La citerne de secours
Lutter contre la pauvreté
Changer des vies, une communauté
à la fois
La
citerne de secours
Zhang Hua
Huang Meie, 30 ans, tâtonne dans lobscurité
pour entrer dans sa cuisine où elle allume un flambeau avant
de sortir de la maison. Elle porte deux seaux qui se balancent au
bout dune palanche. Au loin, la lumière de quelques
flambeaux avance vers une grotte qui se trouve sur lautre
versant dun mont. Depuis son mariage au village de Xiaotong,
la vie de Mme Huang a été liée à cette
grotte pour lapprovisionnement en eau. Le village de Xiaotong
se situe à Donglan, un des districts de la région
autonome zhuang du Guangxi à souffrir dune grave pénurie
deau en Chine du Sud-Ouest. La grotte qui est située
à des kilomètres de sa maison est le seul endroit
où lon trouve de leau potable pour ce village
qui compte 300 personnes et des animaux domestiques.
À lentrée de la grotte, une dizaine de seaux
sont alignés à la queue leu leu. Mme Huang y rencontre
sa voisine, une septuagénaire devenue bossue à force
de porter quotidiennement de leau sur son dos, des jeunes
femmes portant leur bébé sur leur dos et des petites
filles dâge scolaire. Elles sont toutes silencieuses
en faisant la file et elles avancent petit à petit. Cest
ainsi que cela se passe depuis des générations pour
puiser de leau. Après plus de deux heures, cest
le tour de Mme Huang. La grotte a une cinquantaine de mètres
de profondeur. La jeune femme doit donc descendre sur un versant
abrupt. Le sentier est tellement étroit que les seaux heurtent
souvent les roches, ce qui produit un écho sonore. Lobscurité
fait parfois trembler de peur les gens qui viennent chercher de
leau. Dans cette grotte, leau sinfiltre lentement
et en faible quantité. Si quelquun y arrive trop tard,
il devra attendre plus de deux heures pour que se produise une autre
infiltration.
Mme Huang commence à remonter péniblement le sentier
glissant. Elle tient entre ses dents la corde qui attache les deux
seaux sur son dos, tient un flambeau dune main, accroche des
roches à la palanche de lautre et escalade pas à
pas.
Quand elle parle de cette vie quelle mène depuis trois
ans, un tic ravage son visage. Elle dit : « À la saison
de la décrue, de novembre au mois de mars de lannée
suivante, on doit venir chercher de leau dans cette grotte
située à 3 km du village, ce qui demande deux heures
de marche. Pour une famille de 6 personnes comme la nôtre,
je dois my rendre 6-7 fois par jour, de sorte que je ne fais
que chercher de leau à longueur de journée.
» Pour me montrer sa gencive déformée par la
corde, elle ouvre ses lèvres et explique que les femmes âgées
du village ont perdu complètement leurs dents à cause
de la corde des seaux.
Ici, leau domine la vie. Toutes les affaires et tous les
sentiments tendent vers elle. À la saison de la décrue,
tout le monde se mobilise pour aller chercher de leau. Dans
le village, il ne reste que les enfants. À la nuit tombée,
la noirceur, la faim et la peur font pleurer les enfants. On entend
au loin des pleurs, le cri des cochons et laboiement des chiens,
une scène à déchirer le coeur.
On arrive difficilement à croire que le Guangxi manque deau,
parce quon connaît bien sa fameuse rivière Lijiang,
ses monts et les cours deau de Guilin, ville connue pour son
beau paysage. Pourtant, si les monts sont couverts de verdure en
bas, en haut, ce sont des rochers à nu. Cest la topographie
karstique. La plupart des précipitations coulent au fond
de la terre, sinfiltrent par les fentes et les fissures des
roches, ce qui entraîne une pénurie deau à
la surface du sol. Cette topographie particulière ne retient
pas bien leau. À la saison des pluies, tout de suite
après apparaît une vaste étendue deau.
Les céréales, les maisons, les êtres vivants
semblent immergés, mais peu de temps plus tard, leau
coule rapidement au fond de la terre par cet entonnoir gigantesque.
Pour retenir leau, les villageois maçonnent des citernes
rondes publiques dans les baissières. Comme les paysans nont
pas assez dargent pour acheter du ciment, ils ne maçonnent
que des citernes en argile. Ce genre de citernes ne peut retenir
leau longtemps, de sorte quà la saison sèche,
cest la lutte pour leau. Les villageois apportent toutes
sortes de récipients pour aller puiser une quantité
deau misérable quon a recueillie aux jours de
pluie dans la citerne publique.
En 2001, la Fédération des femmes de Chine a décidé
de mettre en uvre le projet daide « Amour de la
terre, citerne pour la mère » et le groupe de pellicules
photographiques Lucky a versé 200 000 yuans à Donglan
et à Longan, deux districts du Guangxi souffrant dune
grave pénurie deau, afin de résoudre le problème
dapprovisionnement en eau potable de 2 000 personnes appartenant
à 388 ménages et dalléger la vie pénible
de la mère.
Depuis lors, la vie de Mme Huang, tout comme celle des autres villageois,
a changé complètement. Sous la direction des techniciens
et encouragées par lespoir séculaire dêtre
approvisionnées en eau, en cinq mois, les familles ont construit
leur citerne à eau. Aujourdhui, devant la cour de chaque
famille, se dresse une citerne de 3 m de haut et de diamètre,
pouvant stocker 60 m3 deau. Daprès Liu Xiaofeng,
vice-présidente de la Fédération des femmes
du Guangxi, une citerne coûte 1 000 yuans rien quen
matériaux. En regardant leau qui coule de la citerne,
on sent que Mme Huang est émue : « Cest assez,
assez pour la famille, et même pour les bêtes que nous
avons. »
Maintenant, elle na plus le souci daller tous les jours
chercher de leau. À part des travaux agricoles, Mme
Huang fabrique du fromage de soja. Grâce à sa technique,
son fromage de soja la rendue célèbre dans les
environs. Tout le monde va lacheter chez elle. Selon les dires
de Mme Huan, maintenant, les villageois nont plus besoin daller
chercher de leau tous les jours, ils ont beaucoup de temps
pour développer dautres exploitations comme la culture
maraîchère, la fabrication du fromage de soja, etc.
Dans sa salle de séjour, le téléviseur posé
sur une table et la machine à laver dans le coin sont les
marques évidentes que Mme Huang a gagné un peu dargent
ces dernières années grâce à la fabrication
du fromage de soja. En outre, elle élève six porcs
et des dizaines de volailles, et elle a construit une fosse à
lisier pour le méthane près de la porcherie. Derrière
la maison, cest son potager où laubergine fleurit.
Lamélioration de laspect de son environnement
encourage Mme Huang à construire une autre citerne de 1 000
yuans lannée prochaine, ainsi quà signer
un contrat forfaitaire pour une parcelle sur le versant du mont
qui se trouve derrière sa maison afin dy cultiver lorange.
Par la suite, elle songe à construire une maison à
deux étages de style moderne, comme celle qui se trouve de
lautre côté de la montagne.
Document 1
Situation actuelle de léradication de la pauvreté
Daprès le Bureau dassistance aux pauvres du
Conseil des affaires dÉtat, le nombre des pauvres absolus
(revenu personnel annuel de moins de 637 yuans) au sein de la population
totale est passé de 250 millions en 1978 à 29 millions
en 2003, soit de 30,7 % à 3,1 % en ce qui concerne la proportion
des pauvres au sein de la population. En outre, le nombre de citadins
ayant un revenu annuel de moins de 882 yuans et ayant franchi le
seuil de subsistance (manger à sa faim et se vêtir
chaudement), est de 56,17 millions de personnes. Ces deux groupes
de la population sont considérés comme lobjet
principal de laide aux pauvres à lheure actuelle.
Depuis 25 ans, lassistance aux pauvres est menée sous
plusieurs formes : aide aux pauvres, aide au village et aide à
la famille, partenaire daide déterminé, déplacement
volontaire, etc. En ce qui concerne les projets daide, il
y a le projet daide aux pauvres des jeunes volontaires en
matière denseignement, les travaux pour le bonheur,
le projet Chunlei (Bouton de fleur printanière), la cause
Guangcai (Splendeur) et autres.
Prenons lexemple du Guizhou, province ayant le plus grand
nombre de pauvres et la plus grande superficie couverte par la pauvreté;
en 1985, la province avait 15 millions de paysans pauvres, soit
57,7 % des paysans de la province. À la fin de 2003, le nombre
de paysans pauvres nétait plus que de 2,9 millions.
M. Shi Xiushi, gouverneur de la province, explique : « À
lintention des pauvres, le gouvernement du Guizhou adopte
trois méthodes différentes selon les catégories
: mise en valeur des compétences pour lemploi, déplacement
et subvention sociale à long terme. Soixante-dix pour cent
des capitaux visés par la mise en uvre de la stratégie
de mise en valeur de lOuest dans la province du Guizhou sont
destinés à la construction des infrastructures, aux
réseaux routier et fluvial, à létablissement
des postes et télécommunications, de la radiotélédiffusion
et à lutilisation du méthane dans les zones
pauvres, ce qui permet daméliorer efficacement les
conditions de vie et de production de la population des zones pauvres.
»
Depuis 1996, les organismes relevant directement de lautorité
centrale ont amassé et introduit 380 millions de yuans de
capitaux pour le Guizhou ; ils ont également mis en oeuvre
570 projets, alloué des capitaux et des matériaux
dune valeur de 200 millions de yuans, fourni des capitaux
pour construire 110 écoles primaires et secondaires dans
les villages et aidé 13 000 élèves pauvres
à poursuivre leurs études. Par exemple, lagence
Xinhua exploite un projet de télé-enseignement dans
69 écoles primaires et secondaires du district de Sinan,
ce qui permet aux enseignants et aux élèves locaux
de bénéficier des ressources denseignement des
zones développées.
Le travail daide aux pauvres du Guizhou est bien apprécié
par le Conseil des affaires dÉtat. Son expérience
mérite dêtre généralisée.
Document 2
Projet daide aux pauvres « Amour de la terre, citerne
pour la mère » développé par la Fédération
des femmes de Chine
La Chine de lOuest, une des zones arides du monde, manque
gravement deau. Ses précipitations annuelles natteignent
que 300-400 mm, mais lévaporation dépasse 1
500 mm. Les habitants et les bêtes comptent sur les précipitations
pour leur consommation. À cause de la pénurie deau,
les paysans mènent une vie très pénible, la
production est au stade primitif et lenseignement tire de
larrière. Le taux de morbidité des femmes et
le taux de mortalité des nouveau-nés sont toujours
élevés. Les femmes assument des charges parfois plus
lourdes que les femmes dailleurs.
En 2001, la fondation pour le développement des femmes de
la Fédération nationale des femmes de Chine a mis
en uvre un projet pour collecter des fonds sociaux destinés
à construire une citerne en béton dans la zone aride
du Nord-Ouest. Grâce à cette méthode, on peut
collecter efficacement leau de pluie en utilisant la pente
du toit, la cour et le versant du terrain. Construire une citerne
pouvant couvrir la consommation annuelle dune famille coûte
seulement 1 000 yuans. À la fin de 2003, la fondation pour
le développement des femmes avait construit 90 000 citernes
dans 15 provinces, régions, villes et anciennes zones révolutionnaires,
1 070 services daqueduc, ce qui a beaucoup apporté
aux 900 000 habitants vivant dans la zone aride de la Chine de lOuest
dont 70 % sont des femmes et des enfants.
Fédération des femmes de Chine : 15, rue Jianguomennei,
Beijing
Tél. pour donations : (86-10)-65263572, 65140471
|