SEPTEMBRE 2004

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

La citerne de secours
Lutter contre la pauvreté
Changer des vies, une communauté à la fois

La citerne de secours

Zhang Hua

 

Huang Mei’e, 30 ans, tâtonne dans l’obscurité pour entrer dans sa cuisine où elle allume un flambeau avant de sortir de la maison. Elle porte deux seaux qui se balancent au bout d’une palanche. Au loin, la lumière de quelques flambeaux avance vers une grotte qui se trouve sur l’autre versant d’un mont. Depuis son mariage au village de Xiaotong, la vie de Mme Huang a été liée à cette grotte pour l’approvisionnement en eau. Le village de Xiaotong se situe à Donglan, un des districts de la région autonome zhuang du Guangxi à souffrir d’une grave pénurie d’eau en Chine du Sud-Ouest. La grotte qui est située à des kilomètres de sa maison est le seul endroit où l’on trouve de l’eau potable pour ce village qui compte 300 personnes et des animaux domestiques.

À l’entrée de la grotte, une dizaine de seaux sont alignés à la queue leu leu. Mme Huang y rencontre sa voisine, une septuagénaire devenue bossue à force de porter quotidiennement de l’eau sur son dos, des jeunes femmes portant leur bébé sur leur dos et des petites filles d’âge scolaire. Elles sont toutes silencieuses en faisant la file et elles avancent petit à petit. C’est ainsi que cela se passe depuis des générations pour puiser de l’eau. Après plus de deux heures, c’est le tour de Mme Huang. La grotte a une cinquantaine de mètres de profondeur. La jeune femme doit donc descendre sur un versant abrupt. Le sentier est tellement étroit que les seaux heurtent souvent les roches, ce qui produit un écho sonore. L’obscurité fait parfois trembler de peur les gens qui viennent chercher de l’eau. Dans cette grotte, l’eau s’infiltre lentement et en faible quantité. Si quelqu’un y arrive trop tard, il devra attendre plus de deux heures pour que se produise une autre infiltration.

Mme Huang commence à remonter péniblement le sentier glissant. Elle tient entre ses dents la corde qui attache les deux seaux sur son dos, tient un flambeau d’une main, accroche des roches à la palanche de l’autre et escalade pas à pas.

Quand elle parle de cette vie qu’elle mène depuis trois ans, un tic ravage son visage. Elle dit : « À la saison de la décrue, de novembre au mois de mars de l’année suivante, on doit venir chercher de l’eau dans cette grotte située à 3 km du village, ce qui demande deux heures de marche. Pour une famille de 6 personnes comme la nôtre, je dois m’y rendre 6-7 fois par jour, de sorte que je ne fais que chercher de l’eau à longueur de journée. » Pour me montrer sa gencive déformée par la corde, elle ouvre ses lèvres et explique que les femmes âgées du village ont perdu complètement leurs dents à cause de la corde des seaux.

Ici, l’eau domine la vie. Toutes les affaires et tous les sentiments tendent vers elle. À la saison de la décrue, tout le monde se mobilise pour aller chercher de l’eau. Dans le village, il ne reste que les enfants. À la nuit tombée, la noirceur, la faim et la peur font pleurer les enfants. On entend au loin des pleurs, le cri des cochons et l’aboiement des chiens, une scène à déchirer le coeur.

On arrive difficilement à croire que le Guangxi manque d’eau, parce qu’on connaît bien sa fameuse rivière Lijiang, ses monts et les cours d’eau de Guilin, ville connue pour son beau paysage. Pourtant, si les monts sont couverts de verdure en bas, en haut, ce sont des rochers à nu. C’est la topographie karstique. La plupart des précipitations coulent au fond de la terre, s’infiltrent par les fentes et les fissures des roches, ce qui entraîne une pénurie d’eau à la surface du sol. Cette topographie particulière ne retient pas bien l’eau. À la saison des pluies, tout de suite après apparaît une vaste étendue d’eau. Les céréales, les maisons, les êtres vivants semblent immergés, mais peu de temps plus tard, l’eau coule rapidement au fond de la terre par cet entonnoir gigantesque.

Pour retenir l’eau, les villageois maçonnent des citernes rondes publiques dans les baissières. Comme les paysans n’ont pas assez d’argent pour acheter du ciment, ils ne maçonnent que des citernes en argile. Ce genre de citernes ne peut retenir l’eau longtemps, de sorte qu’à la saison sèche, c’est la lutte pour l’eau. Les villageois apportent toutes sortes de récipients pour aller puiser une quantité d’eau misérable qu’on a recueillie aux jours de pluie dans la citerne publique.

En 2001, la Fédération des femmes de Chine a décidé de mettre en œuvre le projet d’aide « Amour de la terre, citerne pour la mère » et le groupe de pellicules photographiques Lucky a versé 200 000 yuans à Donglan et à Long’an, deux districts du Guangxi souffrant d’une grave pénurie d’eau, afin de résoudre le problème d’approvisionnement en eau potable de 2 000 personnes appartenant à 388 ménages et d’alléger la vie pénible de la mère.

Depuis lors, la vie de Mme Huang, tout comme celle des autres villageois, a changé complètement. Sous la direction des techniciens et encouragées par l’espoir séculaire d’être approvisionnées en eau, en cinq mois, les familles ont construit leur citerne à eau. Aujourd’hui, devant la cour de chaque famille, se dresse une citerne de 3 m de haut et de diamètre, pouvant stocker 60 m3 d’eau. D’après Liu Xiaofeng, vice-présidente de la Fédération des femmes du Guangxi, une citerne coûte 1 000 yuans rien qu’en matériaux. En regardant l’eau qui coule de la citerne, on sent que Mme Huang est émue : « C’est assez, assez pour la famille, et même pour les bêtes que nous avons. »

Maintenant, elle n’a plus le souci d’aller tous les jours chercher de l’eau. À part des travaux agricoles, Mme Huang fabrique du fromage de soja. Grâce à sa technique, son fromage de soja l’a rendue célèbre dans les environs. Tout le monde va l’acheter chez elle. Selon les dires de Mme Huan, maintenant, les villageois n’ont plus besoin d’aller chercher de l’eau tous les jours, ils ont beaucoup de temps pour développer d’autres exploitations comme la culture maraîchère, la fabrication du fromage de soja, etc.

Dans sa salle de séjour, le téléviseur posé sur une table et la machine à laver dans le coin sont les marques évidentes que Mme Huang a gagné un peu d’argent ces dernières années grâce à la fabrication du fromage de soja. En outre, elle élève six porcs et des dizaines de volailles, et elle a construit une fosse à lisier pour le méthane près de la porcherie. Derrière la maison, c’est son potager où l’aubergine fleurit. L’amélioration de l’aspect de son environnement encourage Mme Huang à construire une autre citerne de 1 000 yuans l’année prochaine, ainsi qu’à signer un contrat forfaitaire pour une parcelle sur le versant du mont qui se trouve derrière sa maison afin d’y cultiver l’orange. Par la suite, elle songe à construire une maison à deux étages de style moderne, comme celle qui se trouve de l’autre côté de la montagne.

Document 1

Situation actuelle de l’éradication de la pauvreté

D’après le Bureau d’assistance aux pauvres du Conseil des affaires d’État, le nombre des pauvres absolus (revenu personnel annuel de moins de 637 yuans) au sein de la population totale est passé de 250 millions en 1978 à 29 millions en 2003, soit de 30,7 % à 3,1 % en ce qui concerne la proportion des pauvres au sein de la population. En outre, le nombre de citadins ayant un revenu annuel de moins de 882 yuans et ayant franchi le seuil de subsistance (manger à sa faim et se vêtir chaudement), est de 56,17 millions de personnes. Ces deux groupes de la population sont considérés comme l’objet principal de l’aide aux pauvres à l’heure actuelle.

Depuis 25 ans, l’assistance aux pauvres est menée sous plusieurs formes : aide aux pauvres, aide au village et aide à la famille, partenaire d’aide déterminé, déplacement volontaire, etc. En ce qui concerne les projets d’aide, il y a le projet d’aide aux pauvres des jeunes volontaires en matière d’enseignement, les travaux pour le bonheur, le projet Chunlei (Bouton de fleur printanière), la cause Guangcai (Splendeur) et autres.

Prenons l’exemple du Guizhou, province ayant le plus grand nombre de pauvres et la plus grande superficie couverte par la pauvreté; en 1985, la province avait 15 millions de paysans pauvres, soit 57,7 % des paysans de la province. À la fin de 2003, le nombre de paysans pauvres n’était plus que de 2,9 millions. M. Shi Xiushi, gouverneur de la province, explique : « À l’intention des pauvres, le gouvernement du Guizhou adopte trois méthodes différentes selon les catégories : mise en valeur des compétences pour l’emploi, déplacement et subvention sociale à long terme. Soixante-dix pour cent des capitaux visés par la mise en œuvre de la stratégie de mise en valeur de l’Ouest dans la province du Guizhou sont destinés à la construction des infrastructures, aux réseaux routier et fluvial, à l’établissement des postes et télécommunications, de la radiotélédiffusion et à l’utilisation du méthane dans les zones pauvres, ce qui permet d’améliorer efficacement les conditions de vie et de production de la population des zones pauvres. »

Depuis 1996, les organismes relevant directement de l’autorité centrale ont amassé et introduit 380 millions de yuans de capitaux pour le Guizhou ; ils ont également mis en oeuvre 570 projets, alloué des capitaux et des matériaux d’une valeur de 200 millions de yuans, fourni des capitaux pour construire 110 écoles primaires et secondaires dans les villages et aidé 13 000 élèves pauvres à poursuivre leurs études. Par exemple, l’agence Xinhua exploite un projet de télé-enseignement dans 69 écoles primaires et secondaires du district de Sinan, ce qui permet aux enseignants et aux élèves locaux de bénéficier des ressources d’enseignement des zones développées.

Le travail d’aide aux pauvres du Guizhou est bien apprécié par le Conseil des affaires d’État. Son expérience mérite d’être généralisée.

Document 2

Projet d’aide aux pauvres « Amour de la terre, citerne pour la mère » développé par la Fédération des femmes de Chine

La Chine de l’Ouest, une des zones arides du monde, manque gravement d’eau. Ses précipitations annuelles n’atteignent que 300-400 mm, mais l’évaporation dépasse 1 500 mm. Les habitants et les bêtes comptent sur les précipitations pour leur consommation. À cause de la pénurie d’eau, les paysans mènent une vie très pénible, la production est au stade primitif et l’enseignement tire de l’arrière. Le taux de morbidité des femmes et le taux de mortalité des nouveau-nés sont toujours élevés. Les femmes assument des charges parfois plus lourdes que les femmes d’ailleurs.

En 2001, la fondation pour le développement des femmes de la Fédération nationale des femmes de Chine a mis en œuvre un projet pour collecter des fonds sociaux destinés à construire une citerne en béton dans la zone aride du Nord-Ouest. Grâce à cette méthode, on peut collecter efficacement l’eau de pluie en utilisant la pente du toit, la cour et le versant du terrain. Construire une citerne pouvant couvrir la consommation annuelle d’une famille coûte seulement 1 000 yuans. À la fin de 2003, la fondation pour le développement des femmes avait construit 90 000 citernes dans 15 provinces, régions, villes et anciennes zones révolutionnaires, 1 070 services d’aqueduc, ce qui a beaucoup apporté aux 900 000 habitants vivant dans la zone aride de la Chine de l’Ouest dont 70 % sont des femmes et des enfants.

Fédération des femmes de Chine : 15, rue Jianguomennei, Beijing

Tél. pour donations : (86-10)-65263572, 65140471