Novembre 2004

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

L’enfance sans joie des champions de gymnastique

Cai Zhenhua, entraîneur général de l’équipe chinoise de tennis de table. Tian Liang et Guo Jingjing, deux plongeurs amoureux.

« Bien entendu, mon idole, c’est frère Xiao Peng !» lance Yang Rui, 14 ans, très enthousiasmé en parlant de son athlète préféré. Assis au fond de la salle de gym, il regarde ses camarades en entraînement. Lors des exercices d’adresse, il s’est blessé la cheville du pied gauche. L’assistant médical lui a appliqué une pommade et fait un pansement. En période de convalescence, il se rend quand même au terrain d’entraînement avec ses copains.

Sur le mur derrière lui, s’affichent les photos de 42 champions du monde. Sur le mur d’en face une sentence appelle à : « s’entraîner assidûment, pour la gloire du pays ! ».

La lumière veille dans les locaux de gym de l’Office national des Sports : des dizaines de jeunes athlètes se répartissent dans différentes parties de la salle au rez-de-chaussée. Le silence y règne, troublé seulement par la voix soit douce soit sévère des moniteurs. Reste le bruit de l’atterrissage des garçons au cheval d’arçons ou celui du ploiement de la barre fixe.

Deux autres gymnastes font des exercices de barres asymétriques. L’entraîneur Lu se met sur un tabouret haut d’un mètre et aide une fille à réaliser des mouvements difficiles. La ventilation et le conditionnement d’air fonctionnent bien, n’empêche que le maillot de M. Lu devienne humide de sueur. Il monte sur le tabouret et en descend à maintes reprises car il doit également prêter attention aux autres membres de l’équipe.

Trois jeunes filles s’entraînent patiemment à la poutre. Elles se soutiennent de leurs mains, ou font le poirier tout en écartant les jambes. Deux gamines parfont leurs mouvements avec l’aide d’un entraîneur. Les garçons de l’équipe nationale de gymnastique sont nés la plupart dans les années 1990.

Ces jeunes athètes sélectionnés par l’équipe nationale viennent des quatre coins du pays. La majorité d’entre eux ont commencé l’entraînement dès l’âge de 5 ou 6 ans. Après l’entraînement collectif de décembre 2003, une cinquentaine ont été sélectionés parmi les 208 candidats natifs des diverses provinces.

L’évaluation est stricte : après le deuxième tour de sélection de juin 2004, il ne reste que 30 athlètes.

Tous les jours à 6 h 10, ces gymnastes sortent pour faire leurs exercices du matin, commençant ainsi leur journée d’entraînement. À 8 h 30, ils quittent leurs chambres de l’Immeuble Temple du Ciel pour se rendre aux locaux de gym, rue Gongti Beilu. Entre 12 h et 15 h, déjeuner et repos. Dès 15h, quatre heures d’entraînement. Après diner, souvent des cours de culture générale ou projection des vidéo des compétitions sont au programme. Ils se couchent à 21 h 30. On leur demande de faire un résumé hebdomadaire sur leur activité d’entraînement.

« Leur performance n’est pas comparable aux celle de leurs aînés, et 4 ou 5 d’entre eux n’ont même pas encore atteint le niveau désiré », dit Bao Xianqin, qui travaille depuis 20 ans comme entraîneur pour l’Équipe nationale et a formé des champions du monde comme Yang Bo. « Les enfants de nos jours sont plutôt mous, ce sont des enfants uniques qui supportent pas de durs exercices. Pourtant ceux-ci que j’entraîne ont une qualité meilleure, ils sont ambitieux, savent ce qu’ils veulent et travaillent dur, ce sont des enfants très dociles. »

Bao n’a pas de week-end, elle prête attention à tout, veille de 8h à 19h au quotidien de ces enfants. Le plus important selon elle, est de leur apporter un soutien psychologique : « Nous sommes leurs anges gardiens. Il faut que l’entraînement leur plaise et soit en même temps efficace. D’autre part il est impératif de veiller à ce que leur santé physique et morale soit saine. Y a quelque temps, pour trouver une méthode convenable, j’ai dû me tordre la cervelle, si bien qu’en entrant dans la salle de gym, je sentais souvent l’écœurement. »

Ce sont ces durs entraînements qui ont édifié le haut niveau de la gymnastique chinoise à l’échelle mondiale. Les J.O. de Sydney ont marqué la prouesse de la Chine dans cette discipline : l’équipe masculine a pour la première fois obtenu sa médaille d’or par équipe, Li Xiaopeng, de sa part, a été champion en barres parallèles. L’équipe chinoise, lors des Championats de gymnastique de 2003, a décroché trois médailles d’or. Et surtout, la compétence de Li Xiaopeng en cheval d’arçons et en barres parallèles est incontestable.

L’amour cède la place au sport

Grande surprise pour toute l’équipe de tennis de table chinoise : le 23 janvier 2004, Cai Zhenhua, vice-directeur de l’Administration des sports de tennis de table et de badminton et le moniteur en chef de l’équipe de tennis de table, a sévèrement puni quatre sportifs impliqués dans des relations amoureuses.

M. Cai est réputé, dans l’Office national des sports, pour sa compétence en gestion. Le public a connu le fait que, ayant subi une intervention chirurgicale, il n’a pas lâché sa responsabilité d’entraîneur malgré des souffrances. C’est cette année-là que les Chinois ont pris le relais de l’équipe suédoise, qui avait été, six ans durant, championne en épreuves masculines par équipe. Un succès très encourageant !

Son sens des responsabilités a laissé une impression profonde à ses sportifs. L’autre impression marquante de lui, ce sont ses sanctions sévères envers ceux qui ont commis des fautes. Les membres de l’équipe avaient en effet appris, en écoutant ses consignes strictes, que son souhait est de former une équipe disciplinée, qu’ils doivent renoncer aux intérêts personnels au profit de contributions au pays.

Ma Lin, classé premier par l’Association internationale de tennis de table, était le probable médaillé d’or des J.O. d’Athènes. Le groupe de moniteurs lui a annoncé à l’avance que Bai Yang a été renvoyée à son ancienne équipe du Hebei à cause de ses liens d’amour avec lui. Il est prié de comprendre cela. Un autre entretien du même ordre a été accordé à Wang Hao : Fan Ying, son amoureuse du moment, devait retourner également dans son ancienne équipe.

Cai Zhenhua a donné des explications aux quatre sportifs renvoyés : l’équipe de tennis de table de Chine se charge d’une lourde tâche pour les Jeux d’Athènes, les relations amoureuses pouvaient troubler les entraînements collectifs de l’équipe nationale.

L’Office national des sports ne permet pas aux femmes de moins de 25 ans, ni aux hommes de moins de 28 ans de se lancer dans des passions amoureuses dans une même équipe. Selon Liu Fengyan, le directeur de l’Administration des sports de tennis de table et de badminton, « il est naturel qu’ils aient leur vie sentimentale et que l’on doive penser à leur futur mariage, mais il faut chercher à prolonger leur activité sportive. Souvent, on n’interdit pas sévèrement les amours à condition qu’ils ne nuisent pas aux entraînements. »

Les quatre sportifs punis déclarent aux médias qu’ils comprennent cette décision du moniteur et qu’ils souhaitent pouvoir bientôt retourner dans l’équipe nationale en travaillant dur.

Contrairement à ces mésaventures, l’amour qui lie Guo Jingjing et Tian Liang, ainsi que Ye Li et Yao Ming est très heureux.

Sun Jun, l’ancien champion de badminton, nous confie que sa première rencontre avec Ge Fei a eu lieu à l’école de sports. Il avait 11 ans à cette époque-là. À cet âge d’innocence, il trouvait en Ge Fei une fille gentille et sympathique. Plus tard, ils ont été tous les deux sélectionnés pour l’équipe nationale. Ils s’entraînaient ensemble, allaient ensemble participer aux compétitions internationales, et se sont petit à petit épris l’un de l’autre. Selon Sun Jun, « notre amour s’est développé peu à peu, il est beaucoup plus vivace qu’un simple coup de foudre ».

Des années durant, l’équipe nationale procède aux entraînements collectifs. Depuis l’adolescence, ces sportifs se renferment dans les locaux d’entraînement. D’ailleurs, en raison de compétitions fréquentes, ils ont peu de contact avec l’extérieur. Toute l’équipe forme une grande famille, a un même parcours de vie. Cette vie collective monotone rend oisif le temps de repos : au retour de l’entraînement, on se téléphone, on s’envoie des messages SMS, et ainsi des couples d’amoureux se forment.

D’autre part, l’équipe de tennis de table comme celle de badminton, est un creuset de belles filles et de championnes. Être belle et championne renvoie à une grande renommée et à un haut statut social. Si haut que personne n’ose s’approcher d’elles. Ce qui fait que les prétendants sont rares.

De même, leurs habitudes de vie, leur emploi du temps différencièrent de beaucoup ceux des gens de l’extérieur, tandis que les camarades d’équipe se comprennent mieux, leur vie se ressemble, il est donc normal que l’équipe nationale génère des amours.

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L’enfance sans joie des champions de gymnastique