que chercheur étranger à l'Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou de l'Académie des sciences de Chine, où il poursuit des études sur la génomique, la biologie des cellules souches et la biologie structurale. En 2014, il a eu l'honneur d'être classé au programme « Cent talents » mis en place par l'Académie des sciences de Chine.

 

Une décision « aventureuse »

 

C'est en 2012 que Ralf est venu en Chine pour la première fois. Il suivait, aux côtés de son père, une délégation assemblée dans le cadre d'un programme d'échanges qui l'a conduit à Beijing, Guangzhou et Hong Kong. « Cette visite m'a permis de mieux appréhender ce pays immense et dynamique qu'est la Chine. Même si avant cela j'avais vécu sept ans à Singapour et que je voyageais souvent en Asie du Sud, j'avais une connaissance encore très limitée de la Chine », nous raconte Ralf en anglais, rehaussé d'un fort accent allemand.

 

Bientôt, Ralf a constaté que le delta de la rivière des Perles présentait de nombreuses similitudes avec Singapour au regard du climat, des infrastructures, de l'environnement d'affaires international et de son ouverture d'esprit. Il a été fasciné par cette région à la croissance dynamique, disposant d'une bonne réserve de fonds et progressant vers une internationalisation inclusive. Vu que Ralf était à ce moment-là à la recherche d'un poste de chercheur, il a envisagé de s'implanter à Guangzhou ou à Hong Kong.

 

En 2013, Ralf a finalement décliné plusieurs offres d'emploi en Suède, au Canada, en Corée du Sud et à Hong Kong pour rejoindre l'Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou. Il a alors composé une équipe de recherche internationale de 12 personnes, regroupant notamment des doctorants et post-doctorants ainsi que des techniciens, dont 60 % sont forts d'une expérience d'étude ou de travail à l'étranger.

 

« Dans une certaine mesure, mon choix a résulté d'un désir de "partir à l'aventure" et de découvrir de choses nouvelles », admet Ralf.

 

« Les travaux de recherche conduits à l'Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou m'étaient familiers et coïncidaient parfaitement avec ce qui me passionne. Par ailleurs, l'Institut offrait un lot complet d'infrastructures et des financements satisfaisants. Autre point important : je savais qu'un groupe de scientifiques occidentaux étaient déjà venus ici développer des travaux de recherche qui s'étaient soldés par une réussite. Tous ces facteurs combinés ont pesé dans ma décision finale », se rappelle Ralf.

 

Ralf Jauch (1er à droite) au laboratoire

 

Des recherches couronnées de succès

 

Après l'obtention de sa licence en biologie à l'université Friedrich-Schiller d'Iéna, Ralf a poursuivi avec brio ses études, décrochant un master puis un doctorat en biologie moléculaire et structurelle à l'Institut Max-Planck dédié à cette discipline. Devenu un spécialiste en biochimie structurelle, il possède une solide expérience dans les domaines de la génomique, de la biologie des cellules souches et de la biologie computationnelle.

 

« La banque de gènes peut nous aider à décoder le génome. Le développement embryonnaire, l'évolution des êtres vivants ou encore les maladies génétiques sont des processus vitaux fondamentaux : où et quand les gènes, en s'influençant mutuellement, jouent un rôle d'activateurs ou d'inhibiteurs dans notre organisme. Notre objectif est de décrypter le code permettant de réguler l'expression des gènes (activateurs ou inhibiteurs). Nous nous intéressons particulièrement à des protéines clés appelées "facteurs de transcription", qui sont capables de "lire" ce code et de l'utiliser pour déclencher certains processus vitaux fondamentaux. D'après moi, si nous parvenons à mieux comprendre ces processus, nous serons en mesure de créer des cellules de façon ciblée, qui pourront servir en biopharmacie », décrit Ralf, prolixe dès qu'il aborde son travail.

 

Depuis qu'il a intégré l'Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou il y a quatre ans, Ralf a dirigé son équipe d'une main de fer afin que leurs recherches progressent à pas de géant. En 2014, son équipe et lui ont décroché le prix Pevny lors de la 4e Conférence de recherche internationale sur les protéines SOX, en récompense des résultats notables énoncés dans leur publication Reprogrammation cellulaire avec des facteurs de transcription SOX synthétiques. Pendant quatre ans, ils ont bénéficié du soutien de divers programmes de recherche, y compris le programme général de la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine, le programme de coopération internationale du ministère chinois des Sciences et des Technologies ainsi que du programme scientifique et technologique de la province du Guangdong, recevant au total un financement de plus de 7 millions de yuans pour mener à bien leur projet. Également, Ralf a publié, en tant que premier auteur ou en tant qu'auteur principal, près de 50 articles scientifiques dans des revues académiques de renommée mondiale telles que Nature, Stem Cell, Nucleic Acid Research et EMBO. Son exposé portant sur les principes de différenciation des cellules souches pluripotentes a vivement été salué par le milieu académique.

 

Aujourd'hui, Ralf est au travail tous les jours, précisant que « constituer sa propre équipe de recherche est un véritable défi pour tout scientifique ». Au-delà des théories à établir et des projets de recherche passionnants à mener, Ralf doit aussi se soucier d'une série d'autres questions : gérer le personnel, contrôler le financement, rechercher des partenaires, trouver du matériel…

 

Un pont pour les échanges académiques sino-allemands

 

Ralf estime que la vie d'un scientifique fait appel à la créativité, rejette les dogmes établis, et met à profit les ressources et les technologies existantes à l'échelle mondiale. « C'est sur ces critères que s'appuie le succès des grandes puissances scientifiques. »

 

Tout au long de sa carrière, Ralf a promu activement les échanges académiques entre la Chine et l'Allemagne, s'impliquant notamment dans la coopération entre la Société Max-Planck pour le développement des sciences et l'Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou. À plusieurs reprises, il a invité des experts de cette organisation allemande à venir à Guangzhou participer à des séminaires spécialisés. Il a également contribué à la mise en place du Centre conjoint Max Planck-GIBH de biomédecine régénérative.

 

En outre, Ralf a appuyé plusieurs programmes d'échanges d'étudiants et projets de coopération élaborés par des universités et des instituts de recherche allemands, notamment l'Université libre de Berlin, la Communauté Leibniz, le Centre Max Delbrück de médecine moléculaire et le Helmholtz-Zentrum Geesthacht Centre. En l'espace de quatre ans, il a invité six étudiants allemands en master à venir soutenir leur mémoire dans son laboratoire ; pendant ce temps-là, de par la réciprocité des échanges, des jeunes Chinois avaient l'occasion de partir étudier en Allemagne.

 

« Les recherches sur les gènes et les cellules souches ont donné naissance à de nouvelles théories, technologies et techniques, qui auront des répercussions majeures non seulement dans la sphère biopharmaceutique, mais aussi dans toute la société », commente Ralf. Avant d'ajouter : « J'espère que les contributions de mon équipe permettront de mieux comprendre le processus de régulation des gènes ainsi que la méthode de création de cellules et d'organes en laboratoire, afin que nous puissions exploiter plus amplement les nouvelles possibilités. L'équipe devra également apporter son aide pour s'assurer de l'utilisation de ces nouveaux procédés conformément aux principes éthiques, notamment pour ce qui est de la création artificielle in vitro de cellules spécifiques productrices de facteurs de transcription. »

 

Scientifique de souche allemande qui a pris racine en Chine, Ralf estime que l'économie asiatique offre de nombreuses opportunités aux acteurs de l'innovation allemands. L'Allemagne devrait donc, à son avis, multiplier ses échanges avec les pays d'Asie, et plus particulièrement la Chine. Une démarche particulièrement importante qui s'inscrirait dans l'orientation du développement futur.

 

 

La Chine au présent

 

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