Des « pieds de trois cun » aux
« beautés artificielles » : les Chinoises ont vécu
deux mondes entièrement différents
Totalement inconnue jusqu'alors,
Hao Lulu s'est transformée d'un seul coup en une célébrité dans
toute la Chine. Après avoir subi une dizaine d'opérations de chirurgie
esthétique générale s'étendant sur une durée de 200 jours environ
et qui lui ont coûté quelque 300 000 yuans, cette jeune fille
de Beijing a acquis le titre de « première beauté artificielle
de la Chine ». Grâce à une série d'opérations, pose d'implants
mammaires, rhinoplastie, lipo-aspirations et interventions sur les
paupières (la surface opérée de son corps n'est pas inférieure à
celle subie par la célèbre star de la chanson américaine Michael
Jackson!), Hao Lulu a subi une complète métamorphose, et ce, des
pieds à la tête! Malgré les protestations qu'a suscitées le choix
extrême de Hao Lulu visant à se faire belle et à affirmer ainsi
sa personnalité, une « vague de beauté artificielle »
déferle d'ores et déjà chez certaines femmes. Cependant, il y a
moins d'une centaine d'années, les grands-mères des jeunes de la
génération de Hao Lulu devaient subir une autre sorte de torture :
dès leur plus tendre enfance, elles étaient obligées de se faire
bander les pieds. Ainsi, une fois adultes, leurs petits orteils
étant déformés, elles ne pouvaient marcher qu'en s'appuyant sur
leurs gros orteils. Or, c'est justement
ces malheureuses aux « pieds mignons de trois cun »
qui passaient pour des femmes parfaites aux yeux des hommes de l'époque...
Depuis l'avènement de la Chine nouvelle en 1949, les Chinoises,
contraintes pendant plusieurs milliers d'années à ne pas mettre
les pieds hors de leur foyer, ont commencé, grâce à la protection
de la Constitution, à travailler dans différents secteurs d'activité
du pays, ainsi qu'à jouir d'un salaire égal pour un travail égal
et de la liberté du mariage. À l'heure actuelle, à peu près le tiers
des fonctionnaires sont des femmes, et parmi l'ensemble des députés
à l'Assemblée populaire nationale, l'institution du pouvoir suprême
du pays, plus d'un cinquième sont des femmes. Passées des blue-jeans
et t-shirts au rouge à lèvres, certaines Chinoises sont montées
sur l'estrade de concours de beauté internationaux, d'autres se
sont transformées en milliardaires, et d'autres encore font partie
de la « classe montante », qui vit dans des hôtels ou
immeubles de bureaux de luxe. « Par rapport à l'époque des
‘pieds de trois cun’ dominée par l'autorité du mâle, les
Chinoises d'aujourd'hui vivent dans un tout autre monde »,
remarque M. Li Yinhe, maître de recherche à l'Académie des sciences
sociales de Chine. Selon les statistiques, ces dernières années,
le secteur des services de beauté, censé aider à embellir les femmes, est d'un seul coup passé à la troisième
place des points chauds de la consommation, juste après le marché
immobilier et le tourisme. Il n'est donc pas étonnant que, ces derniers
temps, le volume des dépenses pour les soins de beauté se situe
chaque année au-delà de 20 milliards de yuans.
(Quotidien du peuple)
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