CHINAHOY

6-April-2017

Chine et États-Unis : la coopération est bénéfique, la confrontation est préjudiciable

 

Cui Tiankai

 

ZHOU LIN, membre de la rédaction

 

D'un côté, la Chine : plus grand pays en développement et deuxième puissance économique au monde. De l'autre, les États-Unis : plus grand pays développé et première puissance économique au monde. Tous deux siègent au Conseil de sécurité de l'ONU en tant que membres permanents et exercent à ce compte-là une influence d'autant plus forte sur le globe. Ainsi, il convient de s'intéresser à la tournure que prend la relation entre ces deux pays, car non seulement elle touchera directement leurs intérêts vitaux respectifs, mais aussi aura des effets majeurs sur le reste de la planète.

 

En mars dernier, Cui Tiankai, ambassadeur de Chine aux États-Unis, nous a gracieusement accordé une interview.

 

La stabilité de la relation bilatérale, une responsabilité envers le monde

 

Après l'arrivée de Donald Trump à la tête des États-Unis, le président chinois Xi Jinping s'est entretenu au téléphone avec lui à deux reprises. Lors de leur conversation en février dernier, Xi Jinping a salué la volonté de Trump d'élargir vigoureusement la coopération entre les deux pays, et de développer leurs relations bilatérales pour qu'elles soient toujours plus constructives et favorables, autant aux deux pays qu'à la communauté internationale. De son côté, Trump a souligné que le gouvernement américain adhérait au principe d'une seule Chine. Les deux chefs d'État ont affirmé vouloir entretenir des contacts étroits et exprimé le souhait de se rencontrer prochainement.

 

« Il s'agit d'un signal positif émis par les deux pays, car effectivement, ils ont convenu d'édifier une relation solide, au bénéfice des deux peuples, qui créera par ailleurs des conditions favorables au développement pacifique et stable du monde, a affirmé Cui Tiankai. Je suis content de voir qu'un tel consensus a pu être atteint entre les deux dirigeants dès le début de l'administration Trump. »

 

En réalité, cette relation de type nouveau entre les deux grands pays, caractérisée par le non-conflit, la non-confrontation, le respect mutuel et la coopération gagnant-gagnant, résulte de trois longues discussions entre le président chinois Xi Jinping et le président américain Obama de l'époque, discussions tenues respectivement en 2013 à Annenberg Retreat, en 2014 à Zhongnanhai et en 2015 à la Maison blanche.

 

Cui Tiankai a passé en revue la quarantaine d'années d'histoire des relations bilatérales, nouées à l'occasion d'une visite du président Nixon en Chine. De ce bilan, il a tiré la conclusion que les deux pays explorent continuellement le potentiel de leurs relations et s'efforcent toujours de les définir. Au cours de cette période, la situation mondiale a connu des changements considérables, avec la fin de la Guerre froide et la crise financière internationale. D'autres défis planétaires nous accablent actuellement, comme le terrorisme, le changement climatique, les épidémies, etc. Néanmoins, les relations sino-américaines ont globalement suivi une tendance à la stabilité et au progrès.

 

M. Cui a souligné que les dirigeants qui se sont succédés à la présidence de la Chine ou des États-Unis ont toujours attaché une vive importance aux relations entre les deux pays, manifestant une volonté de préserver le développement sain et stable de ces relations. En Chine, à cet égard, la même politique est appliquée depuis la génération de Mao Zedong et Zhou Enlai. Aux États-Unis également, tous les présidents américains, ainsi que le Parti démocrate et le Parti républicain, espèrent, depuis l'établissement des relations diplomatiques sino-américaines, resserrer leurs liens avec la Chine.

 

« Cette volonté de rapprochement s'explique par les intérêts en jeu. Cette relation bilatérale est favorable à chacun des deux pays, mais uniquement si elle poursuit un développement serein. Dans le même temps, cette stabilité entre grands pays apparaît comme une responsabilité de la Chine et des États-Unis envers le monde, a ajouté l'ambassadeur Cui. Si les relations sino-américaines se détériorent, pire, si des conflits éclatent entre les deux pays, la Chine et les États-Unis seront les premiers perdants, mais le monde entier en endurera les répercussions. Personne ne souhaite qu'une telle situation se produise. »

 

La maîtrise des problèmes grâce à une juste appréciation

 

L'ambassadeur Cui a admis que les relations sino-américaines, au fil de leurs 40 ans d'histoire, ont été confrontées à bien des problématiques, notamment comment forger un nouveau type de relations entre les puissances chinoise et américaine ? Sur cette question, les deux parties sont progressivement parvenues à un consensus, optant pour le non-conflit, la non-confrontation, le respect mutuel et la coopération gagnant-gagnant comme principes fondamentaux de leurs relations. Et la valeur de ces préceptes a déjà été confirmée par la pratique. « Si ces principes sont mis en œuvre, les relations sino-américaines pourront se développer de façon raisonnable. »

 

M. Cui a pris pour exemple la question de la mer de Chine méridionale. Selon lui, aux États-Unis et dans d'autres pays, il existe encore sur ce sujet des malentendus et des erreurs d'appréciation, qui méritent une mise au point. Il a rappelé tout d'abord que la question de la mer de Chine méridionale se traduit par un différend territorial entre la Chine et certains pays riverains. Cette controverse a émergé de façon soudaine, sur fond d'un contexte historique et géopolitique compliqué. Quoi qu'il en soit, nous reconnaissons aujourd'hui qu'il y a des litiges, à la fois d'ordre territorial et d'ordre maritime.

 

Un Code de conduite en mer de Chine méridionale a été conclu entre la Chine et les pays de l'ASEAN, lequel stipule expressément que tout différend doit être réglé à l'amiable entre les pays souverains directement concernés. Conflits et confrontations sont bien sûr à éviter. Nous nous efforçons de nous en tenir à cette règle depuis des décennies déjà.

 

« En ce sens, le litige en mer de Chine méridionale n'oppose en rien la Chine et les États-Unis, puisque ce dernier pays ne formule aucune revendication territoriale dans cette région », a souligné l'ambassadeur Cui. Ainsi, la question de la mer de Chine méridionale ne doit pas constituer un obstacle qui freine les relations sino-américaines.

 

Quant au petit nombre qui s'obstine à pointer du doigt la Chine sur cette question, l'ambassadeur Cui voudrait leur demander de ne pas transformer les différends territoriaux à l'échelle régionale en une affaire de concurrence stratégique entre la Chine et les États-Unis à l'échelle mondiale. « Cette question de la mer de Chine méridionale pourra être maîtrisée si elle n'est pas pervertie par des erreurs d'appréciation ou des malentendus. »

 

« La liberté de navigation dont les Américains disent se soucier en mer de Chine méridionale est avant toute une préoccupation majeure pour la Chine, car cette mer représente une artère de communication vitale pour notre commerce extérieur, a déclaré M. Cui. La Chine est le premier pays commercial au monde et bon nombre de ses marchandises sont transportées par bateau via la mer de Chine méridionale. Alors évidemment, la paix, la stabilité et la liberté de navigation en mer de Chine méridionale sont dans l'intérêt de la Chine et reflètent des valeurs que le pays défend depuis longtemps. »

 

Pour un renouveau américain et un rêve chinois réalisés ensemble

 

Évoquant la nouvelle administration américaine entrée en fonction début 2017, le XIXe Congrès national du PCC qui se tiendra en automne prochain, ainsi que les nouvelles opportunités mais aussi incertitudes auxquelles font face les relations sino-américaines, l'ambassadeur Cui a souligné que la Chine et les États-Unis sont confrontés aux lourdes tâches de porter leur développement national, mais aussi de répondre aux défis suscités par le développement.

 

« La population aspire à une vie meilleure et notre objectif est de la leur fournir. » L'ambassadeur Cui a cité cette phrase qui lui tient à cœur. Elle avait été prononcée par Xi Jinping.

 

« Notre pays se trouve aujourd'hui dans la phase décisive pour la réalisation du premier des "objectifs des Deux centenaires" (centenaire de la création du PCC en 2021 et centenaire de la fondation de la République populaire de Chine en 2049). Nos efforts futurs seront déterminants pour l'accomplissement à temps du premier objectif, à savoir l'édification in extenso d'une société de moyenne aisance, et décideront en grande partie de la réalisation du deuxième objectif, à savoir la construction d'un pays socialiste moderne, prospère, démocratique, harmonieux et hautement civilisé. Sans aucun doute, notre pays devra relever une série d'enjeux pour saisir les belles opportunités qui s'offrent à lui, a fait savoir M. Cui. Parallèlement, la campagne présidentielle américaine de l'année dernière a révélé que les États-Unis font également face à des enjeux économiques et sociaux. Le président Trump a déclaré vouloir rendre aux États-Unis sa grandeur, ce qui laisse entendre que le pays est actuellement en proie à de multiples difficultés. »

 

D'après l'ambassadeur Cui, dans toutes les nations du monde, les défis les plus urgents naissent à l'intérieur des frontières. Ils concernent la gouvernance nationale, le développement sain de l'économie, la stabilité sociale, ou encore le sentiment de satisfaction et le bien-être du peuple. « Notre pays et notre Parti au pouvoir considèrent le bonheur de la population comme leur intérêt numéro un et déploient des efforts inlassables pour atteindre cet objectif », a-t-il souligné.

 

Cui Tiankai a l'impression qu'aux États-Unis, les plaintes et les revendications des citoyens américains sont bien vives et que ceux-ci attendent une réponse efficace de la part du gouvernement. Par conséquent, les gouvernements chinois et américain, comme ceux des autres pays, ont pour tâche primordiale de satisfaire les exigences du peuple et de tout faire pour assurer une vie meilleure à la population, a-t-il constaté.

 

Dans le contexte actuel de la mondialisation, tous les pays sont interdépendants, a rappelé l'ambassadeur Cui. Aucun ne peut se développer en se repliant sur lui-même. Aucun ne peut connaître une période de prospérité à l'heure où les autres peinent à se développer. Quel que soit le projet visé, qu'il s'agisse du « renouveau américain » ou du « rêve chinois », la Chine et les États-Unis doivent passer par la coopération gagnant-gagnant pour ensemble réaliser leur rêve.

 

 

La Chine au présent

 

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